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Diffusion Compton et processus subséquents

3.5 Etudes systématiques

4.1.2 Diffusion Compton et processus subséquents

On s’intéresse ici au rayonnement produit par un lepton, en général un électron ou un positron, accéléré à haute énergie mc2 caractérisée par son facteur de Lo-

rentz avec m la masse du lepton. On parlera pour l’ensemble des processus liés à un lepton de processus leptoniques, par opposition aux processus hadroniques qui seront rapidement décrits à la fin de cette section. Le processus leptonique principal est la diffusion Compton d’un photon sur un lepton, les autres processus leptoniques décrits ici pouvant en effet s’interpréter comme étant des cas particuliers de diffu- sion Compton [147]. Par abus de langage, on parlera dans la suite d’électrons à la place de leptons, sans vouloir pour autant perdre en généralité, les processus décrits ci-dessous étant valables identiquement pour les électrons et les positrons.

• Diffusion Compton

La diffusion Compton est le nom donné à la diffusion d’un photon sur un électron. La figure 4.1 montre un schéma de cette diffusion dans le référentiel instantané de l’électron. ✓0 est l’angle de diffusion du photon sortant par rapport à la direction

de propagation du photon entrant, définissant l’axe z0 du système de coordonnées

dans le référentiel de l’électron. Si on note respectivement "0

1 et "02 les énergies

dans le référentiel de l’électron des photons entrants et sortants, la conservation du quadrivecteur énergie-impulsion donne la relation de cinématique [147] :

"02= "01 1 +"01

m(1 cos ✓0)

. (4.1)

4.1. Emission et absorption de photons à très haute énergie 43 inverse :

"2 = "02(1 cos ✓0) , (4.2)

où on a supposé que les électrons sont relativistes ( 1).

"01 z

0

"02

✓0

Figure 4.1 – Diffusion Compton dans le référentiel de l’électron. Dans la limite où "0

1 ⌧ m, appelé régime Thomson, on obtient le cas de la

diffusion élastique, où "0

1 = "02 et l’énergie de l’électron est inchangée. Dans ce cas,

la section efficace du processus s’écrit simplement 8⇡r2

e/3 où re = e2/mc2 est le

rayon classique de l’électron.

Dans le cas général, il est nécessaire d’utiliser une description relativiste pour le calcul de la section efficace, ce qui peut être fait dans le cadre de l’électrodyna- mique quantique. Les deux diagrammes à l’ordre principal pour le processus sont résumés sur la figure 4.2, correspondant à l’absorption avant émission d’un photon par l’électron dans le premier cas, et à l’émission avant absorption dans le deuxième cas. Le calcul de ces deux diagrammes montre que la section efficace différentielle de diffusion dans l’angle solide d⌦0 s’écrit [148] :

d C = r2e 2 ✓ "02 "01 ◆2✓("0 2 "01)2 "01"02 + 4(!e1 · !e2) 2 ◆ d⌦0d"0 2 , (4.3)

où !e1 et !e2 sont les vecteurs de polarisation du photon entrant et du photon sortant.

La quantité !e1·!e2 est invariante de Lorentz. Afin de décrire un faisceau non polarisé,

on moyenne sur les deux états entrants de polarisation !e1 suivant x0 et y0, toute

polarisation linéaire étant décrite comme une combinaison linéaire de ces deux états. Le résultat final, indépendant de la polarisation du photon sortant est obtenu en sommant sur les deux états sortants de polarisation, et dépend donc de l’angle ✓0 [149] : d C = r2e 2 ✓ "02 "0 1 ◆2✓ "02 "0 1 +"01 "0 2 sin20◆d⌦0d"0 2 , (4.4)

où il faut encore imposer la condition cinématique de l’équation4.1.

Figure 4.2 – Diagrammes de Feynman pour le processus de diffusion Compton à l’ordre principal.

44 Chapitre 4. Processus physiques en astronomie gammaextragalactique • Rayonnement synchrotron

L’émission synchrotron est un rayonnement émis par une particule chargée en mouvement dans un champ magnétique B. Dans le cadre de l’approche semi-classique de Weizsäcker-Williams [150,151], le rayonnement synchrotron peut être interprété comme un cas particulier de diffusion Compton où le photon entrant est un quanta virtuel du champ magnétique [152]. Cette méthode, traitée en détail dans [153,154] permet en particulier de retrouver le cas classique du rayonnement synchrotron dans le cas où le champ magnétique dans le référentiel de l’électron, B est plus petit que le champ magnétique critique Bcr = m2/e = 4.4⇥ 1013 G, au delà duquel un

traitement quantique est nécessaire. Cette hypothèse sera toujours vérifiée dans la suite de cette étude.

Le flux de photons virtuels par unité de fréquence d! et unité de surface dA est obtenu à partir du flux de Poynting dont on effectue une décomposition en fréquence dans le référentiel instantané de l’électron :

dN d!dA = c ~!|E!|2= c 4⇡2~! Z E(t)ei!tdt 2 . (4.5)

L’équation 4.5est appliquée dans le référentiel de l’électron où le champ électrique E(t) est localement déterminé avec l’équation du mouvement classique de l’élec- tron. La section efficace différentielle de diffusion Compton (voir éq.4.3) est ensuite utilisée pour obtenir la puissance synchrotron rayonnée par unité d’énergie d" et unité d’angle solide d⌦ dans une direction faisant un angle ✓ avec le vecteur vitesse de l’électron. Le cas classique est retrouvé en supposant que la diffusion Comp- ton s’effectue dans le régime Thomson. Cette condition est en fait équivalente à la condition sur le champ magnétique présentée au paragraphe précédent. Dans un champ magnétique homogène et pour des électrons ultra-relativistes se déplaçant perpendiculairement au champ magnétique, cette puissance s’écrit alors [154] :

dP d"d⌦ = e2 3⇡2c ⇣ m" eB~ ⌘2✓1 + 22 2 ◆2 K2/32 (⇠) + 22 1 + 22K 2 1/3(⇠) , (4.6) où on a noté : ⇠ = m" 3eB~ ✓ ✓2+ 12 ◆3/2 , (4.7)

et Kn(x) sont les fonctions de Bessel modifiées d’ordre n. Comme l’électron est

ultra-relativiste, l’émission synchrotron vue du référentiel du laboratoire est concen- trée dans un cône d’ouverture ✓ ⇠ 1/ . Dans l’équation 4.6, le premier terme en K2/3 correspond à la puissance rayonnée dont la polarisation est dans le plan du mouvement de l’électron. Le second terme correspond à une polarisation orthogo- nale au plan du mouvement. Ces deux termes apparaissent lorsque l’équation4.3est sommée sur ces deux états de polarisation sortants. Lorsque ces deux termes sont sé- parément intégrés sur les angles solides accessibles et l’ensemble du spectre d’énergie

4.1. Emission et absorption de photons à très haute énergie 45 ", la puissance rayonnée obtenue avec une polarisation parallèle au plan du mouve- ment de l’électron est 7 fois plus forte que la polarisation perpendiculaire [155]. Ceci montre que l’émission synchrotron est fortement (bien que partiellement) polarisée. Comme on le verra par la suite, cette forte polarisation sera un outil majeur pour étudier les champs magnétiques astrophysiques grâce au rayonnement synchrotron. Dans le cas plus général d’un électron ayant un angle d’attaque ↵ par rapport au champ magnétique, la puissance synchrotron rayonnée par unité d’énergie et intégrée sur les angles solides accessibles est donnée par [156] :

dP d" = p 3e3B~ sin ↵ mc2 " "c Z 1 "/"c K5/3(⇠)d⇠ , (4.8)

où on a défini "c= (3eB~ 2/2mc) sin ↵.

• Diffusion Compton inverse

Le processus appelé Compton inverse est un cas particulier de diffusion Compton dans le cas où l’électron est ultra-relativiste ( 1). Dans ce cas, comme on le voit sur la formule4.2de retour dans le référentiel du laboratoire, le photon repart avec une énergie multipliée par un facteur . Le spectre Compton de la diffusion d’une distribution isotrope de photons de densité n("1) ayant des énergies dans d"1 sur

un électron ultra-relativiste est obtenu grâce à la formule 4.4 en moyennant sur les angles solide, en imposant la relation de cinématique4.1 et en intégrant sur les angles d’attaque. En notant q = "2/(4"1 ( mc2 "2)), le spectre s’écrit dans le cas

ultra-relativiste [157] : dN ,"1 dtd"2 = 2⇡r2 emc3 2 n("1)d"1 "1  2q ln q + (1 + 2q)(1 q) + (4"1 q) 2 2mc2(mc2+ 4" 1 q)(1 q) . (4.9) En raison de la cinématique imposée par les relations4.1et4.2, l’énergie des photons diffusés est bornée par :

"1  "2  4 2" 1 mc2+ 4 " 1 . (4.10)

Comme on a environ "2 ⇠ "1, le processus de Compton inverse est capable de

produire des photons de très hautes énergies à partir de photons beaucoup moins énergétiques. Bien que ce mode de production soit vraisemblablement le principal mode de production de photons de très hautes énergies pour les blazars, il existe cependant deux autres modes de production de photons de haute énergies : le rayon- nement de freinage, d’origine leptonique, et la voie hadronique.

• Rayonnement de freinage

Un électron passant dans le champ électrique coulombien d’un noyau atomique est ralenti et dévié par la répulsion des charges. Cette décélération est associée à l’émission d’un rayonnement de freinage (Bremsstrahlung en allemand). La section

46 Chapitre 4. Processus physiques en astronomie gammaextragalactique efficace de ce procédé est calculable en électrodynamique quantique avec les mêmes diagrammes que ceux de la figure 4.2 où le photon entrant est un photon virtuel échangé. Il est donc possible de traiter de manière semi-classique le rayonnement de freinage comme le rayonnement synchrotron, en l’interprétant comme un cas particulier de diffusion Compton. Dans ce cas, le photon entrant est un quanta virtuel du champ électrique du noyau. Cette étude a notamment était faite en détail dans [147].

Le rayonnement de freinage est d’une importance secondaire pour l’étude des blazars, car les plasmas dans les jets ne sont pas assez denses pour que ce processus soit efficace [158]. Il est ainsi notamment dominé par les autres modes de production que sont le Compton inverse ou les processus hadroniques. En revanche, il intervient dans le développement des gerbes atmosphériques, et est responsable de l’émission de photons de haute énergie par les particules chargées de la gerbe dans l’atmosphère.

• Désintégration de hadrons

Le principal processus d’origine hadronique, c’est à dire se produisant lorsque les particules accélérées sont des hadrons, est la désintégration de pions. Les pions sont produits lors des collisions inélastiques de hadrons via les réactions suivantes dans le cas de protons [159] :

p + p ! p + p + k⇡0+ l(⇡++ ⇡ ) (4.11)

p + p ! p + n + ⇡++ k⇡0+ l(⇡++ ⇡ ) (4.12)

p + p ! n + n + 2⇡++ k⇡0+ l(⇡++ ⇡ ) , (4.13) où k et l sont des nombres entiers. Le ⇡0 a un temps de vie de 8.5 ⇥ 10 17 s [160] et

se désintègre en 2 photons à 98.8%. Il est donc un mode efficace de production de photons de très hautes énergies. En revanche, les pions chargés ne se désintègrent généralement pas en émettant de photons (moins de 10 4) mais produisent des

électrons énergétiques qui peuvent à leur tour rayonner grâce aux processus décrits précédemment. On parle alors d’électrons secondaires. Les processus hadroniques sont envisagés dans certains modèles d’émission de blazar, par exemple [161,162], mais ne seront pas considérés dans la suite de ce travail. Ils interviennent également lors du développement de gerbes atmosphériques de rayons cosmiques initiées par des hadrons.