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5.3.1 Etat de conservation et répartition spatiale

Le matériel archéologique est réparti en deux ensembles. Le premier, plus important, est constitué par les artefacts décou-verts sur le site d’habitat du domaine morphosédimentaire A. Le deuxième rassemble le mobilier La Tène récolté lors des investi-gations entreprises en 2001 et 2002 dans le domaine morpho-sédimentaire B (fig. 130). L’étude présentée dans ce chapitre concerne presqu’exclusivement des pièces céramiques auxquelles s’ajoutent une terre cuite, trois lithiques et un bronze. Les ana-lyses du matériel osseux et des macrorestes végétaux recueillis lors du tamisage des structures du domaine A constituent deux sous-chapitres à part entière. Les rares battitures contenues dans les sédiments font référence à un travail de postréduction du fer. Cette aire de forge n’a pas été localisée, soit faute de conservation, soit en raison d’une situation hors de l’emprise des travaux. Le mobilier prélevé durant la campagne de sondages de 2002 et lors de la fouille de 2003 dans le domaine A provient du niveau archéologique 3a, plus rarement de son contact avec la couche 2, correspondant à l’occupation de l’âge du Fer. Localisé dans la zone d’habitat ou immédiatement au sud des structures d’habitat, il est très fragmenté et porte de lourdes traces d’érosion.

Le matériel récolté dans le domaine B est apparu dans la couche d’occupation du Second âge du Fer, appelée couche 3.2.1. Ce mobilier peu érodé s’accompagne d’une seule structure, le foyer 3, localisée dans le sondage 2696 au sud-est de Combe Ronde. Dans ce périmètre, la couche d’occupation de l’âge du Fer ne semble avoir été qu’effleurée par les fouilles, en raison principalement de la localisation de l’emprise des travaux autoroutiers. De plus, aucune intervention archéologique n’a pu être entreprise dans la périphérie est du sondage 2696 étant donné son classement en zone écologique protégée. De surcroît, la profondeur à laquelle se trouvait la couche archéologique, environ 3 m sous la surface, rendait toute opération périlleuse, en particulier en bordure d’une route à trafic intense.

5.3.2 Composition des corpus

L’étude du corpus du domaine A s’est heurtée à trois difficultés majeures. Tout d’abord, la forte fragmentation des céramiques, conjuguée à l’importante érosion du site, n’ont pas permis de reconstituer de profils complets. Ensuite, le mobilier contenu dans les différents niveaux d’occupation s’est mélangé au cours des épisodes torrentiels qui ont frappé les lieux, compliquant l’étude chronotypologique des céramiques. Puis, en l’absence de mobilier métallique, la rareté des bons marqueurs chrono-logiques alourdit le handicap causé par la faible importance de ce corpus. Le corpus des céramiques de ce domaine morpho-sédimentaire indique un nombre minimum d’individus (NMI) de 100, pour un total de 525 fragments et un poids de 3217,7 g (fig. 137). Une fusaïole en terre cuite, un bracelet annulaire en schiste bitumineux, un fragment de meule et un aiguisoir en grès complètent la panoplie du mobilier exhumé.

L’analyse du corpus du domaine B, bien que les pièces soient moins érodées et n’appartiennent a priori qu’à une seule occu-pation, rencontre les mêmes difficultés quant à la restitution des profils et à l’importance numérique. Elle s’avère toutefois plus complexe du fait que la zone d’occupation n’a pu être explorée de manière extensive et qu’une seule structure, de surcroît non datée par 14C, accompagne ce mobilier. La découverte d’un petit fragment de céramique de type campanienne A à vernis noir (CHE 002/4010 CO, non dessiné) qui apparaît sous nos latitudes dès La Tène D1 constitue un bon marqueur chronologique (Schucany et al. 1999, p. 31). Par contre la présence d’un arc de fibule en bronze, malheureusement retrouvé hors contexte, pose quelques questions pour la datation de cet ensemble dont nous n’avons qu’une vision tronquée en raison des contraintes inhérentes à la fouille.

Le corpus des céramiques du domaine morphosédimentaire B fournit un NMI de 32 individus pour un total de 161 fragments et un poids de 635,5 g (fig. 137). A ceci s’ajoute un arc de fibule à pied libre en bronze.

Plus au sud du domaine B, au lieu-dit Lai Coiratte, un petit lot de céramiques de l’âge du Fer a été repéré par Ursule Babey en

Pâte Bord Fond Panse Anse Total NMI Poids Fragments...

nb % nb % nb % nb nb nb s.ans..fonds % g % % Domaine A 1a. 49 1 209 259 50 49 50 1501,5 46,7 49,3 1b. 22 8 139 169 30 22 30 1000 31,1 32,2 2. 7 3 43 53 10 7 10 239,1 7,4 10,1 3 2 1 5 8 3 2 3 147,5 4,6 1,5 4a. 4 2 17 23 6 4 6 248,3 7,7 4,4 4b. 1 12 13 1 1 81,3 2,5 2,5 Total 84 16 16 3 425 81 525 100 84 3217,7 Domaine B 1a. 1 2 3 1 1 3,1 2,8 0,4 1,9 1b. 17 3 73 93 20 17 62,5 377,3 59,4 57,8 2. 4 1 29 34 6 5 18,8 143,7 22,6 21,1 4a. 3 26 1 30 4 4 12,5 109,2 17,2 18,6 4b. 1 1 1 1 3,1 2,5 0,4 0,6

mars 2009. Brièvement mentionné dans cette publication, ce lot se compose de 73 fragments répartis en seize individus pour un poids total de 384,8 g. Au sein de la typologie des pâtes céra-miques établie par Gisela Thierrin-Michael, ces pièces se répar-tissent comme suit : 24 fragments sont produits à partir d’une pâte de type 2, 20 proviennent d’une matrice de type 4a, l’argile de type 4b est représentée par 23 tessons alors que six fragments appartiennent au type 3. Ce mobilier paraît difficilement pouvoir être mis en lien avec les structures de la zone artisanale ; toute-fois celles-ci devront être étudiées avec la plus grande prudence, en particulier la structure 21 où ont été découverts les restes de quatre pots. Ce site, surtout occupé durant le Haut Moyen Age, sera publié dans le Cahier d’archéologie jurassienne 27.

5.3.3 La céramique

Les ensembles des domaines A et B ont été répartis entre quatre types de pâtes définis par G. Thierrin-Michael (chap. 3.2.5.1) et selon les différentes fractions de récipients conservées (fig. 137). Les ensembles analysés dans ce chapitre comportent une utili-sation prépondérante de dégraissant minéral, plus spécialement des inclusions coquillières. Celles-ci constituent sans doute la particularité principale des groupes observés. Cette caractéristique régionale a fait l’objet d’une analyse spécifique (chap. 3.2.6). La coexistence d’une matrice douce et d’une matrice plutôt sableuse pour les types de pâte 1a, 1b, 2 et 3a a été constatée et, le cas échéant, spécifiée dans le catalogue de description des céra-miques. L’omniprésence de nodules argileux ferrugineux dans les bancs d’argile utilisés par les potiers, et ce dans des concentra-tions plus ou moins fortes, doit être soulignée. Leur présence ne semble pas avoir induit de propriétés plastiques spécifiques aux argiles, ni altéré leur qualité.

Les différents décomptes mettent en évidence les caractéristiques des deux ensembles étudiés et permettent d’observer si une distinction apparaît ou non entre eux, pour essayer d’en com-prendre la signification (fig. 137 et 138). Ces informations sont très influencées par l’importante fragmentation des céramiques et la faible étendue des corpus ; elles sont donc avant tout indi-catives.

Le NMI pour chaque type de pâte a donc pu être calculé, ainsi que les représentations en pour-cent du poids des restes conservés et la proportionnalité de chaque pâte par rapport au nombre de fragments (fig. 137).

Tout d’abord, l’observation des rapports entre le nombre et le poids fait ressortir l’important état de fragmentation des corpus. Cette fragmentation se traduit par la rareté des fonds avec 3 % et 2,5 %, respectivement dans les domaines A et B, pour une présence peu marquée des bords, 16 % et 15,5 % pour chaque ensemble, et par une très large majorité de panses, respectivement 81 % et 82 %. Ensuite, les pâtes à inclusions coquillières, types 1a et 1b, représentent 81,5 % dans l’ensemble A contre 59,7 % dans l’ensemble B. Cette différence apparaît de manière encore plus frappante si l’on ne considère que les pâtes coquillières denses (type 1a) avec 49,3 % des tessons dans l’ensemble A alors qu’elles sont quasi absentes de l’ensemble B avec 1,9 %. En parallèle, nous constatons que les proportions tendent à s’inverser pour la céra-mique à inclusions coquillières éparses (type 1b). Elle rassemble 32,2 % du corpus de l’ensemble A, alors qu’elle forme une large majorité, 57,8 %, des céramiques de l’ensemble B. Un dernier élément intéressant est à relever : la présence de céramiques pro-duites dans une matrice à inclusions minérales grossières, type 3, n’apparaît presque pas dans le domaine A (1,5 % des fragments) et n’est pas recensée dans le domaine B.

Le classement selon les catégories fine/grossière met d’emblée en évidence une distinction très nette entre les deux corpus (fig. 138). Tout d’abord le domaine A est caractérisé par une faible majorité de céramiques grossières avec 53,3 %, pour 46,7 % de céramiques fines. En revanche, dans le domaine B, les céramiques fines domi-nent largement avec 97,5 % tandis que la céramique grossière tend à disparaître puisqu’elle ne représente plus que 2,5 %. Ce dépla-cement des proportions entre céramique fine et céramique gros-sière s’observe pour tous les types de pâte. A titre de comparaison, la céramique de Levroux - La Colline des Tours, datée de La Tène moyenne, se répartit comme suit : 20 % et 60 % (Buchsenschutz et al. 1994, p. 105). Pour Sissach - Brühl, à La Tène D2, les propor-tions sont de 85,7 % et 14,3 % (Müller-Vogel 1986, p. 11). L’observation de la coloration des céramiques induite par les techniques utilisées pour la cuisson des pièces fait apparaître quatre éléments (fig. 139).

Premièrement, au sein de l’ensemble A, nous constatons que la céramique grossière est avant tout de couleur claire alors que la tendance s’inverse pour la céramique fine. Notons, deuxième-ment, qu’au sein de ce groupe le rapport entre couleurs claires et couleurs foncées tend à s’équilibrer puisque l’on compte 50,5 % de couleurs claires pour 49,5 % de couleurs foncées. Troisièmement, en ce qui concerne l’ensemble B, la catégorie des céramiques grossières n’est pas assez représentée pour que nous puissions en tirer les informations relatives à la coloration des récipients. Quatrièmement, la proportion entre céramique fine de couleur claire (47,8 %) et de couleur foncée (49,6 %) s’équilibre, cette tendance déjà apparente pour l’ensemble A est ici confirmée. Bien que ces informations ne puissent être prises telles quelles,

Pâte Céramique grossière Céramique fine

NMI(%) fragments(%) NMI(%) fragments(%)

Domaine A 1a. 50 49,3 1b. 30 32,2 2 10 10,1 3 3 1,5 4a. 6 4,4 4b. 1 2,5 Total 54 53,3 46 46,7 Domaine B 1a. 3,1 1,9 1b. 62,5 57,8 2 18,8 21,1 4a. 12,5 18,6 4b. 3,1 0,6 Total 6,2 2,5 93,8 97,5 Fig. 138 Domaines A et B. Répartition de la céramique selon les catégories grossière et fine.

Pâte Céramique grossière Céramique fine

claire 1 foncée 2 claire 1 foncée 2

nb % nb % nb % nb % Domaine A 1a. 145 115 1b. 65 103 2 26 27 3 6 1 4a. 19 5 4b. 4 9 Total 155 29,5 125 23,8 110 21 135 25,7 Domaine B 1a. 2 1 1b. 38 54 2 16 20 4a. 23 6 4b. 1 Total 2 1,3 2 1,3 77 47,8 80 49,6

Fig. 139 Domaines A et B. Répartition de la céramique par couleur de pâte. Orange, beige, rouge, gris clair (1); brun, noir, gris foncé (2).

Fig. 140 Domaines A et B. Répartition des formes céramiques par type de pâte.

la variation des colorations nous paraît importante. Elle pourrait être le reflet d’une évolution des procédés de cuisson utilisés par les potiers. Les calculs en pour-cent par rapport aux fragments, tant pour le domaine A que pour le domaine B, montrent une réparti-tion presque équivalente entre les différents types de pâtes. Dans ce cas, la coloration est probablement induite par la position des réci-pients au sein de l’aire de cuisson, dans l’hypothèse d’une cuisson en aire ouverte. Cette hypothèse est corroborée par la présence de plusieurs fragments dont la couleur varie de l’orange au noir, tra-hissant ainsi le manque de maîtrise de l’atmosphère de cuisson. Malgré l’importante fragmentation des récipients, une réparti-tion formelle a été effectuée afin de déterminer les profils les plus récurrents et, le cas échéant, de voir si des indications chrono-typologiques peuvent en être déduites (fig. 140). En raison de l’importante fragmentation des corpus, la distinction entre jatte et écuelle n’a pu être effectuée. En effet, les profils sont beaucoup trop endommagés pour que la forme générale des récipients ainsi que leur profondeur puissent être restituées. Par conséquent, le rapport entre le diamètre à l’ouverture et la profondeur du vase n’a pu être calculé. L’attribution des fragments à l’une ou l’autre de ces deux formes n’a donc pas été possible puisque la variation des profils à elle seule n’est souvent pas suffisamment distinctive. Nous avons donc décidé d’utiliser le terme « écuelle » pour dési-gner tous les récipients bas et ouverts, à l’exception des formes plates. Les pâtes grossières seront observées en premier lieu, tout en essayant de présenter en parallèle des hypothèses d’interpréta-tion par rapport aux spécificités observées dans chaque groupe, ces données étant inexploitables pour l’ensemble sédimentaire B. Puis les pâtes fines seront examinées de la même manière.

5.3.3.1 La céramique grossière

La céramique qualifiée de grossière, soit 53,3 % des fragments de l’ensemble A, se distingue par son dégraissant dont le calibre est supérieur à 0,5 mm. Celui-ci est le plus souvent minéral et peut atteindre des concentrations très importantes selon les argiles ; les pâtes de type 1a, 4b et 3 ont été utilisées (fig. 138). Le type 1a à inclusions coquillières denses est le plus représenté avec 49,3 %.

Domaine B

Pâte Forme Céramique grossière Céramique fine

total. % nb total. % 1a Ecuelle.tronc..à.bord.droit 1 33,3 Indéterminée 2 66,7 Sous-total 3 1b Ecuelle.tronc..à.bord.droit 2 10 11,1 Ecuelle.tronc..à.bord.rentrant 3 Ecuelle.hém..à.bord.droit 2 Ecuelle.hém..à.bord.rentrant 3 Pot 1 1,1 Assiette.(dînette) 1 1,1 Indéterminée 78 86,7 Sous-total 90 2 Pot 2 9,5 Indéterminée 19 90,5 Sous-total 21 4a Ecuelle.tronc..à.bord.rentrant 1 4,5 Pot 1 4,5 Anse 1 4,5 Cruche.GR.(panses) 5 22,8 Indéterminée 14 63,7 Sous-total 22 4b IndéterminéeSous-total 11 100 Total 4 133 Domaine A

Pâte Forme Céramique grossière Céramique fine

nb total. % nb total. % 1a Ecuelle.tronc..à.bord.rentrant 4 28 10,8 Ecuelle.tronc..à.bord.droit 9 Ecuelle.tronc..à.bord.éversé 1 Ecuelle.hém..à.bord.rentrant 6 Ecuelle.hém..à.bord.droit 7 Ecuelle.carénée.panse.hém. 1 Pot 6 2,3 Bouteille 1 0,4 Indéterminée 224 86,5 Sous-total 259 1b Ecuelle.tronc..à.bord.rentrant 2 22 13 Ecuelle.tronc..à.bord.droit 2 Ecuelle.hém..à.bord.rentrant 8 Ecuelle.hém..à.bord.droit 9 Bol.Roanne 1 Pot 5 3 Indéterminée 142 84 Sous-total 169 2 Ecuelle.hém..à.bord.droit 1 1,9 Pot 5 9,4 Bouteille 3 5,7 Indéterminée 44 83 Sous-total 53 3 Ecuelle.hém..à.bord.droit 1 12,5 Pot 1 12,5 Jatte.à.bord.festonné 4 50 Indéterminée 2 25 Sous-total 8 4a Ecuelle.hém..à.bord.droit 5 21,7 Indéterminée 18 78,3 Sous-total 23 4b Bouteille.? 1 7,7 Indéterminée 12 92,3 Sous-total 13 Total 280 245

Par conséquent, pour que les variations formelles observées à Combe Ronde acquièrent une signification chronologique, il serait nécessaire de disposer d’un corpus d’analyse beaucoup plus étendu et mieux conservé. En revanche, la mise au jour d’une écuelle à bord rentrant, lobé et à panse grossièrement hémis-phérique (pl. 25.11), forme aussi connue sous le nom de vase parapluie, indique une occupation du domaine A durant La Tène B2-C1. Ce récipient de forme ouverte et basse est en pâte de type 3 contenant des inclusions minérales très grossières, certaines pouvant atteindre jusqu’à 5 mm. Son diamètre à l’ouverture est de 24 cm, pour une hauteur estimée à 10 cm. Ce type de vases sert souvent à l’éclairage et fait alors office de réservoir à huile 2

(surtout Lambot 1988 ; Cattelain 2002, p. 29 ; Billoin et al. 2002, p. 36). Une telle utilisation est plausible pour notre exemplaire, des traces de brûlures sur la partie inférieure de la face interne du récipient fournissant un indice supplémentaire en faveur de cette hypothèse (fig. 142). Les études spécialisées consacrées à ce genre de céramiques font une distinction entre les bords lobés, sans pli, attribués à la tradition rhénane, et les bords festonnés ou ourlés, plus typiques du répertoire marnien ou méridional (Leman Delrive 1973). B. Lambot suggère une évolution chronologique entre les bords lobés qu’il attribue au Bronze IIIb - Hallstatt final et les bords festonnés, plus tardifs, qui apparaîtraient au Hallstatt final - La Tène ancienne (Lambot 1988). Cette tentative de dis-tinction chronologique semble remise en question par plusieurs découvertes récentes dans le Bassin parisien (Marion 2004 ; Buchsenschutz et al. 2005). Retrouvés fréquemment dans les sites d’habitat du Hallstatt final et de La Tène ancienne à l’exemple de Rosheim - Mittelweg (Jeunesse et al. 1993, p. 98, 124 et 127), ces vases perdurent plus longuement à La Tène C en région parisienne (départements du Val-d’Oise, de l’Aisne et de la Seine-et-Marne) où de nombreux exemplaires ont été décou-verts dans des habitats de La Tène moyenne (Marion 2004), période au cours de laquelle ils disparaissent progressivement. La présence de ce fragment constitue un élément archaïsant pour le domaine A et doit, à notre avis, être considéré comme un terminus post quem.

Sur le plan des techniques de fabrication, les écuelles en pâte gros-sière sont montées à la main, procédé révélé par divers exemples de cassures à la jonction de deux colombins d’argile (fig. 143) Les coquilles fossilisées font office de dégraissant naturel dans

les argiles exploitées. Les inclusions de paillettes de mica et les matrices sableuses sont rares pour ce type de pâte. Le type 4b, soit 2,5 %, se distingue par l’absence d’inclusions minérales visibles ou perceptibles au toucher. Souvent mélangée à de la chamotte, cette pâte se caractérise par un aspect vacuolaire dû vraisem-blablement à la disparition du dégraissant végétal rajouté à la matrice. Enfin, le type 3, soit 1,5 %, se caractérise par ses inclu-sions minérales.

Le répertoire formel de la céramique grossière se limite à deux catégories : les récipients bas et ouverts, soit les écuelles, par oppo-sition aux récipients hauts et fermés, soit les pots et les bouteilles. La première catégorie, les écuelles, représente la forme de récipient la plus récurrente au sein de la céramique grossière. Quatorze frag-ments ont une panse hémisphérique et quatorze une panse tron-conique, alors qu’un seul est caréné (fig. 140 et 141). Avec dix-sept occurrences, les bords droits dominent légèrement par rapport aux dix bords rentrants. Un seul bord éversé est recensé. La forme des écuelles n’évoluant que peu au cours du Second âge du Fer, seul un fort déséquilibre de leur proportion au sein des corpus permet d’apporter des indices chronologiques à l’exemple de la diminution des écuelles carénées à la fin de La Tène moyenne 1.

Fig. 142 Fragment d’écuelle à bord lobé avec traces de lissage au doigt et de

brûlures (pl. 25.11). Fig. 143 Jonction entre deux colombins d’argile, témoin du montage manuel des céramiques (CHE 003/175 CR). Domaine A - état récapitulatif

Forme Céramique grossière Céramique fine Fragments

total. % total. % nb % Ecuelle 29 10,4 28 11,4 57 10,8 Pot 7 2,5 10 4,1 17 3,2 Bouteille 2 0,7 3 1,2 5 1 Jatte.festonnée 4 1,4 0 0 4 0,8 Indéterminée 238 85 204 83,3 442 84,2 Total 280 245 525

Domaine B - état récapitulatif

Forme Céramique grossière Céramique fine Fragments

total. % total. % nb % Ecuelle 1 25 11 8,3 12 8,8 Pot 4 3 4 2,9 Autre 7 5,3 7 5,1 Indéterminée 3 75 111 83,4 114 83,2 Total 4 133 137

et par des épaisseurs de paroi importantes et irrégulières. Sur la panse de l’écuelle à bord lobé, des aplats propres à l’emploi de la technique du battage, ainsi que des empreintes de doigts caractéristiques d’un lissage sommaire, sont visibles (fig. 142). La profondeur des reliefs imprimés sur le récipient indique que ces deux opérations ont été pratiquées sur une pâte encore humide, lors de la mise en forme du vase. Son montage, par pilonnage de l’argile sur une forme convexe est sans doute dû à la grossièreté de la pâte utilisée. L’égalisation de la surface des récipients est le plus souvent obtenue par un simple lissage au doigt, laissant parfois apparaître de fines lignes horizontales (fig. 143). En outre, pour trois fragments d’écuelle, le lissage a provoqué un effet de barbotine sur la face interne (pl. 24.5,13 ; CHE 003/538 CR, non dessiné).

Pour les écuelles, les seuls éléments d’ornementation apparais-sent sous la forme de cannelures larges et très peu prononcées. Elles sont le plus souvent localisées à la base du bord (pl. 24.3). Ce type de décor cannelé apparaît de manière récurrente à La Tène ancienne dans la région du Brisgau et de la Forêt-Noire, à Neuenbürg - Schlossberg (Jensen 1986), à Breisach - Münsterberg (Bender et al. 1993) ou encore à Bischoffingen (Röder 1995). Dans notre région, toutefois, ces décors se distinguent par leur manque de relief à l’exemple des spécimens mis au jour à Rosheim (Jeunesse et al. 1993) et à Pfulgriesheim, exemplaires considérés comme des imitations des céramiques du Brisgau (Balzer et Meunier 2005, p. 263). Sur le plan régional, ce type ornemental apparaît à plusieurs reprises sur l’habitat d’Alle - Noir Bois (Masserey et al. 2008) attribué à La Tène ancienne et persiste jusqu’à La Tène finale à Alle - Pré Monsieur (Stahl Gretsch, Detrey et al. 1999, p. 167). Cette persistance du décor à cannelure large est également constatée à Chevenez étant donné sa présence répé-titive sur les sites de Combe En Vaillard et Combe Varu (chap. 3.2.5.2 et 4.5.2). Ce type d’ornementation ne permet donc pas d’affiner la chronologie de l’ensemble A.

Le dernier point à aborder pour les écuelles en pâte grossière, plus spécifiquement du type à inclusions coquillières denses, concerne leur emploi. Leur forme leur confère un usage multiple. Elles peuvent être destinées aussi bien à la préparation des ali-ments, qu’à leur cuisson ou à leur présentation. Mais seule l’uti-lisation des écuelles pour la cuisson des aliments est susceptible de laisser des traces observables. Ces dernières apparaissent par le biais d’une calcination locale postcuisson de la surface externe des récipients ou par la présence d’un encroûtement, ou caramel, sur leur face interne. Dans le cas du domaine A, plusieurs