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Mise en place de l’Organisation de lutte contre les Pratiques Anormales (OPA )

TRANSPORT ROUTIER RÉGIONAL

2.2. STRUCTURE ET INFRASTRUCTURES DE TRANSPORT ROUTIER REGIONAL

2.2.1. Mise en place de l’Organisation de lutte contre les Pratiques Anormales (OPA )

D’après le 26ème rapport de l’Observatoire des Pratiques Anormales (OPA), les entraves au

système des transports se caractérisent essentiellement par la multiplication des contrôles, la complexité des procédures et des documents, les longues attentes aux frontières, les pertes de temps au cours des contrôles et les frais occultes élevés. Ces pratiques ont pour conséquences un coût généralisé très élevé des opérations de transport et la perte de compétitivité des économies des États de l'Union. Pour éliminer ce dysfonctionnement, le Conseil des Ministres a adopté le 16 décembre 2005, la Directive n°08/2005/CM/UEMOA relative à la réduction des

points de contrôle routiers inter-États de l'Union et la Décision n°15/2005/CM/UEMOA portant

modalités pratiques d'application du plan régional de contrôle sur les axes routiers inter-États de l'UEMOA (UEMOA, 2017e).

Selon toujours cette source, ces dispositifs réglementaires visent à rationaliser les opérations de contrôles et à assurer la fluidité du trafic sur les corridors par un nombre limité de postes de contrôles dont la norme communautaire est de trois (03) pour un corridor reliant deux pays de l'Union: un contrôle au départ, un autre aux frontières et le dernier au point de formalités effectives.58 Les objectifs visés par l’OPA sont:

- identifier, analyser et publier les faits, pratiques, irrégularités et abus constatés sur les axes routiers inter-États, dans le cadre du transport des personnes et des marchandises;

- porter les abus constatés à la connaissance du plus grand public;

- amener les autorités concernées à prendre des décisions et mesures correctrices appropriées.

Trois indicateurs sont suivis lors des enquêtes. Il s’agit:

- du nombre de contrôles correspondant au nombre moyen d'arrêts subis par les chauffeurs par un agent des forces de l'ordre;

- du temps de contrôle correspondant au temps total passé à ces postes de contrôle;

58 Ces deux textes s'appuient sur les trois (3) principales conventions adoptées par les États membres de la

CEDEAO afin de garantir et faciliter la libre circulation des personnes et des biens:

- Convention NP215182 du 29 mai 1982 portant règlementions des transports routiers inter-États; - Convention AIP41821du 29 mai 1982 relative au transit routier inter-États;

- Convention Additionnelle AISP.115190 du 30 mai 1990, portant institution au sein de la Communauté, d'un Mécanisme de Garantie des Opérations de Transit routier Inter-États.

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Vincent ZOM A -Thèse de doctorat en Géographie.

Transport et intégration régionale dans l’espace UEMOA : le transit routier de marchandises du Mali et du Niger via le

- des prélèvements illicites correspondant aux montants illégaux perçus par les services en uniforme de la part des chauffeurs.59

L'OPA couvre actuellement les pays de I'UEMOA. Les données sont collectées par les points focaux de l'OPA (les Conseils des chargeurs ou les Chambres de commerce dans les pays membres). En effet, ces points focaux obtiennent leurs informations auprès des chauffeurs qui remplissent les fiches d'enquêtes qui leur sont remises par les agents de l'OPA sur le terrain60.

Nonobstant la mise en œuvre des OPA, l’on est en droit de s’interroger sur son efficacité comme nous le verrons dans la troisième partie de la thèse. En effet, les chauffeurs concernés par le transit routier ont un faible niveau d’instruction comme le montrent les résultats de notre enquête auprès des conducteurs en transit au le Burkina Faso (Tableau n°6).

Tableau 6: Niveau d'instruction des conducteurs en transit au Burkina Faso

Niveau d’étude Sans études Primaire Secondaires Supérieur Total

Pourcentage 29 32,8 38,2 0 100

Source: V. ZOMA, 2018, Travaux de de terrain

D’après le tableau n°6, aucun des conducteurs n’a un niveau d’instruction ‘‘supérieur’’ et 29 % d’entre eux n’ont pas été scolarisés. Lorsqu’on fait la somme des scolarisés, il ressort que 61,8% des chauffeurs enquêtés ont un faible niveau d’instruction. L’absence de conducteur ayant un niveau d’instruction supérieur pourrait s’expliquer par le fait que dans la région, ceux qui sont à la recherche du métier de conducteur ont généralement connu un arrêt précoce dans leurs études. En général, la plupart des conducteurs de poids lourds ont d’abord été des apprentis- chauffeurs61. Cela a un avantage en terme de maîtrise des différents défis du domaine mais au

regard du faible niveau d’instruction des conducteurs, nous pensons qu’il est raisonnable de s’interroger sur l’efficacité de la mise en œuvre de cette initiative. Par ailleurs, étant donné que les conducteurs sont des acteurs directs et que cette situation les fatigue, les coûts mentionnés peuvent être exagérés. C’est la raison pour laquelle dans la présente recherche nous avons

59 Les prélèvements illicites payés par d'autres acteurs tels que les transitaires ne sont pas inclus.

60 Ces chauffeurs doivent remplir les conditions suivantes: avoir un permis de conduire valide; le camion du

chauffeur doit être en bon état et les pièces du camion doivent être contrôlées valides et au complet.

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également eu des entretiens avec les forces de sécurité pour plus d’objectivité dans l’analyse. Les OPA pourraient également adopter cette stratégie ou même souvent se déguiser pour suivre les conducteurs et collecter souvent les données et faire une confrontation.

Cependant, tous les acteurs sont unanimes que malgré les publications des résultats des OPA, les pratiques anormales persistent dans la région (comme nous le verrons dans le sixième chapitre). Au cours de notre entretien avec le point focal de l’OPA au Mali, il nous a confié qu’après une mission d’inspection sur le corridor sénégalais, à leur retour ils ont eux-mêmes été victimes de tracasseries. Selon lui, les forces de sécurité auteurs de ces tracasseries ne les avaient pas reconnus à leur retour. Comme ce point focal, lorsque nous nous rendions au Mali (en janvier 2018), les forces de sécurité maliennes nous ont exigé de payer 1000 FCFA au poste de contrôle frontalier en passant par le corridor Orodora-Cikasso car nous étions un étranger. Nous n’avons été autorisé à poursuivre notre voyage sans payer que lorsqu’ils ont vu notre ordre de mission. Nous sommes pourtant membres de l’UEMOA et nous avions avec nous notre carte d’identité et notre carnet de vaccination (les deux documents exigés par les normes communautaires). En réalité, depuis sa mise en place en 2005, les observations de l’OPA se suivent et se ressemblent. Déjà, le rapport de 2010 faisait le constat que la correction des mauvaises pratiques n’a pas connu d’avancée significative depuis octobre 2006.

Cette situation mérite une analyse approfondie (qui sera traitée dans la troisième partie de la thèse).

Par ailleurs, en plus des OPA, l’UEMOA a un projet de mise en place de poste de contrôle juxtaposé en vue du renforcement de l’intégration régionale.