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5- Fin de phrases

5.2 Intégration de la pratique théâtrale en classe de FLE

5.2.1 Mise en place et déroulement de l’atelier

Pour réussir un projet d’intégration d’une pratique théâtrale en classe, nous envisageons une mise en place d’un atelier théâtre avec un groupe d’étudiants qui s’engagent et découvrent cette expérience collective pour la première fois. Cette expérience nécessite au préalable un cadre qui détermine les modalités d’un travail collaboratif.

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Nous nous inscrivons donc, dans une perspective actionnelle, notre objectif vise à engager ces apprenants dans une co-action à finalité collective, comme le souligne Christian PUREN :

« dans la perspective actionnelle esquissée par le Cadre européen commun de référence (à laquelle je réserverai désormais le sigle « PA »), on se propose de former un « acteur social » ; ce qui impliquera nécessairement, si l’on veut continuer à appliquer le principe fondamental d’homologie entre les fins et les moyens, de le faire agir avec les autres pendant le temps de son apprentissage en lui proposant des occasions de « co-actions » dans le sens d’actions communes à finalité collective. »119

Autrement dit, cette perspective actionnelle de formation d’un apprenant acteur social définit par le CECRL montre l’importance de la réalisation de véritables tâches ayant un sens non seulement scolaire mais encore social. Le CECRL considère la tâche de la façon suivante :

« Il y a « tâche » dans la mesure où l’action est le fait d’un (ou de

plusieurs) sujet(s) qui y mobilise(nt) stratégiquement les compétences dont il(s) dispose(nt) en vue de parvenir à un résultat déterminé »120

Il s’agit de ce fait, de créer artificiellement en classe des situations de simples interactions langagières des apprenants. Ils s’entraident et agissent ensemble d’où l’importance d’un travail de groupe durant lequel, chaque apprenant met à profit ses compétences, participe et s’investit dans le groupe. Dans son ouvrage intitulé oser la pédagogie du groupe, J-P DONCKELE reporte la définition du groupe donnée par Kurt LEWIN dont :

« L’essence n’est pas dans la similitude ou l’absence de similitude entre les membres, mais plutôt leurs interdépendances. Un groupe peut se caractériser comme un tout dynamique ; ce qui signifie qu’un changement

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PUREN, C. (2002). Perspectives actionnelles et perspectives culturelles en didactique des

langues-cultures: vers une perspective co-actionnelle-co-culturelle. Langues modernes, 96(3), p.59 120

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dans l’une de ses parties entraîne un changement dans chacune des autres. »121

Pour qu’il y ait groupe, il faut collaboration, construction commune des savoirs, savoirs-être et savoir-faire. Nous insistons, dans cette perspective d’introduire la pratique théâtrale que nous proposons aux étudiants, qui permettra de renforcer le travail collaboratif.

Quant au choix du texte théâtral à mettre en pratique Marie-Cécile LEBLANC dit à ce propos :

« D’une façon générale, les thèmes peuvent être choisis par l’enseignant à partir de la méthode ou conditionnés par l’enseignement lexical et sémantique dispensé au cours mais ils peuvent aussi être totalement inventés par les étudiants selon leurs intérêts. Le thème exerce indéniablement une incidence sur la motivation du joueur et sur son engagement : certains thèmes plus motivants peuvent faciliter la prise de parole, tandis que d’autres peuvent mettre mal à l’aise ou, inversement, provoquer un excès d’engagement. »122

Comme le souligne l’auteure, nous sommes conscients de l’importance du choix du texte pour aboutir aux résultats attendus, nous avons préféré proposer trois textes aux étudiants, l’enseignant leur a accordé un délai d’une semaine, pendant ce délai, chaque étudiant aura le temps de lire les trois textes.

Extrait du texte N° 01 :123

Les Animaux malades de la peste

Gérard William

Personnages : Le narrateur – La cigale – La cigogne – Le rat – Le renard – Le lion – Le tigre

Le loup – l’âne

Le narrateur : - Les Animaux malades de la peste : « Un mal qui répand la terreur,

Mal que le Ciel en sa fureur

Inventa pour punir les crimes de la terre… »

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DONCKELE, J-P. (2003), « Oser les pédagogies de groupe ». Belgique, Erasme, P.82

122

LEBLANC, M-C. (2002), « Jeu de rôle et engagement ». L’HARMATTAN, Paris, P.33

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La cigale (entrant avec sa guitare) : - Quoi ? il y a une nouvelle catastrophe ? Viiite… il faut

agir ! Il faut… composer une chanson de solidarité, enregistrer un CD avec toutes les stars de

la variété internationale et redistribuer les bénéfices pour lutter contre… contre quoi au fait ?

Le narrateur : - « La Peste (puisqu'il faut l'appeler par son nom) »

La cigogne (médecin) : - Ha non permettez, la peste a été éradiquée, ce n’est plus une maladie

actuelle…

Les rats : - Quel dommage, nous autres les rats étions les vedettes à l’époque… Le renard : - On pourrait parler plutôt de moi !… je veux dire, de ma maladie : la rage…

Le narrateur : - Non ! pas à c’t’heure !… Hé ! Pasteur… la rage… Bon ! Si on commence de

parler des bobos de chacun, on va y passer la nuit !

La cigogne : - Permettez, la santé est un sujet essentiel ! Rien n’est plus passionnant que les

symptômes de la grippe aviaire, le diagnostique de la Pneumonie porcine, l’épizootie de la

tremblante du mouton… ou l’encéphalopathie spongiforme bovine… Le rat (sortant en baillant) : - En effet, captivant…

Le renard (même jeu) : - Envoûtant, fascinant…

Le narrateur : - Vous voyez ? Les bobos des autres, tout le monde s’en tape ! Je peux

Extrait du texte N° 02124

Le Meunier son Fils et l’Ane Gérard William

Personnages : La narratrice – La « girouette » - Le meunier – Le fils du meunier - La 1ère passante –

la 2ème passante - Yolande-Ernestine - Armande-Jeanne - Jacqueline – 1er jeune - 2ème

jeune – 3ème jeune – La mère – La fille – 1ère fille – 2ème fille

La narratrice : - Mesdames et Messieurs quittons un peu le monde de la faune – marre de

toutes ces bestioles à la fin ! – et prenons un bon bol d’oxygène dans le monde végétal : voici

la fable « Le chêne et le roseau » ! Vous serez pliés – de rire – mais ne romprez pas – les

rangs ! Un jour, le chêne dit au roseau : - Le moindre vent te fait tourner la tête, t’es une vraie

girouette…

La « girouette » déboule sur scène.

La « girouette » : - C’est toi qui parle de girouette ? C’est exactement mon problème en ce

moment, je ne sais pas quoi choisir !…

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La narratrice : - Oui, mais là, je raconte une fable…

La « girouette » (apercevant le public, sans se démonter) : - Ah ? Bonsoir ! Je te disais donc : qu’est-ce que je dois choisir ? Est-ce que je dois me cloîtrer dans ma chambre et étudier

étudier jusqu’à ce que j’aie un diplôme qui me permette de travailler travailler ? Ce qui plairait bien à mon père et assurerait mon avenir… Ou est-ce que je dois sortir avec Alexandre, tu sais le grand là… lui faire confiance, l’épouser, devenir femme au foyer et me

laisser entretenir ? Ce qui ne plairait qu’à moitié à mon père et qu’à moitié à moi aussi, faut

bien le dire… Ou est-ce que je dois laisser s’exprimer mon penchant pour les hommes, en

séduire plusieurs et former une troupe de Chippendales ? Ce qui ne plairait pas du tout à mon

père, mais conviendrait bien à ma mère !…

La narratrice : - Ecoute ma chérie, pour toi j’ai une fable de La Fontaine, qui pourrait t’aider

à choisir. (Au public) Ça ne vous fait rien si on change de fable ? (Sans attendre de réponse)

Bon, et bien voici « Le Meunier son Fils et l’Ane » - après les animaux et les végétaux, les

humaux… euh… les humains ! J’ai lu quelque part qu’un meunier et son fils de 15 ans, allaient vendre leur âne à la foire…

Arrivent le meunier et son fils, portant un vélomoteur (en le soulevant).

La narratrice : - Mais qu’est-ce que c’est que ce vélomoteur ? C’est un âne que vous devriez

avoir…

Le meunier : - Mais, chère narratrice, de nos jours on ne se déplace plus à dos d’âne ! Le fils (genre banlieusard) : - Hé ouais la meuf ! Vaudrait z’y voir pour te câbler USB sur le

vingt et unième siècle !

La narratrice : - Mais c’est à cause de la fable…

Le fils : - Bon ! si tu y tiens, la mobilette on va l’appeler Ane… ça te va ?

Extrait du texte N° 03125

6 éléments et une catastrophe

Scène 1

Tournie : Salut la gang !

Terry : T’as ben l’air essoufflé toi, ça va ? Tournie : (incertaine) Oui, tout va bien…

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Fire : T’es pas bien convaincante, on dirait que tu nous caches quelques chose… Tournie : Non…

Vic et Pensée entre…

Pensée : Hmmm ! Je sens qu’il se passe des choses ici…

Terry : Oui, c’est Tournie, je crois qu’elle ne veut pas en parler. Tournie : (impatiente) De quoi voulez-vous que je vous parle ?

Pensée : De ce qui te tracasse, je peux presque le voir. Tu sais que tu ne peux rien me cacher…

Tournie : (se croisant les bras en boudant) Moi, j’ai rien à dire. Vic : Ouais, on dirait pas !

Tournie : Laissez-moi souffler un peu!

Pensée : Ok, quand tu voudras parler, tu viendras me voir. Tournie et Pensée sortent chacune de leur côté.

Pour les étudiants qui participent à l’atelier de pratique théâtrale, la première rencontre avec les pièces proposées par l’enseignant ne représente pas une difficulté, parce qu’ils étaient initiés à la lecture d’un texte de théâtre pendant la phase du pré-test. Le temps qu’on leur avait accordé pour choisir le texte concerne le thème. Après discussion, les étudiants se sont mis d’accord pour choisir le texte N° 02 : le meunier, son fils et l’âne.

Les étudiants ont choisi ce texte pour sa dimension interculturelle, le texte est la première fable de La Fontaine, édité pour la première fois en 1668. Les étudiants connaissent très bien cette fable qui existe déjà dans leur répertoire culturel arabe.

« Joha, son père et l’âne », cette pièce traduite du français par Nadine Khoury est une transposition de la fable de La Fontaine. Joha est un personnage très connu de la tradition orale commune orientale, les étudiants connaissent bien cette histoire, ils veulent découvrir la version française avec tout ce qu’elle porte comme charge culturelle.

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Il est important à noter que le texte choisi est une fable théâtralisée, écrite par Gérard William, auteur suisse, artiste professionnel dans le domaine du théâtre. Il écrit des sketches et des chansons pour les humoristes et des spectacles pour des troupes, des sociétés et des écoles.

Nous étions étonnée du fait que le groupe ait facilement choisi le texte à jouer, nous avons imaginé que nous aurons besoin de plus de temps pour le faire, finalement l’acceptation de la proposition forme déjà le groupe.

Cette première étape aide les apprenants à sortir d’une situation de blocage, nous avons remarqué qu’ils veulent jouer et réussir ce qui représente pour nous un départ très positif.

Nous avons apporté des modifications concernant le nombre de personnages en éliminant quelques rôles pour aboutir à une pièce de dix personnages, sans que cela change le sens global du texte théâtral.