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Mireille et sa compagnie de couture

À la Soupière, ils servaient des déjeuners pour les personnes démunies et Mireille s’y rendait souvent pour déjeuner. Elle parlait presque à toutes les personnes, enfin à ceux et celles qui ne la rejetaient pas.

– Bonjour! Geneviève! dit Mireille. – Bonjour! Mireille! dit Geneviève.

– Ah! As-tu bien dormi la nuit passée, Geneviève? demanda Mireille qui essayait de faire la conversation.

– Pas si mal! Pas si mal! lui répondit Geneviève.

– Moi, j’ai bien dormi. Qu’est-ce que tu fais cet après-midi? demanda Mireille. – Je ne le sais pas. Je n’ai rien à faire d’extraordinaire, répondit Geneviève.

– Voudrais-tu lire la Parole de Dieu avec moi? Je suis allé à la Saint-Vincent-de-Paul hier avant-midi et j’ai trouvé une Bible, dit Mireille.

– Non, ça ne m’intéresse pas. Demande à une autre personne, lui répondit Geneviève qui ne s’intéressait qu’aux garçons.

– C’est bien. Au revoir, Geneviève, souhaita Mireille. – Au revoir, Mireille, dit Geneviève.

Mireille était un peu désemparée de voir que Geneviève ne voulait pas partager sur la Parole de Dieu. Elle ne savait pas encore selon la parabole du semeur (Mt 13, 3) que certains ne voulaient pas apprendre, que certains ne duraient pas dans cette voie à cause de toutes sortes de soucis et de tracas, mais que d’autres voulaient amplement écouter la Parole de Dieu auprès d’un cœur généreux, comme elle l’avait fait avec Claire.

Cependant, à cause de ses expériences qu’elle vivrait avec la Parole de Dieu, ce qu’elle apprendrait directement, lui servirait à comprendre encore mieux la Parole.

Puis Mireille se demanda ce qu’elle ferait si une personne lui disait que oui elle aimerait partager sur la Parole de Dieu? Elle était complètement sans ressource et tota-lement dépendante de Claire en ce qui a trait à la Parole de Dieu.

Elle se dit alors, à juste titre, qu’elle se devait d’améliorer les connaissances qu’elle avait et pour cela elle devait aller voir Claire. Mais Claire lui avait dit d’amener les personnes désireuses de lire la Parole de Dieu chez elle. C’est ce qu’elle ferait en ac-compagnant ces personnes.

Puis elle eut soudainement une idée qui lui survint d’une manière qu’elle ne pou-vait expliquer.

Rendue chez elle, Mireille commença à transformer son salon, dans lequel elle ne recevait pas beaucoup de visiteurs, en une salle où elle ferait de la couture pour ceux et celles qui en auraient besoin; elle lançait un petit atelier de couture à son appartement. Elle se fit un écriteau et le mit sur le bord de sa porte. Travaux de couture.

Quinze jours après avoir mis son écriteau sur le bord de sa porte, elle reçut sa première cliente qui voulait se faire faire une jupe pour une occasion spéciale. Comme elle avait de l’expérience dans le domaine de fabrication de jupes, elle réussit bien à faire la jupe. La cliente, très satisfaite du travail et du prix demandé, lui dit qu’elle avait des amies qui avaient des besoins en couture. Cela ne prit pas beaucoup de temps qu’elle se constitua une clientèle par le bouche-à-oreille.

Avec l’argent qu’elle fit avec son moulin à coudre, elle acheta quelques livres spi-rituels, sous les conseils de Claire, et en fit une petite bibliothèque à la disposition des clientes; elle acheta aussi un crucifix assez grand pour l’accrocher au mur, juste au-dessus de l’endroit où elle cousait. Elle désirait la protection du Tout-Puissant pour sa vie et pour son atelier.

Une nouvelle cliente voulait se faire coudre une robe, et elle vint chez Mireille. Quand elle a vu que la couturière était croyante, elle lui dit:

– Je vais t’amener de la clientèle parmi mes amies qui ont besoin de couture.

– Vous avez une bibliothèque dans cette pièce, est-ce pour nous les clientes?

– Oui, répondit Mireille, vous pouvez emprunter un livre pourvu que vous le remettiez lorsque vous aurez fini de le lire. Et n’oubliez pas de signer votre nom et le titre du livre que vous empruntez, s’il vous plaît.

Cette cliente emprunta Le Royaume caché d’Éloi Leclerc, un titre de livre qui ve-nait des connaissances de Claire qui côtoyait des Franciscains séculiers.

– Avez-vous déjà lu, le Royaume caché? demanda la cliente.

– Non, répondit Mireille, je n’ai pas eu le temps encore de le lire. Mais il doit être inté-ressant, car j’ai une amie qui l’a lu et qui m’en a dit le plus grand bien.

– Connaissez-vous le sujet qui est traité? demanda la cliente.

– N’est-ce pas sur le Royaume des Cieux? Il me semble que le Royaume caché devrait traiter de ce thème, répondit Mireille qui n’avait que lu le mot Royaume dans l’Évangile. Mireille voyait son petit commerce de couture à domicile comme un léger apport à son aide sociale. Elle ne se doutait pas du tout qu’il aurait autant de succès et qu’il lui ferait laisser l’aide sociale. Elle alla au bureau d’Aide Sociale et demanda à son agente si elle pouvait garder ses prestations d’aide sociale pour une courte période pour plus de sécurité. Advenant qu’elle gagne plus que ne le permettait la loi, elle rembourserait le surplus à l’Aide Sociale. Comme son agente le lui permit, elle la remercia deux fois plu-tôt qu’une. Elle quittait le Bureau d’Aide Sociale un peu plus rassurée pour lancer son petit commerce de couture.

Elle en parla à Claire qui n’avait rien à faire, si elle voulait aider à lancer le petit commerce, elle pourrait recevoir une partie des profits réalisés après avoir payé les dé-penses courantes. Il suffirait qu’elles s’entendent toutes les deux et ce serait le succès assuré!

Claire accepta tout de suite l’offre, ne serait-ce que pour aider une amie à lancer une petite compagnie, ce que Claire n’avait jamais accompli durant sa vie d’aide-comptable. Être de celles qui lancent une compagnie, un rêve qu’elle n’avait jamais réa-lisé, mais qui devenait réalisable tout à coup, grâce à la débrouillardise d’une ex-employée qui deviendrait cheffe d’une petite entreprise de couture.

Mireille, avec la sagesse chrétienne déjà reçue, doublée de son expérience de cou-turière pour une grosse manufacture, voulut considérer Claire comme une fondatrice et non comme une employée, alors elle lui offrit tous les avantages d’être fondatrice; ce-pendant il fallait travailler fort pour percer dans ce domaine, et Claire était prête à cela.

Mireille aurait pu n’offrir à Claire qu’un petit salaire pour arrondir ses fins de mois, mais elle désirait obtenir plus de Claire: quelqu’un qui se connaissait dans les af-faires selon les papiers qu’il fallait remplir pour être une entreprise légale. De plus, Claire était son amie.

Claire de son côté, ne voulait pas être considérée dans la compagnie naissante comme une administratrice, mais aussi comme une travailleuse du textile; elle voulait avoir l’expérience de toucher au fil de la couturière pour se rompre à toutes les phases de la confection d’un vêtement.

Entre les deux il y avait plus qu’une bonne entente pour démarrer une compagnie dans un petit appartement de 4 ½ pièces, il y avait une vision de ce qu’est une compa-gnie qui respecte tous ceux qui, de près ou de loin, font des affaires avec elle.

leur espérance s'appuie sur qui peut les sauver. » Si 34, 13