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B. Les procédures de mise sous surveillance

5. Les mesures ordonnées par le tribunal

a) Les mesures concernées

Sur proposition du ministère public, le tribunal des mesures de contrainte553 peut ordonner la surveillance des relations bancaires554 et le prélèvement d’échantillons d’ADN lors d’enquêtes de grande envergure555.

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b) La procédure

Pour ce qui est des prélèvements d’ADN lors d’enquêtes de grande envergure, le message indique que cette mesure est subordonnée à l’autorisation préalable du tribunal des mesures de contrainte556. Le texte de la loi parle toutefois d’ordonner à la demande du ministère public557. Une procédure différente de celle prévue pour la surveillance de la correspondance trouve une justification dans le fait qu’il y a rarement un caractère d’urgence et que ce genre de prélèvement pose des problèmes importants de respect de la proportionnalité. Le fait que ce soit le tribunal des mesures de contrainte qui l’ordonne a cependant l’effet regrettable de soustraire la décision à un recours au sens de l’art. 393 CPP et d’obliger le prévenu à déposer un recours en matière pénale devant le Tribunal fédéral558.

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Quant à la surveillance des relations bancaires, le texte français du CPP prévoit que le tribunal des mesures de contrainte peut autoriser une telle surveillance, avant de préciser qu’il donne à la banque des directives écrites sur le type d’informations et de documents à fournir559. Les versions allemande et italienne

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553

Le tribunal des mesures de contrainte a également des compétences dans d’autres domaines, notamment en matière de détention provisoire et de détention de sûreté (art. 18 CPP) : KUHN, Procédure pénale unifiée, pp 47-49. 

554

Art. 284 CPP. L’avant-projet donnait la compétence au ministère public d’ordonner seul une surveillance des relations bancaires d’une durée d’un mois (art. 318ss AP-CPP). Sans explication, le projet a changé. 

555

Art. 256 CPP. 

556

Message du CF relatif à l'unification de la procédure pénale, p. 1224. 

557

Art. 256 CPP. 

558

Voir à ce sujet le chapitre G. Le contrôle a posteriori, p. 189 ci-dessous. 

559

de l’art. 284 CPP parlent d’ordonner560. Le message souligne que le tribunal des mesures de contrainte ne se contente pas d’ordonner la mesure, mais qu’il en définit aussi les modalités d’exécution en se fondant sur la requête du ministère public561. La surveillance des relations bancaires ne débuterait alors qu’avec la décision du tribunal. Aucun délai n’est imparti au tribunal des mesures de contrainte pour statuer sur la proposition du ministère public562.

L’existence d’un régime d’autorisation différent en matière de surveillance des relations bancaires s’explique, pour le Conseil fédéral, par le fait qu’elle ne doit normalement pas être ordonnée dans l’urgence, les informations et documents visés pouvant aussi être obtenus plus tard, au moyen d’une injonction de dépôt ou d’une mesure de séquestre563. Ce raisonnement est valable uniquement si aucune surveillance en temps réel n’est envisagée, ce qui semble être l’intention des auteurs du projet de loi, puisqu’ils ont pensé seulement à des extraits de comptes ou de dépôts, des contrats ou des lettres564. Le CPP exigerait alors l’autorisation du tribunal des mesures de contrainte pour l’obtention d’extraits de comptes bancaires, contrairement à la pratique en vigueur précédemment, mais laisserait la compétence en matière de perquisition et de séquestre au 374

      

560

En allemand: « Zur Aufklärung von Verbrechen oder Vergehen kann das

Zwangsmassnahmengericht auf Antrag der Staatsanwaltschaft die Überwachung der Beziehungen zwischen einer beschuldigten Person und einer Bank oder einem bankähnlichen Institut anordnen ». En italien: « Per far luce su crimini o delitti, il giudice dei provvedimenti coercitivi può, su richiesta del pubblico ministero, disporre la sorveglianza delle relazioni tra l’imputato e una banca o un istituto analogo ». Les termes « anordnen » et « disporre » figurent égalemment à l’art. 256 CPP et sont traduits en français par ordonner. 

561

Message du CF relatif à l'unification de la procédure pénale, p. 1237. 

562

Contrairement à la surveillance de la correspondance qui prévoit des délais brefs de vingt- quatre heures pour transmettre le dossier et cinq jours pour statuer.

Des délais courts s’imposent vu que la surveillance est déjà en cours. 

563

Message du CF relatif à l'unification de la procédure pénale, p. 1237. Dans le même sens : GOLDSCHMID, Geheime Überwachungsmassnahmen, pp 169-170; WOLTER, Kommentar zu

Art. 269-281 StPO, p. 275. Pour un avis contraire et justifié : RHYNER / STÜSSI, Kommentar zu

Art. 284-285 StPO, p. 485. 

564

Message du CF relatif à l'unification de la procédure pénale, p. 1237. Egalement en faveur d’une surveillance rétroactive et en temps réel : RHYNER / STÜSSI, Kommentar zu Art. 284-285

ministère public dès qu’il ne s’agit plus d’établissements bancaires565. Ceci n’est guère heureux, car la localisation d’un prévenu ou le blocage de fonds à temps serait impossible sur la base de la surveillance des relations bancaires. La surveillance en temps réel devrait alors être régie par les dispositions sur les autres dispositifs techniques de surveillance.

En réalité, il faut admettre que le législateur a perdu de vue que la surveillance des relations bancaires ne concernait pas seulement la remise de documents dont l’examen n’a rien d’urgent, mais également des informations en temps réel permettant de connaître le lieu, le but et le contenu d’une transaction financière (y compris l’utilisation d’une carte de crédit ou de débit)566 voire le lieu, le moment et la manière dont le titulaire du compte contacte la banque567. Il a envisagé une surveillance des relations futures du prévenu avec l’établissement bancaire568, mais pas en temps réel. Le Message du Conseil fédéral fait d’ailleurs expressément référence à la Convention du Conseil de l’Europe relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime et qui vise des techniques spéciales d’enquêtes569.

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Dans ces circonstances, il convient d’appliquer par analogie, et malgré la terminologie utilisée, la procédure appliquée pour la surveillance de la correspondance et retenir que le tribunal des mesures de contrainte autorise la surveillance que le ministère public a ordonnée. Elle devrait être effective dès la décision du ministère public, ce qui correspond à la version française. Un tel raisonnement se justifie également parce que le CPP ne prévoit pas comment le tribunal des mesures de contrainte doit ordonner les mesures qu’il prend à la demande du ministère public, contrairement à la procédure d’autorisation des mesures ordonnées par le ministère public. Les délais impartis au ministère public pour transmettre le dossier et au tribunal des mesures de contrainte pour

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565

Pour une mention du séquestre de documents bancaires et d’une perquisition, ce qui confirme que le séquestre et la perquisition continuent à exister également pour les établissements bancaires : Message du CF relatif à l'unification de la procédure pénale, p. 1221. 

566

De telles mesures sont d’ailleurs régulièrement mises en place pour connaître en temps réel l’utilisation d’une carte de crédit, des mouvements de fonds, etc. 

567

SCHMID, Praxiskommentar, p. 538. 

568

GOLDSCHMID / MAURER / SOLLBERGER, Kommentierte Textausgabe zur StPO, p. 274. 

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statuer, la durée maximale de la surveillance ou encore le sort de découvertes fortuites ne sont pas prévus en matière de surveillance bancaire. Cette lacune doit être comblée par une application par analogie des normes régissant la surveillance de la correspondance570. Comme en matière de surveillance de la correspondance, aucune voie de recours n’est ouverte à ce stade. Un recours ne peut être déposé qu’après la réception par le prévenu de la communication l’informant qu’il a fait l’objet d’une surveillance.

C. Les conditions auxquelles une surveillance peut être

ordonnée