• Aucun résultat trouvé

MESURE DE L’IMPACT DE L’ENVIRONNEMENT REGLEMENTAIRE

L ’ ENVIRONNEMENT REGLEMENTAIRE

4 MESURE DE L’IMPACT DE L’ENVIRONNEMENT REGLEMENTAIRE

4.1 FORMULATION DES HYPOTHESES

L’objectif de ce chapitre est de répondre à la question de recherche suivante : « Toutes choses égales par ailleurs, l’environnement réglementaire du reporting environnemental a-t-il un impact sur le niveau de divulgation environnementale des entreprises ? » Pour ce faire, nous nous proposons de comparer les scores de divulgation environnementale d’entreprises domiciliées dans un pays disposant d’une réglementation ou législation dont l’application s’impose aux entreprises (en l’occurrence la France) aux scores de divulgation d’entreprises

Page | 180 domiciliées dans un pays ayant publié des recommandations émanant d’une structure étatique et destinées à l’ensemble des entreprises, mais dont l’application n’est pas obligatoire (en l’occurrence l’Allemagne). Nous nous proposons aussi de comparer les scores de divulgation environnemental d’entreprises françaises et allemandes aux scores d’entreprises domiciliées dans un pays où les préconisations en matière de divulgations environnementales, lorsqu’elles existent, sont facultatives et spécifiques à certaines entreprises car elles émanent de groupements professionnels (en l’occurrence l’Italie).

Le cadre théorique de la Regulation Theory suggère que la réglementation est souhaitable parce qu’elle conduit les entreprises à divulguer l’information attendue. Cela nous permet de supposer que la réglementation du reporting environnemental a un impact positif direct sur le score de divulgation environnementale des entreprises. Nous pouvons ainsi formuler l’hypothèse suivante :

H1 : Les scores de divulgation environnementale des entreprises soumises à une réglementation stricte sont les plus élevés.

Nous nous attendons donc à ce que, toutes choses égales par ailleurs, les entreprises françaises présentent des scores de divulgations supérieurs à ceux des entreprises allemandes ou italiennes car la France a mis en place une législation qui impose la divulgation d’informations environnementales spécifiques, ce qui n’est pas le cas de l’Allemagne, ni de l’Italie.

Selon le cadre théorique de la Public Policy Pressure, les entreprises publient des informations environnementales sous la pression de leur environnement légal, mais aussi parce qu’elles sont soumises à des pressions d’ordre culturel ou politique. Donc, au-delà des pressions réglementaires, diverses pressions sociales peuvent conduire les entreprises à divulguer sans pour autant être soumises à une réglementation. Il est donc possible que les entreprises publient spontanément les informations qui auraient été exigées par la réglementation parce qu’elles sont socialement utiles, sans être pour autant soumises à aucune exigence réglementaire. Nous formulons donc ainsi notre hypothèse 2 :

H2 : L’information exigée par une réglementation stricte n’est pas spontanément divulguée par les entreprises non réglementées.

Page | 181 Nous nous attendons donc à ce que les entreprises allemandes ou italiennes, qui ne sont soumises à aucune réglementation contraignante, ne divulguent pas certaines informations que les entreprises françaises communiquent dans le seul but de respecter la législation française.

Beyer et al. (2010) relèvent que les divulgations obligatoires et les divulgations volontaires sont complémentaires. Selon Einhorn (2005), il existe une interaction entre les divulgations obligatoires et les divulgations volontaires d’une entreprise : il n’est pas possible de mesurer isolément l’impact d’un type de divulgation. Bagnoli et Watts (2007) complètent cette approche car selon eux, la réglementation des divulgations peut avoir des conséquences fortuites sur les divulgations volontaires. En effet, les dirigeants peuvent être incités à fournir d’autant plus volontairement des divulgations supplémentaires que les exigences en matière de divulgations obligatoires sont fortes. En ce qui concerne les divulgations environnementales, nous pouvons supposer que, au-delà d’un effet direct, la réglementation peut également avoir un effet induit, qui conduit les entreprises à divulguer volontairement au-delà de ce qui est exigé. Nous formulons ainsi notre hypothèse 3 :

H3 : Les entreprises soumises à une réglementation stricte de leur reporting environnemental publient plus d’informations environnementales volontaires que les entreprises non réglementées.

Nous nous attendons donc à ce que, toutes choses égales par ailleurs, les entreprises françaises divulguent sur une base volontaire plus d’informations facultatives que les entreprises allemandes ou italiennes.

Au-delà des réglementations ou législations, il existe des recommandations faites aux entreprises concernant la publication de leurs informations environnementales. Ces recommandations peuvent émaner de l’Etat ou d’organisations professionnelles. Dans la mesure où les recommandations qui émanent de l’Etat, autorité nationale, sont homogènes dans leur contenu et s’adressent à de nombreuses entreprises (voire à toutes les entreprises), ces recommandations devraient être mieux suivies que les préconisations qui émanent d’organisations professionnelles. Ces préconisations sont en effet hétérogènes car elles ne sont spécifiques qu’aux entreprises qui relèvent de l’organisation qui les a établies. Elles ne sont, en outre, pas directement supportées par l’Etat. Ceci nous conduit à formuler notre hypothèse 4 :

Page | 182 H4 : Les recommandations gouvernementales ont un impact plus important sur le niveau de divulgation environnementale des entreprises que les préconisations qui émanent de structures professionnelles.

Nous nous attendons donc à ce que, toutes choses égales par ailleurs, les entreprises allemandes présentent des scores de divulgations supérieurs à ceux des entreprises italiennes car en Allemagne, même si elles ne sont pas obligatoires, les divulgations environnementales sont uniformes (les recommandations du Code de Développement Durable s’adressent à toutes les entreprises). Elles sont en outre recommandées par une structure étatique, le Conseil Allemand pour le Développement Durable. Ce n’est pas le cas de l’Italie où les préconisations en matière de divulgations environnementales ne sont ni systématiques, ni homogènes.

Pour vérifier la validité de ces hypothèses nous nous appuyons sur le modèle économétrique présenté dans le paragraphe suivant.

4.2 LE MODELE TOBIT

L’objectif de notre travail est d’évaluer l’impact de plusieurs facteurs sur le score de divulgation environnementale des entreprises.

Le score de divulgation environnementale [variable SCORE] est la variable dépendante. La réglementation [variable REG], les recommandations gouvernementales [variable REC] et les préconisations professionnelles [variable PREC] sont les variables d’intérêt. Elles correspondent respectivement aux trois environnements réglementaires identifiés, donc aux trois pays : France, Allemagne et Italie.

SCORE = α0 REG + α1 REC + α2 PREC + Σk βk Controlk + effets fixes + ε

L’estimation de ce modèle pose un problème majeur qui vient de ce que, l’échantillon ayant été sélectionné aléatoirement, plusieurs entreprises présentent des scores de divulgation parfaitement nuls. La Figure 1 illustre cette spécificité. Elle présente le nuage de points des scores Globaux de divulgation environnementale.

Page | 183

FIGURE 1 – NUAGE DE POINTS REPRESENTANT LES SCORES GLOBAUX DE DIVULGATI ON ENVIRONNEMENTALE DES ENTREPRISES EUROPEENNES ANALYSEES

L’analyse de ce nuage de points montre que la méthode des moindres carrés ordinaire (MCO) n’est pas adéquate. D’une part, le nuage de point serait mal décrit car il comporte deux parties distinctes. D’autre part, l’hypothèse de loi continue généralement faite sur les perturbations ne serait pas adaptée dans ce cas puisque la valeur nulle du score de divulgation environnementale est observée de nombreuses fois dans l’échantillon et a donc une probabilité d’apparition nettement différente de zéro.

Nous avons donc recours à un modèle de régression censuré : le modèle Tobit qui tient compte de ce que le domaine de définition de la variable dépendante est contraint sous une forme ou une autre. Ce modèle a été développé par James Tobin (1958) qui souhaitait modéliser la relation entre le revenu des ménages et les dépenses en biens durables. Il disposait pour cela d’un échantillon de N = 735 consommateurs tiré du Survey of Consumer Finances. Une des caractéristiques essentielles des données est que le montant des dépenses de consommation est nul pour plusieurs observations, plusieurs ménages n’ayant pas acheté de biens durables sur la période. Pour ces individus, on dispose ainsi d’observations sur le

0 20 40 60 80 100 120 140 160

0 20 40 60 80 100 120 140

Score global

Entreprises

Score global de divulgation environnementale