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Maturation de l’architecture cellulaire

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CHAPITRE II : Situations physiologiques permettant d’étudier le lien

C. Maturation de l’architecture cellulaire

Durant ces processus qui permettent d’augmenter la taille du cœur, la morphologie et la physiologie des cellules musculaires cardiaques sont modifiées de façon importante. Les cardiomyocytes néonataux, dont les disques intercalaires ne sont pas encore bien distinguables, ne sont pas très bien polarisés. Ces cellules subissent un allongement progressif dès les premiers jours de vie postnatale du sujet (Ehler & Perriard, 2000 ; Hirschy et al., 2006) qui est concomitant à une réorganisation longitudinale des myofibrilles, permettant ainsi le passage des cardiomyocytes fœtaux plus ou moins polygonaux aux cardiomyocytes allongés observés chez l’adulte (Hirschy et al., 2006). Si la forme des cardiomyocytes est très changeante au cours du développement postnatal, l’organisation interne de ces cellules subit également de nombreuses évolutions. De manière générale, l’architecture présentée par les cardiomyocytes néonataux est très différente de l’architecture définitive du cardiomyocyte adulte. L’organisation du cytosquelette est beaucoup plus lâche pendant les premiers jours de vie. La densité des microtubules, qui est en quelque sorte un index de l’organisation cytoarchitecturale, augmente jusqu’à 9 jours après la naissance (Cartwright & Goldstein, 1985). Les microtubules sont pourtant bien présents à la naissance, mais seul le réseau microtubulaire longitudinal est bien développé. En comparaison avec la cellule adulte mature,

-Introduction-

les cardiomyocytes néonataux présentent en effet très peu des microtubules orientés transversalement (Li et al., 1997a).

Les microtubules ne sont bien évidemment pas les seuls constituants du cytosquelette qui voient leur organisation se modifier au cours du développement postnatal ; il a également été montré que l’α-actinin, la vinculine et la desmine entre autres ont un comportement très changeant durant cette période (Li et al., 1997a). Il est d’ailleurs suggéré que les modifications d’expression des protéines de structure pourraient jouer un rôle essentiel dans l’arrêt de la phase hyperplasique observée durant la période périnatale. L’arrêt de la cytocinèse, conduisant à la formation de myocytes cardiaques binucléés, pourrait être la conséquence de l’augmentation de la densité des myofibrilles et des structures associées. Ces myofibrilles ne pourraient alors pas être totalement démantelées au cours de la prophase et empêcheraient la division cellulaire par l’anneau contractile actine-myosine (Li et al., 1997a ; Li et al., 1997 b).

Etant donné que ces protéines du cytosquelette, qui voient leur organisation évoluée au cours du développement postnatal, interagissent avec les organelles, il est fort probable que l’arrangement spatial des constituants cellulaires soit également changeant pendant la maturation de la cellule musculaire cardiaque. Il a été montré par microscopie confocale (Tiivel et al., 2000) que la répartition mitochondriale aléatoire observée à la naissance, qui conduit à la formation d’amas mitochondriaux, est effectivement très rapidement réorganisée puisqu’après une semaine de développement, ces organites forment un réseau presque

similaire à celui de l’adulte. L’augmentation du Km des mitochondries de fibres

perméabilisées pour l’ADP au cours du développement postnatal précoce est révélatrice de la complexification de l’environnement mitochondrial et donc du degré d’organisation de la cellule cardiaque. Ceci signifierait en effet que la diffusion de l’ADP est progressivement réduite en raison d’un réarrangement structural important qui rendrait les mitochondries moins accessibles pour l’ADP exogène.

Le réarrangement structural subit par le cardiomyocyte au cours de la période postnatale est sans doute une conséquence directe de la complexification de l’organisation interne de la cellule musculaire cardiaque. Durant cette période, la cellule est la cible de nombreuses modifications physiologiques conduisant entre autres à l’augmentation de la masse mitochondriale (Tiivel et al., 2000) et de la densité des myofibrilles (Smith & Page,

1977 ; Lim et al., 1983) qui permettent l’accroissement de la force développée par les fibres cardiaques (Reiser et al., 1994 ; Siedner et al., 2003). Les mitochondries et les myofilaments étant les principaux constituants cytoplasmiques des cardiomyocytes, il en résulte des adaptations architecturales évidentes.

Il a également été montré la différenciation postnatale du RS. Chez le fœtus et à la naissance, le RS est immature et ne participe que faiblement au mécanisme de relaxation (Fisher et al., 1992) et d’excitation-contraction, si bien que la contraction est principalement due au flux calcique transarcolemmal via DHPR (Chin et al., 1990 ; Tanaka et al., 1998 ; Liu

et al., 2002). De la même façon, la mise en place des tubules transverses qui permettent le

couplage fonctionnel des DHPR et des RyR, se fait tardivement et pourrait prendre entre deux et trois semaines chez le rat (Ziman et al., 2009). La maturation de ces structures, que sont le RS et les tubules transverses, a probablement des conséquences importantes sur l’organisation intracellulaire du cardiomyocyte au cours de la période périnatale.

Il apparaît évident que le cardiomyocyte néonatal subit des processus de maturation importants qui ont des répercussions sur l’architecture même de cette cellule. Si un lien existe entre cette architecture cellulaire et les transferts énergétiques, notamment la canalisation directe des nucléotides adényliques entre les mitochondries et les ATPases, il est probable que ce lien puisse être mis en évidence par une étude simultanée de la maturation architecturale de la cellule cardiaque et de l’efficacité des transferts énergétiques.

II. La dynamique mitochondriale

L’hétérogénéité de la morphologie mitochondriale est connue depuis très longtemps ; le nom même de mitochondrie, évoqué la première fois par Benda en 1898, prend son origine dans la forme changeante de l’organite ; la mitochondrie peut en effet être observée sous forme de fil (mitos en grec) ou de grain (chondron en grec). Ceci provient du fait que cette organelle subit des processus de fusion (fusion de plusieurs mitochondries en une seule) et de fission (division d’une mitochondrie en plusieurs) qui modèlent en permanence le réseau mitochondrial et gouvernent la morphologie de cette organelle (pour revue voir Liesa et al., 2009 ; Jazbutyte, 2010 ; Ong & Hausenloy, 2010) (Figure 24). Si les phénomènes régissant la

-Introduction-

Figure 24 : La dynamique mitochondriale

Les mitochondries sont modelées par des mécanismes de fission et de fusion. D’après

morphologie mitochondriale ont quelque peu été laissés-pour-compte au détriment de l’étude de la fonction biochimique de la mitochondrie dans la première moitié du 20ème siècle, ils suscitent un réel intérêt depuis les années 1970 durant lesquelles les premiers phénomènes de fusion ont été décrits (Kimberg & Loeb, 1972 ; Wakabayashi & Green, 1977 ; Wakabayashi

et al., 1975). Les connaissances mécanistiques de la dynamique mitochondriale se sont depuis

bien étoffées et les principales protéines impliquées dans ces processus sont aujourd’hui bien identifiées.

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