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61- Le caractère matériel du lien devant unir accessoire et principal pour que l’accession se

déclenche est ici en question. L’analyse du jeu de l’accession au sein des régimes matrimoniaux permet de se convaincre que l’éviction du propriétaire de l’accessoire peut être commandée en dehors de toute attache matérielle. Cependant, l’existence d’une disposition spécifique en cette matière pourrait justifier de ne voir là qu’une exception voulue par le législateur, dictée par la communauté d’intérêts unissant les époux et comme telle, non susceptible d’application extensive (§ I). En réalité, en dehors même des régimes matrimoniaux, il existe d’autres hypothèses de déclenchement de l’accession hors de toute union matérielle. Lorsqu’un bien de nature incorporelle est en cause, l’union matérielle est évidemment exclue, mais ce n’est pas à dire que le jeu de l’accession le soit pour autant (§ II).

§

I

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L

ACCESSION ET LES REGIMES MATRIMONIAUX

62- Le 18 octobre 19461, le Tribunal civil de Limoges était appelé à statuer sur la nature juridique d’un cheptel acquis à l’aide de deniers communs mais rattaché par le mari à un domaine rural appartenant en propre à sa femme. Cette dernière soutenait lors du divorce que le cheptel, accessoire à l’exploitation, lui appartenait en propre par application des principes gouvernant l’accession. Le tribunal rejeta l’argument et estima que l’accession ne pouvait s’être produite dès lors que le cheptel restait un bien autonome, distinct du domaine.

Le 14 juin 1994, la Cour d’appel de Rouen, statuant sur renvoi et s’inclinant2, estima dans une affaire similaire que constituait un bien propre, par application de l’article 1406 du Code civil, le cheptel mort ou vif acquis au cours du mariage et affecté au service d’une exploitation personnelle à l’un des époux.

Dans le demi siècle qui sépare ces deux décisions contradictoires est intervenue la réforme des régimes matrimoniaux opérée par la loi du 13 juillet 1965. Le nouvel article 1406 du Code civil qui en est issu énonce désormais que « forment des propres, sauf récompense s’il y a lieu, les biens

acquis à titre d’accessoires d’un bien propre ainsi que les valeurs nouvelles et autres accroissements se rattachant à des valeurs mobilières propres ». Visant à résoudre un certain

nombre de difficultés ayant divisé doctrine et jurisprudence au sujet de la nature des plus-values,

des revenus ou des droits accessoires attachés à un bien propre par le recours à l’idée d’accroissement, cette disposition a, dans le même temps, modifié le fonctionnement de l’accession proprement dite au sein des régimes communautaires. Alors qu’avant 1965 les tribunaux, après avoir conclu à l’applicabilité des règles de l’accession entre époux et notamment entre biens propres et biens communs, s’en tenaient à une application traditionnelle des principes en exigeant que les choses s’agrègent matériellement l’une à l’autre, le nouvel article 1406 autorise une compréhension beaucoup plus souple de la nature du lien devant unir le principal à l’accessoire afin que le propriétaire du premier puisse prétendre évincer le propriétaire du second. Il suffit aujourd’hui que le bien ait été acquis « à titre d’accessoire » d’un propre pour que l’accession se produise, sans qu’aucune union matérielle ne semble requise. Avant cependant que d’envisager les bouleversements que cette disposition apporte au fonctionnement traditionnel de l’accession dans cette matière (B), il faut s’interroger d’abord sur le point de savoir si l’article 1406 participe véritablement du mécanisme de l’accession (A).

A

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PARTICIPATION DE L

ARTICLE

1406

AU MECANISME DE L

ACCESSION

63- On ne peut parler à juste titre de jeu de l’accession qu’à condition que le conflit né de la

réunion de deux biens différemment appropriés se résolve par l’éviction du propriétaire de celui des biens qui pourra être qualifié d’accessoire par le propriétaire du bien faisant figure de principal. Faute d’une telle « expropriation »3, il ne saurait y avoir d’accession, laquelle ne saurait sans erreur être confondue avec les autres hypothèses où le droit a recours à la maxime accessorium sequitur

principale4. Dès lors, l’article 1406 du Code civil ne peut être légitimement rattaché à la théorie de l’accession qu’à condition qu’il ait pour effet d’évincer un propriétaire (I). Si un tel résultat peut être constaté, il convient alors de se pencher sur la spécificité de ce texte quant à la nature du lien qu’il requiert entre les biens accessoire et principal (II). Il est en effet nécessaire que cette union provoque un conflit suffisamment grave entre les propriétaires des deux biens pour que le droit, par la technique de l’accession, accepte d’en sacrifier un.

2 JCP 1995, I, 3821 n° 15 obs. Ph. Simler.

3 L’expression est due à E. Acollas (« Manuel de droit civil. Commentaire philosophique et critique du Code

Napoléon », T. I, 2e éd., Paris 1874 p. 589 : « Le propriétaire des matériaux ne peut réclamer qu’une

indemnité ; on l’exproprie pour cause d’utilité publique et privée ». Adde. J. Brissé Saint Macary, « De l’accession artificielle immobilière. Essai d’un fondement juridique rationnel », thèse Bordeaux 1929 p. 35)

et a été reprise par le doyen J. Carbonnier (J. Carbonnier, « Droit civil », T. III, « Les biens », PUF 2000 n° 217 c) in fine). Si elle caractérise bien la situation du propriétaire de l’accessoire dépouillé de son droit en dehors de toute manifestation de volonté de sa part, elle ne saurait avoir rang d’explication technique. Outre que l’expropriation ne se conçoit qu’opérée par la puissance publique, l’indemnité qu’elle appelle est sans rapport avec celle versée en matière d’accession. L’indemnité d’expropriation vise à réparer l’intégralité du préjudice subi par le propriétaire, ce à quoi ne prétend nullement l’indemnité d’accession (infra n° 430 et suiv.).

I

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QUANT A SES EFFETS

:

L

EVICTION D

UN PROPRIETAIRE

64- L’article 1406 du Code civil déclare propre le bien acquis pendant la communauté à

titre d’accessoire d’un bien propre. Or, en l’absence de cette disposition dans le Code, le bien aurait fait partie de la masse commune par application de l’article 1401 en raison de sa nature d’acquêt. A première vue, il semble donc que ce soit la communauté qui soit « expropriée » par l’un des époux. Cette analyse doit cependant être immédiatement rejetée : la communauté conjugale, bien que la thèse ait été soutenue par un éminent auteur5, n’a pas la personnalité morale, ne peut donc être titulaire d’un patrimoine ni a fortiori privée de la propriété d’un bien. Puisque seuls les époux communs en biens sont propriétaires, c’est à leur égard qu’il faut rechercher une éventuelle éviction.

Or l’application de l’article 1406 ne produira pas toujours un tel effet. Une distinction fondamentale entre propriété et pouvoir gouverne la matière des régimes matrimoniaux, si bien que la propriété d’une chose ne confère pas toujours à son titulaire un pouvoir exclusif sur celle-ci. Le jeu de l’article 1406 se produit ainsi parfois au plan des seuls pouvoirs sur les biens sans que leur propriété soit affectée. On peut en trouver un exemple relativement à la catégorie des biens réservés de la femme mariée, catégorie supprimée par la loi du 23 décembre 1985. Dans une affaire jugée le 4 mai 19826, la Chambre commerciale a eu à connaître de la nature d’une licence de quatrième catégorie, acquise pendant le mariage par le mari et affectée à l’exploitation d’un fonds de commerce de débit de boissons ayant la nature de bien réservé. La Cour de cassation approuve les juges d’appel d’avoir retenu le caractère de bien réservé de la licence, au motif que celle-ci avait été affectée à l’exploitation d’un fonds de commerce lui-même soumis à la gestion exclusive de l’épouse. Comme le souligne le commentateur de la décision, « il s’agit seulement de faire glisser un bien d’un

compartiment à l’autre (de la communauté « ordinaire » à la communauté « réservée »). La question de propriété n’est donc pas ici en cause, mais seulement les pouvoirs d’administration des époux et l’étendue du gage des créanciers »7. Faute de perte de propriété, il est difficile de parler d’accession en cette occurrence et il faut sans doute y voir plutôt une simple application de la maxime accessorium sequitur principale. D’ailleurs, l’arrêt du 4 mai 1982 ne visait pas expressément l’article 1406 du Code civil, ce qui conforte l’idée qu’il n’y a d’application véritable de ce texte qu’en cas de passage d’un bien de la masse commune à une masse propre. Il est facile de voir alors, lorsqu’un tel transfert se produit, où se situe l’éviction d’un propriétaire caractéristique de l’accession. Si les biens communs ne sont pas la propriété de la communauté, ils appartiennent

5 J. Carbonnier, « Le régime matrimonial, sa nature juridique sous le rapport des notions de société et

d’association », préface J. Bonnecase, thèse Bordeaux 1932.

en revanche conjointement aux deux époux. Ce sont des biens indivis dont la gestion obéit à des règles spécifiques édictées par le régime primaire ainsi que par les articles 1421 et suivants du Code civil. Le jeu de l’article 1406 a pour effet immédiat de faire cesser cette indivision et prive ainsi le conjoint de tout pouvoir de gestion sur le bien ainsi que de toute vocation à en obtenir l’attribution en nature lors de la liquidation du régime. Le copropriétaire, tant que dure l’indivision, est d’abord un propriétaire. Faire passer un bien de la masse commune à la masse propre par application de l’article 1406 revient à faire cesser l’indivision sur ce bien et ainsi à « exproprier » le conjoint. L’article 1406 semble ainsi pouvoir être rattaché sans difficultés à la théorie de l’accession.

65- Il faut pourtant nuancer cette affirmation. L’article 1406 énonce que « forment des propres, sauf récompense s’il y a lieu, les biens acquis à titre d’accessoires d’un bien propre (…) ».

L’hypothèse n’est pas à proprement parler celle où un bien commun est appelé à devenir propre par suite de son union avec un principal qui aurait cette nature, mais celle d’un bien dont il faut, au moment de son acquisition, déterminer la nature propre ou commune. Et si l’application des principes gouvernant la composition des masses propres et communes aurait dû conduire à lui conférer une nature commune dès lors qu’il s’agit d’un acquêt, l’article 1406 apporterait une dérogation en conférant à celui-ci une nature propre. Comme l’écrit G. Goubeaux, « La question se

pose en des termes particuliers dans les régimes matrimoniaux : il ne s’agit pas du conflit entre deux propriétaires, mais de la répartition des biens entre le patrimoine propre et le patrimoine commun. Or l’équilibre entre ces patrimoines est théoriquement assuré par le mécanisme des récompenses. La résistance opposée à la maxime accessorium sequitur principale est donc beaucoup moins grande que lorsqu’il s’agit, par le jeu de cette règle, d’évincer un propriétaire »8. Cette analyse de l’article 1406 revient donc à le rattacher simplement à la maxime accessorium

sequitur principale sans en faire une véritable application du mécanisme l’accession. Il n’y aurait

alors de jeu véritable de l’accession en matière de régimes matrimoniaux qu’à condition qu’un bien ayant fait indubitablement partie de la masse commune change de nature en cours de régime pour devenir propre suite à son union à un bien lui-même propre, ou inversement, ainsi que dans les hypothèses où le bien propre d’un époux devient la propriété de son conjoint pour avoir été réuni à un bien appartenant à ce dernier9. Et il faut convenir que dans ces dernières hypothèses, les tribunaux ne se contentent pas d’une affectation de l’accessoire au service du principal pour le faire changer de masse, comme le permettrait une application extensive de l’article 1406, mais exigent, conformément aux principes traditionnels gouvernant l’accession, une véritable réunion matérielle. Ainsi, en cas d’affectation d’un bien propre d’un époux au service du bien propre de son conjoint, la jurisprudence n’admet pas le jeu de l’accession s’il ne peut être constaté aucune union matérielle.

7 G. Champenois, op. cit. p. 928.

8 G. Goubeaux, « La règle de l’accessoire en droit privé », LGDJ 1969 n° 229 p. 313. 9 Hypothèse qui concernera principalement les régimes séparatistes.

La Cour de cassation a par exemple refusé de considérer qu’un terrain propre à l’épouse, pour avoir été acquis avec déclaration de remploi de deniers propres, puisse devenir propre au mari par le seul fait de son affectation à l’exploitation agricole lui appartenant personnellement10. L’article 1406 n’est pas étendu à cette hypothèse11.

66- Un autre argument peut être développé au soutien de cette analyse, tiré de ce que

l’article 1406 n’a pas été, pour employer le langage du droit international privé, « bilatéralisé » par la jurisprudence. Celle-ci refuse en effet d’appliquer ce texte à l’hypothèse où un bien propre serait acquis à titre d’accessoire d’un bien commun, afin de lui conférer une nature commune. L’hypothèse n’est cependant pas d’école, dès lors qu’un bien peut parfaitement avoir été acquis à la fois avec déclaration de remploi et en vue de servir d’accessoire à un bien principal commun. Dans un arrêt du 18 décembre 199012, la Cour de cassation a dû statuer dans l’affaire suivante. Deux époux avaient acquis pendant le mariage un immeuble contigu à un immeuble appartenant en propre au mari et dans lequel celui-ci exerçait la profession de kinésithérapeute. Par d’importants travaux les deux immeubles avaient été réunis de manière à créer un seul immeuble destiné à recevoir l’activité libérale du mari ainsi qu’un fonds de commerce de thalassothérapie. La cour d’appel, statuant sur les difficultés de liquidation après divorce, avait estimé que l’immeuble était commun, vraisemblablement par application de la maxime majors pars trahit ad se minorem. La Première chambre civile a cassé l’arrêt, estimant, sous le visa de l’article 1406, que « la cour d’appel ne

pouvait, du fait que l’immeuble propre était devenu indivisible d’un immeuble commun, tirer la conséquence qu’il avait perdu son caractère de propre pour devenir un bien de la communauté ; que, d’autre part, elle devait rechercher si ce n’était pas l’immeuble acquis par la communauté qui, accessoire du bien propre, serait devenu un propre (…) ». L’attendu de cassation est assez net :

d’une part l’union matérielle des deux immeubles était ici insuffisante au déclenchement de l’accession13, d’autre part, seul l’immeuble acquis pendant la communauté peut prendre une nature propre du fait de son affectation à un immeuble propre et non l’inverse. Dans le même sens, la Cour de cassation a estimé par un arrêt du 17 décembre 1996 qu’une parcelle de terre propre à l’époux et utilisée pendant le mariage dans le cadre d’une exploitation viticole commune n’était pas devenue commune par application de l’article 140614. Il semble donc aujourd’hui que la règle de l’article

10 Civ. 1re, 4 janvier 1995, JCP 1995, I, 3869 n° 7 obs. Ph. Simler.

11 Il faut en effet souligner ici que la jurisprudence admet que le terrain acquis par la communauté à titre d’accessoire d’une exploitation propre soit lui-même propre par application de l’article 1406 : Civ. 1re, 21 juillet 1980, Gaz. Pal. 1981, 2, p. 450, note D. de la Marnière ; D. 1981, IR p. 88 obs. D. Martin ; Defrénois 1980 art. 32503 n° 117 p. 1551 obs. G. Champenois.

12 Civ. 1re, 18 décembre 1990, Bull. civ. I n° 292 ; D. 1992, jur. p. 37 note R. Le Guidec ; Defrénois 1992 art. 35303 n° 87 p. 847 obs. G. Champenois.

13 Elle l’est d’ailleurs normalement toujours : voir sur cette question infra n° 75 et suiv.

14 Civ. 1re, 17 décembre 1996, D. 1997, jur. p. 547 note R. Le Guidec ; RTD civ. 1998 p. 943 et suiv. obs. F. Zenati. Il faut cependant relativiser la portée d’un tel arrêt puisque le débat s’était cristallisé sur la nature propre ou commune de l’exploitation et non sur le point de savoir si la parcelle propre du mari, intégrée dans

1406 ne doive jouer qu’en faveur du patrimoine propre, la Cour de cassation refusant tout « renversement » du texte15. Ce qui conduit à penser que la Cour de cassation voit dans ce texte une disposition spécifique participant de l’équilibre des masses commune et propres et non une simple application du mécanisme de l’accession, analyse qui aurait conduit à sa « bilatéralisation ».

67- En réalité, l’objection ne doit pas être exagérée. S’il est besoin d’un texte pour préciser

que le bien acquis « à titre d’accessoire d’un bien propre » lui emprunte cette nature, c’est parce que cette disposition est dérogatoire. Le bien aurait dû être commun, par application de l’article 1401 du Code civil. Le rejet d’une propriété indivise au profit d’une propriété exclusive n’est voulue par le législateur que dans le souci d’assurer une maîtrise unifiée du bien principal et de celui qui n’a été acquis que pour lui servir d’accessoire. Il y a donc bien là éviction d’un propriétaire, même s’il ne l’est qu’à titre indivis. Cette éviction trouvant sa justification dans le fait que son bien a été réuni à un autre bien auquel il sert d’accessoire, est caractéristique du mécanisme de l’accession. Quant à la portée restreinte que donne la Cour de cassation à ce texte en s’en tenant à sa lettre même et en refusant de l’étendre à d’autres hypothèses dans le cadre des régimes communautaires, elle ne préjuge pas de son fondement même.

Dès lors, l’article 1406 doit être regardé comme une hypothèse véritable d’accession et il convient alors de se pencher sur les conditions de son déclenchement, celles-ci revêtant une originalité certaine par rapport aux règles traditionnelles de l’accession.

II

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QUANT A SES CONDITIONS

:

LA REUNION DE DEUX BIENS

68- L’article 1406 exige seulement, pour qu’un bien acquis durant la communauté échappe

au régime des acquêts et donc à une propriété commune des époux, qu’il l’ait été à titre d’accessoire d’un bien propre. L’exigence d’une union matérielle, traditionnellement requise pour le déclenchement de l’accession, est abandonnée au profit d’un critère basé sur l’existence d’une volonté d’affectation du bien nouvellement acquis au service d’un bien appartenant personnellement à l’un des époux. D’où il faut estimer qu’il ne peut y avoir acquisition de la qualité de propre pour un bien qui aurait été acquis sans intention originelle d’affectation à un propre16. En décider autrement reviendrait en effet à admettre qu’un bien commun dans un premier temps puisse devenir

l’exploitation commune lui avait emprunté ce caractère. Le fait que les juges aient retenu que l’indivision post communautaire devait une indemnité pour mise à disposition de la parcelle par le mari exclut nécessairement que celle-ci soit devenue commune.

15 En ce sens, P. Leroy, « L’acquêt de communauté supplanté par la règle de l’accessoire », D. 1994, Chr. p. 93 et suiv., spéc. p. 95 col 1 et R. Le Guidec, note sous Civ. 1re, 18 décembre 1990, D. 1992, jur. p. 38 et 39. 16 A. Colomer, « Les régimes matrimoniaux », Litec 2000 n° 695 ; J. Patarin et G. Morin, « La réforme des

régimes matrimoniaux » 4e éd. Defrénois 1977 T. I n° 136. Voir cependant F. Terré et Ph. Simler (« Les

propre par suite de sa simple affectation ultérieure au service d’un bien propre à l’un des époux17, interprétation qui porterait atteinte au principe d’immutabilité des régimes matrimoniaux.

En pratique cependant, il n’est pas certain que l’article 1406 soit véritablement mis en œuvre à condition qu’existe une volonté initiale d’affectation de l’acquêt au service d’un bien principal propre. Le problème se pose en effet le plus souvent à des magistrats qui sont appelés à opérer la qualification juridique des biens des époux lors de la dissolution du régime matrimonial, par divorce ou décès de l’un des conjoints. Pour ce faire, ils n’ont pas tant égard à une volonté initiale des parties dont la preuve est difficile à apporter18 qu’à la consistance des biens au moment où ils statuent. Plus exactement, cette volonté d’affectation sera déduite de l’unité qu’auront fini par former le bien propre et l’acquêt au cours de la vie commune. Il s’agira seulement de constater a

posteriori le contenu et la réalité économique du bien litigieux pour décider si oui ou non le bien

financé à l’aide de deniers communs est néanmoins propre par application de l’article 140619.