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LES DIAGNOSTICS DIFFERENTIELS DES HEMANGIOMES INFANTILES

A- Malformations vasculaires :

Un hémangiome superficiel au stade initial peut simuler un angiome plan (malformation capillaire). L’épaississement du tégument dans les premiers mois de vie permet de redresser le diagnostic en faveur de l’hémangiome [95]. À l’inverse, certaines malformations veineuses ou lymphatiques peuvent être confondues cliniquement avec des hémangiomes profonds sous-cutanés. L’échographie-Doppler est l’examen de première intention pour le diagnostic différentiel. Elle permet de les différencier en mettant en évidence un flux rapide dans les hémangiomes en phase d’extension, absent dans les malformations veineuses ou lymphatiques.

Les malformations vasculaires (MF) correspondent à une dysplasie d'origine embryonnaire développée au dépend du système vasculaire. Les vaisseaux capillaires, veineux, lymphatiques ou artériels peuvent être concernés de façon isolée ou associée [30, 45, 96]. Ces malformations peuvent être purement vasculaires ou combinées et complexes [6].

Elles sont composées de cellules endothéliales matures non prolifératives. Ces lésions sont congénitales, présentes à la naissance ou apparaissent quelques mois ou années après, et ne régressent jamais [18, 60], certaines sont familiales, mais la majorité de ces lésions sont sporadiques [6].

1-Malformations capillaires :

 L‟angiome plan (AP) :

C'est une malformation capillaire et/ou des veinules post-capillaires dermiques, toujours présente à la naissance et persiste toute la vie [5]. Les synonymes sont : nævus flameus, tâche de vin, angiome mature.

L'angiome plan (AP) est une tâche de couleur variable, allant du rose pâle au violet foncé, plane, à contours assez bien définis, froide, sans souffle ni battement, disparaissant plus ou moins complètement à la vitropression.

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Figure 33 : A- Angiome plan de la face et du cou, hypertrophique ; B- Hémangiome

segmentaire V3, simulant un angiome plan; C - Faux angiome plan : c‟est une malformation artérioveineuse. [6]

*Syndromes associés à l‟AP :

Les angiomes plans se rencontrent aussi dans des syndromes plus complexes, tels que :  Syndrome de Sturge-Weber-Krabbe(angiomatose encéphalotrigéminée) (SWK):

[45, 46, 97, 98]

C’est un syndrome neuro-oculo-cutané. Il nécessite un diagnostic précoce et il associe :

•Un angiome plan cutané du visage, touchant au moins le territoire de la branche ophtalmique du nerf trijumeau (V1) avec atteinte de la paupière supérieure ;

•Un angiome méningé de la piemère, du même côté que l’AP facial, qui peut être associé à une épilepsie grave et à un retard psychomoteur ;

•Un glaucome congénital (buphtalmie, mégalocornée), Exophtalmie, Décollement de la rétine et Cécité ;

•Une hémiparésie ou hémiplégie du côté opposé de l'AP réalisant le syndrome hémiparésie - Hémiplégie (H-H).

Un angiome plan ayant ces caractéristiques justifie la réalisation d’une IRM cérébrale. Seule l'atteinte du territoire V1 isolé ou associé au V2 et/ou V3 peut

C

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avoir le risque d'atteinte neuro-oculaire. L’atteinte isolée du territoire des autres branches du nerf trijumeau (V2 et V3) ne s’accompagne pas d’angiomes méningés.

Figure 34 : Syndrome de Sturge-Weber [48].  Syndrome de Klippel-Trenaunay : [5, 45, 46, 99, 100]

C’est le syndrome angio-ostéo-hypertrophique. C’est une association touchant le plus souvent un membre inférieur comportant :

•Un angiome plan ;

•Des varices (anomalie des trajets et du développement des veines) ; pouvant entraîner des thrombophlébites qui se compliquent de façon exceptionnelle d’embolies pulmonaires. Les dysplasies veineuses peuvent également atteindre les organes intra-abdominaux et intrapelviens ; elles peuvent alors donner des rectorragies et des hématuries.

•Une hypertrophie acquise des os et des tissus sous-jacents, avec un risque d’asymétrie de longueur des membres inférieurs. Ceci est expliqué, soit par l'hyperpression veineuse, ou bien l’hyperplasie tissulaire.

•Des anomalies lymphatiques peuvent être associées à type de syndactilie, mégalodactylie , vésicules cutanées et un lymphoedème.

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Figure 35 : Syndrome de Klippel-Trenaunay : angiome plan et

hypertrophie du membre inférieur droit (collection du SUMP HER).

 Syndrome de Parkes-Weber :

En plus des éléments cités pour le syndrome de Klippel Trenaunay, s'ajoute une dysplasie artério-veineuse [45,101]. Le membre est chaud, l'échographie doppler met en évidence des fistules artério-veineuses [21].

L'artériographie précise les zones de shunt. La conduite à tenir est la même que pour le syndrome précédent.

 Syndrome de Cobb :

Il s’agit d’une malformation vasculaire complexe rare. C’est l’assiociation d’un angiome rachidien à un AP du tronc, dont le niveau métamérique correspond à celui de la malformation vasculaire méningo-médullaire. Ce syndrome peut entrainer un risque d’hémorragies méningées et de paraplégie. Les manifestations cliniques liées à l’atteinte médullaire apparaissent chez l’adulte jeune. [102, 103]

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 L’angiome plan s’intègre encore dans les phacomatoses pigmentovasculaires, le

syndrome de Protée ou le syndrome de Bannayan-Riley-Ruvalcaba. C’est un

désordre malformatif congénital et sporadique, consistant en des nappes d’angiomes plans avec des tumeurs cutané et sous-cutanées le plus souvent à type d’hamartomes, des masses lymphangiomateuses et lipomateuses, malformation veineuse, naevus épidermique verruqueux, naevus conjonctif, pachydermie plantaire cérébriforme, tâche café au lait, avec souvent une macrocéphalie, des hypertrophies asymétriques des membres.

 Télangiectasie : [6]

Les télangiectasies sont des petits vaisseaux dermiques, capillaires ou artériolaires dilatés de façon permanente. Ils sont purement cutanés et épargnent toujours les

muqueuses.

La lésion de télangiectasie peut être, linéaire, arborisante, punctiforme ou stellaire. Il existe plusieurs types cliniques :

* Cutis Marmorata Télangiectica Congenita (CMTC) :

Il est caractérisé par un réseau réticulé bleu violet fixe, représentant des veines

dilatées au niveau du derme et du tissu sous-cutané. Les mailles sont irrégulières et fréquemment déprimées (ce réseau s’accentue au froid et en position déclive). Les zones sombres et atrophiques sont fragiles et se parsèment de croûtes, d’ulcérations, en particulier en regard des grosses articulations.

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Figure 36 : CMTC d‟un nourrisson de 9 mois avec hypertrophie du membre inférieur droit (collection du SUMP HER).

* Maladie de Rendu Osler (télangiectasies héréditaires hémorragiques) :

C’est une angiomatose héréditaire de transmission autosomique dominante. Elle se révèle dans la seconde enfance et s’accentue avec l’âge [54]. Les télangiectasies siègent également sur les lèvres, la langue et les extrémités digitales. L’épistaxis répété, signe le plus caractéristique, est la conséquence d’ectasies vasculaires muqueuses [46], avec des malformations artérioveineuses viscérales (pulmonaires, cérébrales) chez un sujet ayant une histoire familiale similaire. Il nécessite parfois des embolisations par ponction directe ou par cathétérisme [5].

* Angiome stellaire : [46]

Ce sont des ectasies vasculaires centrées par un capillaire d’où part une arborescence de télangiectasies radiaires. Les plus volumineux ont parfois un caractère pulsatile. La vitropression fait disparaître les arborescences périphériques alors que le point central persiste.

L’angiome stellaire se recolore ensuite à partir du centre. Ils touchent préférentiellement le visage (lèvres, nez, joues) et les extrémités (doigts). Ils peuvent être un signe d’appel d’une insuffisance hépa-tocellulaire, surtout quand ils sont nombreux, mais ils sont également fréquents chez la femme adulte et l’enfant, sans signification pathologique.

* Angiome serpigineux d‟Hutchinson : [104,105]

C'est une malformation capillaire de morphologie particulière. Il s'agit de télangiectasie linéaire, punctiforme, rugueuse et formant un placard érythémateux à bordure serpigineuse. Ils sont disposés en stries, en rubans, ou en anneaux. Il n'y a pas de blanchiment à la pression. Il apparaît en période prépubertaire et touche le plus souvent les filles. Il se localise habituellement aux membres inférieurs et fesses. Leur image histologique montre des capillaires ectasiques sous-épidermiques, avec de nombreux péricytes et une membrane basale épaisse.

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*La télangiectasie arénoïde :

Elle arbore un aspect en pattes d’araignée, elle peut comporter une zone centrale en relief, papuleuse. Elle siège avec prédilection sur la pommette. En général, elle se manifeste par une lésion unique. Elle est totalement bénigne et peut être effacée par laser. [104]

*Le syndrome des télangiectasies nævoïdes unilatérales :

C’est une entité rare, totalement bénignes [104], de diagnostic clinique qui consiste en une éruption de type télangiectasique unilatérale, disposées en nappes et de topographie très évocatrice suivant les lignes blaschkoïdes (Les lignes de blaschko sont des lignes régulières, le plus souvent hyperpigmentées, ne suivant ni des territoires nerveux, ni les vaisseaux, ni les lymphatiques). Un halo anémique périphérique est généralement associé. L’atteinte cutanée des télangiectasies nævoïdes unilatérales, est présente le plus souvent dans des dermatomes spécifiques en particulier C3, C4 ou trijéminé, donc, ils concernent un segment de membre ou la face latérale du cou [104].

* Ataxie-télangiectasique :

Il s’agit d’une maladie héréditaire rare à transmission autosomique récessive. Elle est caractérisée par la triade clinique suivante : ataxie cérébelleuse, des télangéctasies oculo-cutanées et des infections respiratoires à répétition dues au déficit immunitaire. Les télangiectasies sont de type linéaire, se manifestant souvent vers l’âge de 3 à 5 ans, elles siègent à la conjonctive, aux paupières, aux oreilles, au nez, aux plis des coudes [18, 45, 106] ; alors que l’ataxie apparait progressivement à partir de l’âge de 18 mois. Le pronostic vital est mis en jeu du fait du déficit immunitaire, entrainant la mort de l’enfant avant d’atteindre l’age adulte.

*Angiokératomes :

Il s’agit d’une dilatation vasculaire (papule télangiectasique) dont la surface est

kératosique à la palpation, se vidant en grande partie lors de la vitro-pression. Les angiokératomes sont multiples, de petite taille, punctiformes, pseudopurpuriques et augmentent avec le temps pouvant constituer une éruption profuse, prédominant sur la racine des cuisses et sur les fesses (en caleçon). D’autres atteintes sont également possibles : le

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tronc, les doigts, le scrotum, la muqueuse orale et les conjonctives. Ils apparaissent pendant l’enfance ou l’adolescence mais ne sont pas les premiers signes cliniques [107]. La taille variable et leur topographie permet de distinguer plusieurs types cliniques : [104]

Figure 37 : Angiokératome de la jambe [104].

2-Malformations veineuses :

Elles sont les plus fréquentes des malformations vasculaires.

Ces malformations sont soit localisées ; affectant les tissus cutané, sous-cutané, musculaire, synovial, osseux ; soit diffuses. L’extension visible n’est pas corrélée à l’extension en profondeur. [54, 108, 109]

Des erreurs de diagnostic, par confusion avec le syndrome de Kasabach-Merritt (SKM), mènent à des prises en charge thérapeutiques inadaptées.

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Figure 39 : Malformation veineuse labiale inférieure [109].

 Le syndrome de Bean ou Blue-Rubber-Bleb-Nevus : [110, 111, 112, 113] C’est une malformation veineuse diffuse et complexe ; sporadique ou héréditaire (autosomique dominant). Il associe des éléments veineux papuleux, souvent bleu sombre, mous, plus ou moins dépressibles à la pression cutanée, parfois hyperkératosiques, des taches ou nappes de malformations capillaro-veineuses ou veino-lymphatiques ; des nodules particuliers, mous, compressibles, de la même couleur que la peau normale "en tétine de caoutchouc", d'où le nom de ce syndrome.

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3-Malformations lymphatique : *Les MLKS macrokystiques :

Elles se présentent classiquement comme des masses sous-cutanées fermes ou dépressibles, rondes ou lobulées, de plusieurs centimètres, sous une peau d'aspect normal ou parfois rose-lilas et indolores.

* Les MLKS microkystiques : [44,114]

Les MLKS microkystiques se composent de vésicules translucides ou hémorragiques millimétriques, dispersées ou regroupées sur une peau en apparence normale ou sur une plaque ferme, appelées lymphangiectasies.

Figure 41 : Malformation lymphatique microkystique cutanée (lymphangiectasies)[44]. *Les MLKS mixtes : [114]

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Figure 42 : malformation lymphatique mixte du pied droit [114]. 4- Malformations artério veineuses

Ce sont les malformations vasculaires superficielles les plus agressives, et aussi les plus rares.

Elles ont une présentation polymorphe. Il s’agit initialement d’une simple tache rouge ou violacée, plane, simulant un angiome plan mais plus chaude, extensive et battante, pouvant être kératosique (aspect « kaposiforme»), évoluant vers une tuméfaction ou une déformation localisée. [44, 46]

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5-Syndrome malformation capillaire-malformation artérioveineuse (MC-MAV) :

Il correspond à une malformation diffuse et disséminée, récemment découverte. Il est lié à des mutations hétérozygotes des gènes RASA1 ou EPHB4, dont plus d’une centaine de mutations différentes ont été identifiées à ce jour, comme les mutations du gène EPHB4. [115]

Figure 44 : Malformation capillaire gauche avec petite télangiectasie et un halo

anémique périphérique [115]. B-Hémangiomes congénitaux :

Ce sont des tumeurs vasculaires rares, une entité distincte des hémangiomes infantiles avec des liens physiopathologiques. Ils se développent in utéro, le plus souvent au 3éme trimestre, ils conditionnent le mode d’accouchement et ils atteignent leur croissance maximale dès la naissance.

Certains Hémangiomes Congénitaux présentent des critères proches des malformations vasculaires, suggérant un lien entre phénomènes prolifératifs et malformatifs à l’origine de ces lésions [116].

Leur dépistage est anténatal fait lors d’une échographie de suivi de grossesse. Aucun

facteur favorisant n'est retrouvé et le sex-ratio est équilibré. Le diagnostic d'hémangiome congénital est dans la très grande majorité des cas clinique. Il s'agit de lésions toujours très bien délimitées, non pulsatiles [116], restreintes au tissu sous-cutané donc mobiles par rapport au plan profond [44]. Il y a trois formes, au pronostic bien différent, désignées par trois acronymes en langue anglaise :

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* Les RICH (rapidly involuting congenital hemangioma) :

Ils se présentent sous forme d’une tumeur massive saillante blanc bleuté, ou pâle et cireuse, ou marquée de télangiectasies grossières ou encore parsemée de nodules rouges lisses [6]. Ils sont chauds, uniques, de couleur violette, avec halo plus clair rosé ou bleuté de vasoconstriction et souvent avec une dépression, une ulcération ou une cicatrice centrale linéaire. Ils se développent sur les membres, près des articulations ou de la région péri-auriculaire. Ils ne subissent pas de poussées postnatales et peuvent entrainer une lipoatrophie associée à un excès cutané après régression.

Leur involution ne nécessite souvent pas de traitement. Elle est plus rapide que celle des hémangiomes infantiles, allant de 6 à 14 mois en moyenne. Certains cas cependant sont excisés en période néonatale : ceux dont le siège et la base d’implantation s’y prêtent sans problèmes de fermeture de la plaie chirurgicale [6]. Parfois, c’est une exérèse de principe s’il existe un risque hémorragique (la zone de nécrose centrale linéaire peut, si elle est profonde et située en regard de larges vaisseaux, représenter un risque d’hémorragie) [6].

Figure 45 : Hémangiome congénital de type RICH (collection du SUMPR). * Les NICH (non involuting congenital hemangioma) :

Contrairement à l’hémangiome infantile, les NICH n’ont pas de prédominance féminine. Ils se présentent sous la forme d’une plaque moins en relief, chaude, bleutée, télangiectasique, ronde ou ovale. Ils rappellent un hémangiome infantile en

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régression [6], mais souvent entourés d’un halo achromique caractéristique. Ils siègent préférentiellement au niveau de la tête, du tronc et des zones proéminentes de genou et du coude.

Le NICH persiste et peut s’aggraver légèrement à la puberté, s’entourant de drainages veineux plus marqués et inesthétiques. La chirurgie en est le seul traitement, précédée d’embolisation aux particules car c’est une chirurgie assez hémorragique. [6]

Figure 46 : hémangiome congénital de type NICH.

* le PICH (Partially involuting congenital hemangioma) :

Il n'involue que partiellement, laissant une lésion résiduelle évocatrice de NICH. Le RICH et le PICH sont des tumeurs saillantes parfois très volumineuses à la naissance, tandis que le NICH est en général plane et plus discrète. [44]

Le polymorphisme clinique évoque des formes de chevauchement RICH/NICH. [116]

Dans une étude rétrospective de E. Deveza et al. à propos de dix cas réalisée entre 2008 et 2014 au centre hospitalier universitaire (CHU) de Besançon, un hémangiome congénital avait été classé en PICH devant une régression partielle, 2 RICH étaient en cours d’involution à 10 et 15 mois, un autre avait régressé en 7 jours. [116]

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