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ASPECTS CLINIQUES DES HEMANGIOMES INFANTILES

D- Formes associées :

Certains hémangiomes doivent attirer l'attention sur la possibilité d'anomalies du développement sous-jacentes qui peuvent toucher divers organes. Les raisons en sont inconnues : on évoque une anomalie d’un champ de développement morphologique, par altération d’un ou plusieurs gènes régulateurs.

* Hémangiomatose miliaire :

C’est une situation rare caractérisée par de petits hémangiomes qui sont soit peu

nombreux, soit au contraire profus, touchant l’ensemble des téguments. Ils peuvent être associés à des hémangiomes viscéraux, essentiellement hépatiques [46]. Des localisations viscérales plus exceptionnelles ont été rapportées, poumons, rate, cœur et pancréas [6]. De rares cas d’hémangiome hépatique étendu peuvent être associés à une hypothyroïdie

acquise sévère qu’il faut dépister et traiter. Celle-ci est due à une augmentation de l’activité iodothyronine désiodinase et/ou une sécrétion d’un facteur TSHlike, inactivant les hormones thyroïdiennes. L’hypothyroïdie régresse avec l’involution de l’hémangiome hépatique [56, 66].

* Hémangiome “en barbe” :

Intéressant le bas du visage, la lèvre inférieure et le cou. Une localisation laryngée doit être recherchée en urgence (fibroscopie) car il existe un risque d’asphyxie [39].

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Figure 26 : Hémangiome en barbe [71].

* Malformations vasculaires :

Elles peuvent être associées à des hémangiomes infantiles [72]. Une malformation

capillaire ou une cutis marmorata telangiectica peuvent coexister dans un même territoire ou à distance l’un de l’autre. Il s’agit d’une association ou d’une coïncidence qui est rare, mais possible.

Il existe 2 syndromes majeurs qui peuvent être associés aux HI :

* Syndrome PHACES :

L’acronyme anglais PHACES proposé par Frieden et al. en 1996, reprend les anomalies de la fosse postérieure (P), l’hémangiome facial (H), des anomalies artérielles intra- et extracrâniennes, la coarctation aortique (A) et des anomalies cardiaques (C) congénitales et des anomalies oculaires (eye) (E) ; s’y ajoute le S d’anomalies Sternales et ventrales rapprochées ensuite. [49]

IL concernerait 20 % des nourrissons ayant un hémangiome infantile segmentaire facial et 70% des enfants souffrant du syndrome PHACES ne présentent qu’une seule atteinte extracutanée [49, 56].

Les nouveau-nés atteints de ce syndrome sont le plus souvent neurologiquement asymptomatiques ; Drolet et coll. rapportent 5 cas d’ischémie artérielle cérébrale aigue symptomatique avec séquelles neurologiques advenues entre 3 et 6 semaines de vie chez 4 enfants, et à 4 mois chez le 5ème enfant [49].

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 Le syndrome de Dandy-Walker, associant hydrocéphalie, agénésie partielle ou totale du vermis cérébelleux et kyste de la fosse cérébrale postérieure ;

 Les malformations du cervelet.

Des atteintes vasculaires cérébrales peuvent entraîner dès la période néonatale ou parfois des années après :

 Un accident vasculaire ischémique,

 Une hémiparésie,

 Des convulsions,

 Des migraines sévères,

 Des zones cérébrales d’infarctus s’installent du fait d’une artérite occlusive progressive,

 Des sténoses

 Des anévrysmes.

 Déficit neurologique persistant moteur et cognitif,

 Migraines sévères,

 Aspect radiologique de Moya-Moya (sténose progressive des artères cérébrales situées à la base du cerveau et développement d’un réseau collatéral).

Les anomalies neurologiques intracrâniennes sont retrouvées les ¾ du temps dans les cas d’hémangiomes en plaques couvrant l’aire fronto-palpébrale supérieure S1+S4. Les anomalies cardiaques et aortiques sont plutôt associées aux hémangiomes S3 avec présence de raphé ou fossette médians supra-ombilicaux et anomalies sternales (=syndrome dysplasie vasculaire/anomalies sternales).

Le diagnostic du syndrome PHACES est posé devant la présence d’un hémangiome segmentaire large situé dans la face ou le cuir chevelu (plus que 5 cm) et l’association d’une autre malformation de l’acronyme [73, 74].

Un examen physique complet, une IRM cérébrale, une échographie cardiaque et des gros vaisseaux, un examen ophtalmologique et un examen radiologique doivent être réalisés en

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conséquence chez tout nouveau-né porteur d’un HI étendu segmentaire du visage (localisation S1, S3 et S4) [49].

Tableau 3 : Description et exploration du syndrome PHACES [75].

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Figure 27 :hémangiome segmentaire couvrant l‟aire fronto-palpébrale : syndrome PHACES (collection du SUMPR).

Tableau 4 : Critères diagnostiques du syndrome PHACES [76].

Syndrome PHACE Possible syndrome PHACE

Hémangiome facial de diamètre > 5 cm Hémangiome facial de diamètre > 5 cm et 1 critère mineur, ou

Et 1 critère majeur ou 2 critères mineurs Hémangiome du cou ou du torse et 1 critère majeur ou 2 critères mineurs, ou

Absence d’hémangiome mais 2 critères majeurs

Critères majeurs Critères mineurs

Cérébrovasculaire : Persistance d’une artère embryonnaire autre que anomalies d’artères cérébrales majeures l’artère trigéminale (artères pro-atlantale, hypoglosse,

Dysplasie otique)

Sténose ou occlusion Anomalies de la ligne médiane Absence ou hypoplasie Anomalies de migration neuronale Origine ou trajet aberrant Communication interventriculaire Persistance artère trigéminale Arc aortique droit, arc aortique double Anévrisme sacculaire Anomalies du segment antérieur

Cérébral : Cataracte

anomalies de la fosse postérieure Colobome Malformation de Dandy-Walker Microphtalmie Hypoplasie/dysplasie cérébelleuse

Cardiovasculaire : Sclerocornea

Coarctation de l’aorte Hypopituitarisme

Anévrisme aortique Thyroïde ectopique

Origine aberrante de l’artère sous- clavière Oculaire :

anomalies du segment postérieur Vascularisation fœtale persistante Anomalies vasculaires rétiniennes Colobome ectasique

Hypoplasie du nerf optique Staphylome papillaire Colobome

Ligne médiane : Défaut, fente sternale

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Le pronostic dépend de la sévérité des signes cliniques dans le cas d'anomalies cérébrales ou artérielles. Les séquelles neurologiques sont très fréquentes.

Sur le plan thérapeutique, la prise en charge du syndrome PHACES repose sur une prise en charge spécialisée de chacune des malformations associées [77].

* Syndrome PELVIS/SACRAL :

Le syndrome PELVIS regroupe les anomalies suivantes: - hémangiomes Périnéaux ;

- malformations génitales Externes ;

- Lipomyéloméningocèle (sailli d’un tissu gras anormal à travers une anomalie du bas de la colonne vertébrale) ;

- anomalies Vésicorénales ; - anus Imperforé ;

- autres marqueurs cutanés (Skin tag). - myélopathie [52].

Le syndrome SACRAL proposé en 2007 par l’équipe bordelaise [78] est également valable : - dysgraphie Spinale (ou déficit de fermeture du tube neural) ;

- anomalies Ano-génitales ; - anomalies Cutanées ;

- anomalies Rénales et Anomalies urologiques ; - localisation Lombosacrée de l’angiome.

Un PELVIS/SACRAL syndrome doit être recherché systématiquement devant un hémangiome segmentaire concernant tout ou une partie du territoire recouvert par les langes.

Pour tout enfant chez qui il y a un doute concernant la présence d’un de ces syndromes, il y aura une évaluation par IRM médullaire et abdominopelvienne.

L’hémangiome peut être de diagnostic retardé ou difficile du fait d’un aspect réticulé atypique, la dysarthrie périnéale (organes génitaux externes, abouchement urétral, anus) est

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souvent cliniquement évidente, mais nécessite un bilan complémentaire exhaustif urologique, gynécologique et digestif au sein d’un service de chirurgie pédiatrique et la dysarthrie

spinale peut être occulte, d’où la nécessité d’un diagnostic précoce pour éviter des

complications neurologiques tardives : une imagerie du cône terminal médullaire doit être faite si possible par l’échographie en période néonatale (absence de soudure des arcs postérieurs vertébraux) ou par IRM après l’âge de quatre mois [79] . Ainsi, un syndrome PELVIS/SACRAL doit être évoqué devant un tableau de dysgraphie caudale associant de façon variable les anomalies osseuses et médullaires lombosacrées, anales et urogénitales.

Lacobas [80] et al ont proposé un arbre décisionnel en fonction de la localisation des hémangiomes. Ils ont ainsi défini quatre régions : lombaire, sacrée, périnéale et du membre inférieur. En fonction de la localisation, ils ont proposé un algorithme d’explorations complémentaires :

− Pour tous : réalisation d’une écho-doppler médullaire, abdominale et pelvienne.

− Pour les formes lombaires, sacrées et périnéales : réalisation d’une IRM médullaire, abdominale et pelvienne.

− Pour les atteintes des membres inférieurs : réalisation d’une angio-IRM abdomino-pelvienne et du membre atteint, plus une radio des membres inférieurs.

Récemment les Américains ont proposé l’acronyme LUMBAR pour les hémangiomes de la partie inférieure du corps et les autres anomalies cutanées, urogénitales, myélopathies, ulcération, les déformations osseuses, malformations anorectales, anomalies artérielles et rénales [81].

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Figure 28 : Hémangiome lombosacré, périnéal et des membres inférieurs associés à une ambiguïté sexuelle au cours d'un syndrome PELVIS/SACRAL/LUMBAR (collection

Dr Didier bessis). E-Pronostics :

En fonction de sa localisation et/ou de son volume, l’HI peut mettre en jeu : Le pronostic esthétique :

Il existe 2 formes principales d’hémangiome infantile pouvant engager le pronostic

esthétique selon une importance variable :

 Les hémangiomes très étendus, télangiectasiques au niveau de la sphère périnéale où l’on voit régulièrement des phénomènes de nécrose.

 Les hémangiomes centro-faciaux aux conséquences esthétiques importantes.

Tous les hémangiomes sont responsables d’une altération esthétique transitoire qui a une conséquence psychologique sur les parents voire sur l’enfant en grandissant.

Le pronostic fonctionnel :

Les HI mettant en jeu le pronostic fonctionnel sont principalement représentés par les formes péri-orificielles qui peuvent devenir obstructifs et retentir sur les structures voisines. C’est le cas des hémangiomes : péri-oculaires qui peut menacer la fonction visuelle

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définitivement [6, 54], labiaux, anogénitaux, périnarinaires, auriculaires et du rocher (voir dans les formes cliniques).

Le pronostic vital :

Les formes qui mettent en jeu le pronostic vital sont exceptionnelles et précoces. Leurs

formes sont décrites dans ce chapitre pour souligner leurs particularités car ils font l’objet de situations urgentes.

Forme miliaire disséminée :

Ici, il existe de nombreux hémangiomes tubéreux de petites tailles allant de 2mm à 2 cm de diamètre [3, 26, 28]. Ces hémangiomes cutanés sont souvent associés à des hémangiomes viscéraux dont la localisation la plus fréquente est le foie. L’évolution naturelle de ces hémangiomes hépatiques est parallèle à celle des hémangiomes cutanés. Ils vont évoluer, comme les formes cutanées, vers la régression spontanée, sans aucun traitement ; seules persistent des calcifications hépatiques, retrouvées à l’échographie [5]. Mais peuvent aussi, du fait d'une vascularisation intense, entraîner une insuffisance cardiaque par hyperdébit [44], parfois sévère, nécessitant une prise en charge hospitalière. L’examen clinique complet de l’enfant à la recherche de signes d’insuffisance cardiaque, d’une hépatomégalie, d’un souffle hépatique et la pratique d’une échographie abdominale et d’un doppler s’imposent. Il n’y a pas de consensus sur le nombre de lésions nécessaires pour parler d’hémangiomes multiples, de même que pour poser l’indication d’une échographie hépatique. Un suivi régulier tous les 2 – 3 semaines est nécessaire [28].

Les hémangiomes viscéraux peuvent exceptionnellement être purement viscéraux. Ils sont découverts fortuitement ou suspectés sur une symptomatologie clinique d’appel [6].

Une hémangiomatose digestive peut saigner abondamment et menacer le pronostic vital. On doit l'évoquer en cas de saignements bas chez un nourrisson ayant un bilan de coagulation et des plaquettes normales (sinon, il faut plutôt penser à une lymphangioendothéliomatose diffuse) ou un tableau abdominal aigu qui peuvent, exceptionnellement, compliquer des formes miliaires disséminées (mais il n’y a pas

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lieu de les rechercher par des endoscopies systématiques chez un nourrisson asymptomatique). [6, 44]

Figure 29 : hémangiomatose néonatale disséminée [6].

Hémangiome volumineux extensif :

Il peut entraîner une insuffisance cardiaque par hémodétournement [65]. Il faut dans ce cas surveiller le foie et l’état cardiaque.

Hémangiome sous-glottique ou un hémangiome de la filière larayngotrachéale : Il s’agit d’une localisation muqueuse profonde [46]. C’est une entité rare, mais c’est la cause la plus fréquente de dyspnée laryngée du nourrisson [82, 83], voir même une

détresse respiratoire. Il faut craindre une telle atteinte quand un hémangiome touche

de façon symétrique la région maxillaire, mentonnière, cervicale et la lèvre inférieure (hémangiome en barbe) [54], ou bien, devant un hémangiome muqueux de la lèvre ou de la langue. Parfois, l’hémangiome sous-glottique peut être isolé [46]. Les symptômes tels qu’une toux sèche ou rauques, un stridor, une dyspnée, un tirage, une difficulté à téter doivent conduire à la réalisation d’une radiographie standard du larynx, d’une laryngoscopie directe suivie d’une trachéoscopie [83].

L’urgence thérapeutique peut dans les cas extrêmes conduire à la pose d’une sonde endotrachéale, voire à une trachéotomie.

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Tableau 5 : Les HI à haut risque [44].

Localisation Type Phase

Péri-orificielle a (les yeux, le nez, la bouche) Centro-faciale Lombo-sacrée b Génitale b, c Segmental b Multiple A prolifération rapide b Phase de prolifération maximale (3 à 6 mois)

a : Risque fonctionnel. b : Risque d’ulcération. c : Risque d’association avec des anomalies structurales extra-cutanées.

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