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Chapitre 2 : Agent tératogène

4. Nature des agents tératogènes

4.1. Biologique

4.1.1. Génétique

4.1.1.1. Maladies génétiques monofactorielles

Chez les organismes diploïdes comme les vertébrés (dont l’Homme), chaque cellule du corps contient deux copies du génome (Figure 27). C’est-à-dire que chaque cellule somatique contient deux copies de chaque chromosome et deux copies de chaque gène. L’exception à cette règle sont les chromosomes sexuels : l’homme possède un chromosome X et un chromosome Y (XY) et la femme possède deux chromosomes (XX). Les paires de chromosomes n’intervenant pas dans la détermination du sexe sont dits autosomes. L’Homme possède 46 chromosomes : 22 paires d’autosomes et une paire de chromosomes sexuels (X et Y).

Les gènes se trouvent à un endroit spécifique du chromosome : le locus. Pour un même gène, il existe plusieurs séquences : les allèles. Les organismes diploïdes possèdent donc deux allèles de chaque gène situé sur les autosomes : un hérité de la mère, un hérité du père.

Figure 27 : Chromosomes d’une cellule somatique diploïde

Un individu possédant deux copies identiques d’un même allèle est homozygote pour cet allèle. S’il possède deux copies différentes, il est hétérozygote pour cet allèle. Lors de la transmission du génome, le mode de transmission génétique sera différent en fonction de sa localisation ou non sur un autosome mais aussi en fonction de son caractère dominant ou récessif.

C’est cette transmission du patrimoine génétique, qui va entraîner des maladies génétiques monofactorielles pouvant entraîner des malformations congénitales. Ces maladies suivent les lois de Mendel. Les malformations résultant de ces maladies ne représentent que moins d'un tiers des cas de malformations congénitales. Ces maladies peuvent être transmises de différentes manières en fonction des configurations génétiques (Figure 28).

Les maladies génétiques autosomiques dominantes sont transmises avec une probabilité de 50% aux enfants si le parent « responsable » de la maladie est hétérozygote pour l’allèle de la maladie. La probabilité de transmission est de 100% si le parent « responsable » de la maladie est homozygote pour cet allèle. Dans ce cas, l’allèle responsable de la maladie est dominant : même si un enfant porteur de cet allèle est hétérozygote, la maladie s’exprimera. Un exemple de maladie génétique autosomique dominante est l’achondroplasie. Il s’agit d’une maladie constitutionnelle de l'os donnant la forme la plus commune de nanisme. L'achondroplasie est caractérisée par une rhizomélie (racine des membres raccourcie), avec humérus (épaule, bras) et fémur (hanche, cuisse) relativement plus courts que l'extrémité du membre (avant-bras, main et jambe, pied). La croissance des os de la face est également perturbée.

Figure 28 : Différents types d’héritages génétiques suivant la loi de Mendel

Source : adapté de U.S. National Library of Medecine

Les maladies génétiques autosomiques récessives sont transmises avec une probabilité de 25% aux enfants. Dans ce cas, pour développer la maladie, l’enfant doit être homozygote pour l’allèle mis en cause. 50% des enfants seront porteurs sains de la maladie. Un exemple de maladie génétique autosomique récessive est la phénylcétonurie. Cette maladie entraîne un dysfonctionnement de la phénylalanine hydroxylase. En conséquence, la phénylalanine s’accumule dans le sang et entraine une arriération mentale (oligophrénie phénylpyruvique) progressive, une microcéphalie, un Retard de Croissance Intra-Utérine (RCIU) et une dislocation des hanches (Shepard 2010).

Les maladies génétiques dominantes liées au chromosome X touchent plus souvent les femmes que les hommes : un père porteur de la maladie la transmettra à toutes ses filles, une mère atteinte aura 50% de risque de transmettre la maladie à ses enfants. Le Syndrome du X fragile fait partie des quelques maladies concernées. Il se traduit par un retard mental plus ou moins sévère, de l’autisme et de gros testicules (macro-orchidie) chez les garçons.

Les maladies génétiques récessives liées au chromosome X touchent plus souvent les hommes que les femmes : un père atteint le transmettra à toutes ses filles, celles-ci seront porteuses saines. Une mère atteinte aura 50% de risque de transmettre l’allèle morbide à sa fille, celle-ci sera porteuse saine. La mère atteinte aura également 50% de risque de transmettre la maladie à son fils. Le Syndrome de Lowe fait partie de ce type de

maladie génétique. Il se traduit par des atteintes des yeux (glaucome, strabisme et lésion de la cornée), des reins et du cerveau (retard du développement psychomoteur, troubles du comportement, épilepsie, hypotonie musculaire et retard de croissance).

Les maladies génétiques monofactorielles peuvent également avoir pour origine les aberrations chromosomiques. Elles peuvent se produire avant, pendant, ou après la conception. Elles sont généralement dues à un mauvais arrangement des chromosomes chez les gamètes de l'un des deux parents avant la conception.

Les aberrations chromosomiques peuvent altérer le nombre de chromosomes (Figure 29). La perte d'un chromosome entier conduit à une monosomie et la duplication d'un chromosome amènent à une trisomie. Ces deux formes d'anomalies chromosomiques conduisent à un nombre aberrant de chromosomes, qu'on décrit aussi comme aneuploïdie. Elles résultent d'une non-disjonction survenue au cours de la méiose durant l'ovogenèse ou la spermatogenèse. Comme la méiose se déroule en 2 étapes, une anomalie de la ségrégation des chromosomes peut avoir lieu lors de la première division, mais aussi lors de la seconde division.

Figure 29 : Exemples de mécanismes d’altération du nombre de chromosomes au cours de la méïose

Source : Campus Virtuel Suisse

Les trisomies les plus courantes concernent les chromosomes 13, 18 et 21. Ces trisomies se caractérisent par une microcéphalie, une microphtalmie avec colobome, une fente palatine, une polydactylie ainsi que des malformations du cœur et des reins. Le taux de mortalité est de 80-90 % durant la 1ère année. Les trisomies partielles des chromosomes

sexuels sont relativement fréquentes (XXX, XXY ou XYY) et sont viables. Les monosomies sont en général létales, exception faite du syndrome de Turner (Figure 31).

La deuxième aberration chromosomique concerne leur structure. Les anomalies de structure sont le résultat de cassures des chromosomes durant la méiose (Figure 30). Une délétion, une duplication ou la formation d'un isochromosome (chromosome ayant perdu un de ses bras remplacé par l’exacte copie de l’autre) se traduiront par un phénotype anormal, tandis que l'insertion, l'inversion, ainsi que la translocation peuvent être équilibrées. Ceci signifie que les porteurs de ces anomalies de structure peuvent être phénotypiquement sains, car la totalité du matériel génétique est présente.

Une délétion peut avoir lieu dans n'importe quel chromosome et peut atteindre n'importe quelle grandeur. Les conséquences d'une délétion dépendent de sa longueur et des gènes qui sont amputés. Une délétion partielle du bras court du chromosome 5 est responsable de la maladie du Cri du chat. Cette maladie est caractérisée par une microcéphalie, un retard mental et psychomoteur sévère ainsi qu'une déficience cardiaque.

Une duplication désigne un fragment chromosomique dédoublé. La duplication est parfois décrite comme une "trisomie partielle". Lorsqu'il y a duplication, la personne possède 3 copies du gène qui se trouve dans le segment touché. Une duplication peut aboutir au Syndrome de l’X fragile.

Une inversion résulte de la cassure d'un fragment de chromosome, suivie d'une rotation de 180° de ce même fragment, puis de sa réintégration dans le même chromosome. Le phénotype associé à ce type de réarrangement est souvent invisible, étant donné qu'aucune information n'a été perdue. Lorsque la région touchée inclut le centromère, on parle de duplication péricentrique, par opposition à la duplication paracentrique.

Une insertion résulte de l'intégration d'un fragment de chromosome à un autre endroit que son lieu d'origine. Les porteurs d'une insertion peuvent être phénotypiquement sains, car aucune information n'a été perdue.

La formation d'un isochromosome est une malformation chromosomique relativement fréquente au niveau du chromosome X. Elle résulte de la division transversale et non pas longitudinale. L'isochromosome ainsi constitué a soit 2 bras courts, soit 2 bras longs. Les personnes qui présentent cette anomalie du chromosome X ont le même phénotype que les patients atteints du syndrome de Turner (45, X0). Ceci est dû au fait qu'un bras du chromosome X est manquant.

Figure 30 : Exemples de mécanismes altération la structure des chromosomes

Source :Campus Virtuel Suisse

Pour résumer, les enfants souffrant d’aberrations chromosomiques présentent souvent de multiples malformations généralement associées à un retard mental. Par ailleurs, la grande majorité des aberrations chromosomiques entraine des avortements spontanés (Figure 31).

Figure 31 : Incidence et types d’anomalies chromosomiques

Dans sa 13ème édition du Catalog of teratogenic agents, Shepard liste plus de 400 gènes dans les formes mutées sont associées des malformations congénitales (Shepard 2010). On peut citer le gène Pax3, un gène crucial pour la fermeture du tube neural et la formation de la crête neurale. Il est notamment impliqué dans le Syndrome de Waardenburg (maladie génétique de transmission autosomique dominante) associant une surdité avec des anomalies de la pigmentation de la peau, des cheveux ou de l'iris. Le gène Sox11 est aussi listé : il est également impliqué dans le développement du système nerveux et est responsable du Syndrome de Coffin-Siris caractérisé par une microcéphalie, un retard de croissance, une hypotonie, une hyperlaxité ligamentaire et une hypertrichose.

L’expression des gènes peut être altérée par des mutations (modification de la séquence d’ADN) mais aussi par des modifications de la structure de l’ADN. L’ensemble de ces modifications de l’expression des gènes peuvent être transmises à la génération suivante. Dans le deuxième cas, on parle alors d’empreinte épigénétique.