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B Magn´etisme de l’alliage FePt

Il n’existe pas encore de th´eorie compl`ete pour expliquer, de mani`ere non

for-melle, le magn´etisme des alliages `a base de m´etaux de transition. Cependant, le

mo-d`ele des ´electrons itin´erants, plus connu sous le nom de momo-d`ele de Stoner [143–145],

donne une description qualitative de la condition n´ecessaire `a l’apparition du

ma-gn´etisme dans ces alliages. Cette condition (crit`ere de Stoner) traduit le fait que

l’apparition spontan´ee d’un moment magn´etique est conditionn´ee par deux

ph´eno-m`enes (compl´ementaires) qui sont l’existence d’une part d’une forte r´epulsion entre

´electrons de mˆeme site30 et d’autre part d’une grande densit´e d’´etat au niveau de

Fermi [146]. Ce crit`ere est formul´e math´ematiquement par :

1−U N¯

F

)<0 (I.12)

avec N(ǫ

F

) et ¯U d´esignant respectivement la densit´e d’´etat pour une direction

de spin et par atome au niveau Fermi et l’´energie par paire d’´electron et par

atome gagn´ee en passant d’une paire de spin anti-parall`eles `a une paire de spin

parall`eles [147]. Cette derni`ere est une g´en´eralisation d’un param`etre not´e I, qui

quantifie l’importance de la r´epulsion entre ´electrons de spin oppos´es par rapport

`

a celle entre ´electrons de mˆeme spin. Cette condition est r´ealis´ee avec l’existence

d’un d´ecalage d’´echange au niveau de Fermi (∆ex) des bandes d entre les ´etats

de spin minoritaires et majoritaires `a l’absence de champ magn´etique [148]. Le

tableau I.5 qui r´esume les r´esultats de calculs de diff´erents auteurs montre que

pour le syst`eme FePt, le param`etre N(ǫ

F

) provient de la contribution du Fe et le

coefficient de couplage spin-orbite provient de la contribution du Pt.

Table I.5 – Valeurs des param`etres de Stoner et de la constante couplage spin-orbiteξ

du Fe, du Pt et FePt. AvecN(ǫ

F

) la densit´e d’´etat au niveau de Fermi,I

F

N(ǫ

F

) l’´energie

potentielle d’interaction entre ´electrons de spin oppos´e [149–153].

Fe Pt FePt

Ordre ferromagn´etique paramagn´etique ferromagn´etique

structure bcc fcc L1

0

N(ǫ

F

) (Ry

−1

/atom/spin) 19.5 13.6 18.9

I

F

N(ǫ

F

) 1.5 0.6 —

< ξ >(eV) 0.075 0.6 0.053(Fe) - 0.54(Pt)

Ce mod`ele, qui ne tient cependant pas compte des propri´et´es de la surface de

Fermi, o`u des instabilit´es magn´etiques peuvent apparaˆıtre sans que le crit`ere de

30. Le principe de Pauli interdisant l’occupation d’un mˆeme site par deuxe− de mˆeme

spin, la polarisation est favoris´ee du fait d’une plus forte r´epulsion entree−de spin oppos´es.

Stoner ne soit rempli31, permet d’expliquer que le ferromagn´etisme des ´el´ements

3d(Fe,Co,Ni) et le paramagn´etisme des ´el´ements 4d(Pd)-5d(Pt) est une

cons´e-quence de la diminution des densit´es d’´etats au niveau de Fermi, lorsque l’on passe

de la premi`ere s´erie `a la seconde. Car cette densit´e est d’autant moins grande que

la largeur de la bande d est importante. Cependant, `a la diff´erence des bandes 4f

des ´el´ements `a base de terres-rares, les bandesd de ces ´el´ements de transition sont

fortement perturb´ees en cas d’alliage. Ces derni`eres (responsables du magn´etisme)

subissent des modifications importantes qui, dans le cas du FePt, sont `a l’origine

des importantes am´eliorations des moments magn´etiques de spin et orbital du Fe

et du Pt par rapport `a celles du Fe(bcc) et du Pt(fcc) (voir§I.B.1.b).

-12 -8 -4 0 4 8 -2,0 -1,5 -1,0 -0,5 0,0 0,5 1,0 1,5 2,0 D.O.S. Pt s p d D.O.S. Fe s p d

N(E) [1/(eV spin f.u)]

E -E F [ e V ] minority band |+> majority band |->

(a) Densit´es d’´etats de FePt (FP-LAPW)

-12 -8 -4 0 4 8 -2,0 -1,5 -1,0 -0,5 0,0 0,5 1,0 1,5 2,0 minority band D.O.S. Pt s p d D.O.S. Fe s p d

N(E) [1/(eV spin f.u)]

E -E F [ e V ] |+> majority band |->

(b) Densit´es d’´etats de FePt (SPR-KKR)

Figure I.14 – Densit´es d’´etats du Fe et du Pt de l’alliage FePt(L10) calcul´ees avec

la m´ethode FPLAPW-LSDA (Full-Potentiel Linearised Augmented Plane Wave in Local

Spin Density Approximation) et la m´ethode SPRKKR-ASA (Spin Polarised Relativistic

Korringa-Kohn-Rostoker in Atomic Sphere Approximation)

Ces modifications sont essentiellement la cons´equence de l’hybridation des

bandes 3d(Fe) avec celles des bandes 5d(Pt), comme le montrent les densit´es

d’´etats (DOS) du Fe et du Pt de l’alliage FePt(L10) illustr´ees sur les figuresI.14(a)

et I.14(b). Dans ces figures, l’hybridation est clairement mise en ´evidence par le

chevauchement des bandes 3d(Fe)-5d(Pt) des ´etats de spin majoritaires avec

no-tamment une parfaite correspondance de part et d’autre du niveau de Fermi. Au

niveau des spins minoritaires, on observe une diminution (resp. une augmentation)

de la densit´e d’´etat de Fe (resp. Pt) qui, comme le souligne Sakuma [152],

corres-pond `a un caract`ere ‘antibonding’ (resp. ‘bonding’) de ces densit´es d’´etats avec la

diminution des niveaux d’´energies par rapport au niveau de Fermi. Ces DOS, qui

31. Une partie de la surface de Fermi d’une bande dα qui poss`ede des ´etats occup´es

|α, k,↑> peut se coupler par interaction d’´echange `a une autre bande dβ qui poss`ede

des ´etats inoccup´es|β, k+Q0,↓>,Q0´etant le vecteur de maillage (translation du vecteur

d’ondek), ce qui conduit `a la cr´eation d’une onde de densit´e de spin incommensurable [154].

-7,5 -5,0 -2,5 0,0 2,5 -2 -1 0 1 2

Fe(bcc) Coey refs. Fe(bcc) Mohn refs. Fe(L10)

Density of states [eV

-1 spin -1 f.u -1 ] E n e r g y r e l a t i v e t o F e r m i l e v e l [ e V ]

Figure I.15 – Comparaison de la DOS du Fe(bcc) [155] [156] avec celle de Fe(L10)

sont le r´esultat de calculs32 obtenus par deux m´ethodes diff´erentes33, pr´esentent

une grande ressemblance entre elles et sont similaires `a celles obtenues par d’autres

auteurs [113,152,153]. Afin de voir les modifications induites par la mise en alliage

du syst`eme FePt, nous avons compar´e (Fig. I.15) la densit´e d’´etat du Fe dans

le FePt(L10) avec celles du Fe(bcc) trouv´ees dans les ouvrages de Coey [155] et

de Mohn [156]. On observe une augmentation (resp. une diminution) de la

den-sit´e d’´etats des spins minoritaires (resp. majoritaires) au voisinage du niveau de

Fermi. Ces diff´erences sont la cons´equence du renforcement du d´ecalage d’´echange

ex des bandes d du fait des distorsions induites par la structure L10 lors de la

mise en ordre cristallographique du FePt [152] (voir §I.B.1.b). Ces modifications

en plus de celles relatives `a la mise en ordre [161] sont `a l’origine des propri´et´es

magn´etiques du FePt, particuli`erement de l’anisotropie magn´etocristalline.

32. Effectu´es avec le chercheur El-kebir Hlil du groupe Interm´etalliques & Interstitiels

du d´epartement Mati`ere Condens´ee Mat´eriaux et Fonctions de l’Institut N´eel.

33. Une des diff´erences fondamentales entre ces deux m´ethodes (toutes deux

autocoh´e-rentes et bas´ees sur l’approche DFT [157] pour la r´esolution de l’´equation de Schr¨odinger

g´en´eralis´ee HΨ = EΨ) est la mani`ere de caract´eriser la fonction d’onde |Ψ>qui d´ecrit

l’´etat fondamental. Dans la m´ethode LAPW (am´elioration de la m´ethode APW) [158],

il y a une continuit´e du potentiel `a la surface de la sph`ere ‘Muffin-Tin’. `A l’int´erieur de

cette derni`ere (dans l’atome), la fonction d’onde est d´evelopp´ee en harmoniques sph´eriques

Ψk(~r) = Pl,mck(~r)Yl,m(θ, ϕ) et `a l’ext´erieur de cette sph`ere (zone interstitielle) elle est

d´evelopp´ee en ondes planes Ψk(~r) =Pl,mc′

k(~r)eik~r. La m´ethode FPLAPW est une

am´e-lioration de la m´ethode LAPW qui, grˆace `a l’utilisation d’une combinaison lin´eaire pour

la d´efinition des fonctions radiales (ck(~r)), permet une meilleure continuit´e de la fonction

d’onde `a l’interface sph`ere Muffin-Tin et zone interstitielle. Son avantage majeur est sa

tr`es grande pr´ecision. La m´ethode KKR (ou m´ethode de la fonction de Green) utilise un

formalisme bas´e sur l’utilisation de l’´equation Dirac [159] et permet la prise en compte de

l’´echange magn´etique entre moments ainsi que l’interaction spin-orbite [160]. Elle pr´esente

l’avantage majeur de pouvoir ˆetre appliqu´ee aussi bien sur un syst`eme ordonn´e que sur

un syst`eme d´esordonn´e, comme le montre l’´etude effectu´ee par Perlov et al. [161] sur

l’in-fluence du d´esordre sur les propri´et´es magn´eto-optiques du FePt. La m´ethode SPRKKR est

une am´elioration de la m´ethode KKR, elle permet la prise en compte des effets relativistes

ainsi que la polarisation de spin [162]. Elle est num´eriquement la plus stable des deux.