• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE 3 : INTÉGRATION DES MITIC DANS L’ENSEIGNEMENT

3.5 M ODELES D ’ INTEGRATION DES MITIC DANS L ’ ENSEIGNEMENT

Nous allons présenter les modèles d’intégration des MITIC dans l’enseignement que les enseignants utilisent pour adapter à ces outils en classe.

Nous observons que de nombreux auteurs ont proposé différents modèles retra- çant les phases que traversent habituellement les enseignants lors de l’incorporation des MITIC à leur enseignement (Moersch, 1995 ; Newby et Lay, 1996 ; Sandholtz, Ringstaff et Dwyer, 1997 ; Depover et Strebelle, 1997 ; Morais, 2001 ; Raby, 2004 ; Fourgous, 2012).

Le modèle présenté par Moersch (1995, 2001) comprend un outil de mesure (Le-

vels of Technology Implementation) pour évaluer le niveau d’implantation des TICE

en classe par les enseignants. Cet auteur a décrit sept niveaux d’intégration des TICE dans la pratique d’enseignants en classe par lesquels l’enseignant évolue lorsqu’il dé- veloppe son expertise à intégrer les TICE en classe :

1. La non-utilisation où l’enseignant n’intègre pas les TICE dans son en- seignement à cause du manque d’accessibilité et de temps ou d’équipement comme freins à l’utilisation des TICE en classe ;

2. La sensibilisation où l’enseignant utilise personnellement les TICE pour la gestion de classe (ex. : prendre les présences, compiler les résultats des élèves, correspondre via le courrier électronique, préparer des cours, etc.) ou utiliser les TICE comme soutien à son enseignement. Les TICE sont présentes dans l’environnement de l’enseignant mais sans lien direct avec lui (ex. : pro- gramme de dénombrement flottant utilisant les TICE, cours informatique offert le midi, etc.) ;

3. L’exploration où l’enseignant s’engage avec ses élèves dans l’utilisation des TICE au niveau du renforcement, de l’enrichissement, lors d’exercices répétitifs. En effet, l’enseignant utilise les TICE pour compléter leur enseignement (rechercher l’information (connaissances) sur un contenu à étude, didacticiels, jeux, etc.) ;

4. L’infusion correspond à une utilisation des TICE (ex. : base de don- nées, feuille de calcul, graphique, application multimédia, Internet, etc.) de manière ponctuelle, lors d’activités pédagogiques favorisant le traitement de l’information et des structures de raisonnement de niveau supérieur (ex. : réso- lution de problèmes, prise de décision, pensée réflexive, expérimentation, etc.) ;

5. L’intégration où l’enseignant utilise les TICE en engageant ses élèves dans un contexte d’apprentissage riche (ex. : les applications multimédias, les télécommunications, les bases des données, la feuille de calcul, le traitement de texte) pour identifier et résoudre des problèmes réels liés à un thème central ou à un concept. Cette intégration33 peut être mécanique ou routinière ;

6. L’expansion permet d’entrer en contact avec le monde extérieur dans un contexte de résolution de problèmes par une utilisation des TICE (ex. e- mail) ;

7. Le raffinement où l’enseignant utilise les TICE pour permettre aux élèves d’utiliser les TICE comme processus, produit, outil leur permettant de chercher l’information, de trouver des solutions et de développer un produit en lien avec des problèmes réels, et surtout, en lien avec leurs propres intérêts, be- soins et aspirations.

Le modèle de Newby et Lay (1996) est un modèle à trois étapes d’intégration :

33 Dans le modèle révisé (Moersch, 2001), le niveau de l’intégration est divisé en deux sous-niveaux

(intégration mécanique, intégration routinière), pour mettre en lumière le fait que l’enseignant a besoin de recourir à une aide extérieure (collègues, conseiller pédagogique, matériel pédagogique, commercial, etc.) avant d’atteindre une intégration routinière et indépendante.

1. Familiarisation où l’enseignant utilise personnellement les TIC et se met à envisager des usages liés à son enseignement ;

2. Utilisation où l’enseignant utilise les TIC en classe avec ses élèves (usages de logiciels tout faits) ;

3. Intégration où l’enseignant utilise les TIC en classe pour favoriser la création par les élèves de leur propre savoir.

Le modèle de Sandholtz, Ringstaff et Dwyer34 (1997) comprend cinq stades d’intégration :

1. L’entrée est la phase de mise en place de l’équipement. L’enseignant se familiarise avec l’équipement technologique placé dans sa classe ;

2. L’adoption où l’enseignant utilise les outils des TICE pour appuyer l’enseignement (usage didacticiel) ;

3. L’adaptation correspond à une intégration des TICE aux méthodes tradi- tionnelles d’enseignement, à une utilisation fréquente des TICE en classe où il les utilise lors d’exercices répétitifs ;

4. L’appropriation où l’enseignant maîtrise l’utilisation des TICE. Il change ses attitudes d’enseignement vis-à-vis des TICE pour favoriser l’acquisition de nouvelles compétences chez les élèves ;

5. L’invention correspond à l’apparition des nouvelles méthodes d’enseignement qui sont centrées sur la construction des connaissances, la résolution de problèmes et la pensée critique, et qui permettent d’obtenir le plein potentiel des TICE.

Le modèle d’intégration de Depover et Strebelle (1997) présente les dimensions qui nous aident à comprendre l’innovation dans un enseignement. Ce modèle est cons- truit sur deux axes :

Axe dynamique qui montre un processus d’innovation en trois moments (adoption, implantation, et routinisation) en prenant en compte

34 Ce modèle a été élaboré à partir de données empiriques recueillies sur 10 ans entre 1985 et 1995 dans

les intrants qui correspondent aux données de départ, et les extrants qui correspondent aux effets ;

Axe typologique composé de trois systèmes : 1) le microsystème est carac- térisé par le profil d’entrée des enseignants ; 2) le mésosystème qui com- prend le profil d’entrée à l’école qui correspond à l’équipement, le climat relationnel et l’ouverture à l’innovation ; 3) le macrosystème qui corres- pond à l’ouverture du système éducatif.

Pour que l’innovation ait lieu, les auteurs soutiennent différents niveaux de communication numérique (micro, méso, macro)35. Ils montrent l’importance de l’individu et l’influence du milieu de formation et de travail sur l’individu. Ce modèle montre l’importance de l’environnement sur les pratiques des MITIC en proposant les processus d’intégration d’une innovation :

1. L’adoption où l’enseignant se motive et se prépare. Il change sa pratique soit par conviction personnelle, soit sous une pression externe ;

2. L’implantation rend compte du changement de pratique opéré durant la phase d’adoption. L’enseignant a un sentiment de maîtrise des TIC et réa- lise des projets d’intégration, des activités pédagogiques innovantes ayant un impact sur l’environnement ;

3. La routinisation correspond à une utilisation régulière des nouvelles pra- tiques, une diffusion des activités, une stabilisation et une amplification. Morais (2001) propose un modèle à deux phases :

1. L’initiation comporte deux étapes : 1) la pertinence où l’enseignant se de- mande s’il est vraiment pertinent d’intégrer les TICE à son enseignement ; 2) la peur où l’enseignant se sent anxieux et ainsi peut avoir peur de se lan- cer ;

35 Le niveau macro concerne l’évolution de la société en général ; le niveau méso recouvre les réalités

d’un établissement en conjonction avec les contraintes régionales, cantonales et locales ; le niveau

2. L’utilisation se compose de trois étapes d’usage des TICE : 1) usage per- sonnel où l’enseignant utilise les TICE pour ses besoins personnels ; 2) usage professionnel où l’enseignant utilise les TICE pour des fonctions administratives ; 3) usage pédagogique où l’enseignant utilise les TICE pour améliorer son enseignement et l’apprentissage de ses élèves.

Le modèle de Raby (2004) se divise en quatre phases :

1. La sensibilisation où l’enseignant a peu ou pas de contact direct avec les TIC présentes dans son environnement personnel et/ ou professionnel. Cette phase sera suivie par la phase de l’utilisation personnelle et de l’utilisation professionnelle ou de l’utilisation pédagogique, cela dépend des motivations de chaque enseignant à intégrer les MITIC dans sa pra- tique ;

2. L’utilisation personnelle où l’enseignant est motivé à utiliser les TIC par une curiosité ou un besoin d’ordre personnel. Il passera ensuite par la phase d’utilisation professionnelle ou d’utilisation pédagogique. Cette phase con- tient trois étapes : 1) la motivation où l’enseignant a une curiosité, un be- soin ou une obligation d’ordre personnel ou professionnel ou pédagogique à utiliser les TIC ; 2) la familiarisation où l’enseignant apprend à maîtriser les rudiments techniques (une connaissance de base de certains logiciels) ; 3) l’exploration-appropriation où l’enseignant recherche des informations sur des sujets d’intérêt personnel, communique avec les autres (famille et amis) et utilise les outils TIC pour produire des documents en lien avec ses besoins personnels ;

3. L’utilisation professionnelle où l’enseignant est motivé à utiliser les TIC par une curiosité, un besoin ou une obligation d’ordre professionnel. Or, il passera directement de la phase de sensibilisation à la phase d’utilisation professionnelle en dépassant la phase d’utilisation personnelle ;

4. L’utilisation pédagogique où l’enseignant a la motivation à utiliser les TIC par une curiosité, un besoin ou une obligation d’ordre pédagogique. Il pas- sera directement de la phase de sensibilisation à la phase d’utilisation pé- dagogique sans passer par les phases d’utilisation personnelle et

d’utilisation professionnelle. Il touche à l’usage des TIC à des fins éduca- tives et il amène ses élèves à les utiliser en classe. Cette phase commence par :

la motivation où l’enseignant utilise les outils TIC par curiosité, besoin ou obligation ;

la maîtrise des rudiments techniques qui permet aux enseignants d’engager leurs élèves dans l’utilisation des TIC comme récompense ou occupation ;

l’exploration où l’enseignant utilise les TIC pour enrichir son enseignement. Il fait participer ses élèves à des activités qui visent l’acquisition, la compréhension et l’application des connaissances et qui permettent le développement de la compétence transversale liée aux TIC ;

l’infusion où l’enseignant implique ses élèves dans une utilisa- tion ponctuelle des TIC. L’élève utilise donc les TIC lors d’activités de transmission et de construction des connaissances (proposées par l’enseignant) ;

l’appropriation où l’élève utilise des TIC de manière fréquente et régulière dans un cadre d’apprentissage actif et significatif. Cette utilisa- tion se caractérise par un type d’activités de transmission et de construction des connaissances orienté vers la poursuite d’un but.

L’intégration des TIC par l’enseignant passe par quatre stades différents permet- tant de parvenir à une intégration créative des TICE dans l’enseignement selon le rap- port Fourgous (2012) :

1. La découverte : c’est l’utilisation personnelle des outils TIC ;

2. L’adoption : c’est l’utilisation professionnelle des TIC. L’enseignant utilise les TIC pour préparer ses cours mais la pédagogie initiale reste inchangée ; 3. L’appropriation, intégration pédagogique où l’enseignant devient auto-

nome à l’utilisation des TIC. La pédagogie traditionnelle est plus interac- tive ;

4. La création, utilisation innovante où l’élève est au centre de l’enseignement. Il devient acteur en passant du statut de consommateur à celui de créateur, producteur à l’aide de l’enseignant. La pédagogie est changée et innovante.

Ces modèles proposent les processus d’intégration des MITIC dans l’enseignement et définissent aussi les pratiques pédagogiques des enseignants en classe. Nous constatons que la majorité des enseignants se situent dans les usages per- sonnels et professionnels. La réussite d’intégration des MITIC exige que l’enseignant fasse une utilisation personnelle avant d’utiliser les MITIC professionnellement. Ce qui signifie que les TIC n’ont pas d’influence notable sur la pédagogie. Les ensei- gnants passent par une série d’étapes allant de la non-utilisation à l’utilisation person- nelle et professionnelle à l’utilisation pédagogique en classe. Quelques modèles pren- nent en compte les processus d’adaptation à utiliser les MITIC que les enseignants doivent passer. Ce qui montre que l’enseignant construit des compétences et des con- naissances en MITIC grâce à une adaptation réelle et une relation efficace avec l’environnement. Cela aide l’enseignant à passer d’une simple utilisation personnelle des MITIC à une réelle utilisation professionnelle et pédagogique lors des différentes activités pédagogiques proposées à ses élèves. Mais est-ce que l’adaptation à l’usage des MITIC est une innovation pédagogique ? Dans le paragraphe suivant, nous expli- quons le concept d’innovation.