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Section 1. Cheminement de la recherche :

2. Une méthodologie qualitative :

Dans le cadre de notre recherche doctorale nous avons choisi, la méthodologie qualitative qui est, selon Strauss, A.L. & Corbin, J. (1990 : 17) « une recherche qui produit des résultats sans utiliser des procédures statistiques ou tout autre méthode quantitative. Certaines données peuvent être quantifiées mais leur analyse est, quoiqu’il arrive, un phénomène qualitatif ». Pour conduire notre recherche exploratoire de forme hybride, cette méthode qualitative nous est apparue adéquate avec notre choix d’étude de cas-multiples. Ce choix est déterminé par la nature du phénomène étudié et par l’objet de notre recherche. Cette recherche est organisée sur des études de cas de projet de PPP dans des secteurs différents afin de décrire et de comprendre le phénomène de transfert de connaissances managériales au sein de l’entreprise réceptrice de ces connaissances. Le sujet de cette recherche est appliqué à certaines entreprises publiques algériennes de service public. Ce cadre de recherche est peu exploré à notre connaissance, car les recherches en PPP dans ce domaine demeurent relativement nouvelles en raison de la nouveauté du concept en Algérie. Par ailleurs, notre choix est motivé et influencé par la nature de notre question centrale de recherche du type « comment ». Aussi, nous privilégions la méthodologie qualitative, et plus particulièrement, les études de cas comme moyen de compréhension et de production de la connaissance dans une perspective d’analyse de la réalité, et ce, pour plusieurs raisons.

Il s’agit d’une méthode qui nous permet de comprendre le phénomène du transfert de connaissances et du processus d’apprentissage par contact direct avec les individus qui y participent. Cela permet d’avoir un aperçu de la réalité organisationnelle telle qu’elle est vécue par ses acteurs, au travers des discours qu’ils tiennent (interviews) mais aussi par le

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biais des documents internes et des notes prises lors de l’observation.Selon Huberman, A.M. & Miles, M.B. (1991), les mots et les discours des acteurs ont un caractère signifiant et convaincant en comparaison avec les chiffres. Par contre, comme toute méthode de recherche, la démarche qualitative n’échappe pas à des limites inhérentes et des critiques telles que la généralisation étroite, la validité externe limitée... Mais le point fort d’une telle démarche qualitative selon Perrin, A. (2008 : 186) réside dans « la prise en compte du temps et du contexte ». Elle nous est donc apparue propice dans le cadre de notre recherche afin de décrire un phénomène et de comprendre le contexte dans lequel s’inscrivent les acteurs participant à ce processus.

2.1. La méthode des cas : un mode d’accès au réel

La méthode des cas permet de décrire une situation donnée ou un phénomène et de l’expliquer par étape. Elle s’intéresse parfaitement aux études réunies dans un contexte spécifique. Cela commence par l’observation de la réalité à partir d’un questionnement, et finit souvent par un test à ces questionnements (hypothèses ou conjectures). Plusieurs définitions existent pour

définir l’étude de cas dans la littérature, mais la plus fréquemment citée, est celle de Yin, R.K. (2003 : 18) qui la considère comme « une méthode de recherche empirique permettant d’étudier en profondeur un phénomène contemporain dans son contexte, surtout quand les frontières entre ce dernier et l’objet d’étude ne sont pas clairement délimitées ». Dans cette optique, l’étude de cas est souvent associée aux recherches basées sur la compréhension d’un phénomène peu connu ou d’actualité. Selon Walshman, G. (1993 : 15), l’étude de cas est la démarche la plus favorable concernant une conduite de recherche sous le paradigme interprétativiste. Dans le même ordre d’idée, Wacheux, F. (1996 : 89) considère que : « l’étude de cas permet de suivre ou de reconstruire des événements dans le temps (la chronologie), d’évaluer les causalités locales (isoler ce qui est général des contingences locales) et de formuler une explication (puis de la tester auprès des acteurs) ». Pour d’autres auteurs comme La Ville (de), V.I. (2000 : 74), les études de cas « constituent une voie privilégiée d’investigation en ce qu’elles autorisent des analyses fines en termes de processus et qu’elles permettent d’aboutir à des modèles théoriques à la fois plus intégrateurs et dont la portée réelle peut être mieux cernée ».

Ainsi, ce recours à la méthode des cas se justifie principalement lorsqu’une question de recherche commence, d’après Yin, R.K. (2003 : 5) par comment ? Ou pourquoi ? C’est en ce sens, que l’étude de cas, notamment celle de cas multiples, nous semble appropriée dans notre cadre de recherche. C’est une stratégie appropriée d’accès au réel afin de décrire et de

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comprendre ce phénomène du transfert de connaissances managériales dans une relation de coopération fondée sur un PPP. En effet, nous voulons analyser un processus particulier, qui est celui de comprendre une situation précise, ses caractéristiques et donner une représentation sur ce phénomène. Pour cela, nous limitons les modalités des connaissances aux connaissances du management en général qui sont liées aux connaissances techniques60. Pour ce faire, la multiplication des cas ou les expérimentations multiples semblent nécessaires en termes de compléments d’informations pour pouvoir élargir la gamme d’observations sur le terrain. Elle consiste à réaliser une analyse englobant plusieurs cas, soit par la différence des cas choisis, soit en raison de leurs similarités. En revanche, la multiplication des cas d’études dans une recherche exploratoire n’est pas une règle absolue, mais dans le cadre d’une comparaison entre les cas, cette méthode semble satisfaisante.

La multitude des cas apparaît comme un moyen important d’analyse des données et un élément d’amélioration de la validité externe à des fins de comparaisons inter-cas comme le soulignent Huberman, A.M. & Miles, M.B. (1998). Selon Yin, R.K. (1994) deux ou trois cas dans un cadre de recherche sont en effet jugés satisfaisants pour fournir les premiers résultats.

Cela s’applique à notre recherche dans la mesure où l’analyse de la problématique du transfert de connaissances managériales dans le cadre d’une relation de partenariat est basée sur les comportements et les propos des individus participants à ce processus.

Dans notre recherche, nous abordons trois études de cas dans une logique de recherche de résultats convergents sur « le transfert de connaissances managériales dans le cadre de partenariats public-privé ». Rappelons qu’ils sont relativement récents et constituent un effet de mode en Algérie. Dans ce pays, les premiers contrats de PPP ont pris la forme de contrats de gestion, de contrats d’exploitation et de maintenance ainsi que de contrats de gérance. Ils s’y sont développés dans le courant des années 2000 avant même d’avoir un cadre juridique spécifique. Néanmoins, les coopérations entre les secteurs public et privé existent depuis fort longtemps en Algérie, en particulier dans le secteur de l’énergie et de l’industrie61.

Notre premier cas est considéré comme un cas pilote. Ce choix est vivement conseillé par Hlady-Rispal, M. (2002) afin de bien cerner les thèmes conducteurs de notre analyse et de les utiliser comme un guide facilitateur par rapport aux autres cas choisis. Selon Miles, M.B. & Huberman, A.M. (1991 : 22) : « les données qualitatives sont davantage susceptibles de

60 Ces connaissances coexistent dans les projets de ce type de partenariats étudiés.

61 Pour plus de détails sur les partenariats interentreprises en Algérie, voir Gherzouli, K. (1995), Sadi, N.E.

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mener à d’heureuses trouvailles et à de nouvelles intégrations théoriques ; elles permettent aux chercheurs de dépasser leurs a priori et leurs cadres conceptuels initiaux ».

Comme toute méthode de recherche, les études de cas possèdent des avantages, mais elles n’échappent pas à des limites et des critiques. Plusieurs limites existent selon Yin, R.K. (2004) comme le temps (selon la période de l’étude), la difficulté de généraliser des résultats obtenus compte tenu du contexte, la complexité de la masse d’informations recueillies, l’accès limité au terrain...

En définitive, la sélection des cas choisis dans une démarche qualitative relève forcément de la rigueur des cas sélectionnés, des objectifs de la recherche et de la démarche mobilisée. Les caractéristiques de l’étude de cas sont présentées dans le tableau suivant (28).

Tableau 28 : Caractéristiques de l’étude de cas Typologie

en fonction

Auteurs Type de cas Objectifs de recherche

L’objet de l’Etude

Yin, R.K. (2003)

Explicatif

Application jugée la plus importante de l’étude de cas selon Yin. Etude de relations de causes à effets souvent sont trop complexes à étudier par des enquêtes ou recherches expérimentales.

Descriptif

Il s’agit de « décrire une intervention et un contexte

réel dans lequel elle s’est produite ». p. 15.

Exploratoire

Situations à étudier très peu claires, la littérature ne permet pas d’établir de grilles théoriques, plusieurs résultats potentiels sont envisagés.

Etude de cas instrumentale Stake, R.E. (1998) ; David, A. (2004) Instrumental

Le cas est lu à travers une théorie retenue a priori et l’analyse empirique se fait à partir de cette théorie. L’étude se concentre sur une question théorique. Le cas, en lui-même, représente un second intérêt, il joue « un rôle de support et facilite notre compréhension

d’autre chose » Stake, R.E. (1998 : 137).

Collectif ou multiple

Plusieurs cas sont étudiés au sujet d’un phénomène ou d’une population. Il s’agit d’une approche instrumentale étendue à plusieurs cas. La collection de différents cas peut permettre de mettre en évidence des caractéristiques communes.

Intrinsèque

Le cas est décrit en profondeur et dans toutes ses dimensions « pour lui-même » David, A. (2003 : 2). Recherche d’une compréhension du cas particulier étudié. Le cas est choisi « parce que dans toutes ses

particularités et son ordinarité, ce cas lui-même est d’intérêt » Stake, R.E. (1998 : 136).

Source : Ayerbe, C. (2006) Validité interne et validité externe de l’étude de cas : une opposition à dépasser ? En collaboration avec Missonier, A. Atelier méthodologie de l’Association Internationale de Management Stratégique, Lille, 22 juin, in Ayerbe, C., (2008 : 80).

140 2.2. Identifications de l’étude de cas :

Notre démarche de recherche basée sur la compréhension du phénomène est la suivante : une entreprise publique réalise un projet de partenariat avec une entreprise privée62 étrangère, et ce, pour plusieurs objectifs. Parmi ces objectifs, nous retenons la fourniture de service public et le transfert de connaissances managériales. Ce partenariat donne lieu à des opportunités mais aussi des contraintes pour les deux partenaires durant la période du contrat d’une durée limitée. Parmi ces critères, il y a ceux concernant le partenaire public qui constitue notre unité d’analyse et qui se focalisent sur la prestation de service et le transfert de connaissances managériales. Ce transfert a pour finalité de permettre à des cadres locaux d’occuper certains postes après le départ des expatriés. De plus, ces critères se manifestent dans le projet du partenariat par la présence du rôle important du partenaire privé notamment à travers la codification et la facilitation du transfert. Ce rôle est basé, d’une part, sur la volonté d’apprendre du partenaire public et, d’autre part, sur sa capacité d’absorption des connaissances managériales transférées. Paradoxalement, cela ne signifie pas que le partenaire privé ne cherche pas un transfert de savoir-faire local. Au contraire, le transfert de savoir-faire dans un tel projet est mutuel, voire bidirectionnel, même si les objectifs des partenaires divergent car ils ont au moins une finalité commune qui est celle de la réussite du projet. Pour cela, plusieurs interrogations apparaissent : comment s’opère ce transfert pour l’entreprise réceptrice ? Est-elle en capacité de saisir cette opportunité d’apprentissage ? Si la réponse est positive, quels sont les processus mis en place afin de lui permettre d’acquérir ces connaissances et de les intégrer pleinement ? À partir de ces interrogations, nous avons jugé opportun de limiter notre champ d’étude au seul partenaire demandeur de connaissances managériales et de l’analyser comme un versant important du phénomène des PPP.

2.3. Délimitation de notre champ d’étude :

Nous venons de voir combien est vaste le champ d’investigation qui s’ouvre aux chercheurs s’intéressant au phénomène de ces partenariats et des transferts de connaissances. Lors du choix de notre sujet de recherche, nous nous sommes engagés sur plusieurs pistes simultanées et avons été conduits à « défricher » un champ relativement large de connaissances théoriques. Il nous a fallu dresser plusieurs revues de littérature et croiser leurs données avec les problématiques qui nous semblaient liées à notre sujet. Nous exposons plusieurs de ces approches théoriques dans la première partie de notre travail mais nous avons souhaité

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circonscrire davantage l’approche empirique à laquelle la seconde est consacrée. Nous avons donc opéré des choix pour délimiter le cadre de notre principale question de recherche. Compte tenu de certaines contraintes temporelles du phénomène à étudier, nous avons limité le périmètre de nos recherches aux seules entreprises publiques algériennes de service public engagées dans des PPP, et plus précisément aux entreprises publiques dans lesquelles des managers locaux opèrent en lien étroit avec les managers expatriés. L’on vérifie ainsi l’idée que le chercheur a nécessairement un impact, par sa réflexion et ses choix, sur le degré d’analyse retenu lors de la validité des résultats de ses recherches (Lecocq, X. 2002).