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Méthodes de traitement et de reconstruction en tomographie bi-

3.5 Prévisions des performances futures avec l’accélérateur Saturne

4.1.3 Méthodes de traitement et de reconstruction en tomographie bi-

Il existe trois principales méthodes de traitement des mesures en tomographie bi- énergie : l’analyse du rapport des coefficients d’atténuation linéiques (appliquée après reconstruction), la décomposition en double effet et la décomposition en matériaux de base (appliquées sur les projections avant reconstruction). Ces trois méthodes sont dé- taillées dans cette section.

4.1.3.1 Rapport des coefficients d’atténuation linéiques µ

Une technique commune en tomographie bi-énergie est de travailler avec le rapport des coefficients d’atténuation linéiques µ obtenus aux énergies E1 et E2, qui est aussi égal au

rapport des coefficients d’atténuation massiques µ/ρ : R(E1,E2, Z) = µ(E1) µ(E2) = µ ρ  (Z, E1) µ ρ  (Z, E2) (4.1.8) Cette technique a l’avantage d’être simple à mettre en œuvre car il suffit de faire le rapport des deux coupes tomographiques haute énergie (HE) et basse énergie (BE) pour obtenir l’image dépendant de Z.

Ce rapport dépend des deux énergies HE et BE et du numéro atomique Z du matériau, mais pas de sa densité ρ. Lorsque l’on trace R en fonction de Z, comme sur la figure 4.1.5, pour des énergies BE et HE données, plus la pente est élevée, meilleure est la discrimination en Z. En pratique, la discrimination se fait jusqu’à Z = 60 environ. Au-delà, la courbe s’aplatit, ce qui a pour effet d’augmenter l’incertitude sur Z à incertitude égale sur le rapport des µ. Cette méthode a déjà été étudiée par le LMN pour une application à ses activités de CND de colis de déchets par imagerie haute énergie [15], de même que par une équipe du Fraunhofer Institute for Integrated Circuits IIS [71].

Figure 4.1.5 – Exemple de courbes du rapport des coefficients d’atténuation pour deux spectres BE différents, avec et sans filtration avec du polyéthylène, en fonction de Z [15]

Le principal inconvénient de cette méthode est la dépendance du rapport aux spectres BE et HE via les coefficients d’atténuation. Un ajustement systématique aux spectres X, ou une estimation de ces spectres, est alors requis, ce qui peut respectivement être contraignant au niveau de la mise en pratique, et avoir des conséquences sur la qualité et la précision des mesures. De même, dans le cas de l’utilisation d’un spectre X large et non d’une source mono-énergétique, ce ratio est sensible à la densité du matériau traversé via le phénomène de durcissement de spectre, ce qui peut causer d’importants artefacts à la reconstruction.

La densité est quant à elle déterminée par tomodensitométrie classique, au bémol près des artefacts liés au durcissement de spectre : une fois que l’on connait µ et µ/ρ, on obtient directement ρ = µ/ (µ/ρ). La précision sur l’emplacement d’un matériau dans le diagramme (ρ, Z) étant déterminante pour discriminer les matériaux et les classer dans les différentes zones, il convient de minimiser au maximum l’incertitude sur le rapport

µHEBE, qui conditionne l’incertitude sur le Zeff.

4.1.3.2 Décomposition en double effet

Le principe de cette méthode est de décomposer l’atténuation totale d’un objet en une combinaison des deux effets d’interaction rayonnement-matière majoritaires. En tomogra- phie classique, on ne considère plus que les effets photoélectrique et Compton, les autres interactions étant négligées :

4.1 État de l’art

µtot ≈ µPhotoélec+ µCompton (4.1.9)

Parallèlement, la section efficace de chaque effet est exprimée sous la forme d’un produit d’une fonction dépendant du matériau (ρ, Z) et d’une fonction dépendant de l’énergie :

σ(E,Z) = f(E) × g(Z) (4.1.10)

Cette factoristion est un point fondamental de la méthode.

En injectant de telles expressions dans le calcul du coefficient d’atténuation total, la décomposition en tomographie classique prend alors la forme suivante [16] :

µ(ρ, Z,E) = aP(ρ, Z) · 1

E3 + aC(ρ, Z) · fKN(E) (4.1.11)

avec aP et aC respectivement les coefficients de décomposition en effet photoélectrique

et Compton, et fKN(E) la fonction de Klein-Nishina (voir section 1.1.3.2).

aP(ρ, Z) = K1 ρ AZn aC(ρ, Z) = K2 ρ AZ (4.1.12)

avec K1 et K2 des constantes et n ∼ 4 [16].

L’obtention de ces coefficients de décomposition passe par la résolution d’un système d’équations non linéaires, faisant correspondre à chaque couple de projections (PBE,PHE)

issus des sinogrammes leur expression analytique déduite de l’extension de la loi de Beer- Lambert (éq. 1.2.1) à des sources X polychromatiques :

       PBE(y, θ) = ln  ´ SBE(E)dE ´

SBE(E)·exp(−AP(y,θ)E31 −AC(y,θ)fKN(E))dE 

PHE(y, θ) = ln

 ´

SHE(E)dE

´

SHE(E)·exp(−AP(y,θ)E31 −AC(y,θ)fKN(E))dE

 (4.1.13)

avec AC,P les projections des coefficients de décomposition sur l’épaisseur locale L de

l’objet du point de vue d’un photon traversant, que l’on cherche à évaluer : AC,P =

ˆ L 0

aC,Pdl (4.1.14)

SBE,HE(E) est la réponse spectrale du système, égale au produit du spectre de la source

X, de l’efficacité du détecteur et de l’énergie moyenne déposée dans ce dernier :

SBE,HE(E) = SXBE,HE(E) · Eff(E) · Edep(E) (4.1.15)

Par la résolution de ce système, on cherche à obtenir à partir des sinogrammes BE et HE (PBE,PHE) deux nouveaux sinogrammes d’interaction (AC,AP), ce qui revient à séparer

les deux composantes de l’atténuation dans le domaine de projection. Le calcul de ces sinogrammes d’interaction peut se faire actuellement grâce à deux types d’algorithmes :

— par résolution directe du système via une méthode de minimisation contrainte de type Newton-Raphson à deux dimensions [68]. Cette méthode est précise, mais né- cessite une forte capacité de calcul pour la résolution en chaque voxel de deux équations non linéaires ;

— par approximation polynomiale [16, 61] des équations de projections 4.1.13 : les pro- jections PBE,HE sont considérées comme une combinaison polynomiale de AC et AP,

les coefficients polynomiaux étant déterminés par moindres carrés sur une mesure de calibration [72]. AC et AP sont alors estimés par un algorithme de minimisation.

Cette méthode permet une accélération de l’algorithme de minimisation, mais elle souffre d’importantes erreurs d’approximation lorsqu’elle est appliquée à des objets contenant une large gamme de matériaux [73], ce qui est le cas des colis de déchets nucléaires.

La première méthode est retenue dans le cadre de notre étude car la précision de la minimisation est plus importante que la vitesse de traitement.

Une fois ces sinogrammes créés, les coupes tomographiques de chaque effet sont alors reconstruites par rétroprojection filtrée classique (voir section 1.2.3), avec pour valeurs du voxel reconstruit aP(x,y) et aC(x,y). L’étude directe de ces coupes tomographiques

permet immédiatement de distinguer des changements de matériaux parfois invisibles par tomographie classique : sur la figure 4.1.6, les profils photoélectrique (c) et Compton (d) permettent de visualiser le passage du cylindre central de tissu graisseux au cylindre plus large de cerveau, ce qui n’est pas le cas du profil de l’intensité seule reconstruite (b).

Figure 4.1.6 – Résultats issus de simulations [16] : (a) fantôme représentant la boîte crâ- nienne) ; (b) profil d’une reconstruction tomographique conventionnelle ; (c) profil d’une reconstruction tomographique de la partie photoélectrique aP; (d) profil d’une reconstruction tomographique de la partie effet Comp-

ton aC

Dans un second temps, ces coefficients aP et aC , caractéristiques du matériau, peuvent

être combinés pour donner in fine les valeurs de numéro atomique et densité électronique [68] :

ˆ

4.2 Application de la tomographie bi-énergie à haute énergie