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Première partie : Entérocoque

2. Technique de l’examen bactériologique :

2.3. Méthodes d’identification :

Quand l’entérocoque semble impliqué dans un processus infectieux, deux raisons principales justifient son identification jusqu’à l’espèce[68].

 La première est l’existence de résistances naturelles particulières à certaines espèces,

E.faecium pour certains aminosides, E.gallinarum et E.casseliflavus/flavescens pour la

vancomycine, qui sont difficilement détectables par les techniques de routine d’antibiogramme.

 La deuxième est la surveillance épidémiologique des entérocoques multirésistants aux antibiotiques.

Cette identification est basée sur la reconnaissance d'associations particulières de caractères culturaux, biochimiques et antigéniques.

2.3.1. Identification au genre Enteroccocus :

L’identification au genre entérocoque est suspectée par la croissance aisée du germe sur les milieux usuels (trypticase-soja, Mueller-Hinton), et elle est aisément réalisée au moyen d’un test enzymatique, la recherche de pyrrolidonyl-arylamidase produite par tous les entérocoques.

La détection rapide de cette enzyme peut se faire à l’aide de disques commercialisés contenant la L-pyrrolidonylb- naphtylamide : les colonies sont déposées sur un disque réhydraté par du tampon phosphate pH 7,5. Après 10 minutes à température ambiante, un révélateur (cinnamaldéhyde) est ajouté. Le test est positif s’il apparaît une coloration rose à rouge, (S.pyogenes, S.porcinus et parfois S.pneumoniae) sont aussi positifs pour ce test, ainsi que des espèces proches d’Enterococcus. Le test fait aussi partie de la plupart des galeries d’identification pour streptocoques/entérocoques commercialisées. Ces dernières espèces peuvent être aisément distinguées des entérocoques sur la base des caractères culturaux.

Cependant, la recherche de l’antigène D n’a pas d’intérêt, car il n’est pas mis en évidence chez tous les entérocoques, et les streptocoques du groupe D le possèdent (S.gallolyticus, S.bovis et S.equinus) [68, 69].

On peut ainsi les isoler de manière sélective en utilisant des milieux bile-esculine du commerce. De plus, la majorité des entérocoques sont positifs au test de Voges-Proskauer qui relie la production d'acétone à la fermentation du ribose. Ce test est largement utilisé dans la discrimination entre Enterococcus et Streptococcus[70].

Un arbre décisionnel d’identification au genre Enterococcus est montré dans la Figure 5 [69].

Figure 4: Schéma d'identification des entérocoques [69].

2.3.2. Identification à l’espèce :

L’identification à l’espèce est plus délicate, elle peut être réalisée par méthode conventionnelle ou par des galeries d’identification de type API, Vitek (BioMérieux), MicroScan (Dade), BBL Crystal (Becton-Dickinson), ou autre.

En général, ces galeries identifient correctement E. faecalis et les souches d’E. faecium qui ont un profil typique. L’identification des autres espèces est moins performante, avec souvent des confusions entre E. faecium, E. gallinarum et E. casseliflavus.

Les problèmes d’identification existent donc surtout pour les espèces autres que E.

faecalis et, malheureusement, pour celles qui ont des résistances naturelles particulières (E. faecium, E. gallinarum et E. casseliflavus), ou que l’on désire plus particulièrement surveiller

(E. faecium).

L’utilisation de galeries conventionnelles en tube est une solution plus performante, mais plus difficile à mettre en œuvre dans un laboratoire de microbiologie clinique. Les caractères les plus utiles à mettre en évidence sont la production d’acétoïne (réaction de VogesProkauer), la résistance au tellurite de potassium, l’hydrolyse de l’arginine et certaines fermentations (mannitol, sorbitol, L-arabinose, D-raffinose, saccharose et lactose).

Il peut être difficile de se procurer certains de ces milieux, il paraît plus raisonnable d’utiliser une stratégie à deux vitesses. Dans un premier temps, l’emploi de galeries commercialisées ou d’une galerie conventionnelle minimale (comprenant par exemple recherche de pyrrolidonyl-arylamidase, milieu au tellurite de potassium, mannitol, sorbitol et L-arabinose) (tableau IV) permet d’identifier à coup sûr E. faecalis. Pour les autres cas (environ 20 %), une identification certaine nécessite un complément de galerie, au moins quand l’ensemble des caractères n’est pas absolument typique en galerie commercialisée.

Le tableau ci-après montre quelques caractères complémentaires discriminants d’identification. Pour la recherche de E. gallinarum et E. casseliflavus/flavescens, il est utile d’associer la recherche d’une mobilité dans un milieu « mobilité » incubé à 30° C 24 à 48 h et la recherche d’une pigmentation jaune. Ces espèces sont en effet mobiles, et les souches de E.

casseliflavus/flavescens sont pigmentées (pigmentation mise en évidence par la coloration

jaune d’un écouvillon à l’aide duquel les colonies ont été prélevées).

En effet, la mobilité n’est cependant pas constamment mise en évidence chez ces espèces, la recherche de la fermentation du méthyl-alpha-D-glucopyranoside, positive pour ces espèces et négative pour E. faecium, est un bon test. Les espèces immobiles E. mundtii et

E. sulfureus, rares chez l’homme, sont également pigmentées [68].

Tableau IV: Principaux caractères d'identification des espèces du genre Enterococcus les plus fréquemment isolées chez l'homme[68].

2.3.3. Indentification moléculaire des Entérocoques :

Comme c’est le cas pour bien d’autres bactéries, des techniques génotypiques d’identification des entérocoques ont été développées. Elles sont basées sur le choix d’une séquence d’ADN cible spécifique de l’espèce à identifier qui est, en général, un gène de structure de la bactérie, en particulier les séquences codant pour l’ARN ribosomal 16S. Cet ADN cible est amplifié par des amorces oligonucléotidiques spécifiques et éventuellement séquencées. Les séquences codant pour l’ARN 16S, souvent utilisées pour de nombreuses bactéries, sont peu discriminantes entre espèces d’entérocoques.

Le gène ddl codant pour les D-alanine-D-alanine ligases a été proposé comme cible. S. Dutka-Malen et al. ont mis au point une technique PCR multiplex basée sur l’amplification des gènes de diverses ligases d’entérocoques, cette technique permet d’identifier en un temps

E. faecalis, E. faecium, E. gallinarum et E. casseliflavus selon la taille du fragment d’ADN

amplifié ; elle met aussi en évidence les gènes de résistance à la vancomycine,vanA et vanB, éventuellement présents.

Plus récemment, C. Poyart et al. ont proposé l’amplification à l’aide d’amorces dégénérées d’une partie du gène sodA codant pour la superoxyde dismutase , la détermination de la séquence du fragment amplifié aboutit à l’identification précise de 18 espèces d’entérocoques [68, 69].

À nos jours, il n’existe pas de trousses diagnostiques commercialisées, et ces techniques sont essentiellement mises en œuvre dans certains laboratoires spécialisés. Elles sont performantes, techniquement à la portée de nombreux laboratoires hospitaliers, et ont un intérêt certain quand une identification exacte est souhaitée.

Cependant, comme toutes les techniques ‘’maison’’, elles présentent l’inconvénient d’être peu standardisées, avec un risque toujours possible de contamination. De plus, l’identification des entérocoques n’est pas souvent un objectif prioritaire des laboratoires. Les techniques génotypiques d’identification des entérocoques auront sans doute toute leur place dans les futurs systèmes d’identification génétique des bactéries [68].