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Introduction bibliographique

2. Le travail en élevage

2.4. Méthodes de représentation

2.4.1. Les indicateurs de performance du travail

Le nombre d’indicateurs traitant du travail en agriculture est limité et souvent basé sur l’UTA (unité de travail annuel, correspondant à 1800 heures annuelles) ou sur l’UTH (Unité de Travail Homme) dont la définition est très variable (de 1650 à 2800 heures ; Guyomarc’h, 2005). Ces indicateurs sous évaluent généralement la durée de travail des travailleurs agricoles, mais constituent un palliatif commode devant les difficultés concrètes de quantification de la durée annuelle réelle du travail agricole (Lacroix et Mollard, 1991). A partir de ces critères, la productivité du travail est approchée par des ratios tels que la Surface Agricole Utile / UTA ou le nombre d’Unités Gros Bétail / UTA pour des données « physiques » ou par le ratio entre la Marge Brute Standard / UTA pour des données plus économiques. Ces critères sont ceux que l’on retrouve dans les statistiques agricoles françaises ou européennes.

Pour la production porcine, nous avons vu (partie II.3.1) que les indicateurs utilisés portent sur le ratio entre le nombre de truies et le nombre d’UTH (Badouard, 2005) ou sur des données de temps de travaux recueillies en ferme directement auprès des éleveurs permettant de calculer des indicateurs tels que le nombre d’heures passées par truie et par an, le nombre d’heures par 100 kg de carcasse produits ou le temps passé par semaine pour 100 truies (Le Moan et al., 2003). Les valeurs obtenues pour ces critères sont très variables entre les élevages. Ainsi, dans l’étude de Le Borgne et al. (1994), les éleveurs naisseurs-engraisseurs les plus performants (quart supérieur) étaient en moyenne à 18h24 par truie par an et les moins performants (quart inférieur) à 37h12 par truie par an. Le temps passé par truie a diminué au cours du temps mais la variabilité est restée importante puisque dans l’étude de Le Moan et al. (2003), le tiers supérieur passait 16h04 par truie par an alors que le tiers inférieur passait 28h32. Ces différences sont principalement expliquées par la taille du troupeau, la nature des équipements et la main-d’œuvre (Le Moan et al., 2003). Ces auteurs ont aussi analysé les données en fonction du poste de l’exploitation porcine et du type de tâche réalisée. Ces analyses indiquent que l’atelier truie représente 50% du temps passé par truie par an, le reste du temps étant dû à la gestion des porcelets du sevrage jusqu’à la vente, à la gestion de l’exploitation et à la fabrication de l’aliment. Le Moan et al. (2003), s’intéressant à l’atelier naisseur, distinguent deux types d’activités de travail selon leur rythme : les activités quotidiennes (alimentation, surveillance, soins courants, nettoyage quotidien, paillage), et les activités périodiques. Celles-ci sont dépendantes de la périodicité des tâches qu’impose le choix de la conduite en bande (cf. plus haut). Elles concernent la reproduction (détection des chaleurs, contrôle des retours, réalisation des saillies et ou inséminations, prélèvement et conditionnement de la semence, échographie, enregistrements), la mise bas (surveillance des mises bas, soins aux porcelets, castrations, enregistrements), les transferts (des truies et des porcelets d’un poste à un autre), les vaccinations (des cochettes, verrats, truies et porcelets sous la mère) et les lavages-désinfections (de la quarantaine, de la verraterie, de la salle des gestantes et des maternités). Les activités quotidiennes sont celles qui représentent le plus de temps par truie par an (5h13 sur les 10h54 du temps consacré à l’atelier truie par truie par an) suivies des activités liées à la mise bas (2h40) et de celles liées à la reproduction (1h10). Au final ces données montrent donc qu’il existe une grande variabilité entre élevages au niveau de la productivité du travail et que l’atelier truie est celui qui demande le plus de temps par truie et par an (en moyenne 10h54 sur 21h46 ; Le Moan et al., 2003) et donc la variabilité entre les élevages est la plus importante (4h07 d’écart-type dans l’étude de Le Moan et al., 2003).

2.4.2. Les méthodes d’évaluation de l’efficience du travail

Ces méthodes n’étant pas disponibles actuellement dans le secteur de l’élevage porcin, nous nous référerons donc aux travaux menés en élevage herbivore destinés à évaluer le temps disponible de l’éleveur (méthode Bilan Travail ; Dedieu et al., 1993 et 2000 ; Serena et Dedieu, 2004) ou la répartition du travail entre les travailleurs (modèle ATELAGE ; Madelrieux et al., 2006).

a. Bilan Travail

Cette méthode mise au point par Dedieu et al. (1993 ; 2000) se base sur un entretien avec l’éleveur et concerne plus particulièrement les éleveurs de bovins et d'ovins. L’entretien répertorie, selon les indicateurs décris précédemment et au cours d’une campagne annuelle, les différents travaux réalisés, les travailleurs concernés et la durée des tâches avec comme unité de base l’heure par jour pour les tâches quotidiennes et la journée pour le travail de saison. Les périodes sont des tranches d’au moins 15 jours avec les mêmes tâches d’astreinte quotidienne. Cet entretien débouche sur

− des indicateurs permettant de comparer l’efficacité du travail (durée du travail d’astreinte par UGB par exemple) et les facteurs de variation des temps de travaux entre exploitations (cf. précédemment)

− un « temps disponible calculé » (TDC) pour les personnes de la cellule de base (travailleurs permanents dont l’activité agricole est prépondérante en temps et en revenu) qui permet d’évaluer le temps restant à disposition des personnes de la cellule de base pour effectuer les autres tâches de son exploitation (entretien, comptabilité, …) et disposer de temps libre. Cet indicateur permet d’évaluer la souplesse en temps permise par l’organisation du travail et de la référer aux objectifs de l’éleveur.

Le bilan travail peut ensuite être utilisé pour tester l’effet sur ce critère de modifications organisationnelles ou techniques.

b. Atelage

Le modèle qualitatif Atelage (« activités de travail dans les exploitations d’élevage ») est plus récent (Madelrieux, 2004 ; Madelrieux et al., 2006) et se focalise plus sur la répartition du travail entre les travailleurs et au cours de la journée que le Bilan Travail décrit ci-dessus. Ainsi Atelage permet de définir des « formes d’organisation quotidienne » (FOQ) au cours d’une période. Ces FOQ sont une façon de représenter la répartition des activités de travail à rythme quotidien entre les travailleurs et leurs relations (subordination) avec les activités à rythme non quotidien. Au cours d’une période peuvent ainsi coexister plusieurs FOQ selon

rythme quotidien entre les travailleurs et leurs relations (subordination) avec les activités à rythme non quotidien. Au cours d’une période peuvent ainsi coexister plusieurs FOQ selon que les travailleurs ou les relations avec les activités à rythme non quotidien changent (Figure I.6). Ce modèle permet de qualifier l’organisation du travail à l’échelle de la campagne, d’étudier les déterminants de cette organisation (par exemple les attentes de temps libre, de congés – de week-end peuvent être à l’origine de FOQ spécifiques) et enfin de tester l’impact de changements techniques en tenant compte de différentes configurations d’organisation.

Figure I.6 : Les interactions entre des rythmes de travail périodiques et hebdomadaires en élevage

bovin lait. Une approche par les Formes d’Organisation Quotidiennes (FOQ). Madelrieux et al. (2006)

Les éleveurs bénéficient de la présence de leurs enfants les week-ends (WE) et pendant les vacances scolaires. Les enfants participent aux activités à rythme quotidien. Les tâches quotidiennes sont les mêmes tant que les animaux sont dedans et elles évoluent lorsque les animaux sont dehors. Il y a ainsi deux FOQ : une de la semaine (FOQ1) et l’autre du WE (FOQ2) lorsque les animaux sont dedans (séquence 1), de même lorsqu’ils sont dehors et avant les vacances scolaires (FOQ 3 et 4 en séquence 2). Pendant les vacances scolaires les enfants sont présents en permanence. La FOQ 4 devient alors unique ce qui amène une nouvelle séquence (séquence 3). Plus tard au cours de l’année lors d’une période de vacances scolaires et de foins, la météo définie deux FOQ : la FOQ réalisée quand il fait beau (FOQi) et la FOQ des jours où il fait mauvais (FOQj) ce qui défini une nouvelle séquence (séquence k).