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Métaux lourds : sources minéralogiques, disponibilité et fractions porteuses dans les sédiments et déchets miniers du Val de Millun

de surface du Val Millun

III.4 Discussion géochimique et minéralogique

III.4.1 Métaux lourds : sources minéralogiques, disponibilité et fractions porteuses dans les sédiments et déchets miniers du Val de Millun

Les sédiments de fond des cours d’eau et les déchets miniers ont été étudiés pour identifier les teneurs en métaux lourds et leur origine selon les différents minéraux. Ainsi, les sources potentielles, les fractions porteuses et la disponibilité des métaux ont pu être déterminées pour évaluer l’ampleur de la contamination.

La minéralogie et la géologie de la zone affectée par la mine contrôlent très clairement la concentration totale des métaux lourds présents dans les sédiments et les déchets miniers, étant donné que

Thèse de Doctorat de l’Université Toulouse III – Matías M. Salvarredy Aranguren 129 c’est dans ce secteur que l’on trouve les plus fortes teneurs en métaux (Tab. III.XIII). Si, la variation des concentrations en métaux lourds dans les roches et sédiments a été fortement contrôlée par la minéralogie, les opérations minières ont contribué à augmenter considérablement les concentrations en métaux lourds dans l’environnement (eaux de surface et sédiments, Tab. III.I ; III.III et III.XIII). D’après les résultats obtenus à partir des différentes techniques minéralogiques (microscopie réflexion ; XRD, MEB et SED et analyses de microsonde), les sulfures ont été identifiés comme les principales sources de métaux dans la vallée. Cependant, les oxydes primaires peuvent aussi être d’importants fournisseurs de métaux comme l’étain, notamment. La plupart des métaux lourds considérés sont souvent spécifiques d’un minéral en particulier. Seul le fer trouve sa source dans plusieurs minéraux (Tab. III.XI). Toutefois, compte tenu de son abondance, la pyrite est la principale source de fer.

III.4.1.1 As

Les concentrations en arsenic dans les sédiments de fond de cours d’eau des régions du fond géochimique et dans les différentes roches mères constituant le soubassement du bassin sont très faibles en comparaison de celles des sédiments contaminés et des déchets miniers (Tab. III.XIII). L’exploitation minière influence fortement la concentration en arsenic dans les sédiments en aval du secteur d’exploitations. L’arsenic (Tab. III.XI, voir III.2.2.1), -ce sous-produit indésirable de l’activité minière-, résulte de l’oxydation de l’arsénopyrite (Eq. III.2, Vink, 1996). Toutefois, des différentes concentrations en arsenic observées dans les sédiments contaminés et dans les déchets miniers sont aussi à mettre en relation avec la composition minéralogique spécifique des échantillons (en particulier la présence des oxyhydroxides de fer). L’arsenic est uniquement contrôlé par les sulfures dans les déchets miniers frais (M10, Fig. III.11 et III.19). En général dans les sédiments de fond des cours d’eau et des déchets miniers, cet élément est préférentiellement associé aux oxyhydroxides de fer, qui peuvent contenir jusqu’à 20% d’arsenic (M2, Tab. III.XII). Cette association arsenic- oxyhydroxides de fer est particulièrement évidente pour la concentration totale des sédiments riches en oxyhydroxides de fer contaminés par la mine (~0.7% d’As, J8, Tab. III.XIII). En effet, les oxyhydroxides de fer sont bien connus pour séquestrer de l’arsenic dans l’environnement et ils constituent un important puits et un contrôle temporaire de la contamination (Carlson et al., 2002 ; Smedley et Kinniburgh, 2002 ; Garcia-Sanchez et Alvarez-Ayuso, 2003 ; Filippi, 2004 ; Savage et al., 2005). Le pH est le paramètre de contrôle principal pour la stabilité des oxyhydroxides de fer. Ainsi, la jarosite a été trouvée seulement dans les sédiments de fonds des cours d’eaux les plus acides (M1, M6, Tab. III.I et III.XIII) et non dans les zones où le pH est supérieur à 3, en accord avec les données de la littérature (Baron et Palmer, 1996; Gasharova et al., 2005). Bigham et al (1996) ont signalé que la schwertmannite précipite dans des eaux à un pH compris entre 2.8 et 4.5, associé à la jarosite ou à la goethite. En effet, nous avons observé un précipité de jarosite et de schwertmannite simultanément dans l’échantillon M6 (secteur de la mine) d’eau non acidifiée après 6 mois de stockage d’un échantillon d’eau en chambre froide (Fig. III.29).

La diagenèse pourrait aussi jouer un rôle important dans le contrôle de la spéciation des oxyhydroxides de fer : les phases amorphes riches en arsenic pourraient évoluer vers une structure plus ordonnée et appauvrie en arsenic, comme la goethite, en produisant un relargage progressif d’arsenic dans l’environnement (Courtin-Nomade et al., 2003). Ainsi, les oxyhydroxides de fer pourraient être une source secondaire non négligeable d’arsenic (Courtin-Nomade et al., 2003). Ceci est probablement la raison pour laquelle la goethite est uniquement détectée dans les sédiments acides des lacs (pH~3, M8, G8, Tab. III.VIII et III.IX), où la diagenèse précoce a induit la transformation des oxyhydroxides de fer amorphes en goethite ; ainsi que dans les tourbières où le pH est supérieur à 4 (T3, Tab. III.IX). La combinaison des investigations minéralogiques (MEB/SED, microsonde, DRX) et chimiques (extractions séquentielles) argumente pour la rétention préférentielle de l’arsenic dans les oxyhydroxides de fer. Toutefois, l’extraction séquentielle dans les sédiments lacustres de Milluni Grande (G8, Fig. III.17) révèle une proportion inattendue d’arsenic contrôlé par la matière organique. En effet, les mesures réalisées montrent que les sédiments de ce lac contiennent une proportion significative de matière organique (5.5%), dont l’origine est à rechercher en amont par la présence des nombreuses tourbières et pâturages dans le bassin amont. Les eaux des cours d’eau du sous-bassin amont montrent d’ailleurs une teneur en carbone organique dissous supérieur au reste du bassin (Tab. III.II).

Figure III.29. Spectre DRX des précipités formés à partir de l’échantillon d’eau M6 non acidifiée après 6 mois de stockage, où on observe un mélange de jarosite et schwertmannite.

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III.4.1.2 Cd

La sphalérite est la source principale de zinc et de cadmium (Tab. III.XII). Le cadmium est un élément trace dans la sphalérite (Wedepohl, 1995). Bien que sa concentration dans les sédiments soit généralement faible même à de très faibles concentrations, Cd est fortement toxique. Le cadmium est facilement mis en solution par les drainages acides (Licheng et Guijiu, 1996 ; Gomez Ariza et al., 2000 ; Callender, 2003). Toutefois, l’exploitation minière et les traitements de séparation minérale ont produit une concentration préférentielle de sphalérite dans les déchets miniers et les sédiments du secteur minier, dont les concentrations en Cd sont beaucoup plus élevées (M2, M10, Tab. III.XIII) que celles de la Formation Catavi ou que les déchets en blocs de la mine.

En aval de la mine vers l’exutoire du système, les concentrations en Cd sont plus faibles (M8, G8, Tab. III.XIII) assez proches de la valeur de 2.2 mg.kg-1 proposée par Callender (2003) pour des sédiments récents lacustres. Cette teneur en cadmium dépasse largement la valeur pour des sédiments lacustres pre- industriels (0.3 mg.kg-1, Callender op. cit.). Mais la normalisation par rapport au titane nous indique un enrichissement de 11 fois pour les sédiments lacustres de Milluni Grande (G8), ce qui est presque le double de la valeur de 7 trouvée pour des sédiments lacustres récents (Callender, 2003).

L’extraction séquentielle appliquée aux déchets miniers (M10) a indiqué que 61% du cadmium est lié aux sulfures, 16% est sous forme résiduelle, 14% est très labile (cumul des trois premières étapes). Dans les sédiments du fond géochimique et de la sortie du système (P1, G8), autour de 30% de cadmium dans les sédiments est issu des premières étapes de l’extraction séquentielle, résultats qui sont similaires à ceux obtenus par Licheng et Guijiu (1996) et Morillo et. al. (2002), confirmant la grande disponibilité de cet élément. Plus précisément, le cadmium est principalement issu de l’étape acido-soluble (25%) dans les sédiments du bassin amont (P1), alors que dans les sédiments lacustres de Milluni Grande (G8), 24% du cadmium est libéré lors de la première étape lessivable à l’eau. Ainsi en aval de la mine, le cadmium devient beaucoup plus disponible pour les organismes et de plus sa concentration totale est plus élevée, ce qui le rend donc potentiellement dangereux (Galay Burgos et Rainbow, 2001). En effet, cet élément est très toxique notamment en tant que néphrotoxique puissant (Gunawardana et al., 2006).

Sa grande solubilité a permis au Cd d’être stocké dans des minéraux tertiaires (Alpers et al., 2003) comme dans la mélantérite, qui a précipité dans les déchets miniers éloignés de la mine (M9, Tab. III.XIII) pendant la saison sèche. Ces sédiments, normalisés par rapport à Ti, montrent un enrichissement très élevé de 374 par comparaison à la valeur de 255 de déchets en blocs de la mine. Ces déchets miniers distants sont enrichis en Cd, qui est issu de la dissolution de la sphalérite du minerai de la mine. La grande solubilité de Cd a permis sa concentration dans des solutions très chargées en sulfates, ce qui a abouti à la précipitation de sels sulfatés riches en Cd (entre autres éléments). Toutefois, ce puits de Cd est transitoire parce que ces sels sulfatés sont également très solubles, à tel point que la fraction soluble à l’eau de l’extraction séquentielle représente 73% du Cd total de cet échantillon (M9).

III.4.1.3 Zn

Même si Cd et Zn ont pour origine commune la sphalérite, ils ne partagent pas le même comportement tout au long du bassin, à l’exception des phases minéralogiques trouvées dans les déchets miniers et les précipités sulfatés (M10, M9) qui peuvent être considérés respectivement comme des points initiaux et finaux du processus de météorisation minérale. Dans les échantillons à la minéralogie plus complexe, comme les sédiments non contaminés du fond géochimique (P1) ou les sédiments lacustres (G8), le zinc comme le cadmium est lié à différentes fractions. Dans les sédiments non contaminés, le zinc est moins concentré que dans les sédiments en aval de la mine, bien que ces concentrations en Zn du fond géochimique soient plus élevées que les valeurs de références données par Callender (2003) pour des sédiments de régions naturelles. La raison des concentrations plus élevées que les valeurs de références pour des régions naturelles est dû à un contexte géologique régional riche en minéralisation du zinc (Runnels et al., 1992).

L’extraction séquentielle appliquée dans les sédiments non contaminés (P1) a montré que Zn était très bien distribué parmi les différentes fractions minéralogiques (Fig. III.17). La fraction des sulfures est une fraction source non négligeable de Zn dans ces sédiments (20%), et est donc préservée probablement en raison du pH neutre du secteur, ce qui n’autorise qu’une altération lente des sulfures. Le pH neutre permet également l’absorption de 30% du Zn distribué parmi les trois fractions d’oxydes de Mn et Fe (17% étant absorbés dans les oxydes de fer amorphes). Si 18% du Zn est associé à la matière organique, 23% du Zn reste dans la phase résiduelle, probablement lié aux phyllosilicates (Fig. III.20). Dans ces sédiments non contaminés lors de l’expérience EXAFS, Zn a été déterminé en association avec les phyllosilicates. En revanche, les autres fractions n’ont pu être identifiées probablement pour être très au- dessous du seuil de détection de cette technique. Dans le secteur de la mine (M10) Zn est préférentiellement associées aux sulfures, comme le confirment les études minéralogiques (Tab. III.VIII, Fig. III.10), la composition chimique (Tab. III.XI), l’extraction séquentielle et l’étude EXAFS (Fig. III.17 et III.21). En aval du site minier, les sédiments lacustres de Milluni Grande (G8) présentent un fractionnement différent de ceux de la région non contaminée (P1) et de ceux des déchets miniers riches en sulfures (M10). Une large portion de Zn (18%) est extraite par simple lessivage à l’eau dans l’extraction séquentielle (en accord partiellement avec Zn trouvé sous forme de sphère externe dans l’étude EXAFS), et seulement 7% sont absorbés à des oxyhydroxides de fer (principalement aux amorphes, Fig. III.17). L’acidité très forte du lac n’a pas favorisé une absorption dans la fraction des oxyhydroxides de fer, ni la précipitation des oxydes de Mn (Tessier et al., 1996). Selon l’extraction séquentielle, Zn est lié principalement à la matière organique (MO, 41%). Toutefois, bien que la présence de MO ait été vérifiée (§ III.2.2.5), Zn n’a pas pu être trouvé en association avec la MO lors de l’expérience EXAFS. Ce volet incohérent entre les deux techniques reste à approfondir, et il peut être produit par plusieurs causes : absence d’une référence de matière organique similaire à celle du lac (probablement partiellement dégradée par l’acidité et l’état oxydant des eaux) lors de l’étude EXAFS ; hétérogénéités dans l’échantillon ; mauvaise réponse de ces sédiments à la procédure d’extraction séquentielle. Cette dernière possibilité reste plus difficile à concevoir étant donné que nous avons pratiqué

Thèse de Doctorat de l’Université Toulouse III – Matías M. Salvarredy Aranguren 133 sur cet échantillon la procédure originale et la procédure prolongée avec des résultats très similaires (<10% de différence dans le résultat sur la fraction de MO entre les deux extractions).

Il est important de souligner l’absence de Zn lié aux sulfures dans ces sédiments (vérifiée par MEB, extractions séquentielle et EXAFS), ainsi que la partie importante de Zn liée à la phase résiduelle (30%, Fig. III.16a, b et c). Cela signifie que depuis le secteur minier, la sphalérite a été complètement altérée par l’action de l’oxydation (Eq. III.3, Lin et Qvarfort, 1996) et du drainage acide riche en fer ferrique (Eq. III.4, Lin et Qvarfort, 1996) et en protons (Eq. III.5 et III.6, Jennings et al., 2000 ; Weisener

et al., 2004). Le processus d’acidification favorise le maintien de fortes concentrations de Zn en solution

dans l’eau, inhibe son absorption dans les oxyhydroxides de manganèse et de fer, et fini par permettre la précipitation de sulfates riches en Zn pendant la saison sèche (ex. M9, Tab. III.XIII). La précipitation des sulfates comme la mélantérite (Fig. III.14), la rozénite ou la copiatite (Hammarstrom et al., 2005) qui forment une solution solide, peuvent inclure du Zn (Jambor et al., 2000), notamment sous la forme de complexes de sphère externe d’après les résultats EXAFS (Fig. III.23). Ceci explique les fortes concentrations en Zn (1.2%) dans les sédiments de M9, qui sont très facile à mettre en solution (96% du Zn lessivé lors de l’étape de lessivage à l’eau de l’extraction séquentielle).

ZnS + 2O2 → Zn 2+ + SO4 2- Eq. III.3 ZnS + 2Fe3+ + 3SO4 2- + 3/2 O2 + H2O → Zn 2+ + 2Fe2+ + 2H+ + 4SO4 2- Eq. III.4

ZnS + 2O2 + 2H2O → Zn(OH)2(s) + 2H++SO42- Eq. III.5

2ZnS + 2H+ → 2Zn2+ + 2HS- 2HS-+ ½ O2 + 2H + → H2S2+ H2O H2S2+ 7 /2 O2 +H2O → 4H + + 2SO4 2-

Eq. III.6, où (s, precipitation)

III.4.1.4 Pb

La principale source de plomb pour les sédiments de fond des cours d’eau est la galène. Sous des conditions très oxydantes, la galène est altérée en l’anglésite qui est faiblement soluble pour des pH inférieurs à 6 (Eq. III.7, Blowes et al., 2003). La galène n’est pas tellement abondante contrairement à la sphalérite dans la composition minéralogique de la mine de Milluni (Fig. III.6, Ahlfeld et Schneider- Scherbina, 1964; Lehmann, 1978), bien qu’une certaine quantité ait été introduite dans le site de Milluni depuis d’autres mines voisines pour le broyage minier (Ríos, 1985). La galène a été uniquement identifiée par microscopie optique par réflexion dans des sections polies des déchets en blocs de la mine (Fig. III.6). Dans les déchets miniers et les sédiments, la galène n’a pas été détectée par les techniques MEB/SED ou microsonde. L’absence de la galène et la présence de sulfates de plomb (Fig. III.12a, Fig. III.13a et b) peu être liée à une altération rapide de la galène sous des conditions acides (Lin et Qvarfort, 1996; Moncur et

al., 2005). Ces observations sont en accord avec les résultats de dissolution minérale en réacteurs

d’expérimentations développés par Gleisner et Hebert (2002). Ces auteurs ont trouvé un augmentation rapide des teneurs en plomb en solution dès les premières heures de dissolution, suivi d’une diminution rapide, qui a été interprétée comme une conséquence de la précipitation d’une surface protectrice de

sulfate de plomb sur les cristaux de galène. Cette surface protectrice de sulfate de plomb pourrait expliquer pourquoi, contrairement au Zn, Pb est présent dans tous les échantillons associés à la fraction sulfure (Fig. III.17), même à la sortie du système du basin (G8).

PbS + 2O2 → PbSO4 (s) Eq. III.7

A la différence des autres métaux, le plomb est principalement lié à la phase d’extraction de la matière organique (33%) dans les déchets miniers (M10, Fig. III.17), bien que les observations effectuées à la loupe et au MEB sur les déchets miniers frais (M10) n’ont pas révélé la présence de matière organique (comme observé pour P1), et qu’il peut être assumé que le contenu en matière organique pour cet échantillon (M10) est négligeable. En outre, les résultats de l’extraction séquentielle réalisée sur une galène pure ont montré que la procédure est sélective pour ce minéral (voir §II.2.7). Ainsi, cela nous a amené à penser que davantage que d’études sur la sélectivité de l’extraction séquentielle pour le plomb étaient nécessaires. Ces résultats et réflexions ont conduit à l’hypothèse d’une phase minéralogique porteuse du Pb différente de celle de la galène et pour laquelle la sélectivité de l’extraction séquentielle n’était pas performante. Le fort pourcentage de plomb obtenu dans l’étape d’extraction censée être associé à la matière organique indiquerait la présence d’une phase minérale du plomb (autre que la galène) susceptible de lessivage par les réactifs de cette étape. L’étape en question utilise l’acétate ammonium pour éviter la re-absorption des métaux en fin d’extraction (Leleyter et Probst, 1999) ; or ce réactif attaque l’anglésite (minéral tertiaire du plomb, Eq. III.7), comme l’on déjà signalé Fonseca et Martin (1986). Ces considérations ont conduit à conclure que dans cet échantillon (M10), le plomb extrait à l’étape « matière organique » devait correspondre à la dissolution de l’anglésite (Fig. III.12a, Fig. III.13a et b). Si on assume que le contenu d’anglésite est lié à la quantité de galène dans une proportion de 1.3, on peut appliquer un coefficient de correction maximal (ACC) pour estimer la fraction de sulfate de plomb lessivée pendant l’étape d’extraction de la matière organique.

Les sédiments du bassin amont (P1) ont présenté une distribution du plomb semblable à celui du zinc. Seulement 6% du Pb est associé aux sulfures. Ainsi, en utilisant l’ACC comme correction maximale, au moins 27% du Pb reste tout de même lié à la matière organique. Une proportion significative du plomb (11%) est soluble aux acides ; cette phase de stockage correspondant aux carbonates s’explique dans ces conditions neutres, et le pouvoir tampon relatif du substrat rocheux de ce secteur est important (Tab. III.1, III.V et III.VI).

En aval de la mine, pour les sédiments du lac de Milluni Grande (G8), l’application du facteur de correction ACC permet de définir que néanmoins 43% du Pb reste lié à la matière organique. Le contrôle du plomb par la matière organique dans des sédiments de fonds affectés par l’activité minière a déjà été signalé (Singh et al., 1998 ; Pagnanelli et al., 2004). Le plomb est également absorbé dans les oxyhydroxides de fer (~26%). Comme pour des autres métaux (voir As, Pb, Sn et Fe dans la Fig. III.17), l’association du plomb aux oxydes bien cristallisés augmente d’amont en aval, ce qui est en accord avec les observations minéralogiques qui montrent dans le même sens l’augmentation de la présence de phases d’oxydes mieux cristallisées (Tab. III.X).

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III.4.1.5 Fe

Dans les sédiments non contaminés (P1), l’extraction du fer a été très fractionnée, semblable à Pb. Le pH neutre et les conditions peu oxydantes ont favorisé la préservation des sulfures et limité la précipitation des oxydes (Eq. III.8, Jennings et al., 2000). Dans les déchets miniers frais (M10), le fer est principalement lié aux sulfures comme les autres métaux lourds (Fig. III.17), probablement en raison de la cinétique d’altération lente de la pyrite comparée aux autres minéraux (Gleisner et Herbert, 2002) et de son abondance. Finalement en aval de la mine, dans les sédiments lacustres de Milluni Grande, le fer est notamment lié aux oxydes de fer (Fig. III.15), comme il était attendu pour des conditions si oxydantes et acides qui favorisent l’oxydation de la pyrite par la participation du fer ferrique (Eq. III.9, Lin et Qvarfort, 1996). Mais le fer est aussi associé à la fraction organique, probablement en raison du contenu élevé en matière organique (5.5%) de ces sédiments lacustres (Fig. III.17).

FeS2(s)+ 15 /4 O2 + 7 /2 H2O → Fe(OH)3(s) + 2SO4 2- + 4H+ Eq. III.8 FeS2 + 7 /2O2 + H2O → Fe 2+ + 2SO4 2-

+ 2H+ (a, oxydation du soufre de la pyrite) Fe2+ + ¼ O2 + H

+

↔Fe3+ + H2O (b, oxydation du fer ferreux, réaction réversible)

FeS2 + 14Fe3+ + 8H2O → 15Fe2+ + 2SO42- + 16H+ (c, oxydation de la pyrite par le fer ferrique)

Fe3+ + 3H2O → Fe(OH)3(s) + 3H +

(d, hydrolyse et précipitation de minéraux ou de

complexes ferriques) Eq. III.9

III.4.1.6 Sn

L’étain est très peu mobile (Fig. III.17), car il provient de la cassitérite qui domine la phase résiduelle dans tous les sédiments et déchets miniers étudiés par extraction séquentielle (par exemple dans les sédiments G8, Fig. III.19b). Seule une faible proportion est liée aux oxyhydroxides de fer (Fig. III.17). Dans les déchets miniers frais, une partie importante de l’étain est associée aux sulfures telle la stannite et la kestérite comme l’ont confirmées les analyses de XRD, de microsonde (Tab. III.V et III.XI) et des images MEB (Fig. III.12e).

III.4.1.7 Résumé sur la disponibilité des métaux lourds

Finalement à l’exception de l’étain, dans le Val de Milluni, la plupart des métaux sont potentiellement mobiles, comme l’ont révélées les extractions séquentielles par la dominance des métaux associés aux phases les plus labiles. Un ordre général de disponibilité des métaux lourds a pu être établi : As>Fe>Pb>Cd>Zn~Cu>Sn. La disponibilité la plus élevée a été attribuée aux déchets miniers frais (M10), alors que le minimum de disponibilité de métaux est trouvée dans les sédiments non contaminés en amont du bassin (P1). En aval, dans les sédiments lacustres de Milluni Grande (G8), les métaux sont plus

disponibles qu’en amont du système en raison de l’intense altération chimique opérée par l’oxydation et le

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