• Aucun résultat trouvé

lourds dans le Val de Millun

III.5 Conclusions de l’étude des eaux et des sédiments du Bassin de Millun

Pour la première fois, le problème de la contamination environnementale de la vallée de Milluni par l’activité minière, a été abordé par une approche multidisciplinaire : géochimique, minéralogique et hydrologique. Ce bassin hydrologique constitue la principale source d’alimentation en eau de la capitale, La Paz qui est la plus grande ville de Bolivie. L’eau de surface a été identifiée comme le principal vecteur dans le transport des métaux lourds, qui peuvent causer des effets multiples et très sérieux sur l’environnement, ainsi que sur la santé humaine. Une caractérisation poussée des métaux lourds dans les eaux, les sédiments et les matières en suspension (MES), leurs sources et leurs refuges, ainsi que les mécanismes responsables de leur distribution dans l’environnement, ont été identifiés.

Les concentrations en métaux sont très enrichies, dans les eaux de surface et les sédiments après la Mine de Milluni par rapport aux fonds géochimiques. En conséquence, la contamination des métaux lourds est évidente en aval de la mine, comme l’indique clairement les dépassements des normes guides ou de recommandation de qualité pour les eaux et sédiments. Les conditions acides ont été identifiées comme le principal facteur de contrôle de la concentration des métaux dissous et particulaire dans les eaux de surface. Dans les eaux, la tendance d’enrichissement est la suivante : Cd>Zn>>As>>Cu~Ni>Pb>Sn.

 Les sulfures (sphalérite, arsénopyrite, pyrite, chalcopyrite et galène) constituent la source essentielle des métaux lourds (Fe, Zn, As, Cu, Cd, Pb) pour les eaux des surface et des sédiments,

mis à part l’étain qui a pour principale source les oxydes primaires. La sphalérite et la chalcopyrite sont complètement consommées par les processus d’oxydation à la sortie du système. L’arsénopyrite et notamment la pyrite sont plus résistantes à l’oxydation, compte tenu de leur présence encore dans les sédiments du lac de Milluni Grande.

 L’atténuation de la contamination par l’arsenic en aval de la mine, dans des conditions si acides (pH=2.8) et oxydantes (Eh>400 mv) est due au contrôle de As par les oxyhydroxides de fer amorphes ou cristallins dans les sédiments et les MES. En revanche, ces sédiments peuvent se révéler aussi être une source secondaire d’As puisque la jarosite est remplacée à l’aval par la schwertmannite et la goethite faiblement cristallisée, qui peuvent générer une libération progressive d’arsenic (Courtin-Nomade et al., 2003).

 Le pH très bas dans les eaux en aval de la mine favorise les concentrations élevées de Zn et Cd dans la phase dissoute, et les faibles concentrations de ces deux éléments dans les MES. Toutefois, les conditions hydrologiques contrôlent la précipitation de minéraux tertiaires (comme la mélantérite) pendant la saison sèche. Ce processus a été identifié comme le responsable d’un stockage métallique transitoire, notamment en Fe, Zn, Cd, Cu.

 La matière organique est un paramètre clé dans le contrôle de Zn et Pb dans les sédiments de fond, et notamment pour ceux du Lac Milluni Grande. L’exception est pour les déchets miniers riches en sulfures, où la matière organique est absente. Dans ce cas, le plomb extrait lors de l’étape d’extraction de la matière organique a comme origine la dissolution d’une phase minérale, l’anglésite. C’est seulement dans les déchets miniers que l’anglésite affecte les résultats obtenus par l’extraction séquentielle.

 L’ordre de disponibilité des métaux lourds des sédiments et déchets miniers a été identifié comme suit : As>Fe>Pb>Cd>Zn~Cu>Sn, en tenant en compte des phases lessivables. Toutefois en fonction des normes guides pour la consommation humaine en eau et du degré de toxicité, cet ordre peut être différent : Fe>As>Cd>Zn~Mn>Al>Pb>Cu dans les eaux très contaminées, et Fe>Cd>Zn~Mn>As>Al>Pb à la sortie du bassin

 Différentes techniques chimiques (digestion totale et extraction séquentielle) et minéralogiques (XRD, MEB-EDS, Microsonde, EXASF) ont été couplées pour étudier la spéciation de Zn, le résultat c’est une compréhension approfondie de la nature des composés riches en Zn dans un milieu contaminée par l’activité minière. Toutefois, certains aspects incohérents entre les résultats posent des questions sur l’équivalence des observations réalisées.

 L’utilisation des profils de terres rares pour caractériser la contamination minière n’est pas suffisante pour caractériser précisément l’origine de la contamination, car les profils des REE dans les eaux sont notamment l’héritage de la dissolution de l’apatite, de la monazite, de l’orthoclase et des plagioclases. Ces minéraux sont très répandus tant dans les eaux drainant le fond géochimique granitique que dans les minéraux associés à la minéralisation polymétallique. Ces minéraux traces des roches sont porteurs enrichis des REE et ils sont facilement dissous en conditions acides, ce qui entraîne une augmentation de la concentration des REE de plusieurs ordres de grandeurs dans les eaux acides du secteur minier et en aval de la mine. Toutefois, l’absence d’anomalie en Ce*, où les faibles anomalies rencontrées sont un critère efficace pour discriminer les eaux contaminées

Thèse de Doctorat de l’Université Toulouse III – Matías M. Salvarredy Aranguren 173 de celles que ne le sont pas. En outre, l’absence de cette anomalie indique que cet élément (Ce) se retrouve vraiment dans la phase dissoute, en accord avec la diminution des valeurs de coefficients de partage (Kd) entre phases particulaire et dissoute des métaux lourds pour les eaux contaminées. Ces résultats indiquent que dans les eaux acides les colloïdes, comme la fraction particulaire jouent un rôle négligeable dans le contrôle des métaux.

 En dehors des processus physico-chimiques concernées par l’altération des minéraux porteurs des REE, les extractions séquentielles pratiquées dans les sédiments du bassin ont montré le rôle très important des processus biologiques dans l’altération météorique des phases phosphatées et le contrôle par la matière organique dans le transport sédimentaire.

 Comme pour certains métaux lourds (As, Pb, Zn), les oxyhydroxides jouent un rôle dans la séquestration des REE dans les eaux et sédiments, mais ils ne participent que secondairement au fractionnement des REE.

 Les conditions hydrologiques ont un rôle important dans la régulation des concentrations des éléments. Des comportements contrastés ont été observés entre les éléments majeurs et les métaux lourds. Pendant la saison humide, les eaux météoriques favorisent la mobilisation des métaux par la dissolution des minéraux primaires et tertiaires, et la dilution des concentrations en éléments majeurs provenant de l’altération météorique.

 La région étudiée est situé sous latitude tropicale avec une variation saisonnière contrastée, mais l’altitude très élevée (>4400 m a.d.s.l.) génère un climat de haute montagne froid. Ces conditions jouent un rôle majeur dans le devenir de la contamination des eaux par l’activité minière, particulièrement dans les processus d’altération météorique et les processus de lessivage des métaux. Ainsi, le comportement géochimique lié à la contamination métallique est davantage comparable à celui de régions tempérées et froides qu’à celui des aires tropicales.

 Les effluents miniers dans la région, produits de l’infiltration des eaux météoriques dans la mine sont les sources principales de la contamination métallique. Ainsi, la première mesure de remédiation dans ce secteur doit concerner l’imperméabilisation des galeries de la mine pour y éviter la percolation de l’eau, limitant aussi la production des drainages acides. La réduction des drainages acides entraînera une diminution de la lixiviation des métaux dans les déchets miniers de la vallée. Bien que l’acidité des eaux des lacs de Milluni Chico et Grande soit très importante, les sédiments ont une grande capacité à complexer l’arsenic dans les oxyhydroxides de fer, mais aussi Zn et Pb dans une moindre mesure par la fraction matière organique. En conséquence le dragage ou le déplacement des sédiments de fond ne seraient pas une stratégie de remédiation à recommander.

Chapitre IV

Bilan de la contamination dans le Val

Documents relatifs