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Luminescence de Eu(III) dans [EMIm][NTf 2 ] : influence de la concentration en eau et détermination du nombre d’hydratation

ÉTUDE ÉLECTROCHIMIQUE ET SPECTROSCOPIQUE DU COUPLE Eu(III)/Eu(II) DANS LE LIQUIDE IONIQUE

I. Caractérisation de l’europium au degré d’oxydation +III dans le liquide ionique [EMIm][NTf 2 ]

I.1. Spectroscopie d’absorption UV-Vis

I.2.2. Luminescence de Eu(III) dans [EMIm][NTf 2 ] : influence de la concentration en eau et détermination du nombre d’hydratation

Lorsque de l’eau est progressivement ajoutée au liquide ionique, et comme attendu, l’intensité des pics diminue du fait du phénomène de quenching de la fluorescence par les molécules d’eau. De plus, le rapport entre les intensités des bandes J=2 (à 613 nm) et J=1 (à 590 nm) varie. Les différents spectres enregistrés pour des concentrations d’eau de 23, 141, 607, 997, 1570, 2707, 3645, 5112, 6538, et 19466 ppm (1,9 ; 11,9 ; 51,3 ; 84,2 ; 133, 229 ; 308 ; 432 ; 552 ; 1640 mM) sont présentés sur la figure 49.

Figure 49 : Spectres d’émission d'une solution de Eu(NTf2)3 0,05 M dans [EMIm][NTf2] pour différentes teneurs en

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Du fait de la diminution de l’intensité de la fluorescence lors de l’ajout d’eau, les réglages optiques ont été modifiés au cours de l’expérience pour optimiser le signal enregistré. Pour pouvoir être comparés, les spectres ont donc été normalisés par rapport à l’intensité de la bande d’émission J=4 à 694 nm.

La variation du rapport d’intensité des deux bandes d’émission en fonction de la concentration d’eau est présentée figure 50 et montre une diminution jusqu’à une concentration d’eau d’environ 6500 ppm (0,55 M). Au-delà de cette valeur, la première sphère de coordination est saturée en molécules d’eau et ce rapport stagne alors à une valeur proche de 0,5. Comme déjà observé dans la littérature [153], l’eau est donc un ligand plus fort que NTf2. Les molécules d’eau remplacent les

anions bistriflimidure à mesure que de l’eau est ajoutée au milieu.

Figure 50 : Variation du rapport d'intensité entre les bandes d'émission J=2 et J=1 en fonction de la concentration d’eau.

Afin d’avoir accès au nombre d’hydratation pour chacune des solutions testées, on peut mesurer par spectroscopie de luminescence résolue en temps (SLRT) les temps caractéristiques de décroissance du phénomène de fluorescence associé aux bandes d’émission à 590 et 613 nm. Les relations de Kimura et Choppin [140, 141] permettent alors de relier ce temps de vie de fluorescence (τ) au nombre de molécules d’eau en première sphère de coordination (chapitre C1, paragraphe 0). La figure 51 est un exemple pour [H2O] = 23 ppm (1,9 mM) des courbes de décroissance

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Figure 51 : Décroissance de l'intensité des bandes d'émission à 590 et 613 nm au cours du temps et fits mono- exponentiels. Excitation à 532 nm, 200 spectres par courbe de déclin, délai de 1 µs, fenêtre de mesure de 150 µs.

Le tableau 18 synthétise les résultats obtenus pour les différentes concentrations d’eau. Le temps de vie τ diminue lorsque la concentration d’eau augmente et il semble atteindre un plateau à τ = 100 μs à partir de [H2O] = 6538 ppm (0,55 M). Le nombre d’hydratation augmente quant à lui de 0

pour une concentration d’eau de 23 ppm (1,9 mM) à 10 à partir de 6538 ppm. Cela signifie que le complexe initial ne contient aucune molécule d’eau en première sphère de coordination et peut s’hydrater progressivement jusqu’à en contenir 10. Grâce au nombre moyen de molécules d’eau par atome d’europium, il est, a priori, possible de calculer la concentration d’eau liée à un atome d’europium ([H2O]liée). Il est à noter que l’eau dite « liée » dans ce travail correspond à l’eau

coordonnée à l’europium qu’il ne faut pas confondre avec l’eau présente sous forme d’agrégats comme cela peut être le cas dans les liquides ioniques (chapitre A1, paragraphe ii.7). L’eau qui n’est pas coordonnée à l’europium sera dite « eau libre » et sa concentration sera notée [H2O]libre.

Néanmois, il n’est pas exclu que ces molécules d’eau libres puissent être présentes dans le liquide ionique sous forme d’agrégats et donc, liées à d’autres molécules d’eau. Les valeurs du tableau 18 indiquent que jusqu’au point correspondant à [H2O] = 6538 ppm, [H2O]liée est supérieure à la valeur

déterminée par la méthode de Karl Fischer. Ce résultat surprenant peut avoir deux explications qui ne sont pas imcompatibles entre elles. On peut penser dans un premier temps que la méthode de Karl Fischer ne dose pas l’eau liée ou en tout cas pas toute l’eau liée aux atomes d’europium. Ces molécules resteraient alors coordonnées à l’europium en solution dans le mélange de Karl Fischer. Cette hypothèse n’a cependant pas pu être formellement vérifiée. L’autre explication est liée à l’incertitude générée par l’utilisation des relations empiriques de Kimura et al. [139, 140]. En effet, ces relations ont été établies en solutions aqueuses mais leur validité dans les liquides ioniques n’a, à

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notre connaissance, jamais été vérifiée. En considérant, par exemple, une incertitude de 1 sur les nombres de molécules d’eau déterminés ainsi qu’une incertitude de 3 mM sur la concentration d’europium introduite, l’erreur relative commise sur la détermination de la concentration d’eau liée est alors comprise dans l’écart observé entre les valeurs de [H2O]liée et les valeurs dosées par Karl

Fischer.

En conséquence, il n’a pas été possible, lors des mesures de concentration d’eau, de discriminer avec une erreur raisonnable l’eau libre de l’eau liée. Il est donc compliqué de déduire de ces résultats des informations su la cinétique et la thermodynamique de la réaction d’hydratation.

Tableau 18 : Temps de vie de la fluorescence de Eu(III) déterminés grâce aux bandes d'émission à 590 et 613 nm pour différentes teneurs en eau dans le liquide ionique.

[H2O]KF (ppm) [H2O]KF (mM) n(H2O) τ (μs) N(H2O) ([140]) N(H2O) ([141]) [H2O]liée (mM) n(Eu) 23 1,2 0,02 1959 -0,1 0,1 5 141 11,9 0,24 1210 0,3 0,4 22 1115 0,3 0,5 25 607 51,3 1,03 502 1,5 1,7 83 481 1,6 1,7 87 501 1,5 1,7 83 997 79,1 1,58 352 2,4 2,5 127 346 2,5 2,6 130 1570 131 2,62 243 3,8 3,9 194 2707 232 4,64 153 6,4 6,4 321 152 6,4 6,5 321 3645 309 6,18 126 7,9 7,9 395 5112 432 8,64 105 9,6 9,6 478 6538 552 11,04 100 10,1 10,1 503 19466 1660 33,20 102 9,9 9,9 493

La figure 52 montre l’évolution du nombre d’hydratation de l’europium ainsi que celle du temps de vie de fluorescence en fonction de la concentration d’eau. La décroissance exponentielle du temps de vie de fluorescence ainsi que la variation asymptotique du nombre d’hydratation apparaissent clairement.

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Figure 52 : Variation du nombre d'hydratation calculé grâce aux différentes équations [140, 141] en fonction de la concentration d’eau (dosée par la méthode de Karl Fischer).

Insert : Variation du temps de vie de fluorescence en fonction de la concentration d’eau libre.

I.3. Spectroscopie d’absorption des rayons X