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LIQUIDES IONIQUES

II. Électrochimie analytique

II.1.

Potentiostat

Les expériences d’électrochimie analytique ont été réalisées à l’aide d’un potentiostat/galvanostat BioLogic VSP piloté par le logiciel EC-Lab V11.01. Toutes les expériences étant réalisées en boîte-à-gants sous atmosphère d’argon et le potentiostat se trouvant à l’extérieur de la boîte-à-gants, la liaison entre ce dernier et la cellule électrochimique est assurée par un branchement étanche fourni par BioLogic et adapté au câble du potentiostat. Sauf indication contraire, les expériences de voltampérométrie cyclique sont démarrées au potentiel à circuit ouvert et le sens de balayage est indiqué par la flèche sur les voltampérogrammes.

II.2.

Cellule électrochimique

Les techniques d’électrochimie analytique sont mises en œuvre dans une cellule électrochimique réalisée à façon sur le modèle des cellules Tacussel et adaptée au travail avec un faible volume réactionnel. Un schéma de la cellule est présenté figure 11. Elle possède une double- enveloppe qui permet de maintenir une température constante. Toutefois, la mise en place d’un système de circulation de fluide à travers les parois de la boîte-à-gants étant complexe, le contrôle de température est assurée par une plaque d’agitation chauffante reliée à un capteur de température PT1000 plongeant dans le bain d’huile silicone de la double-enveloppe. Grâce au

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système de double agitation (dans la double-enveloppe et dans la cellule), on obtient une température homogène et stable à ± 2°C.

Figure 11 : Schéma de la cellule électrochimique.

II.2.1. Électrode de référence

De nombreuses électrodes de référence standards existent pour les milieux aqueux. Pour les liquides ioniques, il est plus compliqué de fabriquer une électrode dont le potentiel soit parfaitement stable dans le temps et valable pour différents liquides ioniques. Il existe toutefois deux possibilités rencontrées couramment dans la littérature [86] :

- Fabriquer une électrode de référence spécifique au liquide ionique utilisé

- Utiliser une quasi-référence et donner les potentiels par rapport à une référence interne La première option a été choisie et une électrode qui sera notée AgI/Ag a été utilisée. Cette

électrode est constituée d’un compartiment séparé de la solution par un fritté et dans lequel un fil d’Ag plonge dans une solution de 0,01 à 0,1 mol/L d’un sel d’argent dans le liquide ionique d’intérêt [62, 87]. L’anion du sel d’argent doit être, dans la mesure du possible, le même que celui du liquide ionique [44]. Dans le cas des liquides ioniques constitué de l’anion NTf2, le sel de triflate d’argent

(AgOTf) est fréquemment utilisé car le sel AgNTf2 est difficile à purifier.

Comme suggéré par l’IUPAC [88], pour calibrer cette électrode et afin de pouvoir confronter les résultats obtenus à ceux de la littérature, le voltampérogramme d’une solution de ferrocène dans le liquide ionique a été enregistré (figure 12). Les intensités des pics anodique et cathodique sont égales et l’évolution des ces intensités avec la racine carrée de la vitesse de balayage a montré un comportement linéaire. Ce couple est donc bien réversible dans le liquide ionique. Le potentiel

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apparent du couple Fc+/Fc est de -0,42 V par rapport à la référence contenant 0,017 M d’AgOTf dans

[N4111][NTf2]. Cette mesure est effectuée régulièrement et la référence ainsi fabriquée se trouve être

stable à ± 0,01 V durant plusieurs mois. La même électrode a été fabriquée à partir du liquide ionique [EMIm][NTf2] et le potentiel apparent du couple Fc+/Fc est de -0,38 V par rapport à cette référence.

Ces observations sont en bon accord avec Snook et al. [89] qui ont réalisé une électrode de référence constitué d’un fil d’Ag dans un compartiment séparé par un fritté plongeant dans du [BMPy][NTf2]

contenant 0,1 ou 0,01M d’AgOTf.

Figure 12 : Voltampérogramme d'une solution de ferrocène 0,03 M dans [N4111][NTf2] enregistré à une électrode de

Pt disque (A = 0,0314 cm²) à 40°C et 100 mV/s par rapport à l'électrode de référence AgI/Ag.

Insert : Voltampérogrammes enregistrés dans les mêmes conditions à différentes vitesses de balayage.

II.2.1. Électrode de travail

Même si la majeure partie des expériences se déroule en régime de diffusion naturelle, on utilise comme électrode de travail une électrode tournante EDI101T sur laquelle on peut visser différents embouts fournis par Radiometer Analytical :

- Disque de platine de diamètre 2 mm - Disque d’or de diamètre 2 mm

- Disque de carbone vitreux de diamètre 3 mm

Lorsque nécessaire, l’électrode est mise en rotation grâce au contrôleur CTV101T associé.

Les électrodes métalliques sont activées comme indiqué dans la littérature [90] par imposition de cycles de potentiels à 100 mV/s dans une solution aqueuse de H2SO4 0,5 M entre le potentiel de

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du métal. Dans le cas du platine les cycles sont effectués entre -0,17 et 1,41 V vs AgCl/Ag et dans le cas de l’or, entre -0,20 et 1,65 V vs AgCl/Ag. On effectue autant de cycles que nécessaire jusqu’à obtenir des voltampérogrammes identiques à ceux de la littérature [91, 92]. Ce processus permet de renouveler la surface des électrodes en reconstituant les différents plans cristallins. Il est impératif de l’effectuer de manière systématique au début de chaque nouvelle expérience. Le comportement des électrodes métalliques en milieu sulfurique 0,5 M est développé plus en détails dans la partie B et les courbes d’activation y sont présentées (figure 22).

II.2.1. Contre-électrode ou électrode auxiliaire

Afin de ne pas modifier le potentiel électrochimique de l’électrode de référence, il est important de ne pas faire passer de courant à travers cette dernière. Pour ce faire, on utilise une contre- électrode (ou électrode auxiliaire) dont la surface doit être grande par rapport à celle de l’électrode de travail et qui va assurer la circulation du courant dans la cellule électrochimique. Dans cette étude, la contre-électrode est un fil de platine de 0,5 mm de diamètre entortillé sur lui-même sur une longueur de 1 cm afin d’en accroitre la surface immergée.

II.2.2. Détermination de la surface de l’électrode de travail

Même après polissage, les électrodes présentent une certaine rugosité [93]. Leur surface active est alors supérieure à leur surface géométrique (aire).

Dans le cas du platine, il a été montré que dans H2SO4 0,5 M, la charge associée à l’adsorption

d’une monocouche d’atomes d’hydrogène sur une surface activée de platine polycristallin est de 210 µC.cm-2 [91]. Ainsi, en intégrant, sur le voltampérogramme obtenu après activation, la charge

correspondant à l’adsorption des atomes d’hydrogène, on peut calculer la surface active de l’électrode. La soustraction mathématique du courant résiduel et l’intégration du signal sont effectuées grâce aux fonctions du logiciel OriginPro 2017. Le choix relativement arbitraire d’une ligne de base permettant la soustraction du courant résiduel engendre une incertitude importante sur la mesure. L’intégration peut se faire sur le signal d’adsorption (en rouge sur la figure 13) ou sur le signal de désorption (en bleu sur la figure 13). On peut alors définir un facteur de rugosité qui correspond au rapport de la surface active sur la surface géométrique. Dans notre cas la surface ainsi déterminée expérimentalement est de 0,15 ± 0,01 cm² ce qui correspond à un facteur de rugosité de 4,8 ± 0,2.

Dans le cas de l’or, il s’agit d’intégrer la charge correspondant à la réduction d’une monocouche d’oxygène [94]. D’après les auteurs, en solution aqueuse de H2SO4 0,5 M, ce processus met en jeu

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s’assurer qu’une et une seule monocouche d’oxygène s’est bien formée à la surface de l’électrode. Par conséquent, dans le cas de l’or, si la soustraction du courant résiduel est plus précise, cette méthode reste moins précise. Pour l’électrode d’or utilisée, on trouve une surface de 0,16 cm², soit un facteur de rugosité de 5,1. Dans les deux cas, cette méthode s’appuie sur des phénomènes surfaciques et monocouches, s’affranchissant ainsi des problèmes liés à la diffusion des espèces. Elle donne donc accès à la véritable surface des électrodes, tenant compte de la rugosité même la plus fine.

Figure 13 : Intégration des signaux d'adsorption et de désorption des atomes d'hydrogène à la surface du platine. La deuxième méthode mise en œuvre au cours de ce travail consiste à suivre par voltampérométrie cyclique, chronoampérométrie, ou chronopotentiométrie la réduction ou l’oxydation d’une espèce dont on connaît le coefficient de diffusion puis d’appliquer respectivement l’équation de Randles-Sevcik, de Cottrell ou de Sand (Annexe 3) pour calculer la surface de l’électrode. Comme dans le cas des électrodes de référence, le ferrocène, de par son comportement proche de l’idéalité, est souvent utilisé comme étalon dans les milieux organiques. Le coefficient de diffusion du ferrocène dans [EMIm][NTf2] étant selon les auteurs DFc = 5,34.10-7 cm2.s-1 [95] ou DFc =

6,5.10-7 cm2.s-1 [96], on en déduit par chronoampérométrie une surface active de 0.032 ± 0.002 cm²

pour l’électrode de platine, soit une rugosité de 1,0. Les expériences de chronopotentiométrie ainsi que celles de voltampérométrie cyclique confirment ce résultat.

On remarque que la surface ainsi déterminée est bien inférieure à celle déterminée suite à l’intégration du signal d’absorption des protons. Elle est très proche de la surface géométrique de l’électrode (0,0314 cm²). Une valeur similaire est calculée par la même méthode mise en œuvre

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dans une solution de Fc 2 mM dans l’acétonitrile en utilisant le perchlorate de tributylammonium (TBAP) comme électrolyte support. Cette grande différence n’est donc pas liée à l’utilisation des liquides ioniques. Comme expliqué par Bard [93], il s’agit en fait d’un effet de l’épaisseur de la couche limite de diffusion par rapport à la taille caractéristique de la rugosité de l’électrode. En effet, lors d’un phénomène transitoire, l’épaisseur de la couche limite varie avec la racine carrée du temps selon l’équation :

Ainsi, pour des expériences ayant un temps caractéristique de l’ordre de 1 ms à 10 s, la couche limite de diffusion peut avoir une épaisseur allant de quelques micromètres à plusieurs centaines de micromètres, bien supérieure à la rugosité moyenne d’une électrode normalement polie. Ainsi, à l’échelle de la couche de diffusion, l’électrode apparaît lisse pour les espèces électro-actives. Les surfaces iso-concentration sont des plans parallèles à la surface de l’électrode et la surface correspond à la surface géométrique. La figure 14 illustre ce phénomène de manière schématique.

Figure 14 : Représentation schématique de l'effet de l'épaisseur de la couche de diffusion (δ) sur la surface électro- active de l'électrode présentant une certaine rugosité (d) (adapté de [93]).

En pratique, la surface géométrique (aire) est utilisée pour les expériences classiques d’électrochimie et la différence est faite dans le texte entre la surface réelle S, tenant compte de la rugosité et la surface géométrique ou aire A.