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3. Retour d’exp•rience et enseignements tir•s de l’adoption des SMS standardis•s

3.3 Les limites du SMS

S’il n’est pas construit dans le respect de certaines valeurs ou dans un contexte propice (cf. paragraphe suivant), l’adoption d’un SMS est susceptible d’engendrer les d€rives suivantes en terme de management (Drais, 2005a ; Drais, 2005b ; Drais, 2005c ; Favaro, 2005a) :

Une approche gestionnaire € normative ‚ et € rigide ‚

L’approche gestionnaire impliqu€e par la mise en place d’un SMS peut premi…rement se r€v€ler trop ‡ normative ˆ, au sens oŒ elle impose des ‡ bonnes ˆ pratiques de pr€vention sans pour autant tenir compte des sp€cificit€s culturelles, sectorielles, industrielles, sociales, etc. de l’entreprise. L’utilisation de r€f€rentiels de management ‡ standard ˆ (dont certains auteurs critiquent l’€ indigence conceptuelle ‚ (Favaro, 2005a)) pr•conisant des pratiques de management id•ales, th•oriques et universelles ne fait d’ailleurs pas l’unanimit• (Favaro, 2005a). Le systƒme peut alors paraŒtre inadapt•, superficiel, d•contextualis• car artificiellement plaqu• sur le fonctionnement de l’entreprise, d•connect• des risques perŠus, des situations et pratiques r•elles de travail (Drais, 2005a ; Drais, 2005b ; Favaro, 2005a). Le systƒme peut •galement sembler trop formel voire redondant par rapport aux dispositifs pr•alablement mis en place par l’entreprise. Il peut alors introduire insidieusement une rigidit• excessive dans le mode de management. Un scepticisme identique „ celui rencontr• dans le domaine de la qualit• quelques ann•es plus t†t, dont certains se demandaient si elle n’•tait pas € la version d’un taylorisme vaguement revisit• ‚ (Courpasson, 1996), peut alors naŒtre face „ cette apparence de rigidit•, de formalisme, de prescription.

Une gestion € incompl„te ‚ de la s•curit•

Comme le rappelle (Aubertin & Drais, projet de publication), le SMS se bŽtit autour des principales activit•s, risques et personnel de l’entreprise. Sa logique de rationalisation est ainsi souvent € intrins„quement lacunaire ou inadapt•e ‚. Il organise la s•curit• autour des principaux risques de l’entreprise (le stress, l’abus d’alcool au travail, le harcƒlement moral sont par exemple trƒs souvent inexplor•s) mais, ce faisant, est susceptible de laisser de c†t• tout un pan d’activit•s (par exemple les chantiers

d•localis•s, les activit•s de bureaux, etc.) ou toute une population de personnes (personnels administratifs, int•rimaires, visiteurs, etc).

Une approche de la s•curit• pouvant aller … l’encontre du personnel

La mise en gestion de la s€curit€ selon l’approche SMS, parfois trop prescrite ou pens€e d’en haut (‡ bottom-up ˆ), est par ailleurs susceptible de rel€guer le personnel au simple rang d’ex€cutant passif de proc€dures et de faire de lui un objet de contr‹les multiples et permanents : contr‹le des comportements, contr‹le de la connaissance des r…gles, contr‹les du respect des proc€dures, etc (Favaro, 2005a). Elle peut avoir en mŠme temps pour cons€quence de r€duire son autonomie, en augmentant par exemple la quantit€ de r…gles et proc€dures, en lui imposant des remont€es d’information, en le d€poss€dant de son savoir-faire, de ses connaissances lors de l’€criture collective des r…gles (Cochoy et al., 1998), etc. Du fait de l’am€lioration continue recherch€e et de l’atteinte des objectifs s€curit€ fix€s, ce mode de management, peut de surcroŽt avoir tendance ‚ culpabiliser le salari€ accident€ ou ‚ faire pression sur lui pour ne pas d€clarer l’accident. Ainsi, selon la d€marche de mise en œuvre, le syst…me peut aller ‚ l’encontre du personnel, alors qu’il est cens€ en Štre paradoxalement le premier b€n€ficiaire. A ce titre, comme le rappelle (Abord de Chatillon, 2004), € tout dispositif uniquement descendant ne respectant pas les acteurs des situations de travail parait vou• … l’•chec ‚.

Une approche pouvant entra†ner une rupture du dialogue social

La mise en place du SMS dans l’entreprise peut •galement avoir pour cons•quence un recul voire une rupture du dialogue social dans l’entreprise. Le CHSCT peut en effet trouver dans ce systƒme un moyen d•guis• d’intervenir dans son domaine, de la priver de son influence sur le management de la s•curit•, de r•duire son registre d’intervention en s•curit•. Les missions et les d•cisions qui lui revenaient par exemple, en terme d’organisation de r•unions d•di•es „ la s•curit•, de r•alisation enqu…tes d’accidents, d’inspections, de v•rifications, etc. entrent d•sormais •galement dans le cadre du SMS qui peut les confier „ d’autres instances (direction, encadrement, etc) ou les traiter sous une autre forme (revue de direction, etc.). Cette d•rive, pouvant aller jusqu’„ la rupture d’un dialogue social dans l’entreprise, r•vƒle l’importance de la concertation avec le CHSCT, de son implication et de la communication avec l’ensemble du personnel durant la phase de formalisation et construction du SMS.

Une am•lioration continue conditionn•e par une forte animation du syst„me

S’il n’est pas entretenu ou anim€ par l’entreprise, le syst…me de management, une fois formalis€ et mis en œuvre, est enfin susceptible de ne pas porter ses fruits et de ne pas am€liorer de fa‰on continue les performances de l’entreprise en terme de s€curit€. L’animation et la dynamique du syst…me sont en effet garants des progr…s de l’entreprise dans ce domaine. Pourtant, comme le constate (Aubertin & Drais, projet de publication), combien d’entreprises r•activent ou dynamisent le systƒme seulement au moment des audits ? Combien ne visent qu’une conformit• de ˆ faŠade ‰ sans pour autant rechercher une v•ritable am•lioration continue (INRS, 2005) ? La mise en place d’un SMS ne peut donc garantir une am•lioration continue du management de la s•curit• et de ses performances si le systƒme lui-m…me n’est pas entretenu et anim•. Les apports et b•n•fices attendus de l’adoption de ce dispositif sp•cifique de gestion ou au contraire ses effets pervers possibles d•pendent du respect de certaines valeurs ou conditions. La prochaine section en pr•sente quelques unes.