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3.4 Les limites de la signalétique et les problèmes survenus lors de sa mise en place

Une signalétique n'est jamais véritablement terminée. La limite principale d'une signalétique réside dans sa perpétuelle évolution. Une bibliothèque et ses collections sont toujours en mouvement et il doit en être de même pour la signalétique chargée de les représenter.

Michel Piquet met en garde les bibliothécaires contre le fait que la signalétique n'est pas fixe et est susceptible d'évoluer, d'où l'importance de mener une véritable évaluation régulière de la signalétique afin de mesurer son efficacité et de réfléchir sur les possibles améliorations à y

apporter518. Audrey Voudot, Jérôme Dinei et Carine Lallemand relèvent quant-à-eux le fait que

l'absence de modularité est le « défaut fréquent des systèmes signalétiques » et qu'il conduit « à une inadaptation rapide »519. Le niveau de signalétique le plus concerné par ce problème est le troisième niveau, celui des étagères, comme le souligne avec justesse Marielle de Miribel520. En remède à ce phénomène, Nathalie Bonnevide invite à

[s]’assurer d’une bonne mise en place en intégrant à la mission du concepteur de la signalétique une mission de suivi sur une année, le temps que le fonctionnement s’installe et permette d’évaluer les éventuels dysfonctionnements auxquels remédier. De même, une maintenance et une reprise de fabrication est à prévoir dans le cadre des marchés des fabricants de signalétique521.

À la BAN, nous avons justement choisi des supports de signalétique mobile pour pouvoir facilement corriger les informations qui viendraient à être erronées avec le temps. Toutes les pancartes peuvent être réimprimées facilement et insérées dans les panneaux. De même la

518 Michel PIQUET, Court traité de signalétique : à l'usage des bibliothèques publiques, op. cit., p. 59.

519 Audrey BOUDOT, Jérôme DINEI et Carine LALLEMAND, « Réaménagement ergonomique de la signalétique d'une bibliothèque universitaire : la bibliothèque universitaire de Metz », Bulletin des bibliothèques de France [en ligne],

loc. cit.

520 Marielle DE MIRIBEL, « La signalétique en bibliothèque », Bulletin des bibliothèques de France [en ligne], loc. cit. 521 Nathalie BONNEVIDE, « Article sur la signalétique pour le compte du Ministère de la Culture » [en ligne], loc. cit.

signalétique d'étagère est réalisée à la titreuse. Bien entendu, il est plus long de détacher les étiquettes, les taper à la titreuse et les recoller sur les tablettes que de simplement déplacer un porte-étiquette, néanmoins la tâche reste réalisable. Nous préconisons de veiller pour éviter que des étiquettes inadaptées ne s'accumulent dans la bibliothèque et de vérifier à la cohérence des étiquettes au moment de l'opération de reclassement systématique*. Il est plus facile de changer deux ou trois étiquettes à chaque fois que de devoir tout harmoniser. Au niveau des romans les anciennes étiquettes indiquant des noms d'auteurs sont encore en place, mais nous prévoyons de les enlever à mesure que progressera le désherbage de ce secteur. Pour les autres niveaux de signalétique, les mises à jour seront moins fréquentes. Il convient toutefois de rester vigilant et de procéder au modifications nécessaires à chaque mouvement dans les collections. Pour tout ce qui relève de la signalétique temporaire comme les affiches d'événement, il conviendra de vérifier régulièrement la pertinence et la validité des informations affichées, qui seront retirées dès qu'elles ne seront plus à jour. Cette surveillance quasi-quotidienne devrait assurer à la BAN une signalétique durable sur le long terme.

Une autre limite que nous avons remarqué par rapport à cette signalétique est la différence entre la signalétique idéale et celle possible à mettre en place concrètement. Nous avons évoqués la possibilité d'acheter des intercalaires et des porte-étiquettes. Ne bénéficiant pas d'une enveloppe budgétaire consacrée à la signalétique, il nous est impossible de prévoir si ces dépenses sont envisageables ou non. Nous avons donc procédé de la manière suivante : d'abord nous avons cherché à mettre en place une signalétique que nous pouvions établir nous-même sans coût supplémentaire à celui du fonctionnement de la bibliothèque, puis nous avons listé les éléments qui seraient appréciables pour notre signalétique et nous avons vu avec l'UL et l'ABAN ce qu'ils pouvaient ou non financer.

De même, un certain nombre de préconisations établies lors du projet demandent beaucoup de temps afin d'être mises en place. Quasiment toutes les cotes de la BAN nécessiteraient d'être reprises afin d'être en accord avec le plan de classement décidé. De plus les anciennes cotes n'ayant pas la même forme que celles d'aujourd'hui, leur aspect ancien donne l'image d'un fonds vieillissant. Reprendre les cotes de vingt-mille documents demandent du temps surtout pour une bibliothèque dont le personnel est constitué d'un équivalent temps-plein partagé entre deux bibliothécaires, un poste de moniteur-étudiant et quelques stagiaires. Évidemment des cotes harmonisées et mise à jour selon le plan de classement constitueraient un dernier niveau de signalétique pour les usagers, mais un tel travail ne peut pas se faire en un claquement de doigts – d'autant qu'il ne s'agit pas de la seule tâche que doivent réaliser les membres de l'équipe de la BAN.

Enfin, la mise en place elle-même de la signalétique a révélée certaines surprises par rapport au projet théorique. Attacher les affiches ne s'est pas fait sans mal. Certaines ont été directement filmoluxées – avec un plastique dur – sur la surface où nous voulions les afficher, mais ce système n'était pas envisageable pour toutes les affiches. Sur certaines portes aimantées nous avons pu recourir à des aimants. Parfois il a fallu faire preuve d'imagination pour enfin trouver le système d'accroche adapté. Par exemple l'affiche indiquant l'emplacement où ranger les chaises après la conversation, n'a pas été simple à fixer. Nous étions obligés de la positionner sur le mur à l'endroit où nous souhaitions que soient rangés les chaises par mesure de sécurité. Or le mur en question ayant une surface en relief filmoluxe souple ou épais ne tenait pas. Après plusieurs tentatives infructueuses, nous avons fini par trouver la solution. Le mur n'étant pas épais, nous pouvions y enfoncer des punaises sans difficulté. Nous avons alors percer l'affiche à la perforatrice et accrocher l'affiche par deux punaises – système qui jusqu'à présent s'est révélé efficace. Pour les grandes affiches A3 toutes nos tentatives ont été couronnée d'échecs jusqu'à ce que nous investissions dans des cadres à coller sur les surfaces où nous souhaitions mettre les affiches. Nous avons également investi dans des cadre A4 dans lesquels nous glissons la signalétique temporaire. Ce système permet de changer rapidement les informations affichées et donne un rendu plus propre que les précédentes affiches collées au ruban adhésif et qui étaient froissées au bout de quelques jours. Nous avons aussi été confronté au problème de refaire les affiches lorsque certaines coquilles, qui avaient échappées à la relecture pourtant minutieuse de plusieurs correcteurs, nous étaient signalées.

Malgré tout le meilleur exemple illustrant la différence entre théorie et pratique reste celui de la couleur de la signalétique. Tout nos panneaux et nos affiches ont fait l'objet – comme nous l'avons précédemment expliqués – d'un travail informatique. Nous avons donc choisi les couleurs sur écran pensant que le rendu imprimé serait similaire. Quelle ne fut pas notre surprise en découvrant la couleur imprimée des prototypes que nous avions travaillés sur écran. En travaillant depuis un ordinateur, nous avions complètement oublié que les couleurs d'un écran relève de la synthèse additive donc du système couleur RVB (Rouge-Vert-Bleu) tandis que les feuilles imprimées sont soumis à la synthèse soustractive et au système CMJ (Cyan-Magenta-Jaune). Pour l'expliquer brièvement les couleurs que nous voyons sur un écran relève du mélange de lumière colorée, l'écran est d'ailleurs une source primaire de lumière. Une feuille est une source secondaire de lumière, c'est-à-dire qui reflète la lumière. Les couleurs imprimées sur la feuille ne sont visibles de la sorte que parce que la lumière naturelle est filtrée par l'absorption des pigments sur le papier.522

La perception des couleurs entre écran et feuille imprimée ne résultant pas du même mécanisme, il paraît normal que les rendus ne soient pas similaires. Néanmoins, nous n'avions pas pensé en

réalisant notre signalétique sur ordinateur à imprimer des échantillons de couleur pour nous rendre compte du rendu. Ce qui explique la surprise à laquelle nous avons été confrontés en découvrant le résultat. Bien sûr, la différence n'était pas très marquée – nous n'avons pas obtenu du jaune à la place du violet – mais la différence de quelques teintes plus claires ou plus foncées rendaient le résultat différents de ce que nous avions imaginé. Nous avons dû refaire certaines affiches comme pour le jaune car le contraste obtenu des lettres par rapport à la couleur de fond n'était pas celui que nous avions choisi sur écran, et le résultat n'était pas suffisamment lisible.

Une mission de signalétique comporte des limites. Il faut qu'elle soit prolongée sur le long terme afin d'être mise à jour en fonction de l'évolution de la bibliothèque sans quoi elle tombera rapidement en désuétude, en atteste les retours d'expériences des bibliothécaires que nous avons citées. D'autres limites viennent ensuite s'ajouter au moment de l'installation de la signalétique. La mise en place est le moment de se confronter à certaines contraintes qui étaient inexistantes au moment de la conception intellectuelle du projet. Nous en avons cité certaines, mais la mise en place n'étant pas achevée, peut-être d'autres contraintes apparaîtrons par la suite nous obligeant à adapter notre projet de signalétique pour le rendre réalisable. La signalétique n'est pas non plus définitive, car l'évaluation de celle-ci peut amener les bibliothécaires à procéder à des modifications pour améliorer la signalétique.