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La signalétique sert à faire passer des informations et des messages. Mais cet objectif en apparence simple soulève des questions plus complexes. En effet, il y a souvent beaucoup d'informations que les bibliothécaires veulent transmettre tandis que la place dont ils disposent pour le faire est limitée. Il convient donc de choisir les informations principales et de les formuler de la façon la plus efficace possible.

Comme le souligne avec justesse Deborah Gloy « La difficulté de la signalétique est d'en mettre ni trop peu, ni trop419. » « Tout ne peut être indiqué par la signalétique. Il faut sélectionner les éléments car "trop d'information tue l'information"420 » précise Marielle de Miribel, néanmoins l'excès inverse du trop peu d'information est également préjudiciable pour le public. À la BAN, nous avons ainsi décidé de remplacer la signalétique d'étagère au niveau des romans. Celle-ci consistait en des étiquettes collées sur les tablettes comportant un certain nombre de noms d'auteur. Pour un secteur classé par ordre alphabétique, nous avons pensé que l'indication du début de chaque lettre suffisait et nous avons supprimé toutes ces étiquettes auteurs – qui rapidement ne correspondaient plus aux documents sur les étagères. De plus nous avons estimé que le choix des auteurs qui méritait de figurer était trop arbitraires. Quels auteurs méritent une étiquettes ? Les plus célèbres ? Les plus lus ? Les plus représentés ? La bibliothèque doit rester un lieu assez neutre et

419 Deborah GLOY, La Signalétique : un enjeu dans les médiathèques, op. cit., p. 9. 420 Marielle DE MIRIBEL [dir.], Accueillir les publics, comprendre, agir, op. cit. p. 196.

permettre à ses usagers de se sentir légitimes. Si la bibliothèque choisit – même aléatoirement – des auteurs plus que d'autres les usagers peuvent y voir un message sur les auteurs que la bibliothèque plébiscite quand bien même ce ne serait pas le cas. Si seuls les « grands » auteurs – si tant est qu'il soit possible de définir ce concept objectivement – sont mentionnés, les lecteurs de romans de gare et de romans sentimentaux pourraient avoir l'impression que leurs lectures sont déconsidérées par les bibliothécaires. Si seuls les auteurs de best-sellers dans les collections sont mentionnés, les lecteurs puristes pourraient s'offusquer de l'absence d'étiquette pour certains « grands » auteurs. Enfin, si les étiquettes choisies correspondent aux auteurs les plus représentés dans le fonds, certains lecteurs élitistes pourraient reprocher à la bibliothèque de mettre Danielle Steel sur le même plan que Charles Dickens. L'indication du début de chaque lettre est un système tout aussi efficace, qui limite le nombre d'informations et reste neutre vis-à-vis des pratiques de lecture. Les intitulés eux-mêmes doivent faire preuve de neutralité. En effet, comme le signale Élodie Houde « Il faut choisir les termes les plus neutres possibles, car si la signalétique est une interprétation, elle se doit d'être l'interprétation la plus fidèle possible421. » Anne-Marie Chaintreau et Jacqueline Gascuel recommandent que le message ne compte qu'une seule idée à la fois, que le texte soit court, significatif et intelligible. Elles mettent en garde contre les fautes d'orthographe et de frappe, rappellent qu'il convient de veiller à ne pas afficher d'informations contradictoires ou périmées et

précisent qu'une bonne signalétique ne doit pas comporter de jargon bibliothéconomique422. Ce

jargon appelé « bibliothécais » est plus précis pour les professionnels mais n'évoque rien au profane comme le précise Nathalie Bonnevide423. À force d'employer certains termes quotidiennement comme périodique ou ouvrage de référence les professionnels peuvent oublier que ces termes n'évoquent rien aux usagers. Au moment de rédiger la signalétique, il est important de se demander si le message ne comporte pas de tels termes qui pourraient être remplacés par une notion plus simple. L'article de Noëlle Balley « Le bibliothécais sans peine » propose une liste de termes

techniques traduits dans le langage courant424. Audrey Voudot, Jérôme Dinei et Carine Lallemand

recommandent également de se méfier des formulations négatives – la compréhension d'une négation est en effet plus difficile à assimiler par le cerveau qui doit tout d'abord passer par l'affirmation pour ensuite la nier – ainsi que de prendre garde aux connotations associées à certains termes425. Les bibliothécaires doivent s'assurer que le message ne puisse faire l'objet d'une interprétation différente de celle voulue. Pour que les libellés soient compréhensibles ils ne doivent

421 Élodie HOUDE, Signalétique, classement et libre-accès en bibliothèque municipale quelle signalétique choisir dans

le cas du secteur audiovisuel de la médiathèque de Saint-Dié-des-Vosges, op. cit., p. 27.

422 Anne-Marie CHAINTREAU et Jacqueline GASCUEL, Votre bâtiment de A à Z : mémento à l'usage des bibliothécaires,

op. cit., p. 247.

423 Nathalie BONNEVIDE, « Article sur la signalétique pour le compte du Ministère de la Culture » [en ligne], loc. cit. 424 Noëlle BALLEY, « Le bibliothécais sans peine », Bulletin des bibliothèques de France [en ligne], loc. cit.

donc pas être ni trop abstraits ni trop abrupts, ce qui est parfois le cas des intitulé des classes de la

CDD426. Comme le rappelle Frédérique Féron, un usager recherchant des livres de cuisines dans un

fonds classé en CDD devra deviner que ces derniers se trouvent en Sciences appliquées427. Néanmoins, il est difficile de résumer chaque classe de la CDD en une expression qui résumerait sans équivoque l'ensemble de leur contenu. Il faudra donc passer par d'autres outils pour aider l'usager à se repérer dans l'organisation de ce classement.

Une autre difficulté de la signalétique est d'être compréhensible par un public qui comme le souligne Marielle de Miribel est « hétérogène en culture et en niveaux de prérequis428 ». Pour cela elle recommande l'usage de pictogrammes, accompagnés d'une légende car les pictogramme sont rarement compréhensibles sans légende429. En signalétique pour être efficace il faut permettre à l'œil de « balayer le sigle sans avoir à lire ou déchiffrer le sens du mot ou de l’image430. » Le pictogramme offre cet avantage d'être plus rapide à être perçu qu'un message textuel. L'inconvénient du pictogramme est comme nous l'avons vu précédemment la difficulté de le choisir pour qu'il soit adapté au message délivré et qu'il ne soit pas polysémique ni source de polémiques. Nous comprenons l'intérêt du pictogramme néanmoins nous n'avons pas prévu d'y recourir à la BAN pour le moment du fait de la difficulté de définir des pictogrammes. Il ne faut pas non plus oublier qu'un pictogramme n'est pas définitif et peu vieillir, comme l'exemple donné par Marielle de Miribel de l'usine qui symbolise le travail431. Certains logos peuvent être proches visuellement ce

qui complique également la tâche432. La mise en place de pictogrammes demande une réflexion que

nous n'avons pas les moyens de mener dans l'immédiat. Le choix de logos et de pictogrammes est comme le précise Marielle de Miribel un « art très difficile433 » auquel nous n'avons pas le temps pour le moment de nous adonner.

Un fléchage peut également être utile pour aider l'usager dans ses déplacements au sein de la bibliothèque. Dans son mémoire, Marion Loeffler pense qu'un parcours fléché est infantilisant pour le lecteur et le prive de la liberté de suivre le parcours qui lui plaît434. Cela est sûrement vrai dans le cas d'un parcours fléché trop détaillé, mais disposer quelques flèches directionnelles à des

425 Audrey BOUDOT, Jérôme DINEI et Carine LALLEMAND, « Réaménagement ergonomique de la signalétique d'une bibliothèque universitaire : la bibliothèque universitaire de Metz », Bulletin des bibliothèques de France [en ligne],

loc. cit.

426 Frédérique FÉRON, Le Classement et la signalétique en bibliothèque, op. cit., p. 24. 427 Ibid., p. 24.

428 Marielle de MIRIBEL, « La signalétique en bibliothèque », Bulletin des bibliothèques de France [en ligne], loc. cit. 429 Ibid.

430 Ibid.

431 Marielle DE MIRIBEL [dir.], Accueillir les publics, comprendre, agir, op. cit. p. 208. 432 Ibid. p. 209.

433 Ibid.,. p. 209.

croisements est au contraire un moyen d'aider l'usager à s'orienter voire un moyen de l'inciter à fréquenter d'autres espaces. À la BAN, nous pourrions mettre une flèche à l'entrée de chaque box pour en inciter les lecteurs à aller consulter les livres qui s'y trouve. Cela pourrait rendre plus visibles les recueil d'anthologies. Quelques flèches pourraient indiquer la Reading room depuis l'espace documentaire. L'espace étant petit, il ne faudrait pas utiliser davantage de flèches car cela saturerait l'espace d'informations.

Le manque de place se retrouve également à propos de la signalétique elle-même. Les étiquettes de tablettes sont limitées à la taille de la tablette et les entêtes des rayonnages à l'emplacement prévu à cet effet sur les étagères. La signalétique à la BAN étant autant que possible bilingue, cela donne lieu à des intitulés assez longs. Il convient donc de choisir les termes plus compréhensibles du public – sinon les intitulés deviennent inutiles – mais en cas de synonymie entre deux expressions, l'intitulé le plus court. Comme le conseille Michel Piquet : « [e]ntre deux synonymes préférer celui qui comporte le moins de syllabes435 ». Il faut également rappeler que les messages trop longs peuvent décourager les usagers de les lire. Il convient donc d'aller à l'essentiel de la façon la plus concise possible. Lorsqu'un pictogramme peut remplacer un petit discours mieux vaut privilégier le pictogramme – si celui-ci est clair et sans équivoque – car comme le précise Amandine Hoelliger « Tout le monde ne lit pas forcément du début à la fin une feuille A4 sur laquelle on expliquerait les méfaits du téléphone dans les bibliothèques. Le pictogramme frappe l'œil et l'intelligibilité en est clair.436 » Idéalement les pancartes ne devraient avoir qu'un seul auteur ou au moins un référent qui valide chaque nouvelle pancarte. Sans cela il serait difficile d'assurer une certaine harmonie du ton entre les pancartes437. Enfin mieux vaut laisser les pancartes affichées dans les bureaux quelques jours avant de les intégrer à l'espace de la bibliothèque, afin de se laisser le temps de repérer les erreurs de formulation, d'orthographe et de frappe. La relecture par des collègues et/ou des proches est également très utile pour cela438.

Enfin pour que les messages délivrés soient plus visibles et plus clairs pour les usagers, il est important de s'intéresser à leur forme. Gras, italique et souligné doivent-être utilisé avec parcimonie

car comme le rappelle Élodie Houde leur logique pourrait vite échapper aux usagers439. Mieux vaut

les réserver à un mot vraiment important sur une affiche. De même utiliser le gras, l'italique et le soulignement sur une même affiche serait trop lourd et trop excessif, mieux vaut ne choisir qu'un

435 Michel PIQUET, Court traité de signalétique : à l'usage des bibliothèques publiques, op. cit., p. 108. 436 Amandine HOELLINGER, La Signalétique, op. cit., p. 17.

437 Michel PIQUET, Court traité de signalétique : à l'usage des bibliothèques publiques, op. cit., p. 108. 438 Ibid., p. 108.

439 Élodie HOUDE, Signalétique, classement et libre-accès en bibliothèque municipale quelle signalétique choisir dans

seul des styles. Il faut également éviter de tout écrire en lettres capitales, car cela n'améliore pas la visibilité du message. De plus cela pourrait être mal interprété par les usagers, car d'après les règles de la Nétiquette – règles de politesse sur Internet – écrire en majuscules équivaut à crier440. Enfin il est important de respecter une certaine harmonie dans la forme de la signalétique comme le signale Nathalie Bonnevide en ayant recours à « un même lettrage, une même couleur de fond, une même

hauteur d’emplacement pour un même type d’information441 ». Il faut comme le rappelle Audrey

Voudot, Jérôme Dinei et Carine Lallemand que les différents niveaux de signalétique soient bien identifiables et différenciés « par des critères physiques ou typographiques tout en conservant une

cohérence et une homogénéité avec l’ensemble du système signalétique442 ». Pour ce qui est des

critères de visibilité nous avons vu dans une partie précédente comment choisir la taille des caractères et les couleurs utilisées pour une meilleures visibilité et une accessibilité pour les publics en situation de handicap.

Les quelques consignes que nous avons présentées visent à améliorer la clarté du message de la signalétique pour rendre plus visibles et compréhensibles les informations délivrées par la bibliothèque. Elles ne sont toutefois que d'ordre générale et doivent être adaptées en fonction du support et de la bibliothèque. Une bibliothèque utilise différents supports pour sa signalétique. Il convient de s'intéresser à chaque support individuellement pour adapter l'information qui y figure et la rendre plus efficace.