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Concernant la sécurité des personnes et la protection des biens dans les établissements recevant du public, les pouvoirs publics (88) ont fait le choix d’instaurer une législation empirique. Son caractère exhaustif lui confère une particularité qui la différencie du droit en vigueur dans les pays voisins. Ainsi, concernant les normes juridiques françaises opposables aux ERP, la partie législative du code de la construction et de l’habitation est constituée de seulement quatre articles alors que sa partie réglementaire en compte cinquante-cinq.

Du fait de sa mission régalienne, l'Etat reste le garant de la sécurité de la nation mais aussi des personnes et des biens notamment dans les ERP. Toutefois, cela rend la réglementation pesante et complexe lorsqu'il s'agit de la mettre en place pour lutter contre les risques d'incendie et de panique dans les ERP.

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MAYAUD, Yves, « L'identification de l'obligation de sécurité », RSC, 2002, p. 104.

88

« Les pouvoirs publics regroupent des fonctions régaliennes de l’Etat, comme la défense, la justice, la

sécurité publique et les forces de l’ordre (armée, police et gendarmerie). Cette thématique intègre également les Affaires étrangères et européennes ; à cela s’ajoutent les activités des institutions françaises, y compris celles de la Cour des Comptes » définition donnée par la Cour des Comptes.

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Cependant, l'Etat n'est plus le seul à prendre les décisions. En effet, suite à la déconcentration (89) des moyens et des services de l’Etat et à la décentralisation (90) de 1982, le maintien de la sécurité dans les ERP n'est plus son domaine exclusif. Les collectivités territoriales y contribuent, notamment les élus des communes et principalement leur maire. Cependant, ceux-ci restent placés sous l’autorité des préfets et une confusion au sujet de l'autorité responsable est quelquefois possible lorsqu'il s'agit de la sécurité-sûreté des lieux publics. Elle risque de compliquer les missions car il faut au préalable non seulement déterminer les moyens nécessaires mais surtout désigner celui qui les chapeaute.

Les autorités de police des ERP prennent les décisions après que des avis techniques lui ont été donnés. Les Services Départementaux d'Incendie et de Secours (SDIS) sont impliqués en tant que garants de la prévention dans les établissements recevant du public. En effet, selon les dispositions de la loi du 5 mai 1996 (91), ils assurent des missions de contrôle et de conseils techniques portant sur l’application de la règle.

Concernant la sécurité des ERP, les collectivités territoriales ont une obligation de résultats. Elles doivent assurer le suivi des études de dossiers relatifs aux demandes d’autorisation de travaux dans les ERP. Dans ce cas, elles appliquent le code de l’urbanisme. Les visites de sécurité, effectuées avant l’ouverture au public d’un établissement puis périodiquement, veillent au respect des règles du code de la construction. Malgré la déconcentration et la décentralisation, le pouvoir central continue de contrôler l’implication des communes. Il demande en effet aux préfets de faire remonter à la Direction de la Sécurité Civile (DSC) les bilans annuels des travaux des commissions de sécurité.

89

BECET, Jean-Marie, Professeur de droit public à l'université de Bretagne occidentale a défini la déconcentration dans « Les institutions administratives » dans Economica, 4ème édition de 1977, comme étant « une modalité de la centralisation. Elle consiste à accorder à des organes non centraux un pouvoir

de décision limité, étant donné que les agents sont soumis au pouvoir hiérarchique d’une autorité centrale compétente. »

90 Auteur d’un rapport sur l'organisation décentralisée de la République, René GARREC définit la

décentralisation en ces termes : « La décentralisation consiste dans le transfert d’attributions de l’Etat à

des collectivités ou institutions différentes de lui et bénéficiant, sous sa surveillance, d’une certaine autonomie de gestion ».

91

Loi n° 96-369 du 5 mai 1996 relative aux services d'incendie et de secours, Journal officiel n° 105, 4 mai 1996, p. 6728.

« Les pouvoirs publics regroupent des fonctions régaliennes de l’Etat, comme la défense, la justice, la

sécurité publique et les forces de l’ordre (armée, police et gendarmerie). Cette thématique intègre également les Affaires étrangères et européennes ; à cela s’ajoutent les activités des institutions françaises, y compris celles de la Cour des Comptes » définition donnée par la Cour des Comptes.

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La plupart des personnes méconnaissent cette législation. Pourtant le droit régissant les rapports entre les hommes est présent à tous les niveaux et il est censé protéger tous les individus comme le prévoit le préambule de la Constitution du 4 octobre 1958 (92). En réalité, les personnes qui doivent l'appliquer n'en retiennent que sa complexité. Il est vrai que les quelques 1 137 articles (93) qui définissent le droit encadrant la sécurité des établissements recevant du public forment un ensemble volumineux où se perdent les non-spécialistes.

Les multiples ajouts pour préciser les textes sont en partie la cause de la complexité du droit et cette imperfection est accentuée depuis une dizaine d’années par le rôle prédominant de l’Etat et de ses services.

Pour la majorité des citoyens, les difficultés d’application de la règle découlent exclusivement de certaines incohérences contenues dans la réglementation. Leur étude, du fait que les décideurs publics ne les corrigent pas, tend à prouver que le législateur ne se préoccupe pas du principe de clarté du droit opposable aux ERP. Cela n'est pas sans risque pour l’Etat car des administrés peuvent porter plainte auprès d'un tribunal administratif.

D’autre part, une analyse des contraintes administratives que les dispositions réglementaires imposent aux élus locaux et aux agents du service public concernés est nécessaire pour démontrer que cette complexité pèse aussi sur le secteur public. En outre, certains choix politiques sont incompatibles avec les objectifs initiaux du droit dans ce domaine et sur le plan juridique, certaines orientations sont de nature à fragiliser la qualité du service public.

92

Préambule de la Constitution du 4 octobre 1958 :« Le peuple français proclame solennellement son

attachement aux Droits de l'Homme et aux principes de la souveraineté nationale tels qu'ils ont été définis par la Déclaration de 1789, confirmée et complétée par le préambule de la Constitution de 1946, ainsi qu'aux droits et devoirs définis dans la Charte de l'environnement de 2004. En vertu de ces principes et de celui de la libre détermination des peuples, la République offre aux territoires d'Outre-Mer qui manifestent la volonté d'y adhérer des institutions nouvelles fondées sur l'idéal commun de liberté, d'égalité et de fraternité et conçues en vue de leur évolution démocratique. »

93

Rapport n° 014-047/13-083 bis/n° 2013-172R de juin 2014 de l’Inspection Générale de l’Administration, portant sur la prévention du risque d’incendie dans les établissements recevant du public et les immeubles de grande hauteur, adressé au ministère de l’Intérieur, synthèse, p. 5.

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