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La 5 ème catégorie concerne les Petits Etablissements (PE).

5/ La justification de ce travail d’analyses et de recherches

Cette thèse s'appuie sur le contexte actuel de crise qui oblige le renforcement de la sécurité extérieure et intérieure pour assurer la protection de la population. Le droit appliqué à la sécurité dans les établissements recevant du public a été peu analysé dans sa globalité jusqu'ici. En effet, il porte sur un point spécifique de la sécurité : la prévention dans les établissements recevant du public.

Le plan de cette thèse est bâti sur deux parties et dans chacune, deux grands axes d’analyse sont explorés. Tout d'abord, sont étudiées les conséquences de la complexité de ce droit technique et spécialisé opposable aux ERP qui heurte certains principes fondamentaux du droit puis les moyens d’y remédier. Ensuite, en complément, sont analysés les récents choix politiques, facteurs d’une évolution progressive (mais non exhaustive) d’un droit imparfait et en partie dépassé. Ce travail permet une étude théorique et analytique des sujets étudiés. Cependant, chaque rubrique ne peut être traitée qu'en s'appuyant sur ses références réglementaires qui sont complexes et en examinant les enjeux juridiques remis en cause.

Ainsi, la partie première porte sur l’analyse critique de la complexité technique et théorique du droit actuel et de ses ajouts. Certains ont été imposés par l’Union Européenne avec des textes de transposition, cependant les principales difficultés sont le résultat d'une législation nationale très technique comportant de multiples défauts. Ils sont connus et pourraient donc être corrigés mais cela n'est pas fait. Au contraire, ces faiblesses et cette complexité sont accentuées par la lourdeur des procédures administratives que doivent respecter les administrés et les agents des services publics. En outre, il faut s’interroger sur la politique de prévention qui est menée et se demander si elle est encore en adéquation avec les moyens humains, leur niveau de compétences et le coût des missions et des obligations

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qu’elle impose. Au final, il en résulte un droit complexe qui n’assure plus une stabilité juridique, compte tenu du modèle choisi, imparfait par manque de clarté de la législation et difficile à respecter par les acteurs publics et privés de la sécurité du fait de son illisibilité.

Dans un titre premier, l'étude traite des défauts relevant de la politique de prévention ambitieuse et du modèle de droit choisi par les gouvernants. Actuellement, l’administration subit les conséquences de la prédominance des services publics dans cette mission que l’Etat veut régalienne. Le législateur fait supporter aux collectivités territoriales la totalité de la charge des moyens financiers et humains nécessaires pour assurer l’exécution et le contrôle exhaustif de l’application de la règle. Ceci est incompatible avec une politique de Révision Générale des Politiques Publiques (RGPP) (69). Ainsi, une équation à plusieurs inconnues juridiques se pose : les dispositions législatives et réglementaires prises par l’exécutif sont-elles encore en rapport avec les moyens donnés à la fonction publique pour accomplir ses missions et sont-elles de nature à pérenniser un service public de qualité ? Les réponses par la négative pointeront les défauts de la politique de prévention qui est menée. Dans ce cas, les décideurs publics devraient revoir la portée du droit opposable aux ERP et mettre en adéquation les missions de contrôle de l’application du droit avec les moyens humains disponibles et compétents.

De plus, de nombreuses incohérences entravent directement l'application du droit. Certaines ont pour origine les difficultés rencontrées dès la lecture des textes réglementaires, ce qui engendre des incompréhensions et des complications, surtout pour les non spécialistes. D’autres anomalies imputables à la précipitation ou à des non-sens (voire des contradictions) dus au législateur font obstacle au respect de la règle. En l'absence de clarté du droit, si un litige de cet ordre est porté devant un tribunal administratif, le juge ne pourrait pas réfuter les arguments du demandeur, par exemple un chef d’établissement.

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Révisions Générales des Politiques Publiques de juin 2007 (remplacée en 2012 par la MAP : modernisation de l’action publique) : modernisation de l’action de l’Etat voulue par le Président de la République Nicolas SARKOZY.

Objectif : « Cette révision a pour ambition de remettre à plat l’ensemble des missions de l’État, sans

tabou ni a priori, pour adapter les administrations aux besoins des citoyens. La révision vise à identifier les réformes qui permettront de réduire les dépenses de l’État, tout en en améliorant l’efficacité des politiques publiques. Les économies qui pourront être dégagées grâce aux réorganisations et à la diminution des effectifs permettront de financer le renforcement de certaines politiques et les grandes priorités du gouvernement. » (Dossier de presse des services du Premier Ministre).

MAP : Modernisation de l'action publique - thème central concernant la réforme et la modernisation de l’action de l'État autour de la nouvelle décentralisation.

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Le titre second traite des facteurs qui entravent directement l’application du droit. Malgré les qualités reconnues au droit français, si on se réfère aux statistiques nationales concernant les incendies dans les ERP, ce sont, cependant, les facteurs négatifs de cette législation qui doivent interpeller les pouvoirs publics. L’intérêt général passe par une obligation de résultat, ce qui serait possible avec un droit précis et facilement compréhensible par les administrés.

La versatilité du législateur est souvent mise en cause. Sur certains sujets, les décideurs publics pratiquent une surenchère des mises en sécurité en complétant trop souvent des textes réglementaires ou en modifiant des normes qui deviennent ainsi trop techniques. En revanche, sur d’autres points importants, déjà signalés comme devant être corrigés, aucun changement n'est apporté aux dispositions réglementaires. Ces défauts favorisent l’instabilité du droit, ils risquent d’aggraver sa complexité en ne prenant pas en compte certains vides juridiques.

La lecture des normes juridiques reste un exercice pratique difficile pour les administrés et le fait qu'elles proviennent de diverses sources ne facilite pas l’application du droit opposable aux ERP. Il est notamment ardu, même si une procédure de dérogation est possible, d’adapter la législation aux établissements occupant des locaux anciens ou à des bâtiments construits selon des normes obsolètes. De même, en l’état actuel du droit, la lecture d’un procès-verbal de visite d’un ERP avec un avis défavorable à la poursuite de l’exploitation ne permet pas à un chef d’établissement de définir les mesures correctives prioritaires qu’il doit prendre. En ne remédiant pas à l’illisibilité du droit, le législateur bafoue un de ses principes fondamentaux (égalité) et favorise les recours à la justice. Force est de constater d'ailleurs que, de plus en plus fréquemment, les citoyens font appel aux juridictions administratives pour régler leur litige avec les services publics.

La partie seconde porte sur l’analyse des derniers choix politiques qui semblent ne pas donner à cette législation les moyens pour permettre une évolution de ce droit incomplet et aux multiples défauts. Dans le contexte sécuritaire actuel, les gouvernants français doivent redéfinir les objectifs d’une nouvelle sécurité publique de qualité. Cela, d'ailleurs, devrait se faire à l’échelle européenne, tous les pays membres adopteraient des mesures communes pour assurer la protection des personnes et des biens dans les ERP qui sont de nos jours très vulnérables. C’est donc à ce niveau que ce sujet doit être traité.

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Le titre premier de cette partie est consacré à la difficile mutation de l’actuel droit français vers un modèle européen. Les dernières décisions politiques ne montrent pas une réelle volonté de changement, en effet, les décideurs publics ne corrigent ni ne modifient les erreurs, pourtant nombreuses, de la législation. De plus, ils ont fait le choix d’une évolution progressive de la réglementation, ce qui est en contradiction avec la mutation rapide, voire brutale, de la société.

Il est pourtant indispensable que le législateur supprime en interne les anomalies recensées dans les textes en vigueur. Actuellement, les décisions se traduisent par des textes qui aboutissent à un nouveau modèle de droit sans fondement légal ni opposable aux tiers. Vouloir légiférer avec un « droit souple » est un enjeu difficile. Cependant, il faut revoir en priorité les textes existants qui vont à l'encontre des principes fondamentaux du droit car ils engagent la responsabilité de l’Etat devant les tribunaux administratifs. Pour cette raison, tout nouveau texte interne devrait être accompagné d’une étude sur sa légalité juridique et d'une mise à niveau des codes impactés.

La prévention contre les risques d’incendie et de panique est toujours une mission régalienne. Cela semble anachronique, vu la situation de crise financière, les changements d’orientations politiques, la réorganisation administrative de l’Etat, le redécoupage du territoire national et la rationalisation des moyens et des tâches relevant du service public Un certain libéralisme du droit s’impose car cette législation directive pèse lourdement sur les administrés et ce droit prescriptif ralentit le fonctionnement du service public En abandonnant la charge de cette mission régalienne, les décideurs publics pourraient faire évoluer ce droit et adopter celui libéral et jurisprudentiel en vigueur dans les pays anglo-saxons.

Dans le titre second de cette partie seconde sont analysées les nouvelles missions du législateur, il doit répondre aux nouveaux enjeux de sécurité et sûreté des citoyens et trouver les moyens pour y faire face Que cette démarche se fasse en interne ou qu’elle soit communautaire, des moyens juridiques devraient l’accompagner, cependant, certaines dispositions existantes sont déjà des entraves à l’évolution du droit dans ce sens.

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L’absence d’une culture de sécurité civique, capable d’assurer une prévention des risques et des interventions en situation de crise au profit des collectivités et de la population, est un frein à une évolution rapide d’un droit modernisé. Les quelques dispositions prises récemment concernant une citoyenneté participative (70) sont insuffisantes et trop tardives. Aujourd’hui, comme depuis de nombreuses années, l’Etat prend en charge les administrés et dirige son Administration.

Depuis peu, les menaces liées à des attaques terroristes ont fait prendre conscience de la nécessité d’assurer une sécurité globale des personnes et la protection des lieux ouverts au public. Pourtant, le législateur traîne à redéfinir et à élargir les missions des agents du service de sécurité incendie et d’assistance à personnes (SSIAP). Il apparaît essentiel que le statut des agents de sécurité et de sûreté soit modifié et que l'on leur accorde des compétences communes renforcées.

En l’état actuel du droit, il est impossible à la législation d'assurer dans tous les ERP la protection contre les risques d’incendie et de panique et surtout contre les menaces d’attentats. Les plus vulnérables de ces lieux publics sont principalement les locaux réservés pour des fêtes, les établissements de plein air, les grands centres commerciaux, les bâtiments classés aux monuments historiques, les établissements d’enseignement ou des espaces accueillant des manifestations événementielles. Certains ERP regroupant plusieurs de ces activités, les autorités préfectorales doivent élargir l'étude de sécurité publique, la nuancer et la renforcer pour toutes les demandes d’autorisation soit de construire un ERP soit d’organiser une manifestation publique (par exemple, dans ce cas, elles exigent que l'espace soit clôturé).

Le législateur confronté aux nouveaux enjeux de la sécurité du monde contemporain rencontre d'autres obstacles.En effet, la prévention contre les risques d’incendie et de panique reste limitée aux seuls établissements recevant du public, alors que des feux destructeurs se déclarent également dans les bâtiments d’habitation, les lieux de travail, les installations classées pour la protection de l’environnement et les immeubles de grande hauteur. Une simplification importante rendrait le droit plus lisible, il suffirait pour cela de regrouper toutes les mesures de sécurité les concernant.

70 Circulaire n° 10CJ1117146J du ministère de l’Intérieur, de l’Outre-Mer, des Collectivités Territoriales et

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De plus, la législation est cantonnée au seul risque d’incendie, alors que d'autres menaces, notamment terroristes, visent les personnes et les biens et sont souvent plus meurtrières qu’un incendie. Pour la rendre plus efficace, des travaux juridiques des législateurs français et européens devraient approfondir les différents dispositifs.

En conclusion de ce travail de thèse, il ressort que malgré des sujets de préoccupations sécuritaires graves et communs aux Etats membres de l’Union Européenne, le gouvernement français ne semble pas juger urgent de faire évoluer le droit national dans ce domaine. Cependant, sa mutation vers un modèle plus libéral semblable à celui d’autres pays de l’Union est prévisible, d'autant plus qu'elle est techniquement réalisable.

Compte tenu du climat d’insécurité durable dans tous les pays, il semble essentiel d'instaurer un droit communautaire relatif à une sécurité qui inclurait celle de tous les citoyens européens. Pour cela, l'implication du Parlement Européen s’impose. L’absence de sa participation dans ce domaine constituerait une violation de la politique européenne de sécurité.

En 2014, cette volonté de construire une politique commune de sécurité sur la base d'un pacte européen pour « renforcer la coopération antiterroriste », avait été montrée par le Premier Ministre Manuel Valls, lors du mini-sommet Franco-Belge (71). Par ailleurs, « la France et l’Italie militent pour le renforcement des liens en matière de sécurité et de

défense » (72). Si le Parlement Européen n'intervenait pas, cela serait de nature à fragiliser davantage cette institution car les citoyens mettraient en doute sa capacité d’apporter de véritables solutions aux problèmes fondamentaux.

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Article du journal le Parisien du 01 février 2016.

Site : http://www.leparisien.fr/faits-divers/attentats-mini-sommet-franco-belge-pour-ameliorer-la-lutte- antiterroriste-01-02-2016-5504337.php.

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Article du journal le Monde du 22 août 2016.

Site : http://www.lemonde.fr/europe/article/2016/08/22/mini-sommet-au-large-de-l-italie-pour-rapprocher- les-europeens_4985894_3214.html.

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PARTIE PREMIERE: LE BILAN CONTRASTE DU DROIT OPPOSABLE AUX