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Les limites du développement durable

La mise en valeur des centres historiques en Algérie

C. Phase III : Rédaction finale du plan Permanent de Sauvegarde et de Mise en Valeur du Secteur Sauvegardé :

1. Résultats et Constatations

1.1. Les limites du développement durable

Le développement durable, durant ces dernières décennies, a pris beaucoup d’ampleur sur la scène internationale. Il est devenu une sorte de cause mondiale qui se veut être partagée par les citoyens de la planète entière.

Devant la frénésie de la consommation moderne, qui au nom de la croissance économique est en train de bafouer les ordres sociaux et écologiques mondiaux, le développement durable apparait comme la solution de développement par excellence pour l’humanité qui concilie entre le développement économique, l’environnement naturel et le développement social, comme le définit la déclaration de Rio en 1992.

Aujourd’hui le développement durable est présent sur tous les francs de la recherche ; Il englobe un éventail de disciplines très étendu allant des sciences physiques aux sciences humaines, en passant par les sciences de la vie et les sciences de l'ingénieur. « Ce succès peut

119 être ressenti comme fort réconfortant, dans la mesure où l’expression de développement durable est porteuse d’un condensé de valeurs essentielles de ce que l’on pourrait appeler un humanisme moderne »2

Comment ne pas adhérer à un système qui propose un développement qui soit économiquement rentable, socialement équitable et écologiquement respectable ; un développement qui respecte le pluralisme culturel, protège les identités locales et ne compromet pas les capacités des générations futurs à répondre à leur propre besoin ? C’est en effet cette « forme rhétorique qui cherche à concilier les contraires »

.

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qui donne au développement durable tant de succès et en même temps, tant de réticence. Pour les adeptes du non développement durable le terme de l’utopie est souvent cité, du moment où le développement durable pourrait passer pour une théorie ou un vœu pieu, au pire une mode ; « depuis la dernière décennie, le développement durable est devenu le leitmotiv de tous les acteurs politiques […] et cela, quel que soit le pays »4

Le cas de la Médina de Fès que nous avons étudié dans la Partie 2, en est l’exemple. Le projet qui a été présenté au gouvernement marocain comme « le projet de développement durable par excellence » à la fin, n’avait rien de durable. Pourtant sur le papier, le projet avait tout pour plaire, mais dans la pratique ce dernier a montré des lacunes et des difficultés énormes dans sa mise en œuvre. Par contre, la Banque Mondiale, quand à elle, a bien utilisé le labelle « développement durable » pour octroyer du crédit au gouvernement marocain, preuve que le développement durable fait vendre.

, il relève d’avantage de l’incantation que de la mise en œuvre.

Depuis un certain temps, on commence à observer un léger recul du développement durable de la scène internationale. Ce recul a été fortement ressenti lors de la Conférence de Copenhague sur le Climat en décembre 2009 pour reprendre les propos du représentant de Greenpeace-France qui disait : « les résultats de la conférence étaient un désastre. Cela représente en fait plusieurs pas en arrière par rapport au Protocole de Kyoto. Il n’y a aucune substance. Il n’y a plus aucune référence à la science ». Ce recul est donc rattaché à la

2

Marcel, Jollivet. Le developpement durable, de l'utopie au concept. Paris: Elsevier, 2001, P. 9.

3

Rist, G. le développement historique d'une croyance occidentale? Paris: Presse de la Fondation des Sciences Politiques, 1996.

4

AGORA la média citoyenne. http://www.agoravox.fr/actualites/economie/article/developpement-durable-et- utopie-4964 (accès le 10 3, 2010).

120 conceptualisation même de la notion du développement durable ; cette dernière s’est tellement élargie, qu’elle apparait aujourd’hui comme ambiguë.

La quantité de documentation traitant du développement durable que nous avons du trier pour l’élaboration de ce mémoire montre qu’il est présent dans toutes les échelles de décisions : depuis celles qui traitent des problèmes de la planète (réchauffement climatique, la lut contre la pauvreté, la démocratisation, etc.) jusqu'à celles qui relèvent du comportement individuel (modes de transport, commerce équitable, trie des ordures, etc.) en passant par celles des niveaux des collectivités (promouvoir la gouvernance, de la pluridisciplinarité, protection de la biodiversité, etc.)

C’est ce caractère un peu vaste, un peu généraliste du développement durable qui laisse de la place à l’hypothèse et à l’auto-interprétation. De nombreux projets de développement par le monde qui n’ont rien de durable sont présentés par leurs détenteurs comme fervemment durable estimant qu’ils respectent les limites environnementales et sociales. C’est le cas du projet quartier Hafsia de la Médina de Tunis que nous avons développé dans la Partie 2.

Primé à deux reprises par le prix Aga Khan d’architecture, ce projet est souvent présenté dans la littérature comme un projet de réhabilitation durable. Ses élaborateurs mettent en avant le projet de l’aide sociale à la réhabilitation (crédits de réhabilitation bonifiés avec un taux d’intérêt de 5% remboursable sur 15 ans) et celui du projet financier « la non subvention par l’Etat » dont il a permis le développement économique du quartier. Hors, en étudiant le projet de plus près nous nous sommes aperçu que la réhabilitation qui était dans ce cas sensée améliorer les conditions de vie des habitants du quartier a été opérée au détriment des plus vulnérables, et le choix de la mise en valeur du quartier à été fondé sur le renouvèlement de la population concernée par une plus aisée.

En effet, il est aujourd’hui encore difficile de juger de la durabilité ou non d’un projet. « Le conseil du développement durable n’exprime pas la différence entre ce qui est un développement durable et ce qui ne l’est pas »5

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Frey, Patrice. Making the Case: Historic Preservation as Sustainable Development. Washington, D.C.: The National Trust for Historic Preservation, 2007, P. 15.

, en d’autres termes il n’existe pas des mesures d’évaluations des indicateurs de développement durable dont on pourra se baser pour

121 évaluer la durabilité d’un projet ; d’où le besoin de développer des « Guidelines » pour le développement durable.