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Les limites des approches traditionnelles du changement ou comment une mauvaise utilisation de la

II. LA CONSTRUCTION DES DISCOURS D’ACCOMPAGNEMENT OU COMMENT LA

3.1. L ES DISCOURS D ’ ACCOMPAGNEMENT OU COMMENT SUSCITER LA CONVERSATION ?

3.1.2. Les limites des approches traditionnelles du changement ou comment une mauvaise utilisation de la

inefficace.

Un changement, nous venons de le voir, suppose la mise en relation d’acteurs humains et non-humains, ce qui implique de prendre en compte à la fois les individus, et les outils, la matérialité qui les entoure. Dans cette conception communicationnelle du changement, l’accompagnement doit donc s’orienter vers chacune de ces entités.

Or dans les deux approches que nous avons envisagées jusqu’ici, il semble que les actions et les discours d’accompagnement du changement se tournaient soit vers l’un, soit vers l’autre, mais jamais vers les deux. Ce phénomène peut trouver une explication dans le modèle communicationnel dont ces approches s’inspirent pour envisager le changement. Nous allons ici revenir, tour à tour, sur chacune des deux approches, et nous tenterons de comprendre en quoi leur conception de la communication a été à l’origine d’accompagnements lacunaires.

3.1.2.1. Retour sur l’approche managériale : une communication fonctionnaliste.

Selon la conception fonctionnaliste du changement, ce dernier est basé sur les fonctionnalités de l’outil en tant qu’il est porteur de normes de fonctionnement, de contraintes. Ainsi, ce système normatif porte en lui ses modalités d’usage. Et par là même, il contient la manière dont les acteurs vont devoir l’utiliser, en se pliant à ses propres règles. Dans cette perspective, l’objet technique est considéré comme étant programmé pour ne permettre que la bonne pratique, toute autre éventualité étant rejetée. Ainsi, les utilisateurs devront coopérer autour de cet outil, l’utiliser dans des structures d’interaction modélisées par l’outil lui-même.

Suite à une telle conception de l’outil, il semble que les modes d’accompagnement seront alors destinés à faire en sorte que les acteurs se plient à un type de comportement. Il s’agit d’une gestion normative et prescriptive du changement. Les modèles proposés par les sciences de gestion que nous avons introduits précédemment relèvent de ce type d’accompagnement en ce sens qu’ils cherchent à imposer une logique d’opérationnalité, une ligne de conduite. L’accompagnement consistera alors en des outils de transmission de cette bonne conduite, pour faire en sorte que les acteurs de l’organisation s’y soumettent. Le changement est à sens unique, et il n’est pas laissé d’autre choix que de s’en accommoder. La communication ainsi considérée ne vise qu’à faciliter la conformation des acteurs à l’évolution de l’organisation.

En effet, si l’on considère la présentation des modèles de sciences de gestion effectuée lors du chapitre précédent, il nous apparait bien que la communication y était envisagée par le bais d’interventions de managers permettant, à force de formations et de réunions de groupe, à présenter la manière dont les acteurs devraient se comporter pour faciliter la mise en œuvre du changement. Et c’est dans le cadre de cette transmission qu’intervient la communication : elle permet aux dirigeants de communiquer avec les membres de l’organisation. Mais dans cette perspective, l’organisation est perçue comme étant une entité facilement malléable. Les seules problématiques qui habitent les managers consistent à savoir comment transmettre aux subordonnés le changement conçu par la direction, ou quels seront les « bons signaux » à envoyer aux subordonnés pour les faire adhérer.

Ainsi, la communication joue ici le rôle d’outil d’optimisation de la mise en œuvre en tant qu’instrument de transmission de messages permettant la conformation des comportements.

Dans le cadre de cette approche, il semblerait que l’aspect humain soit laissé de côté. En effet,

mis à part le fait qu’il faille que les acteurs se plient aux normes dictées par les outils, la dimension humaine est quasi-absente de cette conception du changement.

3.1.2.2. Retour sur l’approche par les représentations sociales : une communication interprétative.

Selon l’approche interprétative du changement, l’organisation est considérée comme un ensemble de représentations produites par les acteurs dans le cadre de leurs interactions. Par ce processus, les acteurs confèrent du sens à leur organisation, faisant ainsi émerger une réalité sociale. Dans cette perspective, le changement est un processus qui doit aboutir à une redéfinition de ces représentations. La communication est alors ici envisagée comme la relation par laquelle les acteurs co-construisent leur conception de la réalité par le biais de leurs échanges. C’est donc sur ces représentations que le manager cherchera à agir. En effet, comme nous l’avons montré lors du chapitre précédent, il semble possible de faire évoluer les représentations sociales des acteurs de l’organisation pour faciliter l’adhésion au changement.

Pour le manager, l’enjeu est alors de comprendre comment peuvent émerger de nouvelles représentations de l’organisation afin de conseiller les dirigeants sur les manières de les orienter. Il sera alors dans une approche analytique et descriptive et devra se demander comment amener les acteurs à déconstruire puis reconstruire leurs représentations. Mais une autre des variables dont il devra tenir compte consistera à comprendre dans quelles mesures il lui est possible de faire converger ces nouvelles représentations qu’il aura pu faire naitre.

Une fois de plus, on est dans une vision univoque du changement : à l’initiative des dirigeants, il implique que les acteurs s’y conforment sans compromis. Ils devront passer par un désapprentissage et un réapprentissage de leur vision commune de l’organisation. Ils sont considérés comme passifs, et la communication sera le seul mode possible de diffusion du changement étant donné qu’il sera plus de l’ordre de la cognition que de l’action. La communication sera ici un instrument de management symbolique du sens visant une conformation des représentations qui devra se traduire par une conformation des comportements.

Si cette approche est elle aussi lacunaire du fait de sa conception univoque du changement et de sa conception instrumentale de la communication, il n’en reste pas moins qu’elle suggère les prémices de la conception communicationnelle de l’organisation présente dans le modèle

discursif. En effet, par le biais des représentations sociales, elle introduit la capacité des acteurs à construire leur organisation. Mais elle laisse de côté les acteurs non-humains, et omet ainsi un paramètre important.

Chacune des deux approches revisitées nous pousse à reconnaître l’intérêt d’envisager le

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