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Chapitre 2 - Apports sur l’épilepsie en milieu scolaire

2.5 Lieux de scolarisation, adaptations et aménagements

Comme nous l’avons vu la scolarité est un enjeu important pour tout enfant avec épilepsie.

Dans un dossier français relatif à la scolarité des enfants avec épilepsie, Auvin (2013) résume bien les enjeux d’une bonne prise en charge scolaire et propose une liste de questions à se poser pour décider du lieu et des conditions de scolarité :

« L’organisation de la scolarité va répondre à cette question : quel type de prise en charge scolaire est la plus adaptée ? Est-ce une structure classique avec un aménagement ou une filière spécialisée au sein de l’école […] Ou faut-il, et la question est plus délicate, sortir de l’école classique pour rentrer dans une institution spécialisée.

[…] je veux insister sur ce point : quel que soit le type d’épilepsie, il faut toujours être attentif au déroulement de la scolarité. En effet même quand les épilepsies sont considérées comme bénignes, par exemple dans l’épilepsie-absence de l’enfant, on sait qu’un patient sur deux a des troubles attentionnels. […] Est-ce que ces troubles gênent ses acquisitions scolaires et l’empêchent d’avoir le

« rendu scolaire » qu’il mérite d’avoir ? » (p. 2)

Selon Auvin (2013), le choix du type de prise en charge de la scolarité doit être mûrement réfléchi. Où l’enfant atteint d’épilepsie trouvera-t-il les meilleures conditions de scolarité ? Cela peut être en classe ordinaire avec des aménagements, en classe spécialisée intégrée dans un collège primaire ou alors en institution.

Selon Coste-Zeitun et Bennoun (2013) le bilan neuropsychologique permet de repérer les points forts et les difficultés de l’enfant et de définir les aménagements nécessaires. A côté des adaptations valables pour tous les enfants rencontrant de grandes difficultés scolaires les deux auteures relèvent le besoin de repos de certains de ces élèves. En effet une certaine fatigabilité liée à des crises, des effets secondaires dus aux médicaments ou de l’effort nécessaire pour suivre, peut nécessiter d’installer un matelas au fond de la classe et d’adapter les devoirs.

Notre recherche se déroulant dans le canton de Neuchâtel nous présentons ci-dessous les conditions dans lesquelles un élève atteint d’épilepsie est accueilli à l’école. Cependant nous précisons que certaines fois celle-ci n’est pas mise au courant du problème de santé de l’élève.

Le projet d’accueil individualisé (PAI)

Pour poursuivre sa scolarité l’enfant pourra avoir besoin d’un Projet d’Accueil Individualisé (PAI). Le PAI, appelé le « protocole » dans le canton de Neuchâtel, concerne les aspects médicaux qui comprennent des informations sur le type d’épilepsie, un éventuel régime ou des contre-indications concernant certaines activités, ainsi que les consignes en cas de crise (mesures d’urgence incluant ou pas un médicament à donner). En général c’est le médecin scolaire qui transmet le PAI aux enseignants concernés en l’explicitant. Celui-ci est généralement accessible aux enseignants à la salle des maîtres tout en restant confidentiel en raison du secret professionnel à respecter. Le Dr. Perrenoud, médecin scolaire dans deux cercles du canton de Neuchâtel, nous a précisé à ce sujet, lors d’un entretien réalisé en guise

de préparation à notre recherche, qu’il n’y avait pas de directives cantonales concernant ces documents (voir annexe 2). Chaque cercle scolaire décide quand et comment ces documents sont transmis aux enseignants et où les conserver.

Nous tenons à préciser que si certains parents ne transmettent pas, ou que partiellement, des informations importantes, il y a probablement plusieurs raisons qui peuvent l’expliquer. Cela pourrait être le déni, la peur de stigmatiser l’enfant, une médication efficace avec arrêt des crises, un type de crise qu’ils ne considèrent pas comme grave ou des raisons personnelles.

Certains élèves atteints d’épilepsie ne rencontreront aucune difficulté scolaire. Pour d’autres des adaptations seront nécessaires. Si certaines sont laissées à l’initiative des enseignants, d’autres ont une base légale, comme les mesures BEP que nous présentons ci-dessous.

Adaptations dans le canton de Neuchâtel : Les mesures BEP / Document concernant les élèves ayant des Besoins Educatifs Particuliers

Certains élèves avec épilepsie pourront bénéficier des mesures pour les élèves dits à besoins éducatifs particuliers (mesures BEP).

Depuis un arrêté cantonal datant de 2014, un document recense les adaptations conseillées par les thérapeutes ou les spécialistes suivant un élève rencontrant de grandes difficultés (voir annexe 3). Ces mesures doivent être acceptées par les directions d’écoles. Elles concernent tous les élèves du canton de Neuchâtel ayant des besoins particuliers, que ce soit un Trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH), des troubles spécifiques des apprentissages (dyslexie, dyspraxie…) ou d’autres difficultés. Ce document est transmis d’année en année aux enseignants qui devront respecter les mesures de compensation accordées.

« Selon l’arrêté du 2 juillet 2014, des mesures d’adaptation sont mises en œuvre pour répondre aux besoins éducatifs particuliers avérés d’un élève de la scolarité obligatoire. Ces mesures s’adressent principalement aux élèves qui rencontrent de grandes difficultés en matière de facultés d’apprentissage ou de réalisation et qui ne peuvent pas, plus ou seulement partiellement suivre le programme de l’école ordinaire.

La direction de l’école est responsable de leur mise en œuvre dans le cadre fixé par le canton. »

(https://www.ne.ch/autorites/DEF/SEEO/pedagogie-scolarite/Pages/bep.aspx)

Certains élèves atteints d’épilepsie auront besoin en plus d’un programme adapté, lequel peut

être précisé dans un document appelé PAD19 ou Programme adapté.

Programme adapté (PAD)

Certains élèves rencontrant des difficultés scolaires importantes ne pourront suivre le même programme que leurs camarades de classe et auront un programme adapté (PAD). Un exemple de PAD neuchâtelois se trouve en annexe 4.

Dans le canton de Neuchâtel, le PAD concerne les aspects pédagogiques et est établi par l’enseignant spécialisé qui suit l’élève concerné. Certains de ces élèves peuvent être intégrés en classe ordinaire et bénéficier d’un enseignement différencié. D’autres sont intégrés partiellement en classe ordinaire avec le soutien à temps partiel d’un enseignant spécialisé.

Enfin il existe des classes spécialisées intégrées dans les écoles ordinaires. Celles-ci se trouvent surtout au niveau du cycle 3 de l’enseignement obligatoire.

De nos jours dans le canton de Neuchâtel, en raison de l’évolution de la société et des lois sur le handicap (LHand 2002 / 2004), l’élève est maintenu en classe ordinaire aussi longtemps que possible. Il peut passer dans la classe supérieure, même s’il n’en a pas le niveau. En effet le redoublement ayant souvent des effets négatifs sur l’estime de soi et la motivation de l’élève, il n’est que rarement envisagé. Durant la scolarité primaire dans le canton de Neuchâtel le redoublement n’est en principe proposé qu’en fin de cycle (à la fin de la 4e année Harmos ou en fin de 8e Harmos).

Parfois cependant, l’épilepsie est tellement présente et/ou les troubles de l’apprentissage ne peuvent être pris en charge de façon adéquate et sont dès lors trop handicapants pour suivre le rythme en école ordinaire, que l’orientation vers une classe spécialisée est décidée.

Dans le canton de Neuchâtel il existe, par volonté politique, peu de classes spécialisées intégrées dans les écoles primaires ordinaires. L’Etat peut, à certaines conditions, refuser de les subventionner. Par contre, chaque cercle scolaire a une certaine liberté d’organisation.

Ainsi certains cercles en ont plusieurs, tandis que d’autres n’en ont qu’une seule ou même pas du tout.

Etablissements scolaires adaptés

L’orientation vers un établissement adapté devient parfois nécessaire, mais il doit y avoir accord des parents. Un établissement scolaire adapté peut être :

19 PAD : Programme adapté, anciennement appelé PPI : Projet pédagogique individualisé.

- une institution spécialisée dans la prise en charge d’élèves atteints d’épilepsie

- un établissement spécialisé prenant en charge des élèves touchés par différents types de handicaps

Dans le canton de Neuchâtel, il existe trois institutions d’enseignement spécialisé. Mais en cas de handicap, la plupart des enfants qui ne peuvent pas ou plus être intégrés à l’école ordinaire sont accueillis par la fondation des Perce-Neige. Cette institution répartit les élèves dans trois filières correspondant à trois types de diagnostics : handicap mental, troubles du spectre de l’autisme et polyhandicap. Elle propose des classes à très petits effectifs.

En Suisse il existe deux établissements spécialisés dans l’accueil d’enfants épileptiques.

L’école « La Passerelle », située à Lavigny dans le canton de Vaud, n’accueille pas uniquement des élèves avec épilepsie, mais fait partie d’un centre romand reconnu dans le suivi des épilepsies. Le second établissement se situe à Zürich. Il s’agit de l’école

« Epispitalschule » pour le niveau primaire et de l’école « Oberstufenschule » (OSSL) pour le niveau secondaire.

Adaptations et aménagements en école ordinaire

Selon Auvin (2013) trois conditions pourraient améliorer la vie des enfants à l’école : les adaptations scolaires, une meilleure connaissance de ce qu’est la maladie et l’abandon des restrictions qui ne sont pas nécessaires au quotidien. Nous présentons ci-après certains gestes ou aménagements conseillés pour les élèves avec épilepsie par Eduscol, un centre de documentation à disposition des enseignants français :

- tenir compte de la variation possible des acquis dans le temps

- porter une attention particulière à l’élève, en faisant attention de ne pas le stigmatiser - tenir compte d’un certain absentéisme possible

- éviter d’éventuels déclencheurs s’ils sont connus

- éviter la surprotection : peu de sports sont exclus, ou contre-indiqués pour l’élève avec épilepsie.

- autoriser l’élève à participer à toutes les sorties scolaires, même celles avec nuitées après autorisation des parents et avis du corps médical.

(http://cache.media.eduscol.education.fr/file/Action_sanitaire_et_sociale/00/4/Accueillir _et_accompagner_un_eleve_atteint_d_epilepsie_version_consultable_739004.pdf) Un autre aspect important concerne les actions de sensibilisation. Toujours selon Eduscol, l’enseignant doit se rendre disponible pour un dialogue avec les parents, mais il doit aussi

respecter le souhait de l’élève s’il souhaite ou non parler de sa situation. En effet pour éviter l’isolement de l’élève atteint d’épilepsie, les préjugés, la stigmatisation et les réactions inadéquates, il faudrait sensibiliser la classe. Si l’élève concerné ou ses parents refusent, il est également possible d’aborder l’épilepsie de manière plus générale dans le cadre de certains enseignements comme par exemple celui de l’éducation à la santé.