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1. Stau2 et la réponse aux dommages à l’ADN

1.2 Régulation de la transcription de Stau2 en réponse aux dommages à l’ADN

1.2.3 Lien entre les dommages à l’ADN, E2F1 et la régulation de la transcription de

Après avoir fait la constatation de l’effet activateur d’E2F1 sur l’expression de Stau2, nous avons fait l’hypothèse que les dommages à l’ADN, via le traitement à la CPT, pourraient empêcher E2F1 de jouer son rôle d’activateur transcriptionnel de Stau2. Ceci pourrait alors expliquer la diminution de l’expression de Stau2 en réponse à la CPT. Pour valider notre hypothèse, nous avons traité les lignées HA-ER et HA-ER-E2F1 avec la CPT (Fig. 33) et vérifié son effet sur l’expression de Stau2 dans ces cellules. La figure 33 montre ainsi que

l’ajout de la CPT annule presque complètement l’augmentation de la quantité de la protéine Stau2 observée dans les cellules HA-ER-E2F1 (Fig. 33A), observation qui est encore plus frappante lorsque c’est le niveau d’ARNm codant pour Stau2 qui est analysé (Fig. 33B). Un résultat similaire est obtenu lorsque la délétion -195 est transfectée dans les cellules HA-ER- E2F1, que celles-ci sont traitées à la CPT et que l’expression de la luciférase est mesurée (Fig. 34), bien que ce dernier résultat soit un peu moins concluant. Néanmoins, les résultats obtenus nous permettent de suggérer certains mécanismes qui pourraient expliquer comment l’activation de STAU2 par E2F1 pourrait être inhibée en réponse à un stress génotoxique et qui pourraient faire l’objet d’études futures.

Essentiellement, nous pourrions envisager deux mécanismes différents qui pourraient justifier les résultats présentés aux figures 33 et 34. D’un côté, E2F1 agirait en tant qu’activateur transcriptionnel de Stau2 en absence de stress, et lors de dommages à l’ADN, E2F1 serait déplacé du promoteur de Stau2 afin qu’un ou plusieurs facteurs inhibiteurs s’associent au même site sur l’ADN. D’un autre côté, E2F1 pourrait rester associée au promoteur de Stau2 et des modifications posttraductionnelles sur E2F1 pourraient par exemple favoriser le recrutement de cofacteurs répresseurs de la traduction. Évidemment, la façon la plus simple de différencier entre les deux possibilités serait de faire des ChIP pour comparer les niveaux d’E2F1 sur le promoteur de Stau2 en absence et en présence d’un traitement à la CPT. Cependant, il n’est pas impossible qu’E2F1 puisse se lier à plusieurs sites sur le promoteur de Stau2 et ainsi qu’une combinaison des deux mécanismes puisse être observée. Pour l’instant, comme nous ne connaissons pas encore le niveau d’occupation du promoteur de Stau2 par E2F1 avant et après des dommages à l’ADN, nous ne pouvons que poser certaines hypothèses pour tenter d’expliquer ce qui se produit en réalité. De plus, nous ne devons pas oublier que d’autres facteurs pourraient être impliqués dans la régulation de l’expression de Stau2 en réponse aux dommages à l’ADN. Par exemple, il a été montré que l’utilisation de diverses drogues chimiothérapeutiques inhibe l’expression et l’activité de liaison à l’ADN du facteur de transcription YY1 (Baritaki et al., 2007). Ainsi, si YY1 est capable d’activer la transcription de Stau2, son inhibition serait une manière de réguler son expression à la baisse. Cependant, comme nos résultats se concentrent plutôt sur le rôle d’E2F1 pour le moment, son implication sera discutée plus en détail ici.

Comme mentionné, une première possibilité permettant d’expliquer comment la CPT pourrait empêcher E2F1 de réguler positivement l’expression de Stau2 serait en inhibant son association avec le promoteur de Stau2. E2F1 ne s’associe pas seul avec l’ADN, il le fait généralement avec un partenaire protéine de la famille DP. Récemment, une étude a montré que la protéine DP4 est induite par un stress génotoxique et qu’elle peut entrer en compétition avec DP1 pour s’associer avec E2F1 (Ingram et al., 2011). De cette façon, le complexe E2F1/DP4 ne peut interagir avec l’ADN et empêche la transcription à des sites habituellement régulés par E2F1 (Ingram et al., 2011). Par conséquent, la possibilité de l’interaction entre E2F1 et DP4 serait une avenue intéressante à explorer pour éventuellement justifier la diminution d’expression de Stau2 en réponse aux dommages à l’ADN. Aussi, ENCODE indique que deux autres facteurs E2F peuvent interagir avec la même région du promoteur de Stau2 qu’E2F1, soit E2F4 et E2F6, deux facteurs répresseurs de la famille (Consortium, 2011). Les fonctions d’E2F4 et d’E2F6 en réponse aux dommages à l’ADN ne sont pas bien caractérisées, bien que certaines évidences montrent que les niveaux d’E2F4 sont réduits en réponse à des drogues génotoxiques (Ma et al., 2004), ce qui n’en ferait vraisemblablement pas un bon candidat pour réprimer l’expression de Stau2. E2F6 pourrait alors agir comme répresseur transcriptionnel en s’associant avec le promoteur de Stau2 en déplaçant l’activateur E2F1.

En second lieu, l’autre option à considérer pour justifier l’inhibition de l’activation transcriptionnelle de Stau2 par E2F1 en réponse aux dommages est qu’E2F1 pourrait toujours s’associer avec le promoteur, mais que des facteurs répresseurs pourraient être recrutés pour empêcher la transcription. Notamment, E2F1 peut interagir avec TopBP1 sur les promoteurs de ses gènes cibles, ce qui favorise le recrutement de Brg1/Brm, un composant essentiel du complexe de remodelage de la chromatine SWI/SNF (Liu et al., 2004). Cette interaction sert normalement à réprimer l’activité transcriptionnelle d’E2F1 afin d’inhiber sa fonction proapoptotique (Liu et al., 2004), mais il n’est pas difficile d’imaginer qu’un mécanisme semblable pourrait exister lorsque cette activité proapoptotique d’E2F1 est nécessaire, comme en réponse à des dommages à l’ADN. De même, l’interaction entre pRB et E2F1 peut être affectée de plusieurs façons en réponse à un stress génotoxique (section 4.2.1 de l’introduction). Par exemple, pRB peut être phosphorylée par Chk1/2 en réponse à des

dommages à l’ADN, ce qui renforce l’interaction entre pRB et E2F1, et ainsi, favorise la répression transcriptionnelle de gènes cibles d’E2F1 (Inoue et al., 2007). Une telle augmentation de l’interaction entre pRB et E2F1 sur le promoteur de Stau2 pourrait donc être envisageable.

En fait, l’importance des modifications posttraductionnelles dans le contrôle de l’expression de Stau2 n’est pas un aspect à négliger. Effectivement, ce type de modifications représente la première ligne de réponse à la suite d’un traitement avec une drogue génotoxique. Les kinases ATM/ATR et Chk1/2 sont bien sûr responsables de nombreux événements de phosphorylation, et il existe d’autres modifications comme l’acétylation et l’ubiquitination, aussi très courantes. Les modifications posttraductionnelles d’E2F1 en réponse à des dommages à l’ADN qui sont connues jusqu’à maintenant sont surtout responsables de la stabilisation de la protéine (Fig. 18). Il n’est pas impossible par contre que certaines de ces modifications, ou des modifications supplémentaires, soient en plus impliquées dans le recrutement de cofacteurs pour contrôler la transcription, comme dans le cas de p53 (Gu and Zhu, 2012). Néanmoins, des résultats préliminaires obtenus dans notre laboratoire indiquent que l’inhibition des kinases ATM/ATR, ainsi que Chk1/2, n’empêche pas la diminution de l’expression de Stau2 en réponse à un traitement à la CPT (résultats non présentés), ce qui suggèrerait que les facteurs qui régulent l’expression de Stau2 n’ont pas besoin d’être phosphorylés par ces kinases. Toutefois, l’effet d’autres kinases activées en réponse à un stress, comme des kinases de la famille des MAP kinases (p38 MAPK, MAPKAP2 ou MK2), n’a pas encore été évalué.

Un autre aspect de l’induction de modifications posttraductionnelles en réponse à des dommages à l’ADN qui serait intéressant à étudier concerne la possibilité que Stau2 pourrait elle-même être phosphorylée. En effet, des évidences de notre laboratoire montrent que Stau2 peut être phosphorylée dans certaines conditions (résultats de R. Beaujois, non présentés). Comme présenté dans la section 5.2 de l’introduction, la majorité des RBP qui sont régulées à la suite d’un stress cytotoxique doivent être phosphorylées pour accomplir leur fonction dans la réponse aux dommages. Bien sûr, les résultats présentés dans cette thèse indiquent principalement qu’une diminution de l’expression de Stau2 est observée en réponse à des

dommages à l’ADN, et ce dans des conditions de traitement qui causent des dommages assez importants pour éventuellement mener à la mort cellulaire. Cependant, il serait intéressant de vérifier si Stau2 ne doit pas d’abord être phosphorylée pour accomplir certaines fonctions à la suite d’un traitement avec une plus faible dose de drogue, ou un traitement plus court, pour par exemple promouvoir la réparation de l’ADN. Nous pourrions alors envisager que si les dommages deviennent trop considérables, la réparation de l’ADN ne serait plus un événement souhaitable dans la réponse, et que c’est ce qui justifierait la nécessité de diminuer l’expression de Stau2, afin de stimuler une réponse apoptotique. La prochaine section sera ainsi dédiée à discuter du rôle possible de Stau2, et particulièrement de la diminution de son expression, dans la réponse à un stress génotoxique, et l’accent sera mis sur le rôle de Stau2 dans la régulation posttranscriptionnelle de certaines cibles pertinentes à notre étude.

1.3 Rôle de Stau2 et de la diminution de son expression dans la