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2.3 Relation entre Lpn et les autres organismes

2.3.2.2 Les principaux systèmes de sécrétion de Lpn

Il existe différentes voies de transport des protéines à travers les enveloppes bactériennes dont certaines s’effectuent en une seule étape (système de type I, utilisation d’un transporteur, transporteur de type III, dépendant du contact) tandis que d’autres s’effectuent en deux étapes avec une étape périplasmique intermédiaire (type II, type IV, autotransporteurs) (Lammertyn & Ann‚, 2004). Chez les bactéries Gram-, 6 à 8 types de systèmes de sécrétion sont connus (Cianciotto, 2009). Les systèmes de sécrétion I, II, III et IV restent les plus connus.

Un système de type I est composé de trois protéines formant un canal permettant le transport

direct des protéines depuis le cytoplasme vers l’extérieur de la cellule (Liles, et al., 1999, Cianciotto,

2009).

Dans un système de sécrétion de type II, les protéines sont transportées à travers la membrane interne par un mécanisme sec ou tat-dépendant, puis la protéine mature traverse la membrane externe grâce à l’action combinée de 14 protéines. Au total, le système de sécrétion de type II est constitué de plus de 25 protéines, dont plusieurs types d’enzymes de dégradation : des

phospholipases, des protéases, une ribonucléase et une chitinase (Liles, et al., 1999, Cianciotto,

2009).

Un système de sécrétion de type III met en jeu une vingtaine de protéines afin de transporter les exoprotéines depuis le cytoplasme directement à la surface de la cellule d’où elles peuvent alors

être injectées à une cellule animale ou végétale uniquement par contact (Liles, et al., 1999,

Cianciotto, 2009).

Enfin, le système de sécrétion de type IV est un système de transport sec-dépendant de

protéines à travers la membrane interne suivi d’un passage à travers la membrane externe (Liles, et

al., 1999, Cianciotto, 2009).

Lpn exprime clairement des systèmes de sécrétion de type II et IV, son génome suggère

l’existence de système de type I et V. D’autres systèmes de sécrétions peuvent être spécifiques à

50 2.3.2.2.1 Système de sécrétion de type I

Le système de sécrétion de type I de Lpn est appelé Legionella secretion system (LSS), il est

composé de 6 gènes : lssXYZABD. Les gènes lssB et lssD sont proches de ceux des systèmes de

sécrétion de V. cholerae et d’E. coli respectivement. En général dans les systèmes de sécrétion de

type I, les transporteurs ABC forment le pore permettant l’excrétion d’enzymes, de toxines ou d’autres facteurs de virulence. Dans ce cas, la protéine LssY possède plusieurs régions transmembranaires ainsi qu’un domaine de type PAP2 retrouvé dans différentes enzymes (phosphatases). LssZ et LssA sont deux petites protéines de 23 et 28 kDa respectivement. Le gène lssB contient une séquence correspondant au transporteur transmembranaire ABC ainsi qu’un domaine ATPase. La protéine LssD présente un peptide signal et une signature de la famille de

protéines de sécrétion HlyD. Enfin, un autre gène, le gène lssE code pour une protéine de 96 kDa qui

semble impliquée dans la transduction du signal. Ce système semble spécifique à Lpn mais son

fonctionnement est mal connu (Jacobi & Heuner, 2003) 2.3.2.2.2 Système de sécrétion de type II

Le système de sécrétion de type II est un facteur clé dans l’écologie de Lpn. Ce système de

sécrétion intervient à la fois dans les processus de virulence et au cours de la capture des nutriments (lors d’une croissance à faible température ou de la multiplication intra-cellulaire dans les différentes cellules hôtes possibles) (Cianciotto, 2009).

Les gènes lspFGHIJK (Legionella secretion pathway) codent pour des composants conservés

d’un système de sécrétion de type II. Ce système présente en effet de fortes homologies avec la voie

de sécrétion générale (GSP) de P. aeruginosa, codée par les gènes xcp. Mais il s’agit du plus gros

système de sécrétion de type II connu chez les bactéries (Hales & Shuman, 1999, Rossier &

Cianciotto, 2001, Lammertyn & Ann‚, 2004, Rossier, et al., 2004, Rossier, et al., 2008). Ce système

implique le gène pilD (prépiline peptidase) également nécessaire à la synthèse des pili de type IV

(chapitre 2.1.1.1) comme cela est aussi le cas chez P. aeruginosa (Hales & Shuman, 1999, Rossier &

Cianciotto, 2001).

Les protéines sécrétées par ce système sont tout d’abord transloquées à travers la membrane interne grâce à un transporteur sec ou, dans une moindre mesure, un transporteur tat (Figure 3). Une fois dans le périplasme, les protéines prennent leur conformation tertiaire. Elles sont alors prises en charge par le système de sécrétion de type II pour leur faire traverser la membrane externe (Cianciotto, 2009).

Ce système de sécrétion est composé de 12 protéines « cœur ». Parmi elles, une ATPase

cytoplasmique (LspE), mais aussi 3 protéines situées dans la membrane interne afin de former une

plateforme et un site de liaison à LspE (LspFLM), des pseudopilines principales et secondaires

(LspGHIJK) forment une structure ressemblant à un pilus dans l’espace transmembranaire. Une

peptidase (PilD) présente également dans la membrane interne et commune au système de

sécrétion de type IV, permet le transfert et la maturation des pilines en amont de leur association en

pseudo-pilus. Une sécrétine (lspD) située dans la membrane externe forme un pore de sécrétion. La

connexion entre la partie située dans la membrane interne et la membrane externe est effectuée grâce à LspC (Rossier & Cianciotto, 2001, Rossier, et al., 2004, Cianciotto, 2005, Cianciotto, 2009).

Les protéines LspC ou LspD permettent la reconnaissance des protéines devant être prise en

charge par le système de sécrétion. Puis, en utilisant l’énergie générée au niveau de la membrane

interne (LspE), le pseudopilus agit comme un piston poussant les protéines à travers la membrane

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Figure 3: Modèle d'un système de sécrétion de type II (la protéine O correspond chez Lpn à la protéine PilD)

(Cianciotto, 2009)

Ce système est impliqué dans le processus de réplication dans H. vermiformis et A. castellanii

(Rossier & Cianciotto, 2001, Rossier, et al., 2004). De 25 à 60 protéines peuvent être excrétées par ce

système qui présentent au moins 14 activités enzymatiques différentes : métalloprotéases, phosphatases acides, lipases, phospholipase A, phospholipase C, lysophospholipase A, cholestérol acyltransferase et RNases. Il produit également des aminopeptidases dont LapA et LapB qui présentent des activités enzymatiques distinctes et complémentaires, impliquées dans le catabolisme de peptides exogènes, mais non nécessaires au processus d’infection (Hales & Shuman, 1999, Rossier & Cianciotto, 2001, Rossier, et al., 2004, Rossier, et al., 2008). Parmi les enzymes sécrétées, les principales sont des protéases et des peptidases, ce qui est en accord avec les

exigences nutritives de Lpn en milieu de culture. La présence de chitinases et d’endoglucanases

suggèrent que Lpn est capable de dégrader et d’utiliser des molécules plus complexes (Cianciotto, 2009).

L’une des protéines sécrétées est la protéine Msp (Major secretory protein). Il s’agit d’une zinc métalloprotéase de 38 kDa qui présente une activité caséinolytique et hémolytique. Cette

métalloprotéase est nécessaire à l’infection de H. vermiformis mais pas d’A. castellanii ni des

macrophages. Elle aiderait Lpn à obtenir les acides aminés nécessaires mais il est également possible

qu’elle dégrade des facteurs de la cellule hôte contrôlant la croissance bactérienne ou qu’elle active

d’autres protéines sécrétées par Lpn permettant la multiplication intra-cellulaire. Elle joue donc un

rôle important dans l’écologie de Lpn (Hales & Shuman, 1999, Rossier & Cianciotto, 2001, Rossier, et al., 2004, Rossier, et al., 2008).

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Le système de sécrétion codé par l’opéron lsp d’une part, ou d’autre part chacune des

protéines qu’il sécrète ne sont pas requis pour la mort des macrophages, mais ils sont requis dans le processus de croissance intra-cellulaire dans les amibes. Msp semble être un facteur de virulence même s’il n’est pas requis pour la multiplication dans les macrophages et ainsi que dans A. castellanii. Une ou plusieurs autres protéines, sécrétées par ce système sont requises pour la

multiplication dans A. castellanii. Son rôle dans l’infection des macrophages est modeste et semble

dépendre de la souche de Lpn, du type d’essais cytopathologiques ou de la lignée des macrophages

utilisés (Hales & Shuman, 1999, Rossier & Cianciotto, 2001). Ce système est le seul système de

sécrétion de type II qui soit impliqué dans un mécanisme d’infection intra-cellulaire (Rossier, et al.,

2004).

Ce système est également responsable de changements dans la morphologie des colonies de

Lpn. Il est possible que des déterminants de surfaces et/ou sécrétés soient une partie de ce système

de virulence. Ce système peut intervenir dans la localisation des protéines de l’enveloppe cellulaire (Rossier & Cianciotto, 2001, Rossier, et al., 2004). Parmi ses nombreux rôles, il est aussi, à l'origine,

directement, ou indirectement, de l’excrétion d’un surfactant permettant à Lpn de glisser sur une

surface (phénomène de sliding : (Stewart, 2009)).

Notons que la croissance intra-cellulaire est possible essentiellement du fait des molécules sécrétées et non pas par les modifications de la structure de l’enveloppe cellulaire engendrées par ce système de sécrétion (Rossier, et al., 2009).

Parmi les nombreuses enzymes sécrétées par le système de sécrétion de type II, une RNase est

codée par le gène srnA (secreted ribonuclease A). C’est la principale RNase sécrétée par Lpn. Il s’agit

d’une protéine de 38 kDa contenant une séquence signal sec-dépendante et qui ne nécessite pas d’activation par l’une des métalloprotéases. Cette enzyme n’est pas nécessaire à la multiplication extra-cellulaire dans des conditions de laboratoire. Elle n’influence ni le système de sécrétion en lui-même, ni la morphologie des colonies. Elle n’est pas non plus requise dans le cas de l’infection de cellules ou de tissus de mammifère. Dans le cas de l’infection de protistes et plus particulièrement de H. vermiformis, elle n’a pas de rôle dans les premiers stades de l’infection, mais elle est impliquée plus tardivement dans la phase réplicative. Dans ce cas, il est possible que SnrA favorise l’acquisition des nutriments en dégradant des ARN de la cellule hôte afin d’obtenir des nucléotides (ou fragments de nucléotides) ou des groupements phosphates. Elle peut également altérer les fonctions de la cellule hôte en dégradant ses ARN. Elle peut aussi posséder une seconde activité enzymatique nécessaire à l’infection intra-cellulaire, mais l’hypothèse d’une action directe de l’enzyme sur la bactérie elle-même reste la plus plausible. Cette RNase, tout comme d’autres nucléases pouvant être

sécrétées, est importante lorsque l’environnement nutritif de Lpn est limité mais aussi lorsque la

compétition et la prédation sont fortes (Rossier, et al., 2009).

Ce système permet à Lpn de se développer dans une large gamme de conditions allant des

eaux froides jusqu’à la multiplication intra-cellulaires à la fois chez les macrophages et les amibes

(Stewart, 2009). L’expression de pilD est influencée par la température : l’initiation de sa

transcription augmente avec la baisse de la température. La protéine ensuite produite (PilD) est alors

nécessaire pour la croissance de Lpn à basse température (Söderberg, et al., 2004, Söderberg, et al.,

2008). Cette protéine (enzyme permettant de donner la forme mature de la piline) est impliquée dans deux systèmes de sécrétions, les pili de type IV d’une part et le système de sécrétion de type II, mais seul le système de sécrétion de type II est impliqué dans le phénomène de croissance à basse température que ce soit en milieu de culture, mais également dans des conditions aquatiques environnementales ou lors du processus de réplication intra-amibienne. Son importance augmente donc avec la diminution de la température. L'identification de la protéine impliquée reste à faire. Elle représente peut-être, avec d'autres exoprotéines ainsi sécrétées, un nouveau mécanisme d’adaptation au froid (Söderberg, et al., 2004, Söderberg, et al., 2008).

53 2.3.2.2.3 Les systèmes de sécrétion de type IV

Lpn possède deux système de sécrétion de type IV capable d’interagir entre eux: le système

dot/icm (type IVB) et le système lvh (type IVA)(Segal, et al., 1999).

2.3.2.2.3.1 Le système dot/icm

Un groupe de 24 gènes est impliqué à la fois dans le processus d’inhibition de la fusion phagosome-lysosome et dans la réplication intra-cellulaire : ces gènes forment le système dot/icm (defect in organelle trafficking/intracellular multiplication). L’ensemble de ces gènes est localisé dans deux régions distinctes du chromosome bactérien et la majorité d’entre eux codent pour des

protéines associées à la membrane (Coers, et al., 1999, Swanson & Hammer, 2000, Faulkner &

Garduno, 2002). Ce complexe constitue un système de sécrétion ressemblant à un système de sécrétion de type IV capable de transférer des molécules effectrices dans le cytoplasme de la cellule hôte afin de s’échapper de la voie de dégradation de l’endocytose. Le système délivre des protéines de virulence dans le phagosome qui le transforme en vacuole de réplication (phagosome réplicatif)

dans lequel Lpn est alors protégé (Swanson & Hammer, 2000, Molmeret, et al., 2002).

Ce système dot/icm est également impliqué dans les processus de conjugaison (Molmeret, et

al., 2004). Les protéines qu'il produit à ce sujet jouent un rôle dans la sécrétion à travers la

membrane de plasmides ainsi que de facteurs de virulence (Swanson & Hammer, 2000).

En résumé, ce système permet de transporter plus de 40 protéines « effectrices » dans la

cellule hôte (Tiaden, et al., 2007) et de ce fait, il est reconnu comme le facteur de virulence clé de Lpn

(Tiaden, et al., 2010).

2.3.2.2.3.2 Le système lvh

Le système de sécrétion lvh (Legionella vir homologs) est également un système de sécrétion

de type IV. Il est composé de 11 gènes. Les protéines de ce système présentent une forte homologie

avec les protéines Vir de Agrobacterium tumefaciens, Helicobacter pylori et Bordella pertussis. Les

premières observations ne lui donnaient pour rôle que la possibilité de remplacer certains

composants du système dot/icm dans le processus de conjugaison. Elles ne lui donnaient aucun rôle

dans les processus de croissance intra-cellulaire (Segal, et al., 1999). Dans les conditions

environnementales qui favorisent la propagation de Lpn, le système lvh apparaît impliqué dans la

mise en place des phénotypes de virulence (en particulier impliquant des amibes). Le système peut compenser des mutations du système dot/icm. Il est alors requis principalement pour empêcher

l’acidification de la vacuole contenant Lpn. Dans ces conditions proches des conditions

environnementales et dans les amibes enkystées, Lpn préfèrerait le système lvh au système dot/icm

pour l’expression du phénotype virulent (Bandyopadhyay, et al., 2007).