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I. La photographie missionnaire en exploration (1880-1910)

I.2. L’image au service de l’évangélisation : François Coillard au Zambèze

I.2.2. Les portraits de chefs de François Coillard

Si la technique photographique étonne par son mystère, les choix iconographiques de Coillard contribuent aussi à la réputation particulière du missionnaire. Parmi les clichés du missionnaire qui ont été conservés, il existe un grand nombre de portraits de personnalités politiques indigènes. Des allusions à des séances de prises de vue avec des chefs locaux, le roi ou les membres de la famille royale se retrouvent d’ailleurs dans ses lettres. Dans une liste décrivant les tirages qu’il envoie à Paris en octobre 1890, il est aussi intéressant de noter une forte proportion de portraits de chefs. Sur soixante-treize positifs, trente-huit photographies montrent des personnes : quatre images d’indigènes anonymes (« Groupe de passants », « Groupe de femmes zambéziennes », etc.), neuf présentant des Européens ou des indigènes qui travaillent pour la SMEP et vingt-cinq portraits du roi ou de chefs locaux, seuls ou en groupe. Ces derniers sont donc un élément majeur du corpus photographique de Coillard. Mais au-delà de leur quantité relativement importante, ils sont aussi les images que le missionnaire montre le plus aux Lozi, alors qu’il photographie aussi de nombreux paysages du Zambèze ou des scènes de la vie missionnaire.

Influence et mise à distance des préceptes de la photographie anthropologique

163 « afforded me opportunities for intercourse with many to whom I might not otherwise so easily have gained

access », Ibid.., p. 132.

164 « long and interesting conversations with the chiefs residing in the place, as well as with strangers from a

distance, including a number belonging to the capital », Ibid., p. 132.

165 William Ellis explique qu’un homme dit que la photographie est « xanahary – un mot qu’ils utilisent parfois

pour Dieu, et par lequel ils veulent probablement exprimer le merveilleux ou le surnaturel » : « xanahary – a word they sometimes use for God, by which they probably meant wonderful or supernatural », Ibid., p. 131.

Coillard laisse peu de place au hasard dans ses clichés. Ayant un nombre limité de plaques à sa disposition, il ne photographie que très rarement deux fois le même sujet. Malgré certaines contraintes techniques (il ne peut notamment pas faire de photographie quand il fait trop sombre, ce qui l’oblige à travailler uniquement en extérieur et à certaines heures de la journée), ses points de vue sont soigneusement choisis et ses compositions mûrement réfléchies. Les photographies sont le plus souvent posées et il n’hésite pas à faire rejouer une scène pour la photographier comme le montre son journal :

Vers les 4h, j’avais commencé une étude biblique avec mes jeunes gens quand nous vîmes déboucher du bois et serpenter vers nous une longue file de plus de 150 hommes et femmes, les chefs en tête qui nous apportaient en effet cette nourriture de toute espèce. Ils en firent 2 grands lots et alors par le moyen […] qui prête tant de solennité à une cérémonie de ce genre, un petit discours à la 6e édition m’annonçait que la grosse part était la mienne et l’autre celle de Liomba. […] Je fus vivement ému et pus à peine répondre. Comme je désirais photographier ce bel incident, je les renvoyais tous avec leurs charges dans la forêt et les photographiais quand ils en sortirent166.

Cette anecdote montre l’attention que porte Coillard au choix de ses sujets. Le missionnaire ne photographie pas seulement les hommes et les femmes qui lui apportent de la nourriture, il photographie leur sortie de la forêt et tente de reproduire une scène qui lui a fait forte impression. Il cherche à traduire par l’image une émotion plus qu’un fait.

Pour ses portraits de personnalités politiques indigènes, Coillard photographie le plus souvent ses sujets de face et de profil, utilisant ainsi un genre de prise de vue relativement répandu à l’époque, directement influencé par l’imagerie anthropologique. Très rapidement après son apparition, la photographie devient un outil prisé des anthropologues. Tant pour « ses qualités de précision et d’exactitude167 » que pour « sa disposition à être classée et collectionnée168 », elle devient un mode de représentation privilégié pour l’étude de l’espèce humaine au cours du dernier quart du XIXe siècle. Afin « d’objectiver le sujet d’étude169 » et

« de s’abstraire du réel, pour mettre en évidence des types généraux170 », l’anthropologie tente d’adopter des codes de représentation particuliers : devant un fond neutre, les corps et les visages sont photographiés de face, de trois-quarts et de profil et une mesure graduée est

166 COILLARD François, Journal, 14 mai 1895.

167 JEHEL Pierre-Jérôme, Photographie et anthropologie en France au XIXe siècle, mémoire de DEA sous la

direction d’André Rouillé et de Sylvain Maresca, Université Paris VIII Saint-Denis, 1995, p. 4.

168 Ibid. 169 Ibid., p. 5. 170 Ibid.

placée à côté du sujet171. Les scientifiques souhaitent ainsi décontextualiser leurs objets

d’étude afin d’en dégager des caractéristiques physiques et établir un tableau des races172.

Lecteur attentif de nombreuses publications scientifiques et soucieux de contribuer à l’étude du monde, Coillard reprend certains éléments de la photographie anthropologique, mais il ne se montre pas toujours scrupuleux avec les méthodes de normalisation prônées à l’époque. Il fait poser la plupart des chefs zambéziens de face et de profil. Mais si les arrières plans sont flous et mal définis, ils restent naturels. Aucun drap ou décor n’est posé derrière les sujets. Le missionnaire ne place pas non plus de règle à côté des visages. Enfin, il ne fait jamais poser ses modèles nus173. Pour de nombreux explorateurs, les instructions données pour constituer des corpus d’étude sont très contraignantes et donc souvent peu rigoureusement suivies. Dans le cas de Coillard, au-delà des contraintes, la photographie anthropologique ne correspond pas toujours à ses besoins. Il est avant tout un missionnaire et n’a pas pour principal objectif d’utiliser ses portraits dans un but strictement scientifique. S’ils lui permettent de satisfaire sa curiosité anthropologique, ils sont surtout le moyen de garder une trace de ses rencontres et d’en témoigner en Europe et d’établir des liens avec les populations locales.

À la différence de nombreux portraits présents au sein des corpus anthropologiques, les images de chefs de Coillard témoignent aussi des différences de statut entre les diverses personnalités. Certains sont photographiés en buste suivant le mode anthropologique face/profil : Tahalima, deuxième chef de Sesheke, Masotoane, préfet des Matokas [Illustration 2], etc. Coillard réalise d’autres portraits suivant le même modèle : Esaïa, le gardien en chef des attelages de son expédition ou un homme désigné par le groupe auquel il appartient, « un Mokuengo ». Aucun élément intrinsèque aux images ne vient ici préciser la fonction des chefs Lozi, seule la légende qui s’adresse au public occidental apporte des informations à ce sujet.

171 Voir, par exemple, l’ouvrage de TRUTAT Eugène, La photographie appliquée à l’histoire naturelle, op.cit.,

225 p., dans lequel l’auteur entend délivrer des conseils pour bien utiliser la photographie à des fins scientifiques.

172 À la fin du XVIIIe siècle, Johann Blumenbach suggère dans son livre, Natural variety of Mankind (1775) que

la couleur de la peau permet une classification des humains en cinq races. En 1859, dans son ouvrage, Origin of

Species, Charles Darwin avance la théorie que les différences raciales s’expliquent par différents stades

d’évolution de l’homme. En France, Paul Broca suggère d’étudier ces différences par un système de description et de mesure permettant de « classer » les hommes. La photographie anthropométrique est alors développée pour répondre à cette volonté de classification du genre humain. Pour en savoir plus sur le développement de la photographie en anthropologie, voir JEHEL Pierre-Jérôme, Photographie et anthropologie en France au XIXe

siècle, op.cit., 141 p. ou MAXWELL Anne, Colonial photography and exhibitions, representations of the 'native' and the making of European identities, Londres : Leicester University Press, 1999, 243 p.

173 Il existe quelques portraits de femmes avec les seins nus dans les collections photographiques de la SMEP.

Mais jugées non conformes à la morale chrétienne, ces images restent toutefois assez rares dans les fonds missionnaires.

Dans d’autres portraits, le missionnaire souligne un statut particulier à travers certains éléments significatifs. Mathaga (ou Mataha), premier ministre du roi Akufuna-Thatira est aussi photographié en buste, mais uniquement de face [Illustration 3]. Il est peu probable qu’il ait existé une vue de profil, attenante à ce portrait. En effet, les personnes présentes à l’arrière-plan et le flou du visage montrent que cette photographie a été moins soigneusement préparée que les précédentes, ce qui amène à penser que Coillard a du adopter une attitude différente, moins directrice par rapport à son sujet. La même remarque peut être faite à propos du portrait du roi Akufuna-Thatira lui-même, photographié assis de plein pied174 [Illustration 4]. Son statut royal est précisé par certains éléments vestimentaires comme le manteau en peau de léopard et le chasse-mouche qu’il tient à la main.

L’élément le plus original des portraits de chefs de Coillard réside dans la légende. Les anthropologues de la fin du XIXe siècle précisent rarement le nom des personnes qu’ils photographient175. Celles-ci sont davantage présentées en catégories. Les photographes indiquent une appartenance à un territoire (ex : Dahomey), à un groupe ethnique (ex : Homme Fang), à une profession (ex : chasseur). L’objectif premier de leurs images est en effet de dégager des types généraux et il est donc nécessaire d’évacuer toute trace d’individualité chez les personnes photographiées. Dans certaines de ses photographies du peuple Lozi, Coillard lui-même donne à voir des « types », « où les individus disparaissent […] derrière des entités collectives176 » [Illustration 5]. Pour les chefs, au contraire, le missionnaire affirme l’identité des hommes et des femmes qu’il photographie en précisant leurs noms et semble vouloir ainsi faire reconnaître leur statut d’influence et de pouvoir177.

Claude Prudhomme écrit que « le discours sur la supériorité de la civilisation occidentale n’empêche pas d’éveiller l’intérêt, de susciter un certain respect pour d’autre civilisations. Leur faiblesse et leur infériorité sont attribuées à leur caractère païen plus qu’à leur écart par rapport au modèle occidental178 ». C’est précisément dans cette optique que se situent les photographies de Coillard. Pour le missionnaire, c’est le christianisme, et non pas

174 Roi du pays lozi à partir de 1884, Akufuna-Thatira est chassé du pouvoir l’année suivante par Lewanika qui

reprend sa place sur le trône.

175 Il est à noter que certains ethnologues précisent parfois les noms des individus qu’ils photographient. Ainsi,

dans son album intitulé « Peaux-Rouges » réalisé en 1884, Roland Bonaparte indique le nom de chaque personne représentée (Bibliothèque nationale de France, cote We348).

176 BOËTSCH Gilles et FERRIÉ Jean-Noël, « Du daguerréotype au stéréotype : typification scientifique et

typification du sens commun dans la photographie coloniale », Hermès, 2001, n°30, p. 173.

177 Cette attention portée à la légende des portraits de chefs locaux se retrouvent chez d’autres missionnaires.

Voir l’article consacré au missionnaire méthodiste anglais George Brown : GARDNER Helen, « Photography and christian mission », The Journal of Pacific History, vol.12, n°7, septembre 2006, p. 175-190.

178 PRUDHOMME Claude, « La représentation de l’autre dans l’iconographie des missions catholiques à la fin

du XIXe siècle », in Iconographie, catéchisme et missions, actes du colloque d’histoire missionnaire de Louvain-

la civilisation européenne, qui fait défaut à la société Lozi. Il ne souhaite pas changer le système politique indigène mais convertir les chefs. Pour tisser des liens avec ces derniers et gagner leur confiance, il est donc important pour lui de reconnaître leur pouvoir et la photographie lui apparaît comme un moyen efficace pour atteindre ce but.

La photographie : objet de médiation avec les pouvoirs politiques locaux

La première rencontre de Coillard avec Khama a lieu au printemps 1876. Chef de la « tribu des ba-Mangouato179 », Khama s’est converti au christianisme au contact de London Missionary Society installée dans la région. Promulguant des lois soutenant les valeurs chrétiennes contre les traditions païennes, sa conversion joue un rôle important dans l’évangélisation de son peuple. Quand Coillard explore la région à la recherche d’un territoire pour installer une nouvelle mission, c’est Khama qui lui conseille de se rendre dans la région où habitent les Lozi. Quelques années plus tard, afin de montrer à Lewanika que la conversion au christianisme pourrait l’aider à consolider son pouvoir face à la colonisation, Coillard utilise l’exemple de Khama, chef chrétien d’un territoire qui bénéficie du travail des commerçants européens et de la protection de la couronne britannique.

Coillard réalise plusieurs portraits du chef des Ngwato, avec et sans ses conseillers [Illustration 6 ; Illustration 7]. À travers ces photographies, le missionnaire semble vouloir montrer qu’en rejoignant la foi chrétienne et ses valeurs, Khama a conservé son statut de responsable politique. Contrairement aux autres chefs, il est photographié en pied, de façon à montrer qu’il porte un costume européen et des chaussures. Ces accessoires vestimentaires sont importants : difficiles à se procurer, peu d’habitants de la région en portent et ils sont le plus souvent réservés aux chefs. Le cadrage permet aussi au missionnaire-photographe de montrer que Khama est assis sur un siège recouvert d’une peau de léopard s’apparentant à un trône. Placé au centre de ses conseillers, il apparaît comme un véritable chef, qui n’a rien perdu de son pouvoir en se convertissant au christianisme.

En 1891, la Société de géographie de Paris demande au directeur de la SMEP « de vouloir bien donner les instructions nécessaires aux missionnaires évangéliques installés sur les bords du Zambèze pour que M. Dècle, à son arrivée sur le fleuve reçoive le meilleur accueil des missionnaires et qu’un subside de cinq cents francs lui soit remis de la part de la

179 COILLARD François, Sur le Haut-Zambèze, op.cit., p. 38. Les « ba-Mangouato » ou Ngwato habitent des

Société de Géographie180 ». Lionel Dècle, chargé d’une mission scientifique dans l’Afrique

Australe, se trouve alors dans une situation critique, abandonné par ses porteurs. L’ouvrage qu’il écrit à propos de son voyage, Three years in savage Africa, témoigne de sa rencontre avec les missionnaires de la SMEP181.

Dècle réalise de nombreuses photographies pendant son expédition182. La confrontation entre ses images et celles de Coillard est intéressante. Les deux hommes voyagent avec des objectifs différents : l’un ne reste au Zambèze que quelques mois en vue de collecter des informations qui seront étudiées en France, l’autre est installé pour de nombreuses années en vue d’évangéliser la région. Travaillant à la même époque sur un même territoire, les deux hommes ont souvent recours à la même iconographie : l’expédition, les paysages traversés et les populations rencontrées sont mis avant. De nombreux sujets sont d’ailleurs traités de façon semblable. Toutefois leurs photographies traduisent parfois deux regards bien distincts portés sur leur environnement, reflétant des divergences dans leur approche des populations locales.

Les portraits de Khama sont particulièrement différents chez Coillard et Dècle. Le missionnaire met clairement en scène le chef des Ngwato avec différents attributs permettant de souligner son statut de chef : le costume, la peau de léopard, sa place au milieu de ses conseillers. Dècle, de son côté, présente Khama en buste, face à l’objectif [Illustration 8]. Khama est le seul chef photographié par l’explorateur scientifique et plusieurs éléments montrent que Dècle lui donne une place particulière au milieu des autres portraits d’indigènes : il est en costume et son nom est précisé dans la légende. Mais Dècle se montre moins soucieux que Coillard à souligner l’importance de son statut de chef dans ses photographies. Cette différence de traitement s’explique par la façon dont chacun des deux hommes se positionnent vis-à-vis de Khama. Le missionnaire a besoin de son appui pour installer la mission Zambèze en pays Lozi. Dans le cadre de l’évangélisation de la région, il est aussi nécessaire pour Coillard de montrer que le christianisme n’enlève rien à l’autorité des chefs, mais qu’au contraire, la religion peut permettre à ces derniers de mieux affirmer leur pouvoir. Dècle n’a pas la même relation avec Khama. Il perçoit le chef comme réfractaire au pouvoir de la couronne britannique, alors qu’un accord passé avec la Grande-Bretagne l’oblige à s’y soumettre. D’après lui, « au fond de son cœur, Khama hait les hommes

180 SOCIÉTÉ de GÉOGRAPHIE DE PARIS, Lettre à la SMEP, 21 décembre 1891, Paris. 181 DÈCLE Lionel, Three years in savage Africa, Londres : Methuen, 1898, 594 p.

182 Un certain nombre de tirages de Lionel Dècle sont conservées par la Société de géographie de Paris à la

blancs183 ». Dècle ne souhaite donc pas lui témoigner les mêmes hommages que le

missionnaire français dans ses images.

Dans sa démarche d’évangélisation par le haut et par souci de légitimité, François Coillard tente, dès sa première expédition au Zambèze, de se mettre en relation avec le roi Lozi. En 1878, alors que le missionnaire explore la région, il sollicite un entretien auprès de Lewanika. Mais celui-ci vient de monter sur le trône et demande à Coillard d’attendre que le climat politique se calme pour le rencontrer. En 1879, le missionnaire repart ainsi pour le Lesotho sans avoir vu le roi. Quand il revient au Zambèze en 1884, Lewanika vient d’être destitué et Akufuna-Thatira a pris le pouvoir à l’aide de Mataha, son premier ministre. C’est donc lui que rencontre le missionnaire en mars 1885. Mais l’état politique du pays semble encore bien instable et, à la suite de ses premières entrevues avec le jeune roi, Coillard écrit : « Sans être pessimiste, je crois prévoir une révolution nouvelle184 ». En effet, à partir de l’été 1885, d’importants conflits éclatent entre les partisans de différents prétendants à la couronne du royaume Lozi et après plusieurs mois de lutte, c’est finalement Lewanika qui remonte sur le trône. Coillard le rencontre pour la première fois en mars 1886. Le premier portrait du roi réalisé par le missionnaire date de cette période. Le jeune Lewanika y est photographié de plain-pied [Illustration 9], dans la même position que son prédécesseur Akufuna-Thatira [Illustration 4], mais légèrement de trois-quarts. Il ne regarde pas vers le photographe, ce qui est peu habituel dans les portraits de Coillard où les sujets posent les yeux tournés vers l’objectif. Cette particularité rend compte du rapport particulier qu’entretient le missionnaire avec Lewanika. Si les chefs locaux du Zambèze sont importants pour le développement de la mission, le roi est un personnage primordial. Coillard le perçoit comme la clé de l’évangélisation du Zambèze. Il est donc décisif de l’amener vers le christianisme.

Autorisé à s’installer à Léalui, capitale du royaume, en 1892, Coillard voit dans la fondation de cette quatrième station une avancée importante pour la mission Zambèze. Le village où vit le roi est ainsi décrit par le missionnaire :

Du sein de ces huttes perce le toit de chaume de la maison du roi, un vrai palais aux yeux de ces pauvres gens. Elle domine tout, cette maison. Elle est le centre du harem, comme le harem est le centre de la ville, et la ville le centre du royaume. Et la royauté qui siège dans ce pays de roseaux et de chaume, c’est le centre du centre, le centre de tout. Tout est pour elle, tout se rapporte à elle, elle absorbe tout. C’est le malheur du pays, c’est un

183 « At the bottom of his heart Khama hates white men », DÈCLE Lionel, Three years in savage Africa, op.cit.,