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Les obligations contractuelles (Sous-section I) sont énoncées les premières. Les

règles de conflit de loi applicables aux obligations non contractuelles sont exposées

à lasous-section II.

Sous-section I Les obligations contractuelles

Depuis l’entrée en vigueur le 17 décembre 2009 du règlement no 593/2008 du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles, dit « Rome I », celui-ci constitue le droit (185) V. supra, no 1022.

(186) Cass. 1reciv., 11 févr. 2009, Riley.

(187) Cass. req., 22 févr. 1882, Forgo : GAJFDIP, nos7 et 9.

(188) Cass. 1reciv., 5 juill. 1933 : S. 1934, 1, p. 337, note Niboyet. – Cass. 1reciv., 1ermars 2000, Ballestrero : Dr.

et patrimoine juill.-août 2000, p. 97 ; JCP N 2001, p. 92, note G. Légier. Dans cette affaire, M. Ballestrero était décédé le 26 mars 1983 à son domicile français, laissant un patrimoine comprenant des immeubles situés en France, des immeubles situés en Italie et de nombreux biens mobiliers en France. Par testament, le défunt avait fait des legs en faveur de son épouse et de ses deux enfants. Ces derniers contestèrent les opérations de liquidation de la succession, alléguant le dépassement de la quotité disponible. La cour d’appel de Paris, le 19 février 1998, considéra que les juridictions françaises n’étaient pas compétentes pour connaître du sort des immeubles situés en Italie. En conséquence, elle estima que les biens concernés n’avaient pas à entrer dans le calcul de la quotité disponible. Les héritiers formèrent alors un pourvoi en cassation, reprochant à la cour d’appel de n’avoir pas tenu compte du renvoi opéré par la règle de conflit italienne à la loi française. La Cour de cassation censura l’arrêt d’appel au motif que : « Le montant de la réserve héréditaire est déterminé par la loi successorale qui, s’agissant de la succession immobilière, est celle du lieu de situation des immeubles, sous réserve du renvoi éventuel opéré par la loi étrangère à une autre loi, et spécialement

celle du for ». – Cass. 1reciv., 20 juin 2006 : JDI 2007, p. 125, note H. Gaudemet-Tallon. – Cass. 1reciv.,

11 févr. 2009 : JCP G 2009, 10068, note F. Boulanger. – Cass. 1reciv., 25 mai 2016, no 25-16.935 : Dr. famille

20016, comm. 193, M. Farge.

(189) Sur cette question, V. infra, commission 3, nos3411 et s.

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positif dans cette matière (§ I). Il faut néanmoins rappeler les règles fixées par la Conven-

tion de Rome du 19 juin 1980, entrée en vigueur le 1er avril 1991 et qui s’applique aux

contrats conclus après cette date et avant le 17 juin 2008 (§ II), ainsi que les règles

jurisprudentielles qui s’appliquaient avant cette dernière période (§ III).

§ I

Le règlement Rome I

L’article 1 du règlement précise son champ d’application : les obligations contractuelles relè- vent de la « matière civile et commerciale ». Il s’applique à la formation du contrat, à son interprétation, à ses effets, à l’exécution des obligations, aux questions d’exécution et de mauvaise exécution, aux actions en nullité qui pourraient être intentées. L’article 3 de la convention détermine un principe d’autonomie de la volonté. Le choix de loi doit être exprès. À défaut de choix, l’article 4 édicte huit rattachements spéciaux et prédéterminés pour les contrats nommés. Ainsi, pour la vente de biens, la loi applicable est la loi du pays dans lequel le vendeur a sa résidence habituelle ; pour les contrats de prestations de services, la loi applicable est la loi du pays dans lequel le prestataire de services à sa résidence habi- tuelle ; pour le contrat qui a pour objet un droit réel immobilier ou un bail, la loi applicable est la loi du pays de situation de l’immeuble.

Par ailleurs, le règlement prévoit des règles particulières pour certaines catégories de contrac- tants telles que les contrats de transport de marchandises et de personnes (art. 5), les contrats de consommation (art. 6), les contrats d’assurance (art. 7) et les contrats de travail (art. 8).

Le règlement précise également qu’il n’affecte pas les conventions bilatérales conclues par les États membres telles que la Convention de La Haye du 15 juin 1955 sur la vente interna- tionale d’objets mobiliers corporels que la France a ratifiée et la Convention de La Haye du 14 mars 1978 sur la loi applicable aux contrats d’intermédiaires et à la représentation. Par ailleurs, l’article 4, § 3 du règlement met en place une clause dite « d’exception » qui rappelle le principe de proximité déjà évoqué (190). Lorsque la loi applicable ne peut être déterminée en vertu des rattachements fixes et prédéterminés, et « qu’il résulte de l’ensemble des circonstances de la cause que le contrat présente des liens manifestement plus étroits avec un pays autre que celui visé aux paragraphes 1 et 2, la loi de cet autre pays s’applique ».

Le règlement Rome I précise qu’elle remplace, entre les États membres, la convention de Rome, à l’exception des États qui entrent dans le champ d’application territorial de cette convention de Rome et qui n’ont pas signé l’accord de coopération.

§ II

La Convention de Rome du 19 juin 1980

Cette convention s’applique à tous les contrats conclus après le 1eravril 1991, date de son

entrée en vigueur, et avant le 17 décembre 2009. Au contraire du règlement Rome I qui détermine des règles fixes et prédéterminées, la convention ne pose que des présomptions. Ces règles sont toutefois en voie de disparition et, en conséquence, il ne sera rappelé que quelques principes. Cette convention reprend une jurisprudence antérieure (191) qu’elle consacre textuellement en affirmant que la loi applicable est celle que les parties ont choisie. Sous l’influence des théories américaines, il est possible pour les parties de soumettre leur (190) Sur cette notion, V. supra, no 1095.

(191) Cass. 1reciv., 5 déc. 1910, American Trading : GAJFDIP, no 11.

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contrat à plusieurs lois. Ce choix de loi ne doit cependant pas défavoriser un certain nombre de personnes, qualifiées de « parties faibles », qui bénéficient de réglementation particulière. Il s’agit des consommateurs (192) et des contrats individuels de travail (193). En l’absence de choix de loi, l’article 4, § 1 dispose que s’applique la loi du pays avec lequel le contrat présente les liens les plus étroits. Les paragraphes 3 à 5 posent un certain nombre de présomptions. C’est un système très souple qui laisse une large part au juge.

§ III

Les règles jurisprudentielles antérieures à la convention de Rome

Les règles posées par la jurisprudence ont été largement reprises par la convention et le

règlement. Celles-ci s’appliquent encore aux obligations antérieures au 1er avril 1991. Les

contentieux en la matière s’initiant parfois très longtemps après la signature des contrats, ces règles sont tout de même évoquées. Elles sont de construction jurisprudentielle, en l’absence de règle particulière dans le Code civil.

Pendant longtemps, les obligations étaient soumises à la loi du lieu de conclusion du contrat, la locus regit actum. Puis, le principe de l’autonomie de la volonté qui s’est déve-

loppé au cours duXIXesiècle a mis en avant le principe de choix de loi qui a été affirmé par

la Cour de cassation le 5 décembre 1910 (194).

La loi applicable aux contrats est celle que les parties ont adoptée. La Cour a également considéré qu’il faut d’abord s’attacher à la loi que les contractants ont manifestée, que cette manifestation soit expresse, ou « induite des faits et circonstances et la cause, ainsi que des termes du contrat ». Puis, dans un arrêt du 21 juin 1950 (195), la Cour a précisé que « tout contrat international est nécessairement rattaché à la loi d’un État ».

Ce principe a encore été rappelé récemment dans un arrêt du 17 mai 2017 (196). Lorsque les parties n’ont pas désigné de loi applicable, le juge doit la déterminer en analysant « l’économie de la convention et les circonstances de la cause » (197).

Sous-section II Les obligations non contractuelles

Les obligations non contractuelles relèvent aujourd’hui du règlement no 864/2007 du 11 juillet 2007, dit « Rome II », d’application universelle. Ce règlement traite des questions de conditions et d’étendue de la responsabilité, des causes d’exonération, des modes de

réparation du dommage, des possibilités de transmission du droit à réparation(§ I). Cepen-

dant, son article 28 précise qu’il « n’affecte pas l’application des conventions internationales auxquelles un plusieurs États membres sont parties ». De fait, certaines conventions de La

Haye continuent de s’appliquer(§ II). Enfin, il n’est pas inutile de présenter en quelques

mots le droit antérieur qui continue à s’appliquer pour toutes les obligations non contrac- tuelles dont le fait générateur a eu lieu avant le 11 janvier 2009 ou non couvert par le

règlement ou les conventions(§ III).

(192) Conv. Rome 19 juin 1980, art. 5. (193) Conv. Rome 19 juin 1980, art. 6.

(194) Cass. 1reciv., 5 déc. 1910, American Trading : GAJFDIP, no 11.

(195) Cass. 1reciv., 21 juin 1950, Messagerie Maritime : Rev. crit. DIP 1950, 609, note Batiffol.

(196) Cass. 1reciv., 17 mai 2017, no 15-28.767 : JCP G 2017, p. 1727, obs. C. Nourissat.

(197) Cass. 1reciv., 6 juill. 1959, Sté des Fourrures Revel : GAJFDIP, no 35. – Cass. 1reciv., 6 juill. 1959, Mercator-

Press : Rev. crit. DIP 1980, p. 576, note H. Battifol.

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§ I

Le règlement no 864/2007 du 11 juillet 2007, dit « Rome II »

Le règlement Rome II s’applique aux obligations non contractuelles. Il est entré en vigueur

le 11 janvier 2009. Il prévoit à l’article 14 que les partiespeuvent choisir la loi applicable

par un accord postérieur à la survenance du fait générateur ou, lorsque les parties exer- cent toutes deux une activité commerciale, par un accord librement négocié avant la surve- nance du dommage. Ce choix doit être exprès ou résulter de façon certaine des circons- tances. Le choix de loi est illimité, sous réserve de ne pas porter atteinte aux droits des tiers et des règles d’ordre public interne du pays où tous les éléments de la situation sont localisés.

À défaut de choix de loi, le règlement prévoit un rattachement objectif à l’article 4. L’adage lex loci damni a été retenu : la loi applicable est par principe celle du pays où le dommage survient. Une exception est prévue par ce même article lorsque les parties ont leur résidence habituelle dans le même pays. Par application du principe de proximité, la loi de ce pays est retenue.

Les articles 8 à 12 du règlement prévoient quelques rattachements spéciaux, notamment concernant les atteintes aux droits de la propriété intellectuelle, de la responsabilité du fait de grève, en matière d’enrichissement sans cause et de gestion d’affaire ou encore de dommages résultant de tractations avant la conclusion du contrat.

Enfin, et encore pour mettre en avant le principe de proximité, l’article 4 prévoit une clause d’exception en cas de défaillance du rattachement fixe lorsque « le fait dommageable pré- sente des liens manifestement plus étroits avec un pays autre que celui visé aux paragra- phes 1 ou 2 ».

§ II

Les conventions de La Haye

Deux conventions de La Haye continent à s’appliquer. Il s’agit, d’une part, de la Conven- tion de La Haye du 4 mai 1971 sur la loi applicable en matière d’accidents de la circulation routière qui maintient le principe de l’application de la loi du lieu de survenance de l’accident et énonce certaines exceptions dans son article 4.

Il s’agit, d’autre part, de la Convention de La Haye du 2 octobre 1973 sur la loi applicable à la responsabilité du fait des produits, qui concerne les rapports entre victime tiers par rapport au fabricant, fournisseur, producteur ou réparateur. Cette convention a été ratifiée

par onze pays, dont la France le 1eroctobre 1977. La convention prévoit par principe une

règle de conflit de lois cumulative : « La loi applicable est celle du lieu du fait dommageable d’une part et a) l’État de la résidence habituelle de la personne directement lésée, ou b) l’État de l’établissement principal de la personne dont la responsabilité est invoquée, ou c) l’État sur le territoire duquel le produit a été acquis par la personne directement lésée ». Elle met en place une exception pour la loi de la résidence habituelle de la personne directement lésée lorsque cet État est celui « de l’établissement principal de la personne dont la respon- sabilité est invoquée, ou b) l’État sur le territoire duquel le produit a été acquis par la personne directement lésée ».

§ III

Le droit interne

Le droit interne rattache par principe les faits juridiques à la loi du fait générateur de la situation dudit fait. La solution a été définie par une des plus anciennes affirmations de la 1167

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doctrine des conflits de lois par la locution lex loci delicti. Ce rattachement a été consacré par la jurisprudence par l’arrêt Lautour du 25 mai 1948 (198).

Dans cet arrêt, un accident de la circulation a lieu en Espagne entre un camion d’une entreprise française, qui heurte un train et cause un dommage à un autre camion apparte- nant à une société française Les juges du fond appliquent la loi française. La cour casse leur décision et précise que la loi compétente est la loi du lieu où le délit a été commis. Ce principe a continué d’être affirmé par la jurisprudence qui l’a appliqué pour l’indemni- sation de victimes par ricochet et pour tous les délits.

L’arrêt Mobil north sea (199) a déterminé la loi applicable en matière de délits complexes (lorsque l’on peut constater une dissociation dans le temps et dans l’espace entre le lieu du fait générateur et le lieu de réalisation du dommage) en retenant la loi de réalisation du dommage : lex loci damni. Cette règle a annoncé celle finalement retenue par le règlement Rome II.