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3. Les marins étudiés

3.4. Les marins des dragues aspiratrices du PANSN

Le PANSN possédait deux navires de ce type. Leur rôle est de retirer la vase, le sable ou encore les graviers qui s’amoncellent sur les fonds marins, et perturbent le bon fonctionnement des installations portuaires.

La première drague, intitulée l’« ANDRE GENDRE » est dite aspiratrice stationnaire dans le sens où elle ne dispose pas de moteur de propulsion. Elle n’est donc pas totalement autonome, et nécessite un remorquage à couple pour les déplacements d’un chantier à l’autre.

Elle fut construite en 1982, mesure 66,50m de long, et son équipage était de huit personnes.

C’est pour cela qu’elle officie exclusivement dans l’estuaire de la Loire (Nantes et Saint Nazaire).

Elle est positionnée dans le sens du fleuve (cap amont ou cap aval) avec un câble d’écart sur chaque bord à l’avant. Ces deux câbles sont enroulés sur des treuils, leur extrémité est reliée à des ancres et/ou directement au quai (bittes d’amarrage ou chaîne sur la berge).

Néanmoins elle peut se déplacer sur de courtes distances (quelques centaines de mètres) :

- latéralement en pivotant avec les câbles cités ci-dessus par l’action des treuils de la drague ;

- avancer ou reculer, c'est-à-dire qu’elle s’appuie alternativement sur deux pieux inclinables de 30m de haut situés à l’arrière du navire ; on ne fonctionne que sur un pieu que l’on incline pour avancer, et à la fin de la balancée, on change de pieu.

Ce mode de déplacement s’intitule « en papillonnant ».

L’ANDRE GENDRE réalise des « souilles » (tranchées), le long des quais pour éviter aux navires de s’échouer (afin de rester à flot avec la marée). Le système d’aspiration est composé d’une élinde (bras articulé) située à l’avant de l’embarcation qui descend au fond de l’eau, pour aspirer la vase et broyer les roches ou métaux avec un désagrégateur (« cutter »).

La drague rejette simultanément la vase aspirée le long du quai, au milieu de l’estuaire de la Loire via une conduite souple (longueur variable selon le lieu). Après ce transit, la vase est déversée à travers le refouloir (dénommé « sifflet »), lui-même fixé sur une plateforme

Méthodologie

appelée « ponton ». Ce ponton est positionné au centre de l’estuaire à l’aide d’ancres (écart, flot et jusant), dont les câbles sont enroulés sur des treuils.

Un bateau de travail sous forme de vedette de servitude (d’une longueur de 9m) est associé à la drague pour les différentes manœuvres (déplacer les ancres et les câbles, la conduite, le ponton…) ; ainsi qu’au transport du personnel jusqu’à la berge (navette, durée de 15 minutes maximum).

Le mode de fonctionnement de la drague est ininterrompu, donc son personnel travaille en « bordées » (équipes) selon des rotations hebdomadaires. Ainsi, il y a quatre équipes différentes sur 15 jours soit une bordée de jour et l’autre de nuit sur la première semaine, et deux nouvelles bordées pour la semaine suivante.

Par exemple sur quatre semaines consécutives la bordée n°1 va être de :

- bordée de jour de 07H à 19H la semaine 1 ; - repos la semaine 2 ;

- bordée de nuit de 19H à 07H la semaine 3 ; - repos la semaine 4.

A bord de la drague aspiratrice stationnaire, je n’ai eu que deux sujets, alors qu’initialement, je devais observer trois marins par embarquement. Le problème rencontré fut que pour cet unique domaine maritime, je devais embarquer sur deux navires différents (contrat passé avec le directeur du service de dragage). L’équipage étant totalement différent d’une drague à l’autre j’ai choisi de prendre deux sujets sur chaque navire, afin d’éviter tout cas exceptionnel et de rester proche de l’équilibre des trois individus par profession. De plus, j’ai préféré passer deux semaines sur la drague stationnaire, dans l’intention de suivre les sujets sur une bordée de jour et une bordée de nuit. Cette dernière ayant la réputation d’être plus fatigante.

Michel était le patron de vedette, il avait 39 ans. Il dirigeait les différentes manœuvres pour assister la drague dans ses déplacements, déboucher le système d’aspiration si nécessaire, et faire la navette entre la drague et le quai. Il s’occupait également de l’entretien

Méthodologie

Rémy était l’assistant de pont ou dragueur. Il était âgé de 50 ans. Son poste de travail se situait au centre de la passerelle face à l’élinde. Il était le dragueur à son pupitre de travail qui dirigeait l’élinde, et devait respecter les côtes de la « souille » à réaliser. Il avait aussi la commande des pieux et des treuils pour faire évoluer la drague sur le chantier.

Contrairement aux autres embarquements, j’ai observé les deux sujets simultanément car ils travaillaient en étroite collaboration. En fait j’étais à la passerelle avec Rémy, et dès que Michel partait avec la vedette je me rendais avec lui. Je les ai donc observés du 27/10/05 au 03/10/05 pour la bordée de jour, et du 11/10/05 au 18/10/05 pour la bordée de nuit.

La drague aspiratrice mobile se dénomme la « SAMUEL DE CHAMPLAIN ». Elle officie dans les ports ou les estuaires, et ne reste pas cantonnée à Saint Nazaire. Elle extrait du sable, des roches ou de la vase qu’elle stocke dans ses cuves. Elle va ensuite déverser ce contenu dans une fosse sous-marine à proximité. Elle fut construite en 2002, mesure 117m de long et son équipage était de 27 membres. Au contraire des autres navires de ce gabarit, la passerelle est implantée à l’avant tandis que les cuves à ciel ouvert sont centrales. L’élinde est déportée sur l’arrière droit, la plateforme arrière servant aux interventions et au nettoyage sur cette dernière. De la même manière que celle stationnaire, cette drague fonctionne sans interruption. Cependant il n’y a que deux bordées sur quinze jours, la relève s’effectuant toutes les semaines. Les marins alternent donc entre une semaine de travail sous forme de quarts puis une semaine de repos. Ceux qui font le quart de jour passeront de quart de nuit la semaine de travail suivante. Au final, les rythmes sont identiques à ceux de la drague stationnaire. Cette alternance est mise en place pour ne favoriser aucune bordée, le quart de nuit étant considéré comme beaucoup plus éprouvant.

J’étais présent à bord de la SAMUEL DE CHAMPLAIN du 25/10/05 au 01/11/05.

Pour les quatre premiers jours, la zone de travail était dans l’estuaire de la Seine (Le Havre à Honfleur), puis à l’intérieur (avant port) du port de Boulogne sur Mer pour les jours suivants.

L’embarquement et le débarquement eurent lieu au port du Havre, donc il fallut faire les convoyages aller/retour de Boulogne sur Mer. A l’instar de la drague stationnaire, j’ai observé simultanément mes deux sujets qui opèrent dos à dos, mais dans le même espace de travail (à la passerelle).

Méthodologie

Benoît était lieutenant de quart (officier). Il avait 55 ans, et se trouvait à quelques mois de la retraite. Il était responsable du navire durant son service, c’est lui qui effectuait toutes les manœuvres et allait vider la cuve au large lorsqu’elle était remplie. Pendant le convoyage, il était aussi en charge de la navigation. Ses horaires de travail étaient :

- 08H à 13H et 19H à 00H pour les quarts de jour ;

- 00H à 05H et 13H à 18H pour les quarts de nuit (ceux que j’ai observés).

Jimmy était l’assistant de pont ou dragueur. Il était âgé de 46 ans. Son pupitre était dos à la marche pour être face à l’élinde qu’il dirigeait par ses nombreuses commandes. Il devait également respecter les côtes du dragage. Lorsque cela était nécessaire, il se rendait sur la plateforme arrière pour aider les matelots au nettoyage de l’élinde. Ses horaires de travail étaient :

- 06H à 13H et 19H à 00H pour les quarts de jour ;

- 00H à 06H et 13H à 19H pour les quarts de nuit (ceux que j’ai observés).

La majeure partie de mon observation s’est donc déroulée à la passerelle, mais lorsque le dragueur se rendait sur la plateforme arrière je l’accompagnais systématiquement.