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CHAPITRE 1 CONTEXTE DE RECHERCHE

1.3 Technologies de support pour la gestion des médicaments

1.3.2 Les investissements technologiques du circuit hospitalier

La qualité et la stabilité des systèmes de gestion et d’information du milieu de la santé deviennent moins performantes lorsque les biens et les services se déplacent en aval vers les centres hospitaliers (Langebeer, 2007). Les organisations en aval, telles que les hôpitaux, n’ont pas une infrastructure technologique assez sophistiquée pour leur permettre d’améliorer les processus de planification, de synchronisation et de collaboration avec les organisations en amont (Langebeer et Rose, 2003). L’association des hôpitaux du Québec (AHQ) a relevé, dans une étude faite en 2004, plusieurs inefficacités au niveau des activités de la pharmacie hospitalière:

‘’Un circuit de médicaments organisé de façon incomplète et mal supporté sur le plan technologique peut avoir des effets non sécuritaires et peu productifs : plusieurs ordonnances non revues par le pharmacien; duplication d’outils papier et informatiques pour la gestion du médicament par le pharmacien, l’infirmière et le médecin; nombreuses manipulations de médicaments dans des zones de travail achalandées, nombreux déplacements inutiles, etc.’’ (AHQ, 2006).

Le circuit des médicaments peut éviter les erreurs de médication s’il est correctement conçu (Leape, 2005; Kohn et., 2000) et soutenu par des technologies (Crane, 2000). Les centres hospitaliers sont intéressés à intégrer de nouvelles technologies telles que les technologies d’information et communication (OCDE, 2010) et des technologies mobiles (Beaubrun et Pierre, 2001). Ces technologies permettent de diminuer la fréquence des erreurs médicales, de réduire les coûts des services des soins médicaux, d’augmenter l’efficacité de leurs activités (MSSS, 2005; Crane, 2000; Chen et al., 2010) et, surtout, de contribuer à une des prioritiés du secteur de la santé : la sécurité du patient (De Marceillis-Warin, 2004b). Par exemple, les technologies de l’information permettent de diminuer de 50% les erreurs de médication (Chen et al., 2007). De plus, leur intégration peut diminuer la charge de travail du personnel en automatisant les activités répétitives ou routinières. Ainsi, le personnel pourra passer plus de temps à des activités liées directement aux soins du patient. De plus, il faut considérer la possibilité de diminuer les coûts indirects liés à la gestion des médicaments tels que le coût dû au gaspillage des médicaments, le coût du temps

perdu par le personnel pour faire des activités qui pourraient être informatisées ou automatisées, le coût relié au temps additionnel du séjour d’un patient (MSSS, 2007).

Toutes les pharmacies des centres hospitaliers québécois ont des systèmes d’information pour contrôler les processus d’achat, d’inventaire et de distribution. Cependant, leur infrastructure est encore rudimentaire et centralisée. Ces systèmes n’ont pas de capacité d’analyse d’information ou de plateformes de communication et de collaboration entre toutes les organisations de la chaîne d’approvisionnement (Langebeer, 2007).

Figure 1-3: Évolution technologique de l’approvisionnement dans le secteur de la santé (Langebeer, 2007) Langebeer (2007) a développé un modèle pour expliquer la maturité technologique du secteur de la santé en fonction de trois phases (Figure 1-3). Selon cet auteur, la plupart des institutions de santé se trouvent à la phase 1. Dans cette phase, les processus sont exécutés de façon manuelle et documentés seulement en papier avec une faible tendance à automatiser les activités clés et à utiliser quelques outils d’échange de données de type EDI (échange électronique de données) avec les principaux distributeurs et fournisseurs. Une institution du secteur de la santé passe à la phase 2 du modèle de Langebeer quand elle remplace les processus à forte intensité manuelle par des systèmes intelligents, entre autres pour automatiser le processus de planification des achats et de contrôle des inventaires. Finalement, la phase 3 est atteinte

quand tous les processus et les transactions entre l’institution, ses fournisseurs et chacune des unités du service des soins sont automatisés. Dans cette phase, les innovations technologiques sont utilisées pour la mise en œuvre des services de santé et, surtout, pour supporter la prise de décisions. Par exemple, un hôpital aura entre autres la capacité de déterminer automatiquement la quantité de produits à acheter, le meilleur vendeur, les temps d’approvisionnement et les meilleures stratégies de stockage.

Si l’on se tourne vers les technologies de l’information qu’une pharmacie hospitalière peut adopter, on distinguer trois types d’applications selon Mettler et Rohner (2009):

(i) les applications médicales qui permettent de stocker, récupérer, traiter et analyser les informations nécessaires pour mettre en place les processus de la pharmacie comme, par exemple, le système d’information clinique (CIS), le système d’information de la pharmacie, la prescription informatisée d’ordres médicaux(CPOE), le système à dispensation automatique (ADS) et le système à dispensation uni-dose (UDDS);

(ii) les applications administratives qui permettent de gérer des informations de type administratif: par exemple, le système d’information administrative (AIS) et le système de la gestion de la relation avec les fournisseurs qu’il soit opérationnel (oSRM), collaboratif (cSRM), ou analytique (aSRM);

(iii) les applications médicales et administratives qui permettent de supporter ces deux fonctions, telles que par exemple les codes-barres ou la technologie RFID.

La pharmacie hospitalière pourrait améliorer la gestion des médicaments si elle implante les solutions technologiques telles que l’adoption des équipements automatisés pour la préparation, le stockage et la distribution de doses peut diminuer la fréquence des erreurs médicales (Dumitru, 2008). L’intégration du système d’information de la pharmacie (PIS) aux autres sources d’information de l’hôpital (dossier électronique du patient, prescription électronique (CPOE), système de communication d’images (PACS) pourrait apporter des informations pour la prise de décisions du personnel clinique (Hureau et Queneau, 2009; Dumitru, 2008). De plus, les systèmes d’identification et de suivi des médicaments pourraient avoir un impact positif sur la sécurité du patient (Wicks et al., 2006; Patel et Wang, 2010; Yao et al., 2011) et sur les coûts des médicaments (Dumitru, 2009).

Au Québec, plusieurs investissements technologiques sont en train d’être réalisés afin d’assurer la sécurité du patient à travers le circuit hospitalier. En 2006, le Ministère de Santé et Service Sociaux a fait une analyse pour identifier et évaluer les mérites potentiels des projets technologiques dans les centres hospitaliers du Québec (MSSS, 2007). Le Tableau 1-2 liste les principaux résultats de cette analyse.

Tableau 1-2: Taux d’adoption des technologies dans la pharmacie hospitalière au Québec (MSSS, 2007) Moyen Maturité et taux d’utilisation Coût relatif

Effet sur les erreurs et la qualité Effet sur la pénurie Effet sur la productivité Orientations quant à l’utilisation Prescripteur

électronique Faible 4% Élevé Élevé Faible Moyen

Projets pilotes, évaluation

Système d’information de la

pharmacie

Élevé 100% Moyen De moyen à

élevé Moyen Élevé

Remplacement, mise à niveau

Logiciel d’aide à la décision médicale

De faible à

moyen 20% Faible Élevé Faible

De faible à moyen

Projets pilotes, évaluation

Banque de données De moyen à

forte 100% Faible Moyen Élevé Élevé Outil de base

Lecteur du code-

barres Faible 17% Faible Élevé Faible Élevé

Équipement de base

Emballeuse

automatisée Élevé 79% Moyen Élevé Moyen Élevé

Équipement de base

Robot Moyen 7% Élevé Moyen Moyen Élevé Projets pilotes,

évaluation

Système centralisé

d’aditifs aux solutés Élevé 88% Moyen Forte Moyen Moyen

Équipement de base

Cabinet décentralisé (unités de soins

critiques)

Faible 10% Élevé Moyen Moyen Moyen Projets pilotes, évaluation

Cabinet à

narcotiques Faible <2% Moyen Faible Élevé Élevé

Équipement de base

Chariot uni-dose Faible <5% De faible a

moyen Élevé Faible Élevé

organisation du travail Administration de médicaments basée par la prescription papier

Élevé 87% Faible Élevé Élevé Élevé Outil de base

Administration de médicaments basée par la prescription

électronique

Moyen < 2% Moyen Élevé Élevé Moyen Projets pilotes, évaluation,

Délégation du pharmacien au

technicien

Élevé 50% Faible Faible Élevé Élevé Organisation du travail

Délégation de l’infirmier au technicien

Élevé 70% Faible Moyen Moyen Moyen Organisation du travail

Télé pharmacie Faible 0% Élevé Moyen Moyen Moyen

Projets pilotes, évaluation, organisation du

travail

Les technologies permettant la gestion des médicaments à l’unité et la distribution uni-dose (lecture du code-barres, cabinet décentralisé et charriot uni-dose) avaient un taux d’utilisation très bas. Cependant, le gouvernement de Québec a mis en marche, en 2008, l’initiative SARDM (Systèmes Automatisés et Robotisés pour la Distribution de Médicaments) afin d’améliorer la gestion des médicaments dans les centres hospitaliers (MSSS, 2010) et les hôpitaux au Québec sont en train d’intégrer des équipements automatisés pour la préparation et distribution de doses.

1.4 Les systèmes d’identification et de suivi des médicaments