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2.5 Synth` ese et ´ emergence de la probl´ ematique de recherche

3.1.2 Les formes d’imperfection de l’information

L’information est d´efinie comme une ”collection de symboles ou de signes produits soit par

l’observation de ph´enom`enes naturels ou artificiels, soit par l’activit´e cognitive humaine et des- tin´ee `a comprendre le monde qui nous entoure, `a aider `a la prise de d´ecision ou `a communiquer

avec des individus” (Dubois et Prade, 2006).

Le terme d’incertitude au sens g´en´eral doit ˆetre abandonn´e au profit des termes d’ignorance ou d’imperfection de l’information (Bouchon-Meunier, 1995; Dubois et Prade, 2006; Smets, 1991, 1997). De nombreuses typologies ont ´et´e propos´ees2 sans qu’un inventaire exhaustif soit possible ou qu’une typologie internationalement reconnue existe pour d´ecrire le domaine de l’ind´etermin´e (Smets, 1997; Magne et Vasseur, 2006). Les principales formes d’imperfection de l’information sont l’incertitude, l’impr´ecision, l’incompl´etude et l’inconsistance (Smets, 1997) . L’information supporte la d´ecision et peut ˆetre de nature objective ou subjective notamment en fonction du type de source dont elle provient. Cette information a une forme qualitative ou num´erique et son imperfection peut prendre plusieurs formes (Fig. 3.2).

Figure 3.2 – L’imperfection de l’information conditionne la d´ecision

Incompl´etude

L’incompl´etude correspond `a l’absence de connaissances ou de connaissances partielles sur le syst`eme. Elle est syst´ematique et in´evitable `a partir du moment o`u on s’int´eresse `a des ´

echantillons mais peut aussi concerner la nature mˆeme de l’information. Par exemple, supposons une base de donn´ees contenant des informations sans erreurs sur la date de l’avalanche sur un site et l’altitude minimale atteinte par l’avalanche. Pour un site donn´e, la base de donn´ees contient l’information ”avalanche le 3 f´evrier 1980” mais sans extension. L’information est incompl`ete (on ne connaˆıt pas l’altitude) mais le reste est pr´ecis (il y a eu une avalanche) et certain (pas d’erreur dans la base).

Impr´ecision

L’impr´ecision concerne les cas o`u l’information est insuffisante pour permettre `a l’agent de r´epondre `a la question qu’il se pose. La description de la connaissance est imparfaite soit parce que les valeurs num´eriques sont mal connues par insuffisance des moyens d’observations, soit parce que le langage naturel est utilis´e pour d´ecrire de mani`ere vague le syst`eme. Dans le cas de valeurs num´eriques, l’impr´ecision provient soit d’une insuffisance (pouvant provenir d’une impossibilit´e) des moyens d’observation (20000 `a 40000 m3 de d´epˆot d’avalanche), d’erreurs de mesures (largeur estim´ee `a 10% pr`es) ou de r´ef´erence `a des connaissances g´en´eriques variables (la densit´e de la neige varie de 100 `a 500 kg/m3). Le caract`ere vague provient de la forme linguistique employ´ee (faible volume, grande vitesse, arrˆet pr`es du chalet) ou de r´ef´erence `a des cat´egories mal d´efinies (intensit´e moyenne, avalanche rapide). En reprenant l’exemple de la base de donn´ees avalanche, on suppose que l’altitude est donn´ee par l’intervalle [1200 m; 1300 m]. L’information est compl`ete, certaine (donn´ees r´eput´ees sans erreur) mais impr´ecise car il y a ambigu¨ıt´e sur l’altitude exacte d’arrˆet.

Incertitude

L’incertitude se r´ef`ere `a l’´etat de la connaissance qu’a un agent (un individu, un syst`eme informatique) de la relation entre l’´etat r´eel de la nature et l’appr´eciation de cet ´etat de la nature. L’incertitude est attach´ee `a la validit´e (v´erit´e) d’une information. L’incertitude peut elle-mˆeme ˆ

etre d´ecompos´ee (Helton, 1997) en :

– incertitude al´eatoire correspondant `a l’incertitude r´esultant du comportement al´eatoire d’un syst`eme ´egalement d´enomm´ee incertitude de type A, incertitude stochastique, irr´e- ductible, objective ou variabilit´e ;

– incertitude ´epist´emique r´esultant d’un manque de connaissances d’un syst`eme et li´ee aux agents analysant le syst`eme, ´egalement d´enomm´ee incertitude de type B, incertitude sub- jective, incertitude r´eductible, incertitude li´ee `a la connaissance, ignorance.

L’incertitude ´epist´emique est potentiellement r´eductible par le biais d’une acquisition de donn´ees suppl´ementaires3(Indrayan, 2002). Dans le contexte des risques naturels, l’incertitude

´

epist´emique est l’incertitude de mod´elisation due `a une connaissance incompl`ete de la physique des ph´enom`enes (Woo, 1999). L’incertitude peut ´egalement provenir de la fiabilit´e de la source d’information parce qu’elle n’est pas sˆure d’elle ou qu’elle est susceptible de commettre des erreurs : ”je crois que l’avalanche est arriv´ee au niveau de cette route”, ”la ligne de cassure de l’avalanche mesure 200 m” (avis exprim´e par un touriste non qualifi´e).

Inconsistance

L’inconsistance est une forme d’imperfection de l’information provenant d’informations conflic- tuelles. Elle provoque l’incoh´erence des conclusions. Par exemple, l’avalanche a touch´e le chalet `

a 15 h, elle s’est d´eclench´ee `a 15 h 10. Cette inconsistance peut provenir d’une source qui produit des informations contradictoires ou de plusieurs sources ´emettant des informations diff´erentes sur une mˆeme situation : par exemple, l’expert A affirme ”le volume maximal de lave torrentielle

sera de 1000 m3”, l’expert B d´eclare ”le volume maximal de lave torrentielle sera de 20000 m3”. Liens entre imperfections de l’information

Des liens existent entre les imperfections de l’information. Les incompl´etudes entraˆınent des incertitudes. Les impr´ecisions peuvent induire des inconsistances (cas d’un intervalle sur les altitudes d’arriv´ee avec une valeur sup´erieure `a l’altitude de d´epart). L’incompl´etude, li´ee `a

l’information existe ind´ependamment de l’observateur, peut ˆetre consid´er´ee comme une forme objective de l’ignorance. L’incertitude peut ˆetre une forme subjective d’imperfection de l’infor- mation d´ependant de l’observateur. L’impr´ecision et l’incompl´etude sont des notions relatives d´ependantes du contexte de d´ecision. La connaissance de l’existence d’une avalanche avec des altitudes d’arriv´ee impr´ecises peut ˆetre suffisante pour d´efinir une cartographie des ph´enom`enes observ´es dans une vall´ee mais insuffisante pour faire une analyse de risque d´etaill´ee. La sensibilit´e de la d´ecision `a l’imperfection de l’information d´epend donc du contexte et des besoins. Ce qui est suffisant dans une configuration donn´ee ne le sera pas forc´ement pour tout type de d´ecision.

Qualit´es de l’information et de l’expertise

Les qualit´es de l’information et de l’expertise sont li´ees, tout comme le sont l’information et la d´ecision (Fig. 3.2). Les imperfections et notamment l’incertitude d´eterminent la qualit´e intrins`eque de l’information utilis´ee dans le processus d’expertise. Dans l’objectif d’une d´ecision, il est n´ecessaire de franchir les ´etapes suivantes :

– d´efinir la nature de l’information : comment peut-on d´ecrire le domaine th´ematique d’ap- plication ? quels sont les objets sur lesquels l’information est recherch´ee ? Cette ´etape indispensable permet de formaliser et de structurer l’information qui sera exploit´ee dans le processus de d´ecision et qui apparaˆıtra ult´erieurement sous forme de crit`eres dans les mod`eles d’aide `a la d´ecision. Il s’agit ici de d´efinir explicitement les objets et concepts qui seront utilis´es dans la suite ;

– regrouper les informations en fonction des raisonnements mis en œuvre. Il ne s’agit pas ici d’effectuer des traitements produisant de nouvelles informations comme dans un sys- t`eme expert mais de d´efinir des ensembles homog`enes d’information exploit´es dans les divers cadres d´ecisionnels. Une mˆeme information peut ´evidemment ˆetre utilis´ee pour de nombreuses applications ;

– ´evaluer les informations par rapport `a leur niveau d’imperfection est une ´etape indispen- sable et difficile dans le cadre des approches qualit´e. Des indicateurs explicites, quantitatifs ou qualitatifs, sont indispensables ;

– capitaliser les informations est une n´ecessit´e dans le cadre de la gestion op´erationnelle des risques. Par rapport `a notre objectif, cette capitalisation des donn´ees doit s’enrichir d’un volet permettant la tracabilit´e et int´egrant la qualit´e de l’information en vue du stockage des informations. Comment peut-on attacher `a une donn´ee des ´el´ements d´ecrivant la g´en´ealogie de l’information, sa qualit´e intrins`eque en restant inter-op´erable avec d’autres syst`emes d’information ?

Cette logique peut ainsi ˆetre rattach´ee `a la th´ematique des risques naturels et `a la caract´e- risation des composantes du risque (Fig. 3.3). Il s’agit ici non seulement de mettre en œuvre des approches disciplinaires pour estimer chacun des composants mais aussi de caract´eriser la confiance associ´ee `a chacune de ces informations en fonction de leur nature, de leur mode d’ac- quisition et de leur provenance. Une couche relative `a la qualit´e de l’information et associ´ee `

a la couche d’´evaluation. Pour les informations r´esultat de jugements d’expert, des approches multicrit`eres (repr´esent´ees sous forme d’arbre) peuvent ˆetre imagin´ees pour d´ecrire la qualit´e de l’information.

Figure 3.3 – La qualit´e de l’information impacte l’´evaluation des composantes du risque