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Le dilemme de l’expertise : analyser et agir sans pouvoir tout connaˆıtre

2.3 Formes et modalit´ es d’expertise

2.3.2 Le dilemme de l’expertise : analyser et agir sans pouvoir tout connaˆıtre

Malgr´e l’ensemble des connaissances disponibles, l’analyse des risques comporte toujours une part d’incertitude dite irr´eductible associ´ee au caract`ere al´eatoire des ph´enom`enes et aussi au d´efaut de connaissances. Quelques situations en illustrent les difficult´es pratiques et concr`etes.

L’explication est toujours plus facile que la pr´ed´etermination . . .

En 2005, le torrent d’Armancette (Contamines-Montjoie, Haute-Savoie, France), g´en`ere une lave torrentielle de l’ordre de 200000 m3 qui d´eborde en rive droite, touche quelques maisons et s’arrˆete dans la cour de la halte-garderie. Une visite post-´ev`enement permet de proposer une premi`ere analyse (Chambon et al., 2005). L’incision g´en´eralis´ee du lit dans la partie sup´erieure du chenal, sur une largeur de plus de 10 m et une profondeur de l’ordre de 8 m, est tout `a fait surprenante et n’aurait probablement mˆeme pas ´et´e envisag´ee dans le cadre d’une pr´ed´e- termination avant l’´ev`enement. L’analyse post-´ev´enement a, quant `a elle, expliqu´e et analys´e le ph´enom`ene observ´e : expliquer est en effet toujours plus facile que pr´ed´eterminer. En partie m´ediane du chenal, des barrages de correction torrentielle ont ´et´e affouill´es de plusieurs m`etres en quelques jours : un horizon gypseux non identifi´e `a la construction constituait en fait la partie inf´erieure du lit (Fig. 2.15).

Figure 2.15 – Les niveaux d’incision du chenal d’´ecoulement en partie haute et m´ediane du chenal d’´ecoulement n’´etaient pas pr´evus

L’´etude historique des sites, jamais tr`es facile `a organiser, apporte la plupart du temps suffi- samment d’information sur les ph´enom`enes potentiels. Les sc´enarios alternatifs ne correspondent cependant pas toujours `a des r´ef´erences historiques et `a des situations ayant d´ej`a ´et´e observ´ees. Imaginer des sc´enarios de ph´enom`ene alors que rien ne s’est encore produit fait alors partie de situations d’expertise particuli`eres difficilement probabilisables.

De la difficult´e de la description d’un ph´enom`ene : les bases fragiles du raisonnement

L’analyse post-´ev´enement d’une avalanche est essentielle pour d´eterminer le sc´enario et les caract´eristiques de l’avalanche puis en assurer la transcription dans les bases de donn´ees ´ev´ene- mentielles (EP A6) et cartographiques (CLP A7) qui fourniront des donn´ees servant `a alimenter des simulations num´eriques. Dans ce cadre, l’observateur doit essayer de d´eterminer le volume de neige au d´epart puis le confronter `a une estimation du d´epˆot observ´e dans la zone d’arrˆet. Il fait pour cela une ou plusieurs hypoth`eses relatives `a la densit´e de la neige dans la zone de d´eclenchement et de propagation en observant les traces laiss´ees par l’´ecoulement pour d´eter- miner s’il s’agit d’une avalanche coulante, a´erosol ou mixte aux diff´erents points de passage. La d´etermination de la longueur de cassure se fait g´en´eralement `a distance, sauf dans les rares cas o`u le risque de d´eclenchement r´esiduel d’avalanche est nul et l’acc`es est possible. Outre les conditions m´et´eorologiques, la position du point d’observation conditionne `a lui seul la pr´ecision de l’estimation effectu´ee par l’observateur (Fig. 2.16).

6. Enquˆete permanente sur les avalanches

Figure 2.16 – De mauvaises conditions d’observation compromettent l’estimation du volume de neige au d´epart de l’avalanche

La qualit´e des donn´ees disponibles lors des relev´es post-´ev´enements impacte directement la pertinence des sc´enarios de description des ph´enom`enes. Des indicateurs qualitatifs ont ´et´e propos´es pour qualifier des ph´enom`enes observ´es (information bonne, moyenne, mauvaise) sans explicitation de l’´echelle servant `a l’´evaluation de la qualit´e des donn´ees stock´ees dans les bases de donn´ees ´ev´enementielles (H¨ubl et al., 2002). L’enjeu est ici de proposer une m´ethode pour justifier la confiance que l’on a dans l’information recueillie. Pour contribuer `a cet objectif, le principe d’un couplage entre l’expertise et la qualit´e des donn´ees a ´et´e imagin´e (Tacnet et al., 2006). Un niveau de qualit´e globale est affect´e `a chacune des analyses effectu´ees dans le cadre de l’expertise post-´ev´enement. La nature des informations disponibles est d´ej`a un crit`ere permettant de d´eterminer des niveaux croissants de confiance dans l’estimation : la confiance dans l’analyse du sc´enario de d´eclenchement sera meilleure si l’information utilis´ee comporte par exemple des relev´es m´et´eorologiques locaux par rapport `a une situation d’absence totale de donn´ees sur ce volet (Fig. 2.17). Le sc´enario du ph´enom`ene d’avalanches correspond `a la description des phases de d´eclenchement, de propagation et d’arrˆet. `A chaque ´etape, le principe consiste donc `

a ´evaluer les crit`eres de l’avalanche (longueur de la cassure, volume de neige au d´epart . . . ) mais aussi de d´eterminer la confiance dans la mesure ou l’´evaluation du crit`ere en fonction des conditions d’observation et des informations disponibles. Une premi`ere approche propose donc de repr´esenter l’expertise post-´ev`enement comme l’association d’une couche d’´evaluation du crit`ere et d’une couche li´ee `a la fiabilit´e de l’information. Sur la couche d’”expertise”, un mod`ele de d´ecision hi´erarchique d´ecrit la d´ecision d’expertise et sur la couche ”qualit´e des donn´ees”, un autre mod`ele d´efinit la confiance en chacune des informations utilis´ees.

Figure 2.17 – Un premier principe de prise en compte de la qualit´e de l’information dans l’expertise

Un exemple d’expertise r´ev´elateur des incertitudes et des contradictions

Des enjeux et d´ecisions capitales. Le cas de la commune de Mont-Dore (Puy-de- Dˆome, France) est un exemple frappant du contexte d’expertise. En janvier 2004, en pleine nuit, une coul´ee de boue (lave torrentielle) d’un volume estim´e `a 5000 m3 traverse le lotissement des ”Egravats” et d´epose des blocs m´etriques sur la route d’acc`es `a la station de ski du Mont-Dore. La coul´ee a d´ebord´e d’un modeste chenal de quelques m2 de section construit quelques ann´ees en arri`ere `a la suite d’une premi`ere expertise. Les chalets en amont du cˆone de d´ejection sont touch´es. Par chance, et en raison de l’heure tardive, la coul´ee ne fait aucune victime dans le lotissement et sur la route d’acc`es `a la station, r´eguli`erement emprunt´ee par des v´ehicules de tourisme et de transport en commun. Ne connaissant pas l’´etat de la menace r´esiduelle, le pr´efet, conseill´e par un groupe d’experts, ordonne l’´evacuation de 49 chalets et conditionne le retour des habitants `

a la production d’une expertise favorable en ce sens. Un groupe d’experts8 va ˆetre mandat´e pour infirmer ou confirmer la mesure d’´evacuation. L’enjeu de l’expertise est consid´erable : un des sc´enarios ´evoqu´es correspond en effet `a l’expropriation et `a la destruction totale des chalets. Une premi`ere ´etude des donn´ees bibliographiques disponibles cherche `a identifier les ph´enom`enes connus et analyse les conclusions des nombreuses ´etudes pr´eexistantes. Le constat est troublant : les volumes attendus, ´evoqu´es dans les diverses ´etudes, s’´etalent de quelques centaines `a plusieurs dizaines de milliers de m3 (Fig. 2.18). Parmi les experts ayant exprim´e les plus faibles valeurs, se retrouve une personne reconnue internationalement pour ses comp´etences en m´ecanique des sols mais qui s’av´erera finalement n’avoir fait qu’une visite ´eclair sur le site. L’analyse permet ´

egalement de d´ecouvrir que les expertises ne sont ´etay´ees par aucune mesure de terrain. La question reste donc pos´ee tant sur le risque de coul´ee de boue que sur celui de chute de blocs : quels sont les volumes de coul´ees et de chute de blocs possibles ? peut-on prot´eger le site et autoriser le retour des habitants. Une ´etude de plusieurs mois, ´etay´ee par de nombreux essais g´eotechniques in situ, conclut finalement `a la possibilit´e de protection du site (Berger et al., 2004).

Figure 2.18 – Comment consid´erer des expertises contradictoires ?

Les approches quantitatives et les mod`eles sont toujours interpr´et´es Pour ana- lyser les sc´enarios d’´ecoulement et de d´ebordement de lave torrentielle, toujours dans le cadre de cette expertise, une mod´elisation num´erique d’´etalement est r´ealis´ee sur la base de volumes d’entr´ee fournis par une autre ´equipe d’experts charg´es de d´eterminer les volumes de d´epart provenant d’un glissement. En l’absence de mesures r´ealis´ees sur le mat´eriau r´eel, les param`etres rh´eologiques du fluide sont approch´es dans le cadre de sc´enarios d’´ev´enements choisis par l’ex- pert en prenant en compte les situations les plus d´efavorables en terme de hauteur ou distances atteintes. Les simulations permettent ici de d´efinir des enveloppes indicatives : les r´esultats de mod´elisation num´erique ne sont en effet pas utilis´es de mani`ere brute pour produire des cartes d’al´eas (Fig. 2.19) mais font l’objet d’une interpr´etation (Tacnet et al., 2005b). Le r´esultat du zonage est donc finalement une adaptation propos´ee sur la base de la simulation mais aussi d’une appr´eciation de facteurs d’aggravation tels que des embˆacles ou des blocages de l’´ecoulement en raison de la pr´esence de blocs.

Figure 2.19 – L’expertise est n´ecessaire pour interpr´eter les simulations et proposer une solution op´erationnelle. Le cercle est un simple point de rep`ere)

De mani`ere g´en´erale, mˆeme si l’utilisation de m´ethodes quantitatives est toujours recherch´ee, le raisonnement humain reste, avec la subjectivit´e qu’il comporte, primordial dans le r´esultat final de zonage des al´eas. Dans le mˆeme temps, il est ´egalement reconnu que les approches quan- titatives, notamment les simulations num´eriques, restent largement bas´ees sur l’exp´erience de l’expert (conditions initiales, param`etres des mod`eles . . . ) et demeurent du mˆeme coup subjec- tives et incertaines (Brundl et al., 2008). Le jugement d’expert, reconnu comme indispensable, doit s’accompagner d’une description des hypoth`eses, des arguments et faire l’objet d’une des- cription d´etaill´ee (Barbolini, 2008).

Les circuits d’information et leur caract`ere imparfait

Le processus global d’expertise est consid´er´e comme un enchaˆınement complexe de traite- ments utilisant une information imparfaite par nature. L’information constitue le fondement des raisonnements, avis, et d´ecisions exprim´ees dans le cadre de l’expertise des risques natu- rels. Elle provient de nombreuses sources au cours du processus d’expertise : mesures, capteurs, chroniques historiques, observations, avis d’expert. L’incertitude et l’imperfection associ´ees `a l’information se propagent dans le processus d’expertise (Fig. 2.20). Des donn´ees brutes de qua- lit´e m´ediocre, fortement subjectives peuvent ˆetre utilis´ees comme des donn´ees de mod`eles de simulation et tout autre raisonnement ou analyse d´eterministe. L’imperfection de l’information peut ´egalement n’ˆetre que contextuelle en raison par exemple d’une collecte de donn´ees insuffi- sante par manque de temps ou de moyens (on peut distinguer les informations disponibles mais non utilis´ees et les informations inexistantes).

Figure 2.20 – L’incertitude provient des diff´erentes phases de l’expertise

Le cas des plans de pr´evention des risques9 illustre cette probl´ematique. Le contrˆole de l’occupation du sol constitue en France une des principales mesures de pr´evention de type non- structurelle contre les risques naturels (Bourrelier et al., 1997). Le zonage pr´eventif d´efinit des zones o`u les constructions sont soit interdites, soit autoris´ees avec ou sans restrictions (Fig. 2.21). Les zones sont d´etermin´ees par croisement de l’al´ea (le ph´enom`ene caract´eris´e en intensit´e et fr´equence) et de la vuln´erabilit´e associ´ee aux enjeux. Ces plans sont mis en œuvre sur la base des connaissances disponibles. Des approches quantitatives sont conseill´ees mais il est aussi reconnu que les jugements d’expert sont indispensables pour pallier l’incertitude dans la connaissance des ph´enom`enes et formuler les sc´enarios de r´ef´erence sur la base de l’information disponible (Barbolini, 2008; Brundl et al., 2008; Tacnet et al., 2005a).

Figure 2.21 – Les plans de pr´evention des risques (PPR) : une mesure non-structurelle de zonage des risques

2.3.3 L’expertise n´ecessite et produit des outils d’aide `a la d´ecision

Domaines et ´echelles de d´ecisions

La gestion des risques naturels implique un grand nombre d’acteurs et de d´ecisions variables en fonction des phases temporelles (pr´evention, gestion de crise, retour d’exp´erience), de l’objet et de la port´ee de la d´ecision. L’expertise peut prendre des formes diverses et concerner aussi bien la d´etermination de sc´enarios de r´ef´erence en phase de pr´evention, que la d´ecision d’´evacuation d’urgence suite `a une menace imminente (Fig. 2.22). Dans le premier cas, l’expertise peut ˆetre qualifi´ee d’interne, l’expert ´etant lui-mˆeme le d´ecideur. Elle ne mobilise que des connaissances et des acteurs scientifiques ou techniques et ne concerne que le ph´enom`ene. Dans le second cas, le cadre de d´ecision est beaucoup plus large et va impliquer d’autres crit`eres que les stricts aspects techniques. L’expert devient alors une source d’information pour un d´ecideur externe qui va devoir consid´erer les volets certes techniques mais aussi humains, sociaux, fonctionnels . . . .

Figure 2.22 – Les diff´erents types d’expertise

ecisions internes au processus d’expertise Dans le cadre de l’expertise d’un risque torrentiel, les d´ecisions internes vont, par exemple, concerner l’identification du ph´enom`ene de r´ef´erence (lave torrentielle, charriage), sa quantification (volume, zone d’apports), sa propagation (trac´e, zone d’arrˆet) et plus g´en´eralement le zonage de l’al´ea. . . . Un autre exemple de probl´e- matique courante et de plus en plus fr´equente, suite au vieillissement des ouvrages, consiste `

a devoir ´evaluer l’´etat d’un dispositif de protection ancien et analyser son efficacit´e : doit-on, peut-on laisser se d´egrader des ouvrages de protection ? o`u faut-il intervenir en priorit´e ? Cette analyse d´epend de facteurs tels que le type d’ouvrages de protection, leur position dans le dispo- sitif, leur mat´eriau de construction, leur ´etat, leur efficacit´e structurelle mais aussi fonctionnelle (Tacnet et Richard, 2009) (voir annexe B.3, p. 335).

De mani`ere classique, l’expertise utilise autant que possible des m´ethodes quantitatives de mod´elisation associant des approches statistiques, des simulations num´eriques (Barbolini, 2008). Les experts utilisent aussi des outils bas´es sur la confrontation et l’analyse de crit`eres multiples pour identifier les composantes du risque correspondant au ph´enom`ene et aux enjeux expos´es. Ils prennent par exemple la forme d’´echelles d’intensit´e, de typologies d´evelopp´ees pour comparer les sites selon leurs caract´eristiques morphologiques (Staub, 1999, 2001), hydrom´et´eorologiques, analyser les risques de d´eclenchement et d´eterminer le potentiel physique d’aggravation par rapport `a des ph´enom`enes connus (Richard, 1995).

Pour qualifier des niveaux de risques, les praticiens utilisent ´egalement des m´ethodologies is- sues d’approches ´economiques telles que les approches coˆuts-b´en´efices (Brundl et al., 2008). Dans le domaine des crues torrentielles, ces approches montrent cependant leurs limites notamment en raison de la difficult´e d’´evaluation de la vuln´erabilit´e (Brochot et al., 2003; Fuchs and al., 2007).

Les d´ecisions de gestion externes L’aide `a la d´ecision se situe donc souvent `a un autre niveau que la stricte vision technique propos´ee par une expertise.

L’expertise technique ne produit pas directement de d´ecisions de gestion qui mobilisent d’autres acteurs et int`egrent des facteurs li´es `a l’impact social, ´economique, financier, environ- nemental des mesures. Ces d´ecisions qualifi´ees d’”externes” sont ´evidemment les plus complexes. L’expertise technique ne fait ici que participer `a l’´elaboration de d´ecisions de gestion. Il peut s’agir par exemple de choisir des priorit´es de protection en consid´erant des contraintes tech- niques, ´economiques, politiques. Le risque z´ero n’existe pas (Guilhou et Lagadec, 2002) et pour

des raisons financi`eres, la protection ne pourra toujours ˆetre que partielle : dans ces conditions, comment choisir les enjeux `a prot´eger en priorit´e ? comment choisir des parcours et strat´egies `a dommage minimal, acceptant des d´egˆats localement pour mieux prot´eger ailleurs ?

En situation d’urgence, un ´elu va ˆetre confront´e `a d’autres choix d´elicats. A quel moment faut-il ´evacuer temporairement une zone mˆeme si celle-ci est prot´eg´ee par un ouvrage impo- sant ? Comment va-t’il d´ecider et sur quels crit`eres ? A ce moment, ces choix sont souvent faits par des non-sp´ecialistes (responsables des collectivit´es locales, de l’Etat...) et la confiance dans l’information dont ils disposent va alors jouer un rˆole essentiel dans la d´ecision :

– Est-ce qu’on est certain de l’´etat du dispositif de protection ?

– Est-ce que tous les ´el´ements techniques sont parfaitement connus en temps r´eel pour per- mettre la d´ecision (hauteur de neige, stabilit´e des sols, circulations d’eau dans le sol . . . ) ? – Est-ce que la chaˆıne op´erationnelle est sans faille : acc`es, t´el´ecommunications . . . ?

Conclusion sur les domaines de d´ecision Dans le domaine des risques naturels, la prise de d´ecision ”interne” fait partie inh´erente du processus d’expertise technique. Ces expertises contribuent aux d´ecisions ”externes” qui s’op`erent `a des ´echelles allant de celle du bassin de risque (bassin versant torrentiel, site d’avalanche . . . ) `a des ´echelles d´epartementales, r´egionales voire nationales dans le cadre d’approches visant `a identifier par exemple les sites prioritaires d’intervention, planifier des politiques publiques, g´erer des infrastructures de communication . . . . Des mod`eles d’aide `a la d´ecision pour les risques naturels servent par exemple `a d´eterminer les sites `a risques sur des secteurs g´eographiques ´etendus dans le domaine par exemple du risque minier (Merad et al., 2004), du risque d’avalanches (Rapin et al., 2004) ou du risque routier. Les solutions (ou alternatives) correspondent alors aux sites devant ˆetre ´evalu´es par des op´erateurs diff´erents.

Des m´ethodes d’aide `a la d´ecision sont donc requises dans le cadre des d´ecisions internes au processus d’expertise et externes dans le cadre de d´ecision de gestion. Fournir des ´el´ements et un cadre m´ethodologique pour am´eliorer et aider les processus de d´ecision li´es `a l’expertise est donc un v´eritable enjeu. Dans la pratique, pour r´epondre aux besoins, des outils sont d´evelopp´es parfois tr`es empiriquement, sans r´ef´erences explicites avec des cadres m´ethodologiques d’aide `a la d´ecision reconnus.

Les m´ethodes d’aide `a la d´ecision pour les risques : un existant ”non conventionnel” et un besoin de polyvalence

Les mod`eles de d´ecision simplifi´es et empiriques Pour r´epondre aux besoins, des mod`eles d’aide `a la d´ecision simplifi´es sont con¸cus par les praticiens en combinant les crit`eres par le biais de sommes pond´er´ees par exemple pour l’´evaluation de la vuln´erabilit´e (Chauviteau et Vinet, 2006), de la sensibilit´e des sites au risque d’avalanche (Rapin et al., 2004), de l’ex- position des routes aux chutes de blocs (Gaussin, 2009). . . . Si chaque mod`ele est pens´e pour un objectif d´etermin´e, les donn´ees qu’il exploite peuvent par contre servir dans de nombreuses probl´ematiques : les crit`eres descriptifs, morphologiques d’un site d’avalanche ou d’un bassin versant torrentiel sont en effet ind´ependants du contexte d´ecisionnel dans lequel ils sont utilis´es. Ils auront par contre des importances variables selon les cadres de d´ecision. Les regroupements effectu´es entre ces crit`eres et l’importance qui leur sera accord´ee d´ependront par contre de la d´ecision `a prendre. On peut faire ici une analogie avec la r´eorganisation d’un plan d’un document (la d´ecision) dont on conserverait le mˆeme contenu mais en classant les paragraphes (les crit`eres) autrement pour changer le message d’un texte. Il y a donc plusieurs objectifs pour assurer la plus grande polyvalence aux donn´ees disponibles. Consid´erant qu’il existe autant de mod`eles que de probl`emes de d´ecision et d’analystes (Roy, 1985), le principe est de dissocier l’´evaluation des donn´ees et l’analyse en vue d’une d´ecision pour permettre d’exploiter la connaissance m´etier