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LES DROITS DES FAMILLES DANS DIFFERENTS REGIMES MIGRATOIRES

Partie I C ADRE CONCEPTUEL

Chapitre 2 L E PROCESSUS MIGRATOIRE AU SEIN DES FAMILLES : PERSPECTIVES THEORIQUES

2.2.1 LES DROITS DES FAMILLES DANS DIFFERENTS REGIMES MIGRATOIRES

Il est possible d’identifier deux régimes migratoires idéal-typiques définis en fonction des droits accordés aux migrants et à leurs familles dans le pays d’arrivée : le régime de la migration (temporaire) et de l’immigration (permanente) (Böhning, 1974). Le XXème siècle se caractérise par le passage des principaux pays d’immigration du premier régime vers le second, comme nous le montrons dans un premier temps. Cette évolution au niveau des différents pays s’est réalisée dans un contexte de construction d’un système de droit commun défini par des normes juridiques internationales, puis européennes, qui est décrit dans un deuxième temps. La dernière partie de cette section montre comment les caractéristiques du système de protection sociale des pays d’arrivée et de départ peuvent à leur tour influencer les décisions des familles.

a) DEUX REGIMES MIGRATOIRES : MIGRATION VERSUS IMMIGRATION

Les régimes de la migration et de l’immigration se traduisent par des politiques étatiques spécifiques envers les migrants et leurs familles (Böhning, 1974 ; Glenn, 1983 ; Hondagneu-Sotelo et Avila, 1997 ; Salazar Parreñas, 2005 ; Satzewich, 1993). Deux critères centraux à notre thématique définissent chaque régime : la durée envisagée de la migration et la place accordée à la famille nucléaire. Dans le cas de la migration, la présence du migrant est considérée comme temporaire, le temps de son employabilité, et des mesures interdisant son installation sont mises en place (délivrance conjointe des contrats de travail et des permis de séjour temporaires, interdiction de faire venir la famille, restriction de la formation des couples (mixtes) dans le pays de destination). De fait, l’existence des migrants est séparée en deux mondes : celui du travail dans le pays de destination et celui de la famille au pays d’origine. Dans ce modèle, l’État cherche à séparer les coûts de la maintenance de la main d’œuvre de ceux de sa reproduction afin de maximiser les bénéfices de la migration ; il se subordonne donc, selon les critiques marxistes et féministes, à la logique capitaliste. A l’inverse, dans le modèle de l’immigration, l’État part du principe que la présence du migrant est durable et le considère comme un membre de la société en devenir. Il met en place des politiques tournées vers son intégration et celle de sa famille : possibilité de migrer ensemble ou de faire venir ultérieurement des membres de sa famille, accès au système de protection sociale (retraite, chômage, santé, éducation).

Quels régimes migratoires mettent en place les États ? Dans les pays d’installation tels que les États-Unis et le Canada, des mesures politiques interdisant l’installation sur le territoire national

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de certains groupes de migrants, notamment originaires d’Asie, étaient courantes jusqu’au milieu du XXème siècle (Glenn, 1983 ; Satzewich, 1993). De fait, les migrants étaient obligés de « faire famille42 » à distance :

- soit émigrer sans le conjoint avec lequel ils étaient mariés,

- soit, s’ils étaient venus célibataires, former plus tard une union avec une personne résidant dans le pays d’origine, en raison de l’interdiction de former un couple mixte avec un national du pays de destination.

L’ensemble de ces dispositions impliquait aussi de voir naitre et grandir ses enfants à distance. La politique des gasterbeiter en Allemagne était également conçue sur le mode de la migration visant un renouvellement régulier de la main d’œuvre, sans l’installation durable des travailleurs sur le territoire national. Pour atteindre ces objectifs, l’État privilégiait le recrutement de travailleurs célibataires et prévoyait la rupture des contrats lorsque la situation familiale changeait, notamment si les femmes tombaient enceintes (Strasser, Kraler et al., 2009). Ainsi, une clause dans les contrats des femmes ressortissantes du Vietnam prévoyait l’avortement ou le retour au pays d’origine des femmes qui tomberaient enceintes pendant leur séjour en Allemagne, clause qui rappelle des dispositions similaires existantes avant la première guerre mondiale (Milewski, 2010).

Progressivement, les pays occidentaux reconnaissent aux migrants le droit de « vivre en famille » et le principe de « l’unité de la famille43 », et suppriment les dispositions les plus discriminatoires telles que celles décrites précédemment. Cette évolution passe par la reconnaissance du lien familial comme un motif d’admission au séjour, soit le droit des membres d’une famille de vivre ensemble et de pouvoir se réunir en cas de séparation, mais également leur accès au marché du travail et au système de protection sociale. Il y a donc une évolution générale du régime de la migration vers celui d’immigration, et ceci malgré les restrictions observées dans ce domaine dans les dernières décennies dans plusieurs pays européens, discutées dans la suite de ce chapitre. Il existe néanmoins des régimes fonctionnant encore sur le modèle de la migration temporaire. Ils se situent principalement en Asie de l’Est (Corée du Sud, Japon, Singapour, Taiwan) et au Moyen-Orient (Koweït, Arabie Saoudite). Ces pays continuent de limiter l’installation des migrants travailleurs, ainsi que de leurs familles (instauration d’une durée maximale de présence sur le territoire, interdiction de faire venir des membres de la famille…) (Asis, 2004 ; Castles et Miller, 2009 ; Shah, 2006).

42 L’expression « faire famille » (« doing family ») exprime la dimension dynamique et plurielle de la construction de la famille, qui s’oppose ainsi à un modèle statique et unique de la famille. Cette expression prend un sens d’autant plus fort dans le contexte migratoire dans la mesure où les relations et les expériences familiales se construisent et sont impactées par l’environnement socio-économique et légal dans lequel les familles évoluent (Strasser, Kraler et al., 2009).

43 Ce droit / principe n’est pas formulé en tant que tel dans les normes juridiques, mais englobe généralement l’ensemble des règlements relatifs à l’admission, au séjour et aux départs forcés du territoire des membres d’une famille (Jastram, 2003).

89 b) NORMES JURIDIQUES

Même si l’immigration reste un domaine phare des politiques nationales, la compréhension de l’évolution décrite précédemment ne peut se faire sans la prise en compte de l’importance croissante des normes juridiques établies au niveau international. Elles prennent des formes différentes (conventions internationales élaborées par des organismes liées aux Nations Unies, directives de l’UE) et peuvent avoir un impact plus ou moins fort sur le cadre légal national. Parmi les conventions internationales existantes, il convient de distinguer celles à portée générale et pouvant comporter des articles concernant spécifiquement les migrants et leurs familles, de celles qui visent en priorité ces derniers.

CONVENTIONS INTERNATIONALES « UNIVERSELLES »

Des articles relatifs au respect de la vie familiale et à la protection de la famille figurent dans plusieurs conventions internationales : Déclaration universelle des droits de l’homme44 (1948), Convention européenne des droits de l’homme45 (CEDH) (1950), Convention internationale relative aux droits de l’enfant46 (CIDE) (1989). Ce sont notamment les articles 8 de la CEDH stipulant le « droit au respect de la vie privée et familiale » et l’article 9 de la CIDE demandant aux États de veiller à ce que « l'enfant ne soit pas séparé de ses parents » qui sont souvent cités dans les tribunaux opposant les migrants aux autorités nationales. Les familles confrontées à une interdiction de réunification ou à un retour forcé peuvent faire appel à la Cour Européenne des droits de l’homme, le tribunal d’instance le plus haut permettant de statuer si la décision de l’Etat basé sur ses intérêts (règlementation des flux migratoire, sécurité nationale) n’est pas disproportionnée au regard des implications d’un tel refus pour les familles impliquées (de Hart, 2009 ; Staiano, 2013).

CONVENTIONS INTERNATIONALES ET ACCORDS BILATERAUX RELATIFS AUX MIGRANTS

L’amélioration des droits des migrants et de leurs familles s’inscrit dans l’évolution plus globale d’un Etat de protection sociale tout au long du XXème siècle. Les droits de travailleurs étrangers apparaissent centraux à la question de la coordination des systèmes de protection sociale nationaux qui débute dans la période de l’entre-deux-guerres, menée en partie par le Bureau international du Travail (BIT) (Rosental, 2006). Pour rester « compétitif », les États souhaitant attirer des travailleurs étrangers se voient « obliger » de leur accorder des droits dont bénéficient les travailleurs nationaux. Les premières conventions apparaissent en 1919 (durée de travail, chômage) et sont progressivement signées par les pays à partir des années 1920. La première convention portant spécifiquement sur les travailleurs étrangers parait en 193547 et porte sur la conservation de leurs droits à pension (n°48). La convention sur l’égalité de

44 https://www.un.org/fr/documents/udhr/ 45 http://conventions.coe.int/treaty/fr/treaties/html/005.htm 46 http://www2.ohchr.org/french/law/crc.htm 47 http://www.ilo.org/dyn/normlex/fr/f?p=NORMLEXPUB:12100:0::NO:12100:P12100_INSTRUMENT_ID:3 12193:NO

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traitement (sécurité sociale) (n° 118) de 196248 propose d’élargir ce droit à d’autres domaines de sécurité sociale :

- « (a) les soins médicaux; (b) les indemnités de maladie; (c) les prestations de maternité; (d) les prestations d'invalidité; (e) les prestations de vieillesse; (f) les prestations de survivants; (g) les prestations d'accidents du travail et de maladies professionnelles; (h) les prestations de chômage; (i) les prestations aux familles » (Convention sur l’égalité de traitement (n°118) de 1962n article 2)

Cependant, seuls quelques pays mettront en pratique cette ouverture. Ainsi, la branche des prestations aux familles est ouverte par seulement 14 pays sur les 38 pays signataires. Parmi les pays de destination des migrants travailleurs à cette période en Europe, neuf signent la convention (Allemagne, Danemark, Finlande, France, Irlande, Italie, Norvège, Pays-Bas, Suède), mais seulement la moitié ouvre la branche des prestations familiales (France, Irlande, Italie, Norvège et Pays-Bas).

Les accords bilatéraux signés entre un pays de destination et un pays d’origine constituent un autre type de norme juridique ayant un impact sur la définition des droits des migrants et de leurs familles. Compte tenu de leur nombre, mais également de la diversité de leurs contenus, il est impossible de les analyser en détail. Généralement, ils donnent plus de droits aux ressortissants des pays concernés (par rapport au régime général), mais la « plus-value » diffère selon les pays de destination et d’origine.

Les premiers accords bilatéraux sont signés dans la période de l’entre-deux-guerres et se multiplient à partir de 1945. A cette période, plusieurs pays d’Europe occidentale connaissent un accroissement des flux migratoires, dont une part importante est composée par les migrations de travail (Castles et Miller, 2009). A l’exception de la France, ayant déjà reçu des travailleurs étrangers dès le XIXème siècle, c’est une situation nouvelle pour les pays en question. Nombre d’entre eux ont connu des émigrations de leurs nationaux par le passé (Allemagne, Suède) et d’autres continuent d’en faire l’expérience tout en recevant des flux de l’étranger (Royaume-Uni). Malgré la spécificité de chaque contexte national, il est possible d’identifier différents groupes de pays selon leur mode de recrutement de travailleurs migrants. Pour certains pays le recrutement des migrants travailleurs se réalise en partie parmi les ressortissants des anciennes colonies, qui bénéficient d’un régime migratoire spécifique (Belgique, France, Royaume-Uni, Pays-Bas). L’ensemble des pays de destination, et surtout ceux n’ayant pas de liens privilégiés avec des pays d’émigration potentiels (Allemagne, Luxembourg), signent des accords avec des pays de l’Europe du Sud (Espagne, Portugal, Grèce), ainsi qu’avec la Yougoslavie, la Turquie ou le Maroc.

La coordination internationale et bilatérale des droits de migrants travailleurs a atteint des limites dans la période plus récente : les pays de destination du Nord cherchent à limiter les flux

91 migratoires, tandis que les pays d’origine du Sud, surtout ceux ayant connu un développement tardif de l’émigration de leurs nationaux et n’ayant donc pas fait partie des accords signés plus tôt, souhaitent, à l’inverse, développer la mobilité et assurer les droits de leurs nationaux à l’étranger. Ainsi, la convention la plus récente et allant le plus loin dans la reconnaissance de ces droits – Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille49 (1990) – a été signée à ce jour uniquement par les pays d’origine (MacDonald et Cholewinski, 2007). De même, après l’arrêt de l’immigration du travail dans les années 1970, la signature des accords bilatéraux, et par extension des dispositifs migratoires plus favorables, devient plus rare. A l’inverse, ces régimes d’exception sont progressivement alignés sur le régime général, celui-ci étant communément moins avantageux.

LE REGIME DE LIBRE CIRCULATION DES PERSONNES

La construction européenne, avec notamment l’objectif de la création d’un espace de libre circulation des personnes, débute dans la période d’après-guerre et a aussi marqué profondément les cadres légaux nationaux. Même s’il paraît difficile de parler d’une politique européenne unique, compte tenu des intérêts parfois divergents des acteurs impliqués (Union Européenne, États nationaux, acteurs sociaux), les évolutions récentes se caractérisent par une ouverture progressive des droits aux personnes circulant à l’intérieur de l’UE et par la fermeture de ses frontières extérieures (Block et Bonjour, 2013 ; Kraler, 2010 ; Kraler, Kofman et al., 2011). Cependant, à l’intérieur de l’UE, il reste encore des différences considérables entre les droits dont jouissent d’une part les ressortissants des pays membres ou les migrants communautaires et d’autre part les ressortissants des pays hors de l’UE, auxquels il est souvent fait référence comme des ressortissants des « pays tiers50 » (Encadré 2-1).

La libre circulation des personnes est l’un des piliers de la construction de l’UE. Les principes de base sont posés dès le traité de Rome de 1957, suivis par d’autres étapes importantes comme l’adoption des règlements relatifs à la coordination des régimes de sécurité sociale dans les années 1970 (Math, 2004 ; 2009). Au départ, ces règlements concernent les migrants travailleurs et leurs familles, mais sont ensuite étendus à d’autres groupes (étudiants, inactifs). Malgré la relative ancienneté de ces normes juridiques, les États ont longtemps été réticents à l’ouverture de leurs systèmes de protection sociale aux migrants communautaires présents sur leur territoire et la situation actuelle de l’égalité de traitement n’a été obtenue qu’après des années de batailles juridiques. A présent, les droits des ressortissants communautaires sont comparables à ceux des nationaux de leur pays de résidence dans de nombreux domaines (emploi, protection sociale, participation à la vie citoyenne). Cependant, il existe des exceptions à cette règle, notamment dans le domaine de la migration familiale où les règlements européens

49 https://treaties.un.org/Pages/ViewDetails.aspx?src=TREATY&mtdsg_no=IV-13&chapter=4&lang=fr 50 D’ailleurs les textes juridiques n’utilisent pas la notion de « migrant » pour le premier groupe, mais parlent plutôt de personnes bénéficiant de la « libre circulation » ou de la « mobilité ». Les termes de « migrant » et de « migration » sont réservés aux ressortissants des pays tiers. Dans cette recherche nous utilisons le terme de « migrant » pour les deux groupes, en précisant lorsqu’il le faut leur origine nationale (communautaire versus pays tiers).

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prévoient des dispositifs plus favorables pour les ressortissants européens comparés aux nationaux (section 2.2.2).

La construction européenne a également conduit à l’élaboration progressive d’un régime migratoire commun relatif à l’admission et au séjour des ressortissants des pays tiers (directives concernant la politique des visas, de l’asile, la résidence de longue durée). Même si des différences entre les pays persistent, les législations nationales sont plus homogènes comparées à la situation antérieure aux années 2000. La Directive relative au regroupement familial51 est un exemple de ce processus d’homogénéisation des politiques migratoires au niveau de l’UE. Au début des années 2000, cette procédure « emblématique » existe déjà dans plusieurs pays, mais ses conditions varient sensiblement selon les pays52 (Division de législation comparée, 2002 ; OECD 2000). Après plusieurs années de discussion entre les pays membres, une directive européenne voit le jour en 2003, couvrant l’admission, mais également l’accès à d’autres droits, des migrants venus dans cette procédure légale (obtention d’un statut légal indépendant, accès au marché du travail). Les pays membres avaient jusqu’en 2005 pour mettre la législation nationale en règle avec la directive, ces adaptations ayant fait l’objet de nombreuses études de droit comparatif (Division de législation comparée, 2002 ; 2006 ; EMN 2008 ; Pascouau et Labayle, 2011). La directive ayant laissé une marge de manœuvre importante aux États, il apparaît que, malgré une homogénéisation importante des dispositifs au cours de la dernière décennie, il reste encore des différences entre les législations nationales.

c) L’ACCES AU SYSTEME DE PROTECTION SOCIALE

Cette recherche porte sur les familles migrantes, dont les trajectoires sont directement affectées par les politiques relatives à l’entrée et au séjour sur le territoire national. Cependant, les politiques dans d’autres domaines peuvent également y contribuer. Sans parler d’un « welfare magnet », il est indéniable que l’accès des familles au système de protection sociale, ainsi que les droits accordés dans le cadre de celui-ci, peuvent aussi déterminer la décision des parents migrants de faire venir ou non leurs enfants dans le pays de destination. Toutefois, son impact sur les décisions des familles est sans doute plus diffus et difficilement observable. Lorsque l’ensemble de la famille réside encore à l’étranger, elle n’a que très partiellement accès aux informations relatives au système de santé ou à l’école. Il est donc probable que cette dimension joue davantage lorsque l’un des parents est déjà installé dans le pays de destination. Les principaux dispositifs cités dans les récits des familles migrantes sont évoqués ci-dessous, en distinguant s’ils s’adressent spécifiquement aux familles migrantes ou portent sur toutes les familles.

51 Directive 2003/86/CE du Conseil du 22 septembre 2003 relative au droit au regroupement familial (Source : http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=CELEX:32003L0086:fr:HTML)

93 Encadré 2-1 Le régime de libre circulation en Europe

Le régime de libre circulation des personnes a principalement été élaboré dans le cadre de la construction de l’UE. Ainsi, son champ d’application s’est agrandi à chaque élargissement dans la mesure où les ressortissants des nouveaux pays membres bénéficient de ce régime dès le moment de l’adhésion.

Année d’adhésion

Pays

1957 Belgique, France, Italie, Luxembourg, Pays-Bas, République fédérale d’Allemagne 1973 Danemark, Irlande et Royaume-Uni

1981 Grèce

1986 Espagne et Portugal 1995 Autriche, Finlande et Suède

2004 Chypre, Estonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Malte, Pologne, République tchèque, Slovaquie et Slovénie

2007 Bulgarie et Roumanie

2013 Croatie

Il faut cependant noter que lors de la majorité des élargissements, des périodes transitoires ont été imposées aux nouveaux pays membres pendant lesquelles leurs ressortissants avaient un accès limité au marché du travail des « anciens » pays membres. Sa durée pouvait varier selon les périodes. En France, elle a été de sept ans lors des élargissements de 1981, 1986 et 2007, de cinq ans lors de celui de 2004 et est actuellement de deux ans pour la Croatie. En revanche, dès leur adhésion, les ressortissants des nouveaux pays membres bénéficiaient du droit de s’établir avec les membres de leurs familles (par conséquent, ces familles cessent de figurer dans la procédure de regroupement familial).

En 1994, les accords conclus dans le cadre de l’Espace Economique Européen (EEE) ont étendu ce régime aux pays de l’Association Européenne de Libre-Echange (AELE), à l’exception de la Suisse. Aujourd’hui ces accords concernent l’Islande, le Liechtenstein et la Norvège53. La Suisse, également membre de l’AELE, a conclu un accord bilatéral sur la libre circulation des personnes avec l’UE en 1999 qui est entré en vigueur en 2002. Cependant, il pourrait être remis en question suite au référendum du 9 février 2014.

Lorsque nous nous référons aux « migrants communautaires », nous nous rapportons à la zone géographique composée des pays de l’UE, en précisant s’il s’agit de l’UE15 ou l’UE27, et de l’AELE. Cependant, il faut rappeler que le régime de libre circulation n’est pas exactement le même au sein de l’UE et entre l’UE et l’AELE, puisque dans le dernier cas il ne concerne que les travailleurs salariés et leurs familles alors qu’il est total au sein de l’UE. Il faut également rappeler que les accords avec l’AELE et la Suisse ne couvrent pas d’autres domaines de l’intégration européenne (union économique et monétaire, politique extérieure, justice…)54. Ainsi, les directives de l’UE décrites dans la suite de ce travail, tels que la directive relative au regroupement familial, ne concerne pas les pays de l’AELE.

53 En 1994, l’Autriche, la Finlande et la Suède font également partie de l’AELE, mais depuis leur adhésion à