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Section 2 : revue de littérature scientifique

2 De multiples ancrages théoriques d’appui pour penser les dispositifs hybrides de formation

2.1 Des dispositifs hybrides prenant appui sur une lecture psychosociale de l’apprentissage

2.1.2 Les approches socioconstructivistes pour penser les dispositifs hybrides de formation

Parmi les théories développées à partir d’une approche socioconstructiviste (Guerin, Kermarrec & Péoc'h, 2010 ; Karsenti, Garry & Benzianz, 2012 ; Linard, 2002), celles menées en référence à un ancrage « anthropo-centré » semblent aujourd’hui prendre le pas sur celles relevant d’un ancrage « techno-centré » (Albero, 2010). Accompagner l’apprentissage et le développement professionnel des formés consiste alors à les engager dans des pratiques réflexives afin d’alimenter la construction de leurs connaissances (Aguillard, 2012) ou de leurs savoir-faire professionnels (Baconnet & Bucheton, 2011). De nombreuses études menées dans le cadre des DHF se sont plus particulièrement centrées sur les situations de formation proposée à distance. Pour l’essentiel, elles contribuent à documenter l’impact de communautés de pratiques d’apprentissage en ligne développées au sein des DHF (Audran & Daele, 2009 ; Chanier & Cartier, 2006, Jezegou, 2010 ; Lehéricey, 2013). Elles traitent par ailleurs de l’organisation des communications virtuelles s’instituant en réseau (Rheingold, 1993) à partir d’activités coopératives entre formateurs et formés, ou formés eux-mêmes (Dillenbourg, Poirier & Carles, 2003).

De nombreux DHF font explicitement référence au socioconstructivisme en termes d’aménagement des activités menées en leur sein. L’apprentissage est alors rendu possible parce que le formé se trouve dans un contexte social favorable, en interaction avec les autres. Il peut par ailleurs exploiter les outils collaboratifs placés à sa disposition au sein du dispositif.

C’est le cas par exemple de certaines plateformes d’e-learning utilisées dans un contexte de formation hybride. Les plateformes de formation les plus utilisées sont issues du champ des « learning management system » (LMS) comme Moodle ou Ganesha, ou de celles plus spécifiques encore des « blended learning » employées pour les enseignements hybrides de formation avec des activités menées de façon synchrone ou asynchrone avec le ou les formateurs. Certains auteurs mettent en avant que ces dispositifs singuliers contribuent à l’émergence de « communautés d’apprentissage » qui se structurent en autonomie (Charlier & Peraya, 2003).

Au sein des DHF structurés à partir d’une approche socioconstructiviste, les modalités d’accompagnement des formés valorisent la communication et la collaboration (Audran & Daele, 2009 ; Bruillard, 2008 ; Charlier & Henri, 2004 ; Ferone, 2011 ; Lebrun 2015) afin de développer leur capacité argumentative et réflexive (Daele, 2006). Le rôle dévolu au formateur est ici central (Jézégou, 2010 ; Quintin, 2008). Il doit en effet alimenter les interactions sociales (Jézégou, 2010) et créer les conditions d’une présence « à distance » afin de favoriser les apprentissages au sein de ce qui finalement apparaît finalement comme une « communauté de pratique » (Lave et Wenger, 1991). Pour bon nombre de recherches, le rôle joué par ces interactions sociales est primordial dans le cadre des DHF (Charlier & Peraya, 2003 ; Jézégou, 2008, 2010 ; Moore & Anderson, 2003).

Ancrés dans cette approche socioconstructiviste, les DHF sont aussi construits à partir de la notion « d’apprentissage collaboratif » (Bruillard, 2008 ; Deschryver, 2009 ; Henri & Basque, 2001). En leur sein « la construction des connaissances se fait avec les nœuds du

réseau qui sont des personnes ou des ressources d’information » (Henri & Basque, 2001,

p.178). L’étude de Deschryver (2009) illustre tout particulièrement l’exploitation de l’approche socioconstructiviste pour aménager les DHF. Selon l’auteur, les formés doivent être engagés dans des interactions. Pour ce faire, l’aménagement techno-pédagogique des situations de formation est pensé pour permettre la constitution d’« espaces collectifs présentiels » et d’« espaces distants individuels » nécessaires pour soutenir l’apprentissage et le développement professionnels des formés.

L’étude de Ladage (2016) permet de mettre en exergue l’importance du contexte de communication instrumentée entre les formés et le formateur au sein d’un DHF. Le dispositif transformatif proposé par l’étude vise à repenser l’articulation des cours magistraux (CM) et des travaux pratiques (TD) dans un contexte de formation initiale d’enseignants à l’université. L’aménagement du DHF rend possible la réalisation des TD à distance et en autonomie par

les formés. Le processus d’autonomisation de la formation des étudiants est mené dans le cadre d’un travail collaboratif par l’exploitation de traces d’activités déposées par les formés sur la plateforme de formation du DHF. L’activité dévolue au formateur consiste à se saisir de ces traces déposées par les formés sur la plateforme pour, en présentiel, solliciter leurs interactions. Les résultats de l’étude mettent toutefois en avant qu’une part significative des formés n’assume pas la publication de leur activité de formation et ne bénéficie que très peu des activités menées avec les pairs à distance.

D’autres recherches menées sur les DHF, pensés et structurés à partir d’une lecture socioconstructiviste, visent à caractériser les interactions entre les formés et l’environnement d’apprentissage (Meyer, 2012 ; Nizet & Meyer, 2016), à identifier la nature des interactions entre les formés, ou encore à analyser l’activité des formateurs menée en présentiel ou à distance (Lameul, Peltier & Charlier, 2014 ; Peraya & Peltier, 2012). L’étude récente de Hellis et Han (2018) souligne par exemple que l’engagement et la réussite des formés au sein d’un DHF sont liés à la perception qualitative de l'environnement en ligne et des enseignements dispensés, de la charge de travail ou de l’avantage perçu à s’engager dans un travail en ligne. Certaines études conçues selon une approche socioconstructiviste (par exemple : Guérin, Kermarrec & Péoc’h, 2010), évaluent l’impact de la formation universitaire sur le développement professionnel des enseignants stagiaires. Le dispositif hybride présenté aménage des situations de formation en alternance entre la formation à l’université et la situation de stage en classe. Cette modalité singulière permet d’évaluer trois aménagements successifs de formation. Dans un premier temps les formés sont invités à concevoir collectivement des situations d’apprentissage à mettre en œuvre en situation réelle de pratique. Le second temps consiste à l’enregistrement vidéo des activités ainsi planifiées des stagiaires en situation de classe, suivi d’autoconfrontations. Un troisième temps propose un retour réflexif collectif sur les traces d’activités collectées sur une plateforme. Les résultats de l’étude montrent notamment que l’hybridation des activités de formation a permis de confronter les stagiaires à une « itération circulaire » de situations de formation et de mises en œuvre professionnelles, d’établir des liens entre les différentes expériences de formation (collectives) et finalement de les confronter aux circonstances variables de conception de situations d’apprentissage.