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1 Lecture des scènes, entre peintures originales et restitutions

Les ensembles picturaux des églises Saint-Martin-de-Fenollar et Sainte-Marie des Cluses-Hautes ont été datés de la

première moitié du xiie siècle d’après des

éléments stylistiques et paléographiques. Du point de vue architectural, la première se place dans la continuité de l’art préro-man de la région (xie  siècle) par la mor-phologie du plan au sol, constitué d’une nef unique dotée à son extrémité orientale d’un chevet plat, mais aussi par le couvre-ment par une voûte à arc outrepassé.

Les parties conservées de cette peinture murale se situent principalement dans l’ab-side, où l’on retrouve les thèmes suivants : un Christ en Majesté entouré des symboles

des quatre évangélistes, une Vierge dans la position de l’orant, les vingt-quatre vieillards de l’Apocalypse et plusieurs scènes de l’Enfance du Christ, organisées en registres.

Au niveau de la travée orientale, quelques fragments isolés subsistent également, notamment celui situé sur la paroi sud, où sont représentés deux quadrupèdes se faisant front de part et d’autre d’un arbre à double tige. Aujourd’hui, la partie supérieure de ces animaux a disparu. Les peintures de Saint-Martin-de-Fenollar ont été restaurées en 1910 par Gsell-Maury, en 1954, puis en 1969 par J. Baudouin.

L’église Sainte-Marie des Cluses date, quant à elle, d’entre la fin du xe et le début du

xie siècle, à l’exception du clocher-mur du xive siècle qui constitue la façade principale.

Cette église est composée d’une nef à trois vaisseaux et d’un chevet plat à l’extérieur (fig. 4), qui comprend à l’intérieur trois absides semi-circulaires voûtées en cul-de-four, alignées avec les vaisseaux de la nef.

Fig. 2. — Plan au sol de l’église Saint-Martin-de-Fenollar à Maureillas-las-Illas. Droits de reproduction : STAP 66 – R. Mallol.

91 Les peintures murales romanes de Saint-Martin-de-Fenollar et des Cluses-Hautes : étude de la technique...

Ici, les peintures murales conservées se situent uniquement sur l’abside centrale du chevet, notamment sur la partie sud du cul-de-four ainsi que sur l’arc qui précède ce dernier. Les thèmes représentés sont un Christ en Majesté accompagné à dextre par un ange, un fragment de l’Adoration des Mages, la colombe du Saint-Esprit et un taureau

ailé, attribué au symbole de saint Luc l’évangéliste1.

Des comparaisons iconographiques ont été menées à partir des photographies en lumière directe réalisées par O.  Guillon, photographe au CICRP. Ces comparaisons avaient pour objectif d’identifier des ressemblances ou des divergences thématiques et stylistiques entre les deux ensembles. En ce qui concerne les sujets représentés, certains

1. Durliat 1954.

Fig. 3. — Annonciation — Photographie en lumière directe de la scène de l’Annonciation sur le deuxième registre, paroi nord de l’abside de Saint-Martin-de-Fenollar. Droits de reproduction : CICRP — O. Guillon. Fig. 4. — Plan au sol de l’église Sainte-Marie des

Cluses-Hautes. Droits de reproduction : STAP 66, dessin R. Mallol.

se retrouvent dans les deux églises, comme le Christ en Majesté et l’Adoration des Mages. Malgré l’emploi des mêmes codes pour l’identification des personnages (mains voilées des Rois Mages par exemple), le traitement stylistique diffère, essentiellement par l’as-pect plus ornemental spécifique aux Cluses. De plus, la différence de dimensions entre les deux absides pourrait expliquer la multiplicité des scènes à Saint-Martin-de-Fenollar, à la différence des Cluses-Hautes. Cependant, l’état de conservation très lacunaire du décor, qui affecte l’ensemble de la partie inférieure de l’abside et d’une grande partie du côté nord, limite ici les possibilités de comparaison.

La réalisation du dossier d’imagerie scientifique avait aussi pour objectif d’apporter des informations supplémentaires nécessaires à un diagnostic d’état de conservation. Ainsi, l’observation de ces peintures sous différents rayonnements permet de préciser

Fig. 5. — Christ en Majesté. Photographie en lumière directe du Christ en Majesté situé au niveau du cul-de-four de l’église Sainte-Marie des Cluses-Hautes. Droits de reproduction : CICRP — O. Guillon.

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certaines zones de restauration et d’orienter les prélèvements destinés à l’analyse phy-sico-chimique. La comparaison entre l’état actuel des peintures et les relevés permet par ailleurs de mieux repérer les zones où une restitution a été faite. Enfin, l’observation sous rayonnement infrarouge des peintures des Cluses et des photographies en lumière directe facilite la lecture de certains détails tels que les drapés des Rois Mages dans l’Adoration : les contours des motifs deviennent plus lisibles.

Les peintures des deux édifices ont subi des altérations importantes avec le temps. Ainsi, la comparaison des peintures de Saint-Martin-de-Fenollar avec les relevés de J. Pijoan i Soteras (1907) montre en fait l’état très lacunaire de ces peintures, qui peuvent, d’un premier abord, sembler être relativement bien conservées. Elles ont fait l’objet de

réin-tégrations et interprétations illusionnistes depuis le début du xxe siècle qui ont conduit

à l’aspect actuel des peintures murales de cet édifice.

Les relevés de cette même publication, attestant l’état de conservation de l’église des Cluses au début du siècle, ne sont pas exploitables en raison du trop grand nombre de différences de composition observées sur ces derniers par rapport à la vision actuelle que l’on peut avoir de la peinture.