• Aucun résultat trouvé

Le trouble mental insuffisant pour caractériser la dangerosité

Dans le document Le traitement pénal de la dangerosité (Page 85-97)

LA DANGEROSITE, LONGTEMPS ENVISAGEE COMME UNE MALADIE A TRAITER

Section 2. L’évolution vers la notion de dangerosité pénale

A. Le trouble mental insuffisant pour caractériser la dangerosité

69. Selon M. Foucault, l'individu dangereux « n'est ni exactement malade ni à proprement parler criminel »1. Deux modèles permettent de définir le trouble mental , le modèle biomédical dans lequel le désordre mental est diagnosticable (exemple : la schizophrénie) et le modèle social qui est subjectif et évoque un comportement comme anormal (exemple : la dépression)2. De nombreux et complexes facteurs interviennent pour compléter cette définition. Seule une évaluation par un médecin psychiatre permet de déterminer les troubles psychiques d’une personne. La maladie est évolutive et le patient doit adhérer aux soins. Ces deux facteurs sont à prendre en compte. La dangerosité peut- elle être considérée comme un trouble mental ?

70. Il est important de ne pas confondre dangerosité et maladie mentale. « Parce que la maladie mentale grave ne prédit pas indépendamment un comportement violent avenir, ces résultats remettent en question la perception que la maladie mentale est la principale cause de la violence dans la population générale (...) comprendre le lien entre les actes de violence et trouble mental nécessite l'examen de son association avec d'autres variables telles que l'abus de substances, les facteurs de stress environnementaux et des antécédents de violence »3. Dans un article publié il y a trente ans, un auteur, Monahan4, brosse un tableau des travaux de recherche publiés au cours des dernières décennies qui avaient pour but de déterminer les variables prédictives de la violence chez les malades mentaux. Il démontrait déjà que les dispensateurs de soins en santé mentale ne peuvent pas déterminer avec précision les facteurs permettant de prévoir la violence ou la dangerosité chez les 1 Foucault M., Les anormaux, Cours au Collège de France, 1974-1975, Gallimard éd., 1999

2 Rossinelli G., Dangerosité et troubles mentaux, Perspectives Psy, 2009/1 Vol. 48, p.9-12.

3 Elbogen E. B., S. C. Johnson, Arch. Gen.Psychiatry, Etude américaine, Vol. 66, n°2, February 2009,

MD. 2009; 66(2) : 152-161. http://archpsyc.ama-assn.org/cgi/content/short/66/2/152 L'auteur, le psychiatre Eric Elbogen, professeur à l'université de Caroline du Nord, a travaillé sur des entretiens avec 34 653 personnes tirées au sort sur les registres de population.

4 Monahan J., The prediction of violent behaviour : Toward a second generation of theory and policy, American

85

malades mentaux et recommande de modifier le critère de la dangerosité. Cependant, entre 1992 et 1993, à seulement un an d’intervalle, le même auteur se contredit en tentant de démontrer un éventuel lien de causalité entre la maladie mentale et la violence1. Des analyses ont confirmé que la maladie mentale grave seule ne prédit pas de manière significative la possibilité de commettre des actes violents2. Il existe de nombreux facteurs auxiliaires nécessitant pour les médecins de regarder au-delà du diagnostic et de considérer de plus près la situation de vie passée et actuelle du patient lors de l'évaluation des risques de violence.

71. Au Canada, une étude sur ce lien a été menée par des auteurs qui ont interrogé des bases de données contenant des articles scientifiques dans les domaines de la psychologie, de la sociologie, de la criminologie, du droit, de la médecine, de la philosophie, de la psychiatrie, de la psychiatrie légale et de l'épidémiologie3. Leurs études portaient sur divers types de troubles mentaux, particulièrement sur des maladies mentales fonctionnelles graves (comme la schizophrénie et les états dépressifs majeurs), la toxicomanie et l'abus d'alcool, mais également sur les troubles de la personnalité . La définition de la violence a été limitée aux actes comportant une agression physique et aux menaces de violence physique à l'égard d'autrui. Cette étude a permis de conclure « qu'il n'a jamais été scientifiquement démontré, jusqu'ici, que la maladie mentale cause la violence »4, malgré des études portant sur la violence chez des malades mentaux soumis à un traitement démontrant que les taux de criminalité violente étaient effectivement plus 1 Monahan J., Mental disorder and violent behaviour, American Psychologist, 1992, vol. 47, n°4, p.511-521 et

Mental disorder and violence: Another look, In « Mental disorder and crime », S. Hodgins (Ed.),. Newbury Park, CA: Sage, 1993, p.287-302

2 Dangerosité psychiatrique : étude et évaluation des facteurs de risque de violence hétéro-agressive chez les

personnes ayant des troubles schizophréniques ou des troubles de l’humeur, Recommandations de la commission d’audition, Haute Autorité de Santé, Service des bonnes pratiques professionnelles, Mars 2011

3 Rapport de recherches rédigé pour la Direction générale de la promotion et des programmes de santé, Canada,

1996, ISBN 0-662-80784-7, Calgary World Health Organization Collaborating Centre for Research and Training in « Mental Health, Maladie mentale et violence : Un lien démontré ou un stéréotype? » http://www.phac- aspc.gc.ca/mh-sm/pubs/mental_illness/index-fra.php

86

élevés au sein de ces groupes que dans la population générale et que la fréquence de la violence était élevée chez les malades mentaux hospitalisés.

72. Souvent, la criminalité est utilisée comme une mesure de la violence. Cependant, il est reconnu que le lien entre la maladie mentale et la criminalité avec violence est fonction d'autres caractéristiques qui sont des prédicateurs du crime, comme le statut socio-économique, l'âge ou les antécédents d'arrestations. Il est par ailleurs précisé que le risque de comportement violent, en particulier chez les schizophrènes, dépend en partie du contexte et de la présence de symptômes psychotiques. Ainsi, en cas de prise de neuroleptiques, l'incidence de comportement violent peut être limitée. La toxicomanie semble également constituer un important facteur de risque de la violence et de la criminalité au sein de la collectivité, chez les malades hospitalisés et chez les détenus. Toutefois, les études évoquées dans ce rapport sont principalement de sources canadienne et américaine. Une mise en garde s'impose quant à la généralisation de ces conclusions compte tenu des différences dans les régimes de soins de santé et de justice pénale. Presque toutes les études réalisées jusqu'à ce jour portent sur des populations de malades mentaux soumis à un traitement ou sur des populations carcérales. Or, ces groupes ne sont pas représentatifs de l'ensemble des malades mentaux1.

73. Il est intéressant, à travers le diagnostic d’un trouble de la personnalité, d’apprécier son retentissement sur la vie sociale du sujet afin d’identifier les situations d’urgence et de planifier une prise en charge et un suivi du patient2. Appréhender la personnalité du patient, sa façon d’être au monde selon ses pensées, ses sentiments et ses comportements doit permettre d’en reconnaître les anomalies dès lors qu’elles génèrent une altération du 1 Seulement deux études ont été réalisées sur la population générale; l'une aux États-Unis et l'autre au Canada.

Dans les deux cas, les chercheurs ont eu recours aux techniques d'enquête épidémiologique et à des échantillons représentatifs de la population générale. Bien que les deux études aient révélé une relation statistique entre la maladie mentale et la violence, rien ne démontre dans quelle mesure cette relation pourrait s'expliquer par la relation de dépendance entre la définition de la maladie mentale et celle de la violence.

87

fonctionnement social ou une souffrance de l’individu ou de son entourage1. La personnalité d’un individu se définie comme le résultat, chez un sujet donné, de l’intégration dynamique de composantes cognitives, pulsionnelles et émotionnelles. En principe stable et unique, elle ne devient pathologique que lorsqu’une souffrance ressentie par le sujet ou une altération significative du fonctionnement social entraînent des réponses inadaptées. L’Organisation Mondiale de la Santé, dans la dixième révision de la Classification Internationale des Maladies (CIM-10)2, définit la personnalité pathologique à travers des « modalités de comportement profondément enracinées et durables consistant en des réactions inflexibles à des situations personnelles et sociales de nature très variée ». Ce genre de comportement est généralement dû à des « déviations extrêmes ou significatives des perceptions, des pensées, des sensations et particulièrement des relations avec autrui par rapport à celles d’un individu moyen d’une culture donnée »3. Deux approches permettent d’étudier les personnalités pathologiques. L’approche dimensionnelle répertorie des traits de personnalité plus ou moins marqués, alors que l’approche catégorielle se réfère aux caractéristiques des divers types de personnalité pathologiques, basées sur des regroupements statistiques d’attitudes et de comportements, sans référence aux raison pouvant expliquer ces regroupements. La clinique psychiatrique semble utiliser plutôt cette seconde approche. Les troubles de la personnalité sont souvent associés aux troubles psychiatriques, la personnalité pathologique pouvant être un facteur de risque aggravant d’une pathologie psychiatrique. Toutefois, ces troubles se distinguent par leurs symptômes. Les troubles de la personnalité sont indépendants des situations auxquelles se trouvent confrontées les sujets. La question de la psychopathie est récurrente concernant le pronostic dangerosité4. Elle est parfois définit comme une entité

1 Collectif (O Gales, JD Guelfi, F Baylé, P Hardy), Question d’internat n°286 - troubles de la personnalité,

deuxième partie : maladies et grands syndromes

2 Personnalité pathologique, Classification Internationale des maladies, OMS, 2010 3 ibid

88

clinique spécifique qui ne se recoupe pas avec l’existence de troubles mentaux graves1. L’appréciation du risque violent à travers la définition de la psychopathie procède d’une certaine forme d’anti-socialité et d’une modalité relationnelle particulière entre manipulation, superficialité et séduction. Le manuel de diagnostic et statistique des troubles mentaux (DSM)2, manuel de classification américaine de référence utilisé internationalement par tous les professionnels de santé mentale, catégorise les critères diagnostiques et recherches statistiques de troubles mentaux spécifiques. Il est destiné à être applicable dans un large éventail de contextes et de nombreuses orientations différentes (par exemple, biologiques, psychodynamiques, cognitives, comportementales, interpersonnelles, familiales). La Cinquième édition (DSM-5) a été conçue pour une utilisation sur des paramètres cliniques. C’est un outil nécessaire pour recueillir et de communiquer des statistiques précises de la santé publique. Compte tenu des conventions sur lesquelles reposent actuellement les diagnostics psychiatriques, il n'est pas possible de diagnostiquer la maladie mentale indépendamment de la violence, presque la moitié des troubles décrits dans le DSM sont définis ou décrits en partie en fonction de comportements violents. Il se décompose en trois parties, à savoir la classification diagnostique, les ensembles de critères de diagnostic et le texte descriptif de classification diagnostique. » Réaliser un diagnostic DSM » consiste à repérer dans le DSM les troubles qui reflètent le mieux les signes et symptômes qui sont exposés par l'individu évalué et associer à chaque étiquette de diagnostic, un Code de diagnostic, dérivé du système de codage utilisé par tous les professionnels de soins de santé aux États-Unis, connu sous le nom de « classification internationale des maladies, neuvième édition, modification clinique » (CIM-9-CM). Pour chaque trouble inclus dans le DSM, un ensemble de critères diagnostiques stipule quels symptômes doivent être présents ainsi que leur durée, mais également les troubles et conditions qui ne doivent pas être présents.

1 Pham T., Coté G, Psychopathie : théorie et recherche, Villeneuve d’Ascq, Presses universitaires du Septentrion,

2000

2 Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders, Axe II, Les troubles de la personnalité et le retard

mental DSM-IV-TR, Elsevier Masson, Paris 2003, 1002 pages, publié par l'Association américaine de psychiatrie.

89

74. La dangerosité d’une personne peut être mise en exergue par des altérations psychiques transitoires1 telles qu’une bouffée délirante ou une confusion mentale. Au cours de ces états de déstructuration plus ou moins complète de la conscience , le rapport du sujet à son environnement est bouleversé. Le champ de conscience du sujet est envahi d’images hallucinatoires et d’idées délirantes habituellement effrayantes. Le monde est perçu hostile. La perplexité du malade porte non pas sur la nature de ce vécu (en fonction des fluctuations du niveau de sa conscience) mais plutôt sur le type de réactions à adopter pour échapper à l’anéantissement de sa vie psychique2. Celui-ci est fréquemment perçu au cours des états psychotiques aigus comme étant provoqué par l’entourage immédiat. L’intensité de ce vécu occupe la conscience du sujet, lui interdisant toute référence à l’expérience passée et à un futur possible. Il réagit dans l’immédiateté de la tragédie qui l’envahit. Si la fuite semble impossible, l’imminence de sa mort le fait réagir par une tentative de destruction de l’autre. Les hallucinations et les idées délirantes en tant que reconstruction psychotique d’une réalité s’imposent avec toute leur force à la conscience du sujet. Un ordre hallucinatoire de tuer est immédiatement exécuté. Ce vécu incite à une réaction défensive violente. Cette personne, aliénée à sa néo-réalité, prise dans une tourmente de psychose aigüe, est à priori dangereux. Sa dangerosité ne semble pas liée à une libération instinctive et les pulsions sexuelles ne sont qu’exceptionnellement exacerbées lors de ces accès3. La violence engagée est souvent considérable et l’appréciation de la dangerosité de la situation se fait sur la base de la connaissance du vécu du patient et des causes de l’altération psychique.

1 Tribolet S., C. Paradas, Guide pratique de psychiatrie, Collection Réflexes, éd. Heures de France, 2000, p.187

et 194

2 ibid p.185 3 ibid p.197

90

75. Une personne présentant un état maniaque1 est considérée comme un sujet en proie à tous les excès et débordements possibles, y compris violents. Pourtant, il est moins dangereux qu’il n’y parait, à condition de ne pas heurter de front son sentiment de toute- puissance. L’excitation psychomotrice au cours de ces accès entraîne préférentiellement une agitation désordonnée, peu propice aux actes violents élaborés. Les crises dites de « fureur aveugle » sont aussi rares. Le rapport entretenu avec la réalité est trop peu consistant pour permettre l’expression d’une action violente élaborée et efficiente. D’autant que l’euphorie du maniaque le rend peu enclin à percevoir son entourage comme hostile. Mais ce frein à la violence est toutefois moins prononcé au cours des accès hypomaniaques. En outre, ces manies atténuées s’accompagnent plus fréquemment que les accès maniaques typiques d’un vécu voire d’un délire de persécution. La conviction de ce délire ainsi que la réalité d’un persécuteur désigné sont de puissants moteurs pour le passage à l’acte violent. La libération instinctuelle à forte connotation sexuelle amène en fait le maniaque à être plus souvent victime qu’auteur de délits sexuels. Les outrages à la pudeur sont plus à craindre que les passages à l’acte sexuels avec violence physique. Il est surtout animé par sa volonté d’affirmer sa toute-puissance, y compris sexuelle, d’où les actes d’exhibition, mais sans arrière-pensée de brutaliser ou d’humilier le témoin de ses extravagances. Cependant son sentiment de toute-puissance peut le conduire à affronter celui qui dans son esprit, représente l’autorité car le narcissisme disproportionné du maniaque ne saurait tolérer la plus infime humiliation, pouvant le conduire alors à des comportements violents. Toute velléité de contenir les débordements du maniaque est susceptible d’engendrer de sa part des réactions agressives de défense. Il est préférable de tolérer certains débordements car le traitement trop actif de la manie peut aboutir à l’émergence d’affects dépressifs, eux-mêmes autrement plus criminogènes. L’instabilité du tableau clinique désigné « état mixte » est propice à des actes totalement imprévisibles et potentiellement dangereux. Cet état englobe la coexistence d’éléments mélancoliques et maniques chez un sujet au cours d’un même dérèglement de l’humeur. Lorsque l’accès 1 ibid p.247 et s.

91

mélancolique est franc et sévère, le risque majeur est surtout suicidaire. Le caractère intolérable de sa souffrance morale peut lui sembler envahir son entourage par mécanisme de projection ou de contamination. Le mélancolique ne peut tolérer de souffrir comme de faire souffrir son entourage qu’il aime. Sa culpabilité inflexible et son sentiment d’indignité s’en trouvent renforcés et le risque de tuer par altruisme en découle, d’autant qu’il augmente considérablement si des idées délirantes (de ruine, damnation, etc…) apparaissent. Ceux-ci témoignent d’altérations importantes des fonctions cognitives perturbant les rapports du sujet avec la réalité. A côté du suicide collectif, il y a le risque de raptus mélancolique autant dans sa forme auto qu’hétéro-agressive. Ces actes d’une extrême sauvagerie seraient induits par l’émergence brutale d’une angoisse massive. Toutefois, il est également possible que ces passages à l’acte soient plus prémédités qu’il n’y parait, dans la mesure où le choix des victimes n’est pas tout à fait aléatoire mais congruent avec la thématique délirante. Ils peuvent tuer tout autant que les maniaques. Les virages maniaques éventuels que l’on rencontre dans la psychose maniaco-dépressive relèvent de la même dynamique et sont à entendre comme des tentatives de déni défensives de la dépression sous-jacente. L’enjeu est de dénier l’aspect moralement douloureux et pénible de la perte d’objet en recherchant de manière compulsive et désordonnée d’autres objets à investir dans une oralité et une agressivité qui provoquent parfois des passages à l’acte tout aussi agressifs, mais cette fois dirigés vers l’autre.

76. Les arriérations intellectuelles1 entraînent parfois d’importante forme d’agressivité, souvent corrélée avec le degré de son déficit intellectuel. L’élément décisif n’est pas à rechercher dans la sphère intellectuelle, mais plutôt dans la sphère affective, une affectivité mal élaborée. Le déficit intellectuel a immanquablement des répercussions psychologiques fragilisant davantage l’édifice émotionnel déjà précaire. Des changements brusques, mêmes minimes, génèrent une angoisse souvent incontrôlable facilitant le 1 Raoult P.A., « Figures de la dangerosité : de la monomanie au tueur en série. », Bulletin de psychologie 1/2006,

92

recours à des réactions élémentaires de violence. Capable de percevoir cette difficulté, il ressent douloureusement toute manifestation d’exclusion. Il se sent aisément dévalorisé, et comme ses capacités de réaction à ces frustrations sont réduites, le recours à la violence en est facilité. Capable de distinguer le bien et le mal, il ne mesure pas cependant toutes les implications de ses actes et ne peut se projeter valablement dans l’avenir. Son incapacité à médiatiser ses relations affectives et à les nuancer par la parole, l’expose aux frustrations. Il privilégie le temps présent et recherche donc la satisfaction immédiate. Mais son intolérance à la frustration s’exprime par une irritabilité apparente et une instabilité. Il est également surchargé de troubles caractériels, proches du déséquilibre psychopathique. Mais la similitude s’arrête aux apparences car chez le débile léger, il s’agit moins d’un défaut de structuration psychique que des répercussions affectives de son déficit intellectuel.

77. Le plus souvent, la démence s’accompagne de perturbations affectives pouvant parfois se compliquer de troubles psychiatriques. En effet, ceux-ci sont le plus souvent présents dès la phase initiale de la démence et peuvent même la révéler. A un stade plus tardif de la maladie, l’importance du déficit intellectuel masque les troubles connexes. Les passages à l’acte violents peuvent schématiquement être secondaires, soit au déficit intellectuel, soit aux troubles affectifs et psychiatriques. S’ils sont liés à l’atteinte intellectuelle, les comportements violents ont une traduction qui dépend essentiellement de l’importance du déficit, et déterminés par les troubles de la mémoire (exhibitionnisme involontaire) ou par la perte de jugement moral (délits sexuels). Ce qui caractérise le mieux les délits commis par les déments est l’absence de précautions et la maladresse de leur exécution. Lorsque les comportements violents sont secondaires aux troubles affectifs surajoutés, ils reflètent la prise de conscience douloureuse de sa déchéance par le dément au début de l’évolution des troubles. Cette perception aigüe est particulièrement intolérable et pour y faire face, le patient se réaménage psychologiquement, en instaurant un mécanisme de défense particulier : la projection. Il rend alors son entourage responsable de son déclin, ce qui le pousse à y adhérer totalement facilitant son recours à

93

l’agressivité envers ses proches. A un degré de plus, le dément, par le même mécanisme,

Dans le document Le traitement pénal de la dangerosité (Page 85-97)