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Conclusion au Chapitre

Section 6 Le renforcement de la publicité financière (1960'-1970')

La crise boursière au début des années 1960 entraîne une méfiance des actionnaires qui fait développer chez eux un besoin d'information. C'est pourquoi, plusieurs efforts sont entrepris pour favoriser (6.1.), contrôler (6.2.) l'information des actionnaires.

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En janvier 1962, se tient le premier congrès européen des analystes financiers (Lougovoy et Linon, 1969, pp.96-)235. Ce congrès fait suit la création en 1961 de la

SFAF (Société Française des Analystes Financiers). Lors de ce premier congrès, cette association professionnelle émet des recommandations sur la liste des renseignements qui devraient être publiés.

"I. LISTE DES RENSEIGNEMENTS QUI DEVRAIENT ETRE PUBLIES A. Renseignements portant sur l'administration de l'affaire

Liste du Conseil d'Administration et des principaux directeurs et commentaires sur les changements intervenus dans le Conseil de la direction

B. Renseignements portant sur la nature de l'activité

Nature des produits fabriqués : principales fabrications de la Société avec leurs applications.

Nature des produits fabriqués : productions de l'exercice. Nature des produits fabriqués : nouveaux produits.

Importance relative en valeur et, le cas échéant, en tonnage de chaque catégorie de produits, également en pourcentage des gains.

Répartition de la clientèle.

235 Lougovoy C. et Linon M. (1969), Les relations publiques – Fonction de gouvernement de l'entreprise et de l'administration, Dunod, Editions du Tambourinaire.

Renseignements sur les travaux de recherche avec pourcentage du budget consacré à la recherche par rapport au chiffre d'affaires; effectif affecté à ces travaux.

C. Renseignements portant sur la consistance du patrimoine Description détaillée des actifs comprenant en particulier :

- Une description de l'actif industriel, y compris les laboratoires et les services de recherche.

(Cette description pourrait faire l'objet, par exemple, d'une plaquette mise à jour tous les trois au quatre ans par la Société).

- Des précisions sur les méthodes de réévaluation et d'amortissements.

- Un état des filiales et participation avec indication du pourcentage du capital détenu et comportant des informations précises sur leurs résultats et leurs relations avec la Société-mère.

- Bilan et chiffre d'affaires des principales filiales.

- Indication de la méthode d'évaluation des stocks utilisée par la Société. Détail des principaux postes du passif et notamment :

- Nature et régime fiscal des diverses provisions inscrites au bilan.

- Nature et échéances des dettes à long et moyen terme ; préciser la fraction venant à échéance l'année suivante ; préciser, le cas échéant, la contrepartie à l'actif.

Signification économique des principales variations annuelles enregistrées au bilan. D. Renseignements portant sur l'origine, le montant et l'emploi des revenus

Chiffre d'affaires annuel en précisant sur le montant s'entend hors taxe ou taxe comprise.

Répartition des ventes entre le marché intérieur et l'exportation.

Compte d'exploitation générale et compte des pertes et des profits détaillés. E. Renseignements portant sur la situation actuelle et les perspectives à court terme Publication semestrielle du chiffre d'affaires.

Publication semestrielle de renseignements concernant l'activité. Indications semestrielles sur l'évolution des résultats.

Perspectives de l'exercice en cours au point de vue de la production, des prix, des résultats et de l'évolution du carnet de commandes.

Situation actuelle de l'industrie considérée. F. Renseignements portant sur les investissements

Nature des investissements effectués chaque année. Coût des investissement effectués chaque année.

Nature, coût, financement prévu et intérêt des projets sur le point d'être entrepris par la Société.

G. Renseignements portant sur la main d'œuvre

Effectif au 1er janvier : ouvriers et employés, cadres.

II. PRESENTATION (il ne s'agit pas ici d'informations nouvelles mais d'une façon commode de présenter des renseignements souvent épars ou d'une confrontation instructive de divers chiffres cités)

Tableau de financement.

Tableau récapitulatif sur dix ans : principaux comptes, production, ventes, main d'œuvre.

Présentation des comptes (bilans et résultats) permettant la comparaison avec les chiffres correspondant de l'année précédente.

Indication en début de rapport des principaux faits de l'exercice avec les chiffres correspondants de l'exercice précédent.

Tableau des mouvements concernant les immobilisations et amortissements au cours de l'exercice."

Ces recommandations sont bien entendu encore trop ambitieuses pour l'époque. Cette époque marquée par un capitalisme managérial s'accompagne de la méfiance des actionnaires. La loi de 1966 porte la marque de cette

époque. L'objectif est de revenir à une plus vision plus contractuelle de la société. Car si l'actionnaire, apporteur de ressources, avait en théorie tous les pouvoirs, dans la réalité, il n'en était rien. Il possédait des droits "symboliques" en particulier son droit à l'information : comme nous avons pu le constater ce droit à l'information financière est loin d'être satisfait. Nous avons en effet pu constater tout au long de ce chapitre que "les textes qui l'organisaient auparavant se révélaient insuffisants pour permettre aux associés d'exercer leur droit de façon éclairée et contrôler ainsi réellement les affaires sociales" (Urbain-Parleani et Boizard, 1996)236.

En ce sens, loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales est venue organiser l'information financière en précisant les droits de l'actionnaires. Cette loi prévoit tout d'abord une information légale.

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Toutefois, ces dispositions sont à elles seules insuffisantes. Ainsi, pour reprendre les propos de Brunereau et Mathiaud (1975, p.7)237, "pour que ces textes soient

appliqués, il faut qu'il existe un (ou des) organismes(s) chargé(s) d'en contrôler l'application, de déclencher éventuellement des sanctions". L'idée de contrôle de l'information apparaît donc à la fin des années soixante.

236 Urbain-Paléani I. et Boizard M. (1996), "L'objectif d'information dans la loi du 24 juillet 1966", Revue des sociétés, juillet - septembre 1996, p. 447-463.

237 Brunereau F. et Mathiaud D. (1975), La publicité financière en France – Perspectives et réalités, Thèse de doctorat en Sciences de Gestion, Université Paris 9 Dauphine.

6.2.1. L'institution des commissaires aux comptes

La loi du 24 juillet 1966 prévoit un contrôle légal des comptes en instituant des commissaires aux comptes. Toutefois, il convient de préciser que des commissaires aux comptes apparaissent dans la loi française en 1863 (Mikol, 2000)238. Cependant,

"les normes d'indépendance, de compétence, et de respect du secret professionnel sont absentes de la loi de 1863". Si bien, que les commissaires aux comptes pouvaient être choisis "parmi les parents des dirigeants, ou encore parmi les salariés de l'entreprises" et n'exige "aucune compétence comptable". L'étendue de la mission des commissaires aux comptes est précisée dans le décret loi du 8 août 1935. Ce décret vient renforcer l'interdiction d'immixtion : les commissaires aux comptes n'ont plus le droit de participer à la gestion de la société239. La loi du 24 juillet 1966 renforce la

compétence et l'indépendance des commissaires aux comptes. La CNCC (Compagnie Nationale des Commissaires aux Comptes) édicte des normes (de comportement, travail, rapports) permettant d'assurer le bon exercice de leurs missions.

6.2.2. La Commission des Opérations de Bourse

Par ailleurs, face à la méfiance qui règne sur le marché des capitaux, les pouvoirs publics ont souhaité "inciter les épargnants à reprendre le chemin de la Bourse". Pour cela, les pouvoirs publics se sont inspirés de la Securities and Exchange Commission (SEC) et de la Commission Bancaire Belge. Ces deux commissions ont déjà fait leur preuve puisqu'elles ont été institués trente cinq ans avant (Vasseur, 1969, p.83 240).

238 Mikol A. (2000), "L'histoire du commissariat aux comptes", Economie et Comptabilité, Numéro 11, juin 2000, pp.3-9.

239 Il serait d'ailleurs intéressant d'identifier dans une société qui étaient commissaires aux comptes avant ce décret (parents des dirigeants, actionnaires, salariés) et après ce décret.

Officiellement en place le 1er janvier 1968, la COB est chargé de veiller au bon

fonctionnement des marchés financiers et en particulier à la bonne information des actionnaires. En effet, d’après les termes de l’article 1er de l’ordonnance n°67-833 du 28 septembre 1967, "la commission des opérations de bourse, autorité administrative indépendante, veille à la protection de l’épargne investie dans les instruments financiers et tous autres placements donnant lieu à appel public à l’épargne, à l’information des investisseurs et au bon fonctionnement des marchés d’instruments financiers".

Selon Vasseur (1969, p.83)241, les pouvoirs publics "sont partis de l'idée qu'ils

n'atteindraient ce résultat que si les épargnants, qu'ils soient ou non déjà porteurs de valeurs mobilières, étaient exactement informés sur la marche des sociétés et leurs résultats et s'ils pouvaient être assurés qu'ils ne faisaient pas les frais d'une gestion qui n'était profitable qu'aux dirigeants et à certains privilégiés, compte tenu des informations qui sont les leurs". Si l'ordonnance du 28 septembre 1967 annonce comme objectif celui de la protection de l'épargne, la création de la COB est plus guidé selon Vasseur (1969) par le souci d'information.

L’information (lorsqu’elle est correcte, bien entendu) doit permettre à l’investisseur (individuel ou bien institutionnel) de prendre des décisions d’achat ou de vente en toute connaissance de cause. L’information financière doit alors regrouper des données objectives, des faits, et des chiffres sur l’entreprise. Plus globalement, elle doit être intelligible.