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CHAPITRE 3 : LA QUESTION DE LA PAUVRETÉ DANS LES POLITIQUES

4 Rétrospective des politiques agricoles en Algérie depuis l’indépendance

4.8 Le Plan National de Développement Agricole (PNDAR)

Les différentes réformes initiées et mises en œuvre ne hissent pas l’agriculture algérienne au niveau escompté et plusieurs des résultats positifs enregistrés sont le plus souvent le fruit de conditions naturelles favorables plutôt que de mesures ou de dispositions efficientes. En effet, la politique agricole mise en œuvre jusque-là favorise l’émergence d’une agriculture administrée, sous-équipée et peu performante, grevant ainsi toute l'économie du pays. Face à ce constat, les pouvoirs publics tentent de mettre en œuvre un programme d'appui pour relancer le secteur. L’objectif de ce programme est de dynamiser l'économie et de mettre en place un processus de développement durable.

C’est dans cette optique qu’est lancé le 1er septembre 2000 le Plan National de Développement Agricole, car le contexte tant régional qu’international impose l’émergence d’une agriculture moderne et performante, capable de valoriser au mieux les potentialités que recèle le pays et de faire face aux défis du moment que sont la reprise effective de l’investissement, la sécurité alimentaire, l’amélioration de la balance commerciale agricole, la création d’emplois, la réoccupation de l’espace rural, la protection de la nature et enfin l’amélioration du niveau de vie des agriculteurs (CNES, 2000).

4.8.1 Objectifs du programme de relance du secteur agricole

Telle que définie dans le programme du Gouvernement, la stratégie de développement agricole doit tenir compte des avantages comparatifs réels de l’agriculture algérienne et notamment de sa diversité territoriale. Elle doit s'inscrire progressivement dans le cadre de l'ouverture de l'économie et viser une amélioration de la balance agricole à moyen terme.

Par ailleurs, la sécurité alimentaire du pays revêt une importance cruciale au regard du fort taux de croissance démographique, de la relative faiblesse des ressources naturelles en sol et en eau, de la nature aride et semi-aride du climat et des incertitudes liées à la situation économique mondiale. Il est prévu par le PNDAR :

 Une utilisation rationnelle et durable des ressources naturelles, particulièrement l’eau qui est à juste titre le plus important des facteurs limitants ;

 La promotion des productions à avantages comparatifs avérés en vue de dégager des capacités d’exportation ;

 La sauvegarde de l’emploi agricole et l’accroissement des capacités du secteur agricole en matière d’emploi par la promotion et l’encouragement de l’investissement ;

 L’amélioration du niveau de vie des agriculteurs.

4.8.2 Les composantes du PNDAR

Le plan national de développement agricole englobe une série de programmes spécifiques s’étalant entre 2000 et 2004, adaptés aux contraintes agroclimatiques de l'Algérie.

Programme d’intensification de la production

Il s’adresse particulièrement aux exploitations situées dans les plaines du littoral et du sublittoral ainsi que dans les plaines intérieures. Il vise essentiellement l’intensification de la production céréalière, le développement de la production laitière et le développement des cultures maraîchères (notamment de la pomme de terre), le développement de la production arboricole, le développement et la réhabilitation de la betterave sucrière, le développement de la production de graines oléagineuses. Programme d'adaptation des systèmes de culture (reconversion)

Il préconise une démarche qui vise à intervenir sur des espaces fragiles avant que la situation de dégradation ne devienne irréversible. Une telle démarche s’appuie fondamentalement sur l’adhésion des populations concernées aux actions préconisées pour l’adaptation des systèmes de production aux conditions agroclimatiques de chaque terroir.

Plan National de Reboisement (PNR)

Les objectifs projetés dans ce cadre sont réorientés en faveur des boisements économiquement utiles, susceptibles de lutter contre la dégradation des sols et la désertification et d’améliorer les ressources des populations riveraines. À terme, il est projeté entre autres de relever le taux de boisement

de 11 à 14 % dans le nord du pays et d’accroître les ressources en production fourragère et en bois, ainsi que de redynamiser les entreprises spécialisées dans les travaux forestiers.

Programme de développement des zones de parcours et de protection de la steppe

Il vise essentiellement à protéger les 32 millions d’hectares de parcours steppiques des effets ravageurs de l’homme et de la nature : surpâturage, extension anarchique des surfaces céréalières, utilisation de techniques inadaptées et destructrices des sols, désertification, etc.

Dans le même contexte, un fonds spécial est créé par le gouvernement57 et doit englober le développement des parcours et de la steppe pour prendre en charge les problèmes des zones arides et semi-arides : il s’agit du « Fonds de lutte contre la désertification et de développement du pastoralisme et de la steppe ». L'ordonnateur principal de ce fonds est le ministre de l'Agriculture et du Développement Rural.

Programme de mise en valeur des terres par concession

Il a pour objectif d’étendre la surface agricole utile pour lever la contrainte de l’insuffisance de la SAU. Les efforts sont concentrés sur des espaces mieux ciblés, la préférence allant aux périmètres existants qu’il s’agit de réhabiliter et d’étendre, ainsi qu’aux zones situées à la périphérie des villes, villages et agglomérations ou à la périphérie des oasis. Les actions de ce programme portent sur la création de 47 800 concessions devant permettre un gain de 637 000 hectares, le gain d’une superficie de 250 000 hectares identifiés antérieurement (et non encore atteints) par l’APFA, et la mise en valeur de 5 000 concessions dans les zones périoasiennes sur une superficie de 10 000 hectares entre autres. Programme de mise en valeur des terres dans le sud du pays

Un ensemble de mesures est proposé par le PNDAR en vue de compléter les actions déjà entreprises dans le cadre du développement de la grande et moyenne hydraulique : l’acquisition de matériel de pompage moderne, la réalisation de forages, de puits et de bassins d’accumulation et de rétention, l’entretien ou la réhabilitation des puits traditionnels, foggaras et des autres ouvrages similaires, etc.

Les mesures d’accompagnement du PNDAR

Un ensemble de mesures est prévu pour garantir au PNDAR un maximum de chances de réussite et pour lever les zones d’ombre et les entraves susceptibles de freiner sa mise en œuvre. Le gouvernement, en concertation avec le ministère de l’Agriculture, procède à un recensement global de l’ensemble des capacités agricoles dont jouit le pays. Par la suite, des dispositions sont prises pour alléger la dette des agriculteurs et régler les problèmes inhérents au foncier.

Le Recensement Général de l’Agriculture

Le Recensement Général de l'Agriculture (RGA), réalisé en 2001 sous l’égide du ministère de l'Agriculture, peut être considéré comme le premier recensement du genre dans la mesure où le

57 Décret exécutif n° 02-248 du 23 juillet 2002 fixant les modalités de fonctionnement du compte d'affectation spéciale

recensement de 1973 n’avait touché que les wilayas du nord et que les données étaient devenues rapidement caduques, en raison des transformations des structures de l'agriculture engendrées par les différentes réformes du secteur. Les objectifs assignés au RGA sont fixés par le décret exécutif n° 01- 114 du 7 mai 2001, à savoir :

 Recenser l’ensemble des exploitants et des exploitations agricoles ainsi que l’ensemble des activités connexes ;

 Actualiser, sur l’ensemble du territoire national, les données liées aux structures agraires et à la population agricole ;

 Mettre en place les bases d’un système national intégré de statistiques générales sur l’agriculture ;

 Disposer de bases de sondage nécessaires à la réalisation d’enquêtes spécifiques par domaine d’activité.

Allégement des dettes des agriculteurs

Les incitations du gouvernement Hamrouche au début des années 1990, qui avait pris l’initiative d’accélérer les processus de crédits, poussent bon nombre d’agriculteurs issus des ex-domaines autogérés à emprunter aux banques qui avaient reçu des instructions pour faciliter les opérations d’octroi de crédits : « On finançait même les salaires des attributaires. La banque a stoppé les crédits au moment où l’exploitant, manquant d’expérience, en avait vraiment besoin. En fait, l’attributaire a évolué dans

un environnement économique défavorable58. »

À partir de 1990, la Banque Agricole de Développement Rural (BADR), raisonnant en termes de commercialité, bloque les crédits pour les attributaires fortement endettés et incapables de s’acquitter de leurs créances, sans pour autant arrêter le compteur des intérêts. De plus, la solvabilité des agriculteurs endettés se trouve fortement affectée par la sécheresse et par le terrorisme qui déstabilise la campagne algérienne. Par ailleurs, le vide juridique entourant le foncier agricole incite bon nombre de personnes fortunées à profiter du système de désistement et de la misère des gens pour faire main basse sur les terres fertiles et s’adjuger des crédits, privant ainsi les ayants droit légitimes. Le chargé de l’organique à l’UNPA dira à cet effet que « sur les 24 milliards de dinars de dettes à la fin de l’année 1999, seule une dizaine de milliards ont été contractés par les vrais fellahs, le reste du montant

est parti dans les poches de personnes étrangères au secteur59 ».

L’absence de financement à long terme réduit considérablement l’investissement agricole qui atteint son niveau le plus bas dans la quasi-totalité des exploitations. Pour remédier à cette situation, le Président de la République déclare, lors d’un discours prononcé en novembre 2000 devant les adhérents

58 Propos recueillis auprès du directeur de l’organisation foncière du ministère de l’Agriculture, et rapportés par Mohamed.B.

de l’UNPA, que l’État s’est décidé, en vertu des promesses passées, à alléger les charges des fellahs issues de leurs dettes bancaires.

En mai 2002 est décidé le rachat de l’essentiel des dettes des agriculteurs par le Trésor, dettes inscrites au crédit de la BADR. L’engagement des pouvoirs publics à soulager le portefeuille de cette banque porte sur un total de 27 milliards de Da, ce qui représente les créances détenues par la BADR au 31 décembre 2000 et concerne environ 250 000 dossiers60.