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CHAPITRE V : Présentation des résultats

5.5 L’accès aux ressources de base

5.5.2 Le logement

Divers thèmes ont émergé des analyses et sont présentés ici, soit les difficultés rencontrées dans les recherches de logement, la faible qualité, l’insalubrité et les problèmes de surpeuplement de leur appartement. D’autres éléments comme le coût élevé des loyers ainsi que les difficultés rencontrées avec les propriétaires ont été nommés.

Neuf participants de ce mémoire n’avaient pas choisi leur premier logement puisque celui-ci leur avait été attribué par le CMQ. Seulement un participant qui arrivait de l’Ontario avait fait sa première recherche d’appartement accompagné d’amis réfugiés déjà installés à Québec. Six participants habitaient toujours dans leur première habitation alors que presque tous les autres ont reçu l’aide de certains intervenants ou d’organismes communautaires pour trouver leur 2e logement.

Nous n’avions pas le choix (du pays de réinstallation). Tu ne connais pas là où tu pars. Comment tu veux faire le choix ? Là où nous partons, on ne connaît pas, [on fait tout pour toi dans les camps]. Y’a quelqu’un qui fait tout pour toi. Nous on arrive [à Québec], on te loge dans l’hôtel après on te dit qu’on a trouvé une maison. Et c’est là où tu vas quitter pour avoir ta maison (logement). Tu vas accepter, parce que si tu n’acceptes pas tu vas rester où. […] Donc on te trouve une maison, tu y habites, tu n’as pas de choix. Ce n’est qu’après que c’est là que tu vas juger que là où je suis ce n’est pas bon ou c’est bon. [Bemwezi, participant, H., 46-50, 1 année.]

Au moment des entrevues, la moitié des participants étaient sur une liste d’attente pour obtenir une habitation à prix modique (HLM), alors que deux réfugiés avaient déjà eu accès à ces habitations. D’autre part, il est pertinent de mentionner que l’accès à un logement subventionné se fait dans un contexte de choix très limité. Les deux réfugiés qui ont eu accès à un HLM devaient choisir entre deux appartements et avaient un très court délai pour accepter ou refuser, sinon, ils auraient eu droit à une pénalité d’une année.

Non je n’ai pas choisi [mon logement]. On m’avait appelé, on m’avait dit qu’on m’a trouvé la maison à Beauport, puis ils m’ont donné deux jours pour répondre si je la veux ou pas. Je suis allée là, j’ai vu que c’était loin et puis je suis revenue et j’ai appelé. J’ai dit la maison c’est bon là, mais c’est très loin et puis j’ai regardé tout autour l’accès à l’école de ma fille, l’épicerie. Tout, tout, tout est loin de chez moi. J’ai dit, est-ce que je ne peux pas avoir autre chose, surtout près de l’école ? […] Parce que je n’ai pas une voiture, je n’ai rien, je marche à l’autobus. Ils m’ont dit là [tu n’as] pas le

choix, c’est ça qu’il me reste. Si je ne prends pas là, je vais avoir la pénalité d’un an et puis après je vais recommencer encore. C’est ça, puis j’avais accepté de le prendre, sinon là je n’avais pas une meilleure place.  [Kadjatou, participante, F., 21-25 ans, 1 année.]

 Parce que j’avais juste deux places, [près de l’entreprise] Duro ou ici, dans ce temps-là Duro était vraiment sale. Ce n’était pas sécuritaire, pour sortir et jouer [avec les enfants], c’était dans la rue. Les voitures passaient tout le temps. Avec les enfants, j’ai choisi ici. Je n’avais pas le choix.  [Wivine, participante, F., 31-35 ans, 16 années.]

Par rapport au logement, seul deux participants ont eu à effectuer des recherches sans accompagnement et une participante a rencontré plusieurs difficultés. Elle a essayé durant quatre années consécutives de changer d’appartement et a vécu plusieurs épisodes de discrimination. Selon elle, les propriétaires refusaient de lui louer puisqu’elle est immigrante ou encore parce qu’elle a beaucoup d’enfants (7). Lorsqu’elle appelait les locateurs, certains refusaient de la faire visiter en disant que leur appartement était déjà loué. Toutefois, le logement demeurait disponible dans les annonces. Cette participante suppose que son accent ou son nom serait la cause des refus. D’autres propriétaires lui ont fait visiter des habitations et lorsque celle-ci voulait signer un bail, les locateurs lui mentionnaient que c’était déjà loué, or celui-ci était toujours affiché comme disponible. Cette participante a abandonné ses recherches de logement croyant qu’elle ne pourrait jamais avoir accès à un appartement décent et, continue à ce jour, d’habiter dans un endroit insalubre avec ses sept enfants.

J’ai essayé au moins quatre fois [de changer d’appartement], mais je n’ai pas eu de logements. […] quatre années de suite. […] J’ai essayé de changer et puis, il te demande tu as combien d’enfants et puis [le propriétaire] dit non. […] Oui, ou tu dis le nom et il te dit c’est déjà loué, mais c’est encore disponible. […] des fois on visite et puis après ça va être l’heure de signer le bail, ils refusent et ils disent que c’est déjà pris. […] Il vous dit que c’est déjà loué. Y’en a d’autres, y’en a déjà en bas le locataire qui ne veut pas des enfants. [Wivine, participante, F., 31-35 ans, 16 années.]

En ce qui a trait à la taille des logements, sept participants n’ont pas réussi à en trouver un où tous les membres de la famille pouvaient y habiter. Cela pose des problèmes de surpeuplement à l’intérieur des appartements. Pour remédier à cet inconvénient, trois participants ont dû louer deux logements adjacents pour loger toute la famille, et ce, à des coûts très élevés.

Le logement représente un fardeau économique majeur pour tous les participants. Ils ont tous rapporté dépenser une trop grande partie de leur revenu pour les frais de loyer et ne pas pouvoir compresser cette dépense. Dans les entrevues, les participants ont fait part de leur revenu mensuel et des charges associées à leur appartement. Pour la majorité, les dépenses reliées au logement dépassent plus de 50 % de leur revenu mensuel.

Plus de la moitié des participants ont rapporté devoir vivre dans un logement en mauvais état, dont les deux personnes qui habitent en HLM. Les éléments négatifs reliés à l’état des logements sont l’insalubrité des parties privatives (cuisine, salle de bain, etc.) et des parties communes (hall d’entrée, corridors communs, etc.), le manque d’entretien des habitations par les propriétaires, le mauvais état des électroménagers ou d’appareils inclus dans la location. Les participants ont rapporté des bris de douches, de ventilateurs, de lavabos, des trous dans les murs ainsi que de la moisissure dans leur logement. Une autre participante a relevé des cas d’infestation par des insectes dus au mauvais entretien du bâtiment dans lequel sa famille habite.

Mais ce n’est qu’après que tu vas commencer à voir qu’une maison comme ça ce n’est pas bien. Mais quand tu arrives brusquement parce qu’ils ont mis des nouvelles peintures, ça brille bien. Mais après tu vas voir que vraiment ce sont des anciens logements. Les conditions ne sont pas faciles et des fois aussi si tout fonctionne bien y’a pas de problème. Mais quand tes autres choses comme tes ventilateurs, tes douches, les chasses d’eau, ça ne fonctionnent pas bien tu appelles le concierge, il ne vient pas. [Bemwezi, participant, H., 46-50, 1 année.]

Parce que là où je suis dans le logement, ce n’est pas en bonne condition. C’est magané, y’a des moisissures partout. […] Mais quand je suis entrée, y’avait de la moisissure partout. Tu vois le lavabo, il tombe tout seul. C’est comme un [vieux] logement. Ça fait vingt-huit ans. Quelqu’un était ici pendant vingt ans, moi ça fait huit ans. Ce n’est pas nous qui étions le premier. […] Yen a ici où on habite, on n’a pas la place pour laver les vêtements. Il faut payer en bas. Mais les machines aussi en bas elles ne fonctionnent pas. […] Si on lave et ça ne fonctionne pas, on peut attendre qu’ils viennent réparer. On peut faire même une semaine sans laver. […] On est obligé de demander de l’aide aux amis. Comme la semaine passée, j’ai appelé une amie qui habite à Charlesbourg. [Wivine, participante, F., 31-35 ans, 16 années.]

Même si tu vérifies, tu vas voir vraiment qu’ici c’est très très sale. Il y a des pigeons qui viennent là, ils habitent ici. Ils font leur saleté ici, tu vois vraiment ça ne marche pas. Dans les corridors c’est vraiment très sale. [Aminata, participante, F., 41-45 ans, 1 année.]

Trois participants ont rapporté que le concierge ou propriétaire de leur immeuble avait refusé d’effectuer des travaux ou des réparations dans leur appartement. Certains propriétaires niaient que leurs immeubles et appartements avaient besoin d’entretien ou de réfection. Pour un problème de champignons sur les murs, un propriétaire a mentionné à la personne réfugiée que cette situation était normale et qu’elle ne nécessitait pas de travaux. Deux personnes réfugiées ont aussi rapporté que les propriétaires ne retournaient pas leurs appels et omettaient de considérer leurs demandes de réparation et d’entretien.

Finalement, une participante n’était pas logée dans une habitation adaptée à sa condition. Elle habitait au deuxième étage d’un immeuble qui n’a pas d’ascenseur. En raison d’un handicap physique, elle était incapable

de sortir de son appartement. Sa condition de santé n’avait pas été considérée dans la recherche de logement effectuée par l’organisme communautaire qui accompagnait la famille.