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L'exclusion sociale vécue par des réfugiés de l'Afrique subsaharienne à Québec et les effets sur leurs conditions de vie et leur santé

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Academic year: 2021

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L'exclusion sociale vécue par des réfugiés de l'Afrique

subsaharienne à Québec et les effets sur leurs

conditions de vie et leur santé

Mémoire

Catherine Beaulieu

Maîtrise en santé communautaire - avec mémoire

Maître ès sciences (M. Sc.)

(2)

Cette étude explore les expériences d’exclusion sociale chez les réfugiés de l’Afrique subsaharienne réinstallés à Québec et cherche à comprendre les effets des formes d’exclusion sociale sur leurs conditions de vie et leur santé. La recherche se base sur un devis qualitatif qui donne la parole à dix réfugiés en provenance de différents pays de l’Afrique subsaharienne. Ces personnes ont été rencontrées lors d’entrevues individuelles semi-dirigées. Les résultats de l’étude ont permis de mettre en lumière différentes expériences d’exclusion sociale dans différents milieux comme le travail, l’école, les commerces, le transport en commun et différents lieux publics. Les données tirées des entrevues font ressortir différentes formes d’exclusion : discrimination raciale à l’embauche, mépris identitaire, difficulté de créer des liens sociaux avec la population hôte, non-respect des droits fondamentaux et des règles de programmes contraignantes.

L’exclusion sociale vécue par certains réfugiés subsahariens réinstallés à Québec s’accompagne de conditions de vie très délétères à leur santé : insécurité alimentaire, faible revenu, logements insalubres, réinstallation dans des quartiers mal desservis par les services et les commerces. Cette recherche relève également quelques effets perçus de l’exclusion sociale et des conditions de vie sur la santé tels que des maladies chroniques et des problèmes de santé mentale.

MOTS-CLÉS : réfugiés réinstallés, exclusion sociale, déterminants de la santé, conditions de vie, santé, Québec.

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This study seeks to explore experiences of social exclusion among refugees from sub-Saharan Africa resettled in Quebec and to understand the effects of forms of social exclusion on their living conditions and their health. The research is based on a qualitative quote that gives the floor to experts to live, ten refugees from different countries of sub-Saharan Africa. These people were met in semi-structured individual interviews. The results of the study shed light on different processes of social exclusion in different environments such as work, school, businesses, public transportation and various public places. The forms of social exclusion identified by participants are related to racial discrimination in hiring, identity contempt, difficulty in creating social links with the host community, lack of respect for fundamental rights and restrictive program rules.

The social exclusion experienced by sub-Saharan refugees resettled in Quebec makes them experience living conditions that are very deleterious to their health: food insecurity, low income, unhealthy housing, resettlement in neighborhoods that are unfavorable to health and unsafe. In addition, this research identifies some effects of social exclusion and living conditions on health such as chronic diseases and mental health problems.

(4)

Résumé ... ii

Abstract ... iii

Liste des tableaux ... viii

Liste des sigles et des acronymes ... ix

Remerciements ... xi

Introduction ... 1

CHAPITRE I : Objet d’étude et exploration préliminaire ... 3

1.1 Les différents statuts ... 3

1.1.1 Les demandeurs d’asile ... 3

1.1.2 Les personnes déplacées internes ... 3

1.1.3 Les apatrides ... 4

1.1.4 Les rapatriés ... 4

1.1.5 Les réfugiés ... 4

1.2 La trajectoire migratoire d’une personne réfugiée ... 6

1.2.1 L’exil ... 6

1.2.2 La reconnaissance du statut de réfugié par le HCR ... 6

1.2.3 L’entretien avec l’agent d’Immigration Canada ... 7

1.2.4 L’examen médical ... 7

1.2.5 La réinstallation... 8

1.3 Les responsabilités fédérales, provinciales et municipales en matière d’immigration humanitaire ... 9

1.3.1 Les responsabilités fédérales en matière d’immigration humanitaire ... 9

1.3.2 Les responsabilités du Québec en matière d’immigration humanitaire ... 10

1.3.3 La politique municipale de la Ville de Québec sur l’intégration des nouveaux immigrants ... 12

1.4 L’immigration au Québec ... 13

1.4.1 Les catégories de l’immigration au Québec ... 13

1.4.1.1 Les réfugiés pris en charge par l’État ... 13

1.4.1.2 Les réfugiés parrainés... 14

1.4.1.3 Les réfugiés reconnus sur place ... 14

1.4.2 Quelques chiffres ... 15

(5)

1.6 Synthèse du premier chapitre ... 17

CHAPITRE II : Recension des écrits et problématique ... 19

2.1 Portrait général des effets de la migration sur l’état de santé des réfugiés ... 20

2.1.1 Les conséquences du parcours migratoire sur la santé physique ... 20

2.1.2 Les conséquences du parcours migratoire sur la santé mentale ... 21

2.2 Les causes de l’exclusion sociale chez les réfugiés ... 23

2.2.1 Une faible participation sociale ... 23

2.2.2 La discrimination ... 24

2.2.3 La rupture des liens sociaux, réseaux sociaux et isolement ... 25

2.2.4 Les difficultés liées à l’emploi, au faible revenu et à la déqualification ... 26

2.3 Les conséquences de l’exclusion sociale sur les conditions de vie, l’accès aux services de santé et la santé ... 28

2.3.1 Les problèmes liés au logement ... 28

2.3.2 L’insécurité alimentaire ... 30

2.3.3 Les problèmes d’accès aux services de santé ... 30

2.3.4 Sommaire des conséquences de l’exclusion sociale sur la santé des réfugiés ... 31

2.4 Synthèse ... 32

CHAPITRE III : Questions et cadre conceptuel ... 34

3.1 Les questions de recherche ... 34

3.1.1 Les questions de l’étude ... 34

3.2 Pertinence de la recherche ... 35

3.2.1 La pertinence sociale ... 35

3.2.2 La pertinence scientifique ... 36

3.3 De l’intégration à l’exclusion sociale ... 36

3.4 Quelques perspectives sur l’exclusion sociale ... 37

3.5 Le modèle du Social Exclusion Knowledge Network... 38

3.5.1 L’exclusion sociale, la définition du SEKN ... 38

3.5.2 Les forces du modèle du SEKN ... 39

3.6 Des idées complémentaires ... 40

(6)

CHAPITRE IV : Méthodologie de la recherche ... 42

4.1 Le choix de la méthode qualitative ... 42

4.2 La procédure de sélection des participants ... 42

4.3 L’échantillon ... 43

4.4 Les stratégies de recrutement ... 44

4.5 La collecte de données ... 46

4.5.1 L’entrevue semi-structurée ... 46

4.5.2 Le schéma d’entrevue ... 46

4.5.3 Le déroulement des entrevues ... 47

4.6 La méthode d’analyse des données ... 48

4.7 Les considérations éthiques ... 49

4.8 Synthèse ... 50

CHAPITRE V : Présentation des résultats ... 51

5.1 Le profil général des participants ... 51

5.2 Le parcours migratoire ... 54

5.2.1 Les causes de l’exil ... 54

5.2.2 Les pays de transition et la vie dans les camps de réfugiés ... 55

5.2.3 L’impact de la trajectoire prémigratoire sur l’état de santé ... 56

5.3 L’installation dans la ville de Québec et ses défis ... 57

5.4 L’exclusion sociale vécue dans différents milieux ... 61

5.4.1 Le marché du travail ... 61 5.4.2 Le milieu familial ... 63 5.4.3 La colocation... 65 5.4.4 Les amis ... 65 5.4.5 Le quartier et le voisinage ... 66 5.4.6 Le milieu de l’éducation ... 68

5.4.7 Les milieux de garde ... 70

5.4.8 Les lieux publics ... 70

5.4.9 Les organismes communautaires ... 72

5.4.10 Les associations religieuses ... 73

5.4.11 Les services de santé ... 74

5.4.12 Les services sociaux ... 75

(7)

5.5.1 Le revenu ... 77

5.5.2 Le logement ... 78

5.5.3 L’alimentation... 81

5.5.4 L’accès aux biens essentiels ... 82

5.6 La santé ... 82

5.6.1 La santé physique ... 83

5.6.2 La santé mentale ... 83

5.7 Synthèse ... 88

CHAPITRE VI : Analyse ... 89

6.1 Les formes d’exclusion sociale ... 89

6.1.1 La dimension économique ... 91

6.1.2 La dimension sociale ... 94

6.1.3 La dimension politique ... 97

6.1.4 La dimension culturelle ... 100

6.1.5 Les injustices symboliques ... 101

6.2 Les effets de l’exclusion sociale sur les conditions de vie ... 103

6.3 Les effets des formes d’exclusion sociale sur la santé ... 106

6.4 Les limites de l’étude ... 109

6.5 Les forces de l’étude ... 111

6.6 Synthèse ... 112

Conclusion ... 114

Bibliographie ... 116

ANNEXES ... 125

Annexe I — Entrevues préliminaires ... 126

Annexe II – Tableau d’opérationnalisation des concepts ... 135

Annexe III — Communication pour le recrutement ... 136

Annexe IV — Schéma d’entrevue ... 138

(8)

Liste des tableaux

Tableau 1 - Le partage des responsabilités provinciales et fédérales en immigration ... 11 Tableau 2 - Les principaux problèmes de santé physique chez les réfugiés par catégorie ... 21 Tableau 3 - Profil des participants selon le sexe, l’âge, l’état civil, le nombre d’enfants, le nombre de personnes dans le ménage, le pays d’origine, le temps passé dans les pays de transition et les camps de réfugiés, le statut de réfugié et le nombre d’années vécues à Québec ... 52

Tableau 4 - Le profil socioéconomique des participants selon le niveau de scolarité atteint en Afrique, les diplômes obtenus au Québec, l’occupation en Afrique et l’occupation au Québec ... 53

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Liste des sigles et des acronymes

ASF Agence des services frontaliers

ASIB Australian Social Inclusion Board B-SEM Bristol social exclusion matrix

CCNSA Centre de collaboration nationale de la santé autochtone

CCNSD Centre de collaboration nationale sur les déterminants sociaux de la santé CERUL Comité d’éthique de la recherche de l’Université Laval

CIC Citoyenneté et Immigration Canada

CIUSSS Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux

CIUSSSCN Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux de la Capitale-Nationale CLSC Centre local de santé communautaire

CMQ Centre multiethnique de Québec

CRI Commissariat aux relations internationales et à l’immigration CSSSVC Centre de santé et de services sociaux de la Vieille-Capitale DPJ Direction de la protection de la jeunesse

ELIC Enquête longitudinale auprès des immigrants du Canada ESPT État de stress post-traumatique

GRC Gendarmerie royale du Canada

HCR Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés HLM Habitation à loyer modique

ITS Infections transmissibles sexuellement

MIDI Ministère de l’Immigration de la Diversité et de l’Inclusion MNT Maladies non transmissibles

OBNL Organisme à but non lucratif

OIM Organisation internationale pour les migrations OMHQ Office municipal d’habitation de Québec OMS Organisation mondiale de la Santé

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ONU Organisation des Nations Unies OSBL Organisme sans but lucratif

PAIR Programme d’accueil et d’installation des réfugiés PANA Programme d’accompagnement des nouveaux arrivants PBMR Pays à bas et moyens revenus

RAMQ Régie de l’assurance maladie du Québec RC Recherche collaborative

RP Recherche participative

SARCA Service d’accueil, de référence, de conseil et d’accompagnement SCRS Service canadien du renseignement de sécurité

SEKN Social Exclusion Knowledge Network

SOIT Service d’Orientation et d’Intégration des Immigrants au Travail SPOT Clinique communautaire de Santé et d’Enseignement

TCRI Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes VIH Virus de l’immunodéficience humaine

(11)

Remerciements

Ce mémoire est l’aboutissement d’un long processus académique à travers lequel je souhaitais mieux comprendre la réalité des réfugiés subsahariens réinstallés dans la ville de Québec. J’espère qu’à sa façon, le fruit de ce travail nous permettra d’avoir une ville encore plus inclusive et accueillante.

Mes premiers remerciements s’adressent aux personnes réfugiées qui ont accepté de participer à cette recherche en partageant leur vécu et leurs expériences. Vos histoires ont été tout aussi touchantes les unes que les autres. Dans votre pays d’origine, mais aussi à Québec, plusieurs d’entre vous ont surmonté des épreuves difficiles à imaginer. J’ai un immense respect envers vos capacités à faire face à l’adversité. Votre résilience et le courage que vous avez manifestés dans vos parcours respectifs m’ont énormément impressionnée.

J’aimerais ensuite remercier chaleureusement mes deux superviseurs, la Dre Shelley-Rose Hyppolite,

médecin-conseil à la Direction de santé publique au Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux (CIUSSS) de la Capitale-Nationale, professeure adjointe à la Faculté de Médecine de l’Université Laval et M. Éric Gagnon, chercheur au CIUSSS de la Capitale-Nationale qui m’ont accompagnée dans ce long processus et qui ont partagé, à maintes reprises, leur expertise avec moi. Merci d’avoir toujours respecté mon rythme de travail et d’avoir laissé mes réflexions construire ce projet. Votre grande disponibilité, vos précieux conseils et vos nombreux encouragements sont parties prenantes de la réussite de ce projet. Ces quelques lignes ne pourront pas suffire pour vous exprimer toute ma gratitude.

Ce projet n’aurait pas été possible sans l’appui de différents partenaires. Merci à Nathalie Beaulieu, de la Clinique santé des réfugiés du CIUSSS de la Capitale-Nationale, à Bernard Mercier, du Service d’aide à l’adaptation des immigrants et des immigrantes de la Commission scolaire des Découvreurs, à Éloïse Brault, organisatrice communautaire, au CIUSSS de la Capitale-Nationale, à Cindy O’Farrell, du Patro de Charlesbourg et aux bénévoles du Comptoir alimentaire de la paroisse Notre-Dame-de-Foy qui m’ont appuyée pendant le recrutement des participants. Merci à tous les autres organismes communautaires, associations et professionnels qui m’ont ouvert la porte afin de mener à terme ce projet, notamment à toutes les personnes qui ont participé aux entrevues préliminaires : Manon Roy, Barbara Leclerc, Claudia Lafond, Hector Contreras et Liliana Hernandez.

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Jacinthe, agente administrative à la Direction de santé publique du CIUSSSCN et François, je ne peux passer sous le silence les nombreuses heures que vous avez passées à lire et relire mon mémoire afin d’améliorer la qualité du texte. Je vous remercie pour ces nombreuses lectures qui ont considérablement bonifié ce document.

Merci à mes chères amies Véronik, Jessica, Catherine, Amélie, Anne-Marie, Johannie et Sylvie qui m’ont soutenue dans la réalisation de ce projet, qui ont alimenté mes réflexions et pour certaines, qui ont lu et commenté mes travaux. Marie-Josée Nault, ma chère amie d’enfance, mes prochains remerciements te sont destinés, pour ton écoute inconditionnelle, ton soutien et ces longues heures passées ensemble dans les cafés de la ville de Québec à rédiger nos mémoires respectifs. Nos échanges ont sans aucun doute bonifié ce projet.

Merci à mes chers parents qui m’ont encouragée et soutenue pendant tout ce cheminement académique. Je vous remercie de m’avoir libérée à plusieurs reprises de mes responsabilités de jeune maman afin que je puisse terminer la rédaction de ce projet. Merci de m’avoir transmis les valeurs de réussite, de détermination et d’engagement, sans elles je n’y serais pas arrivée.

Finalement, merci à mon partenaire de tous les jours, Sébastien, d’avoir accepté tous les sacrifices occasionnés durant la réalisation de ce projet académique et d’avoir entendu, un nombre interminable de fois, le mot « mémoire ». Tu es, à ta façon, artisan de ce projet.

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Introduction

Avec la mondialisation, la mobilité internationale concerne aujourd’hui environ 244 millions de personnes (El-Bialy et Mulay, 2015; Elsevier, 2016). Les trajectoires et les motifs des migrations internationales sont multiples et leurs effets sont complexes. Dans certains cas, les migrants sont forcés de quitter leur pays d’origine. Ils ont alors en commun le fait de fuir leur milieu de vie pour assurer leur survie et celle de leurs proches ainsi qu’un choix limité de déplacements qui se présentent à eux (Grove et Zwi, 2006). Ils quittent leur pays, entre autres, à cause des conflits politiques, de la guerre et des persécutions (Grove et Zwi, 2006; Guterres, 2016; Lindert, Carta, Schafer, et Molica, 2016). En 2015, ce type de migration touchait 60 millions de personnes à travers le monde (Lindert et al., 2016; Modi, Williams, et Taylor, 2015).

Au Québec, l’immigration humanitaire occupe une place relativement importante. Par l’accueil des personnes réfugiées, la province souscrit aux principes de solidarité internationale ainsi qu’aux objectifs des conventions qui régissent la protection des réfugiés. En 2015, le Québec a accueilli 49 024 immigrants, dont 7 610 d’entre eux se retrouvaient dans cette catégorie (MIDI, 2016a). Entre le 1er juillet 2014 et le 30 juin 2015, 325 réfugiés

pris en charge par l’État ont été réinstallés dans la ville de Québec (CMQ, 2015).

L’accueil des personnes réfugiées à Québec soulève des enjeux très importants au regard de la diversité culturelle et du vivre ensemble. Ce mémoire porte sur l’exclusion sociale vécue par des réfugiés africains subsahariens réinstallés dans la ville de Québec en adoptant une approche exploratoire et holistique. Cette étude décrit également les effets perçus de l’exclusion sociale sur leurs conditions de vie et leur santé.

Ce mémoire est divisé en six chapitres. Le premier est dédié à la présentation de l’objet d’étude. Les différents statuts des personnes ayant effectué des migrations forcées sont expliqués afin de permettre une bonne compréhension du statut de réfugié. La trajectoire « typique » de migration et le processus de sélection menant au statut de réfugié sont présentés. Ensuite, le contexte de l’immigration au Québec est abordé. À la toute fin de ce premier chapitre, quelques-uns des enjeux reliés à l’intégration des réfugiés qui ont été identifiés par des groupes communautaires et une professionnelle du secteur de la santé de la ville de Québec sont rapportés.

Le deuxième chapitre présente la recension des écrits sur les différents thèmes de notre étude. Dans un premier temps, les causes de l’exclusion sociale ainsi que ses conséquences chez les réfugiés sont abordées. Par la suite, un portrait global de la santé mentale et physique des réfugiés est présenté. Les différentes sections de ce deuxième chapitre permettent de bien cerner la problématique de ce mémoire.

(14)

Le troisième chapitre est consacré aux questions de recherche et au cadre conceptuel. La première partie est dédiée à la présentation de la question générale et des questions spécifiques de ce mémoire ainsi qu’à la pertinence sociale et scientifique. Par la suite, quelques perspectives de différents auteurs sur le thème de l’exclusion sociale sont décrites. La dernière section de ce chapitre présente et explique le cadre conceptuel de l’exclusion sociale de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) retenu comme cadre d’analyse pour ce présent mémoire.

Le quatrième chapitre est dédié à la description de la méthodologie de la recherche qui a permis de répondre à la question principale et aux questions spécifiques de cette étude. La première partie de ce chapitre se consacre aux raisons ayant mené au choix de la méthode qualitative, à la composition de l’échantillon, à la procédure de sélection des participants et à la méthode de collecte et d’analyse des données. Dans la seconde partie, les considérations éthiques de l’étude sont décrites.

Le cinquième chapitre est consacré principalement à la description des résultats de la recherche. La première partie présente le profil général des participants rencontrés et résume leur parcours migratoire. Par la suite, les formes d’exclusion sociale vécues dans différents milieux par les participants sont décrites. Les dernières sections de ce cinquième chapitre abordent les effets de l’exclusion sociale sur les conditions de vie et la santé.

Le sixième chapitre est dédié à l’analyse des résultats obtenus lors des entrevues avec les personnes réfugiées. Les formes d’exclusion sociale vécues dans la dimension économique, sociale, politique et culturelle nous permettent de mieux comprendre les processus relationnels qui diminuent la participation de certains réfugiés subsahariens à la société. Les effets perçus sur la santé de l’exclusion sociale sont également abordés. Ce chapitre se conclut sur les limites et les critères de qualité de l’étude.

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CHAPITRE I : Objet d’étude et exploration préliminaire

Ce premier chapitre présente les bases de cette recherche et vise une meilleure compréhension de la question des réfugiés sur le plan international et au Québec. Premièrement, les distinctions entre les réfugiés et les autres groupes qui ont effectué des migrations forcées sont présentées. Les différents groupes de personnes déracinées ou en exil faisant partie de ce type de migration sont définis : les « demandeurs d’asile », les « personnes déplacées internes », « les apatrides », les « rapatriés » et « les réfugiés ». Deuxièmement, un exemple de trajectoire migratoire d’une personne réfugiée est décrit. Troisièmement, le processus de sélection par lequel les réfugiés sont soumis avant leur arrivée au Québec est présenté. Quatrièmement, le contexte de l’immigration au Canada et au Québec, plus précisément, dans la ville de Québec est abordé. Nous terminerons par une brève synthèse des entrevues préliminaires réalisées en mai 2015 auprès de groupes communautaires et d’une professionnelle du milieu de la santé de la ville de Québec. Ces entretiens ont permis d’aider à établir les orientations de ce mémoire.

1.1 Les différents statuts

La première section de ce premier chapitre présente les différents statuts des personnes déracinées afin de mieux cerner les nuances qui existent entre chacun des groupes. Cela permet de bien identifier certaines spécificités de la population concernée par ce mémoire, les personnes réfugiées.

1.1.1 Les demandeurs d’asile

Les termes « demandeur d’asile » et « réfugié » sont souvent confondus. Un demandeur d’asile est une personne qui affirme être réfugiée, toutefois la demande n’a pas encore fait l’objet d’une évaluation définitive par le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) (UNHCR, 2014a) ou par un état signataire de la convention de Genève. À titre informatif, en 2013, le HCR avait reçu quelque 1,1 million de demandes d’asile individuelles (UNHCR, 2014b).

1.1.2 Les personnes déplacées internes

Les « déplacées internes » sont des personnes qui se déplacent à l’intérieur de leur propre pays et qui ne franchissent pas de frontières internationales contrairement aux personnes réfugiées. Elles peuvent fuir pour des raisons qui sont similaires à celles des réfugiés, comme la guerre et la persécution. Ces personnes restent sous la protection légale de leur gouvernement. En 2013, le HCR portait assistance à 26 millions de personnes déplacées internes en leur fournissant des abris d’urgence et en faisant la gestion et la coordination des camps

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de déplacés internes (UNHCR, 2014a). Pour cette même année, le nombre total de déplacés internes à travers le monde s’élevait à 33,3 millions (UNHCR, 2014b).

1.1.3 Les apatrides

Une personne apatride est une personne dont la nationalité n’est pas établie. Aucun État ne considère cette personne comme son ressortissant. L’apatridie peut survenir dans des cas de discrimination à l’égard de groupes minoritaires selon la législation relative à la nationalité. Il peut aussi arriver que tous les résidents n’aient pas été inclus parmi les citoyens au moment de l’indépendance d’un État (succession d’États). Rappelons que sans nationalité, une personne est incapable d’exercer un large éventail de droits (UNHCR, 2014a). Tout comme les réfugiés, les apatrides relèvent de la compétence du HCR. En 2013, l’apatridie touchait environ 10 millions de personnes dans le monde (UNHCR, 2014a).

1.1.4 Les rapatriés

Les rapatriés sont des personnes qui ont fui temporairement dans un pays étranger. Lorsqu’elles ne peuvent plus séjourner dans ce pays et que cela est sécuritaire, elles retournent dans le pays dont elles détiennent la nationalité. Ces personnes relèvent des compétences du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés lorsqu’elles sont à l’extérieur de leur pays d’origine et elles le restent généralement pendant deux ans après être retournées dans leur pays. Le terme peut également s’appliquer aux déplacés internes qui étaient sous la protection du HCR et qui retournent à leur lieu de résidence (UNHCR, 2014a). En 2013, 414 600 personnes avaient été rapatriées dans leur pays d’origine (UNHCR, 2014b).

1.1.5 Les réfugiés

Le 28 juillet 1951, la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés est adoptée. Ce traité international permet de consolider les outils internationaux d’aide aux personnes réfugiées, de redéfinir le statut juridique du « réfugié » et de souligner les obligations des pays signataires.

Premièrement, la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés permet à la communauté internationale de se donner des outils permanents pour intervenir sur la question. Parmi ces instruments, soulignons le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés mis sur pied le 14 novembre 1950. Depuis sa mise sur pied, cette agence a pour mandat de diriger et de coordonner l’action internationale visant à protéger les réfugiés et de résoudre les problèmes auxquels ils font face dans le monde entier.

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Deuxièmement, sur le plan conceptuel, le Traité international de Genève définit ce qu’est un « réfugié ». La notion de réfugié s’applique à toute personne : « qui, par suite d’évènements survenus (en Europe) avant le 1er janvier 1951 et craignant, avec raison, d’êtrepersécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité,

de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays, ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels évènements, ne peut, ou, en raison de ladite crainte, ne veut plus y retourner. » (Cité dans Lochak, 2013, p. 43).

La Convention de 1951 relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951, ne permettait pas d’universaliser complètement la définition du « réfugié » puisqu’elle visait uniquement les Européens touchés par les évènements survenus avant le 1er janvier 1951. Pour que la définition devienne universellement

accessible à toutes les personnes victimes de conflits armés et de persécution, il fallut attendre la signature du Protocole de New York de 1967. La signature de ce protocole a permis d’enlever les mots « par suite d’évènements survenus avant le 1er janvier 1951 », « par suite d’évènements survenus » et « [en Europe] ».

Cette nouvelle définition lève les restrictions géographiques et temporelles et devient plus englobante que toutes les précédentes qui délivraient le statut selon des évènements bien précis (Lochak, 2013).

Les personnes qui fuient des conflits armés ainsi que des persécutions dans leur pays natal et qui ont migré en dehors de leurs frontières peuvent dorénavant faire une demande d’asile (UNHCR, 2007b). Ainsi, l’article 1 de la Convention de Genève de 1951 relative au statut des réfugiés et le Protocole de New York de 1967 relatif au statut des réfugiés définissent un réfugié comme étant un individu : « qui, en raison d’une crainte justifiée de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques : se trouve hors du pays dont il a la nationalité et ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ou n’ayant ni pays ni nationalité et se trouvant hors du pays dans lequel il avait sa résidence habituelle ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut plus y retourner. ». Les États signataires sont libres de l’appliquer selon leur interprétation (UNHCR, 2007a).

Troisièmement, la Convention de Genève énumère aussi les obligations minimales de chaque État signataire en regard du traitement des réfugiés dans leur pays. Ils doivent veiller à ce que les droits fondamentaux des personnes réfugiées soient respectés (UNHCR, 2014a). Bien que le traité établisse les balises minimales, les pays signataires ont la latitude d’octroyer un traitement plus favorable. La convention prévoit également diverses garanties contre l’expulsion des réfugiés et certaines dispositions quant à l’obtention de documents essentiels

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de réfugiés à travers le monde est estimé à 41 millions. En 2018, ce nombre est passé à 70,8 millions (HCR, 2018).

1.2

La trajectoire migratoire d’une personne réfugiée

Les trajectoires migratoires des personnes à qui l’asile est conféré (réfugiés) se situent dans une dynamique complexe. Il est important de bien comprendre qu’au cours de sa trajectoire migratoire, la personne réfugiée a subi une rupture avec sa vie passée (Lacroix, 2004). Partir pour fuir des tensions, des persécutions, la guerre et supporter des conditions de vie difficiles (camps de réfugiés, clandestinité, tracas administratifs) ont de profondes conséquences sur ces personnes (Kanouté, 2007; Lindert et al., 2016). La compréhension des expériences vécues pendant la trajectoire migratoire des personnes réfugiées réinstallées est essentielle pour un accompagnement adéquat dans leur nouvelle société d’accueil.

La prochaine section présentera la trajectoire « typique » d’une personne réfugiée ainsi que les principales démarches que les demandeurs d’asile à l’étranger doivent entreprendre avant leur arrivée au Canada, soit l’exil, la reconnaissance du statut de réfugié par le HCR, l’entretien avec l’agent d’immigration canadienne, l’examen médical et la réinstallation.

1.2.1 L’exil

La trajectoire d’une personne réfugiée comporte des évènements perturbateurs et traumatiques qui provoquent l’exil (Paquet, 2011). La migration forcée est un déplacement marqué par la violence, les deuils, les souffrances et la rupture des liens territoriaux, matériels, familiaux et sociaux (Dhooper et Tran, 1998; Guilbert, 2003; Joshi et al., 2013; Lindert et al., 2016; Paquet, 2011). Les personnes en fuite ont parfois été témoins d’émeutes, de massacres, d’emprisonnements arbitraires, de mort d’innocents, de disparitions, d’assassinats, de viols, de torture et de climats de terreur (Dhooper et Tran, 1998; Lindert et al., 2016). Certains réfugiés sont même visés personnellement par la répression en raison de leur implication politique ou celle des membres de leur famille. L’exil répond à un besoin de sécurité et de survie. Le vécu et l’expérience dans le contexte prémigratoire influencent l’intégration dans la société d’accueil (Jacob, 1993). Avant de pouvoir obtenir le statut de « réfugié » et être réinstallées, les personnes exilées doivent passer par un rigoureux processus de sélection.

1.2.2 La reconnaissance du statut de réfugié par le HCR

L’immigration humanitaire s’inscrit dans des politiques transnationales mises en œuvre par des organisations multilatérales et internationales (Saillant, 2009). C’est le HCR qui a pour mandat de diriger et coordonner les actions visant à résoudre les problèmes qui touchent les réfugiés sur la planète. Il a également le mandat

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d’attribuer le statut de réfugié aux personnes qui demandent l’asile (UNHCR, 2014a). La reconnaissance du statut de réfugié par le HCR passe par plusieurs étapes. Lors de ce processus, les personnes ont à remplir des formulaires administratifs et à passer des entrevues avec les employés du HCR. Lors de ces entretiens, les personnes en exil sont tenues de fournir une série d’informations personnelles et de détailler les raisons pour lesquelles elles craignent pour leur vie. Le HCR procède à des vérifications sur les activités militaires des demandeurs et peut utiliser des mesures de sécurité biométriques et antifraudes s’il doute de l’honnêteté des discours.

Ce n’est qu’un faible pourcentage de demandeurs d’asile qui se fera attribuer le statut de réfugié par les employés du HCR. Après avoir été reconnues par le HCR, les personnes réfugiées pourraient profiter de l’une des trois solutions suivantes : 1) le rapatriement librement consenti, 2) l’intégration dans le pays de transit, 3) la réinstallation dans un autre pays.

Ainsi, la reconnaissance du statut de réfugié par le HCR est une étape obligatoire et préalable avant la réinstallation. La réinstallation est possible pour moins de 1 % des personnes ayant obtenu le statut de réfugié. De plus, le HCR retient en priorité, mais pas seulement, les candidats les plus « vulnérables » comme les enfants non accompagnés, les mères monoparentales et les minorités religieuses ou sexuelles (UNHCR, 2013).

1.2.3 L’entretien avec l’agent d’Immigration Canada

Une fois que leur dossier est recommandé par le HCR et que la réinstallation au Canada est la solution envisagée, différentes étapes font partie intégrante du processus. D’abord, les réfugiés sont interrogés par un agent d’Immigration Canada (CIC, 2014). Lors de cet entretien d’environ une heure, ils doivent confirmer les informations préalablement transmises aux employés du HCR. Dans certains cas, une deuxième entrevue peut être nécessaire. Une fois, la cohérence de leur discours établie, la Gendarmerie royale du Canada (GRC), le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) et l’Agence des services frontaliers du Canada consultent leurs bases de données et celles des pays alliés pour effectuer des vérifications de sécurité. Ces instances examinent la demande du requérant afin de déterminer si la personne a commis des crimes graves par le passé et s’assurent que les réfugiés ne présentent pas de risque pour la sécurité du Canada (CIC, 2014). Les personnes réfugiées doivent aussi se soumettre aux contrôles de santé.

1.2.4 L’examen médical

L’examen médical permet de s’assurer que le candidat réfugié ne représente pas une menace à la santé publique. Les professionnels de la santé surveillent les maladies contagieuses, la tuberculose et le virus de

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comportements violents. Dans le cas où les critères de santé ne sont pas satisfaisants, les personnes reçoivent les soins nécessaires avant leur réinstallation. Une fois ces procédures complétées, l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) ou une autre organisation indique à la personne réfugiée à quelle date elle peut se rendre au Canada (CIC, 2014).

1.2.5 La réinstallation

Afin d’assurer la réinstallation des personnes réfugiées, l’OIM s’occupe de la logistique concernant les réservations aériennes et offre un encadrement jusqu’au départ vers la terre d’accueil (CIC, 2014). Les coûts de déplacement des réfugiés ainsi que ceux reliés à l’examen médical sont couverts par un prêt pouvant aller jusqu’à 10 000 $ accordé par le gouvernement canadien. Celui-ci est remboursable selon différentes modalités en fonction du montant du prêt. Sur le plan canadien, les réfugiés pris en charge par l’État sont accueillis dans le cadre du Programme d’aide au rétablissement par l’entremise de Citoyenneté, Réfugiés et Immigration Canada et au Québec par le ministère de l’Immigration, de la Diversité et de l’Inclusion (MIDI) (Saillant, 2009).

Dès sa descente de l’avion, le réfugié pris en charge par l’État, seul ou avec des membres de sa famille ou encore avec des réfugiés du même pays que lui, est accueilli par un agent d’immigration ou une personne d’un organisme communautaire mandaté pour l’accueil et le cas échant, avec un interprète (Saillant, 2007). À leur arrivée au Canada, ils obtiennent leur carte de résidence permanente qui leur confère les mêmes droits que tous les autres Canadiens à l’exception du droit de vote, d’être élus, de posséder un passeport canadien et d’occuper certaines fonctions réservées aux citoyens (CIC, 2014).

Les premiers jours sont consacrés aux procédures administratives et les personnes réfugiées se déplacent d’un lieu à l’autre. Les personnes ou les intervenants mandatés de travailler auprès des nouveaux arrivants les accompagnent en comblant leurs besoins essentiels (logement, nourriture, vêtement). Cette phase est aussi marquée par la découverte de nouveaux repères sur plusieurs plans : climat différent, nouvel environnement et nouveaux codes culturels (Paquet, 2011). Peu après la période d’accueil, les personnes réfugiées bénéficient d’autres services prévus par le programme d’aide : les programmes de francisation, les services reliés à l’emploi, l’orientation vers les milieux communautaires et les services gouvernementaux et l’accompagnement dans les soins médicaux (Saillant, 2007). Le Québec et le Canada, au moyen de différentes ententes, se partagent différentes responsabilités relatives à l’accueil et à l’intégration des personnes réfugiées.

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1.3 Les responsabilités fédérales, provinciales et municipales

en matière d’immigration humanitaire

En accueillant des milliers de réfugiés, le Canada estime de cette façon honorer ses responsabilités politiques internationales. Sur le plan des accords fédéraux-provinciaux/territoriaux sur l’immigration, le Québec, au moyen de différentes ententes, s’est prévalu de dispositions constitutionnelles selon lesquelles l’immigration est une compétence partagée entre les gouvernements provincial et fédéral, et ce, depuis 1971 (Farmer, Chambon, et Labrie, 2003). La première entente, Lang-Cloutier (1971) a été suivie de l’entente Andras-Bienvenue (1975), puis de l’entente Cullen-Couture (1979), remplacée par l’Accord Canada-Québec (Becklumb, 2008). En effet, depuis le 1er avril 1991, c’est l’Accord Canada-Québec relatif à l’immigration et à l’admission temporaire des

aubains qui balise les responsabilités entre le Québec et le Canada.

L’accord encadre les responsabilités relatives à l’immigration des deux gouvernements notamment en ce qui concerne les réfugiés. La Ville de Québec s’est également dotée d’une politique municipale sur l’accueil et l’intégration de ses nouveaux arrivants. La prochaine section présente les différentes responsabilités fédérales et provinciales qui touchent plus précisément le sujet de notre étude, soit les personnes réfugiées. Les grands axes de la politique municipale de la Ville de Québec sur l’intégration des nouveaux immigrants seront également abordés.

1.3.1 Les responsabilités fédérales en matière d’immigration humanitaire

Entre le Canada et le Québec, c’est l’Accord Canada-Québec de 1991 qui octroie des responsabilités exclusives au gouvernement fédéral en matière d’immigration humanitaire et économique, ainsi que des responsabilités partagées avec le gouvernement de la province de Québec en ce qui a trait aux programmes d’intégration des immigrants et à la sélection de ceux-ci. En ce qui concerne le nombre d’immigrants, c’est le gouvernement fédéral qui établit les volumes annuels d’immigration pour le pays en prenant en compte la planification québécoise.

Sur le plan juridique, le gouvernement fédéral est le seul responsable pour définir les catégories générales d’immigration (Becklumb, 2008). En ce qui concerne les réfugiés, c’est le gouvernement canadien qui est responsable de les sélectionner à l’étranger. De plus, le gouvernement fédéral est le seul responsable du traitement des demandes d’asile présentées par des personnes se trouvant déjà au Canada.

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L’Accord Canada-Québec stipule que l’accueil et l’intégration des réfugiés sont sous la responsabilité exclusive du Québec. Cependant, le Canada doit octroyer au gouvernement provincial une juste compensation pour les mesures mises en œuvre.

1.3.2 Les responsabilités du Québec en matière d’immigration humanitaire

L’accord Canada-Québec permet au Québec de préserver son poids démographique et d’assurer une intégration de ses immigrants qui soit respectueuse de son caractère distinct. L’entente stipule que c’est le Québec qui est responsable de déterminer ses intentions d’accueil en ce qui concerne le nombre d’immigrants, ainsi que leur sélection, à l’exception des réfugiés et également de gérer ses programmes d’accueil et d’intégration.

Le Québec a la possibilité d’accueillir un nombre d’immigrants proportionnel à son poids démographique dans l’ensemble du Canada, plus 5 % additionnel, selon ses besoins et sa capacité d’accueil. En vertu de l’Accord Canada-Québec, le Québec s’engage à recevoir chaque année 22 % de l’ensemble de l’immigration humanitaire accueillie dans tout le pays ce qui correspond à son poids démographique dans l’ensemble canadien (Guyon, 2011; MIDI, 2011b).

Finalement, le Québec a la responsabilité exclusive de l’intégration de ses nouveaux résidents permanents, y compris les réfugiés. Il se charge de tous les programmes et services reliés à l’accueil ainsi qu’à l’intégration linguistique et socioéconomique (MIDI, 2013). De 2013 à 2016, le Québec s’est doté d’un plan d’action pour l’accueil et l’intégration des personnes réfugiées sélectionnées à l’étranger. Les grands axes de ce plan d’action sont de proposer un parcours optimal pour les personnes réfugiées sélectionnées à l’étranger, améliorer et adapter l’intervention, mobiliser les milieux et favoriser la concertation (MIDI, 2013). Le gouvernement fédéral se retire de tous ces services en offrant une compensation financière à la province (MIDI, 2013). En 2011-2012, le montant prévu de la contribution s’élevait à 258,4 millions (Guyon, 2011). Le tableau 1 résume les responsabilités du pays et du Québec.

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Tableau 1

Le partage des responsabilités provinciales et fédérales en immigration COMPETENCE RESPONSABILITES

Provinciale  Détermination des volumes d’immigrants dans la province

 Sélection des candidats à destination de son territoire (à l’exception des réfugiés)  Gestion de ses engagements de parrainage

 Responsable des programmes d’intégration des immigrants dans la province

Fédérale  Détermination des volumes d’immigrants pour le Canada en tenant compte de la

planification québécoise

 Définition des catégories juridiques d’immigration pour tout le pays  Sélection des réfugiés à l’étranger et des familles parrainées

 Responsable de traiter les dossiers des demandeurs d’asile déposés au Canada  Octroi d’une subvention au gouvernement provincial pour les programmes

d’intégration offerts aux immigrants

En 2016, le Programme réussir l’intégration fait son apparition et remplace le Programme d’accueil et d’installation des réfugiés (PAIR) et le Programme d’accompagnement des nouveaux arrivants (PANA). Ce nouveau programme vise, entre autres, l’apprentissage du français afin de favoriser une pleine participation à la vie collective. Il se traduit par une aide financière aux organismes ou directement aux personnes. Il comprend cinq volets :

1. Information, orientation et suivi.

2. Accueil et installation des personnes réfugiées ou protégées à titre humanitaire outre-frontière. 3. Aide au logement et aide à l’information pour les personnes demandant l’asile.

4. Amélioration des services offerts aux personnes immigrantes dans le cadre du programme. 5. Information et orientation pour les aides familiales.

Quant au deuxième volet qui est consacré spécifiquement à l’accueil et à l’installation des personnes réfugiées ou protégées à titre humanitaire, celui-ci comprend trois sous-volets qui sont les suivants (MIDI, 2016b) :

1.1 Accueil à l’aéroport. 1.2 Installation et intégration. 1.3 Aide financière.

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De plus, à leur arrivée, les réfugiés sélectionnés parrainés par l’État reçoivent une allocation d’aide sociale (soutien au revenu) établie selon les mêmes critères et barèmes qui s’appliquent à tous les citoyens québécois. Certaines municipalités, comme la Ville de Québec, se sont également dotées de politiques d’intégration pour faciliter l’inclusion de leurs nouveaux immigrants.

1.3.3 La politique municipale de la Ville de Québec sur l’intégration des nouveaux immigrants

La Ville de Québec s’est dotée d’une politique d’accueil, d’intégration et de rétention de ses immigrants le 5 juillet 2010. Par l’adoption de cette politique, elle manifeste une volonté de prévenir l’exclusion sociale des nouveaux arrivants. La Ville de Québec considère que la promotion, l’accueil, l’intégration, le rapprochement interculturel et la rétention des nouveaux arrivants sont des actions à privilégier pour contrer le vieillissement de la population et le déclin démographique sur son territoire (CRI, 2010). Les grands principes de la politique concernent la reconnaissance de la diversité ethnoculturelle, la reconnaissance des personnes immigrantes comme des citoyens à part entière, la gestion proactive et inclusive de la diversité ethnoculturelle, l’engagement, la collaboration et le partenariat (CRI, 2010).

La ville favorise l’intégration économique, sociale, culturelle et politique des immigrants et valorise les relations interculturelles harmonieuses entre tous les citoyens. Deux principaux programmes découlent de cette politique, soit le Programme de stages pour personnes issues de l’immigration et le Programme « Québec, collectivité accueillante » (Ville de Québec, 2017).

Le Programme de stages pour personnes issues de l’immigration a pour objectif de permettre aux nouveaux immigrants qui s’installent dans la ville de Québec d’obtenir une expérience en milieu de travail québécois dans un domaine lié à leur formation. Ces stages sont offerts à la Ville de Québec. Pour y avoir accès, les personnes doivent être admissibles au Programme Subvention salariale d’Emploi-Québec. Quant au Programme « Québec, collectivité accueillante », il a pour objectif de soutenir des projets d’organismes communautaires du territoire. Ces organismes doivent déposer des projets qui s’inscrivent dans les objectifs généraux suivants :

L’édification d’une collectivité encore plus accueillante et inclusive pour les personnes issues de l’immigration

et des communautés culturelles.

L’établissement durable des personnes immigrantes au sein de la collectivité.

La pleine participation des personnes immigrantes et des communautés culturelles à la vie citoyenne et à

l’enrichissement collectif.

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La politique municipale ne fait pas référence spécifiquement à l’immigration humanitaire.

1.4

L’immigration au Québec

Au Québec, les politiques d’immigration ont évolué autour des enjeux de poids démographique, de rétention des immigrants, de francisation et de régionalisation de l’immigration. La prochaine section dresse le portrait sociodémographique de l’immigration au Québec et dans la ville de Québec dans les dernières décennies. Cette section présente aussi les catégories d’immigrants appartenant à l’immigration humanitaire au Québec.

1.4.1 Les catégories de l’immigration au Québec Au Québec, l’immigration permanente se subdivise en quatre grandes catégories, soit :

1. L’immigration économique qui compte pour 61,1 % (comprend les travailleurs qualifiés, les gens d’affaires et les autres immigrants économiques) de l’immigration.

2. Le regroupement familial s’élève à 21,4 % de l’immigration.

3. Les réfugiés et les personnes en situation semblable représentent 15,5 % de l’immigration.

4. Les autres immigrants (ex. : motifs humanitaires) correspondent à 2 % de l’immigration (MIDI, 2016a).

Rappelons que pour le présent mémoire, nous nous intéresserons aux personnes réfugiées qui se sont réinstallées dans la ville de Québec. Au Québec, la catégorie des réfugiés et personnes en situation semblable est subdivisée en trois sous‐groupes : les réfugiés pris en charge par l’État, les réfugiés parrainés et les réfugiés reconnus sur place. Dans la prochaine section, ces sous-catégories seront expliquées.

1.4.1.1 Les réfugiés pris en charge par l’État

Les personnes réfugiées prises en charge par l’État s’inscrivent dans la catégorie des immigrants réfugiés et des personnes en situation semblable sélectionnées et admises au Québec à la charge du gouvernement. Pour être accepté dans cette catégorie, le ressortissant étranger doit se trouver à l’extérieur du Canada et être reconnu par le gouvernement fédéral comme réfugié au sens de la Convention de Genève (MIDI, 2011a). Dans la dernière décennie, les réfugiés pris en charge par l’État représentaient 32 % du nombre total de réfugiés admis au Canada (Grisales, Arsenault, et Guilbert, 2016). À leur arrivée, les réfugiés sont inscrits à l’assistance-emploi et à la Régie de l’assurance maladie. Par la suite, ils sont accueillis et accompagnés dans leur intégration par des organismes non gouvernementaux soutenus par le ministère de l’Immigration, de la Diversité et de

Note : Les données présentées dans cette section se rapportent à l’année 2015.

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1.4.1.2 Les réfugiés parrainés

Les réfugiés parrainés s’inscrivent dans la catégorie des immigrants réfugiés et des personnes en situation semblable sélectionnées et admises au Québec dans le cadre du Programme des personnes réfugiées à l’étranger — Parrainage collectif.

Ce programme permet à des organismes à but non lucratif et à des groupes de résidents du Québec de manifester leur solidarité à l’égard des personnes réfugiées qui se trouvent à l’extérieur du Canada. Ils s’engagent à subvenir à leurs besoins pendant une période déterminée et à faciliter leur inclusion au Québec (MIDI, 2011a). Les réfugiés accueillis dans le cadre du Programme des personnes réfugiées à l’étranger – Parrainage collectif ne reçoivent aucune aide financière de l’État à leur arrivée.

Pour être accepté sous le titre de réfugié parrainé, le candidat doit : 1) se trouver à l’extérieur du Canada et être reconnu par le gouvernement fédéral comme réfugié au sens de la Convention de Genève, 2) être reconnu par le gouvernement du Québec comme une personne en situation de détresse décrite à l’article 18 c) iii du Règlement sur la sélection des ressortissants étrangers, 3) être sélectionné par le Québec (MIDI, 2011a). Dans la dernière décennie, les réfugiés parrainés par des groupes privés représentaient environ 10 % du nombre total de réfugiés admis au Canada (Grisales et al., 2016). Au Québec, en 2015, le nombre de réfugiés parrainés s’élevait à 4 600 personnes, ce qui représentait 60 % du nombre total de réfugiés admis (MIDI, 2016a). Ce pourcentage peut varier de manière importante d’une année à l’autre en fonction des engagements de nos gouvernements.

1.4.1.3 Les réfugiés reconnus sur place

Les réfugiés reconnus sur place sont également des immigrants appartenant à la catégorie des réfugiés et des personnes en situation semblable. Le gouvernement du Canada leur a accordé l’asile alors qu’ils se trouvaient déjà au Québec (MIDI, 2011a). Ce pourcentage peut varier d’une année à l’autre, mais environ 50 % des demandeurs d’asile qui se trouvent sur le territoire canadien obtiendront le statut de réfugié (Lacroix, 2004). L’autre moitié d’entre eux devront retourner dans leur pays. À titre indicatif, entre le 1er janvier et le 31 juillet

2017, 21 695 demandes d’asile ont été déposées au Canada. Parmi ces demandes, il y en avait 7 950 en provenance du Québec, soit 36,6 % (MIDI, 2017). Il faut toutefois préciser qu’il y a eu une augmentation considérable des demandes d’asile déposées au Québec à partir de 2017 comparativement aux dernières années.

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1.4.2 Quelques chiffres

En 2015, la province de Québec a accueilli 49 024 immigrants. De manière générale, l’immigration québécoise admise en 2015 est plutôt jeune, 66,5 % des immigrants sont âgés de moins de trente-cinq ans et elle se partage à peu près également entre les hommes (49,2 %) et les femmes (50,7 %) (MIDI, 2016a).

Des 49 024 immigrants accueillis dans la province en 2015, 15,5 % d’entre eux se retrouvaient dans la catégorie des réfugiés et des personnes en situation semblable (MIDI, 2016a). Comparativement à l’année 2014, en 2015, un nombre supérieur d’immigrants, soit 2 749 personnes, a été recensé dans la catégorie des réfugiés et des personnes en situation semblable (MIDI, 2016a). Des 7 610 personnes réfugiées qui ont été admises au Québec en 2015, 36 % ne connaissaient ni le français ni l’anglais, 32 % connaissaient seulement l’anglais alors que 32,1 % connaissaient le français.

En ce qui concerne la ville de Québec, entre 1970 et 1990, elle a accueilli beaucoup de réfugiés indochinois principalement en provenance du Vietnam. Dans les années 1990, les réfugiés étaient majoritairement originaires de l’Ex-Yougoslavie et de la région des Grands Lacs africains. Les années 2000 ont été marquées par l’arrivée de réfugiés originaires de la Colombie et de l’Afghanistan. De 2010 à 2015, ce sont les réfugiés originaires du Népal, du Bhoutan, du Burundi, du Congo et de la République centrafricaine qui ont été les plus nombreux à se voir réinstaller dans la Capitale-Nationale (CMQ, 2015; Grisales et al., 2016). Entre le 1er juillet

2014 et le 30 juin 2015, 325 d’entre eux ont été réinstallés dans la ville de Québec.

Bien que l’immigration ne cesse d’augmenter depuis les dernières années, la région métropolitaine de recensement de Québec est encore peu diversifiée au plan ethnique et culturel (Lessard et Echraf, 2009). En 2016, dans la ville de Québec, la population immigrante représentait 7,2 % de la population totale, comparativement à 4,5 % en 2006 (Statistique Canada, 2017, Lessard et Echraf, 2009). En 2006, il y avait 44,3 % de personnes issues des minorités racisées au sein de la population immigrante (Lessard et Echraf, 2009). Les personnes noires étaient les plus représentées avec 28,5 % (Lessard et Echraf, 2009). La politique québécoise en matière d’immigration, de participation et d’inclusion du Québec précise que le terme « minorité racisée » fait référence à un « regroupement de personnes cibles du racisme et d’un processus de “racisation”, c’est-à-dire, l’attribution d’une signification raciale, biologique, à des différences culturelles » (MIDI, 2016c). Selon la définition présentée dans la politique québécoise d’immigration, les personnes sont catégorisées socialement par leur couleur de peau ou leur apparence physique. Il s’agit ici d’un construit sociopolitique puisque de nombreux scientifiques ont réfuté l’unité de la race sur le plan biologique (MIDI, 2016c).

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Les données recueillies sur l’immigration au Québec et dans la ville de Québec témoignent de la diversité ethnoculturelle sur plusieurs plans : culturelle, linguistique, socioéconomique, provenance géographique et diversité religieuse. Ceci pose certainement des défis de société qu’il faut explorer.

1.5

L’exploration préliminaire

À l’été 2015, j’ai réalisé cinq entrevues individuelles avec des personnes provenant du milieu communautaire et du Centre de santé et de services sociaux de la Vieille-Capitale (CSSSVC) pour connaître les enjeux reliés à l’immigration dans la ville de Québec. Le but de ces entretiens informels était d’établir des orientations de recherche pour le présent mémoire. Les personnes suivantes ont été interrogées : la coordonnatrice du regroupement Familles à Bord!, d’Avenir d’enfants de l’arrondissement Sainte-Foy–Sillery–Cap-Rouge, une intervenante de l’organisme Ressource Espace Familles, une organisatrice communautaire du CSSSVC et deux professionnels du Centre multiethnique de Québec (CMQ), dont un agent de liaison et la coordonnatrice à l’hébergement.

Une grille d’entrevue semi-structurée a été construite avec des questions essentiellement exploratoires. Au total, cinq questions ont été posées à chacune des personnes : 1) Quels sont les enjeux qui concernent l’immigration humanitaire et économique à Québec? 2) Quels sont les besoins exprimés par les immigrants réfugiés et économiques? 3) Quels sont les groupes de personnes immigrantes qui présentent le plus de besoins et quels sont ces besoins? 4) Quels sont les problèmes de santé les plus fréquemment rencontrés par les immigrants réfugiés et économiques? 5) Comment la recherche pourrait-elle appuyer les initiatives communautaires en matière d’immigration?

À la lumière des informations recueillies dans les entrevues préliminaires, de nombreux enjeux ont été identifiés en lien avec les immigrants économiques et les réfugiés. Les personnes interrogées ont discuté des thèmes suivants : les trajectoires migratoires, les conditions de vie, l’exclusion sociale, la santé des réfugiés, l’intervention interculturelle et d’orientations pour la recherche. En ce qui concerne la trajectoire prémigratoire, les professionnels ont mentionné l’importance d’en tenir compte dans l’intervention. Pour les réfugiés, par exemple, ils ont subi des évènements traumatiques qui affectent de façon majeure leur intégration à Québec.

Pendant les entrevues, les personnes interrogées ont mentionné que de nombreux immigrants économiques et réfugiés installés dans la ville de Québec vivent des conditions de vie difficiles. En effet, ils seraient plus susceptibles que les résidents de la ville de Québec à habiter dans des logements insalubres ou surpeuplés, de résider dans des quartiers défavorisés et d’utiliser les comptoirs alimentaires pour se nourrir. Dans les entrevues,

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les personnes réfugiées sont apparues comme vivant des conditions de vie très difficiles marquées par la pauvreté, et ce, dès leur arrivée.

Ces entretiens préliminaires mettent aussi en lumière que les immigrants sont susceptibles de vivre de l’exclusion sociale. En effet, les personnes rencontrées ont également fait état de quelques rapports de pouvoir inégalitaires entre les Québécois et les immigrants. Ils ont rapporté que les immigrants de la ville de Québec vivent de la discrimination et des « abus de vulnérabilité » par certains citoyens. Les informateurs clés rapportaient également d’autres éléments en lien avec les préjugés véhiculés sur les personnes immigrantes.

En ce qui concerne la santé, les intervenants ont rapporté divers problèmes de santé chez les réfugiés et, plus particulièrement, chez ceux issus du Bhoutan, de la Colombie et de l’Afrique. De manière générale, ils arrivent avec des conditions de santé physique et mentale très fragilisées dues aux violences, aux conditions de vie précaires et au faible accès à des soins de santé dans les camps de réfugiés. Après leur réinstallation, l’état de santé mentale des réfugiés est également affecté par les déséquilibres, parfois provoqués par le changement de statut social, la rupture des liens avec les personnes restées au pays, l’isolement, la perte des repères culturels et la précarité financière.

D’autres éléments ressortis des entrevues préliminaires font référence à l’intervention auprès des immigrants. Les personnes interrogées ont rapporté de nombreux enjeux en rapport avec le manque de compétences culturelles des intervenants, la faible qualité des relations thérapeutiques, le peu de services qui leur sont destinés et l’insuffisance des budgets alloués pour l’immigration.

Finalement, en ce qui concerne les pistes d’intervention pour la recherche, les intervenants des entrevues préliminaires ont fait ressortir l’importance de donner la parole directement aux personnes immigrantes. Les entretiens préliminaires témoignent aussi de l’importance de mieux documenter les conditions de vie et les défis reliés à l’intégration des réfugiés.

1.6 Synthèse du premier chapitre

Dans ce premier chapitre, nous nous sommes consacrés aux distinctions entre les différents types de statuts migratoires humanitaires ainsi qu’aux parcours migratoires « typiques » des réfugiés. Les responsabilités fédérales, provinciales et municipales ainsi que quelques données sur l’immigration humanitaire au Québec ont permis de prendre conscience de l’ampleur du phénomène, non seulement à travers la province, mais également dans la Capitale-Nationale.

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D’ailleurs, à la lumière des informations recueillies dans les entrevues préliminaires, de nombreux enjeux reliés à l’immigration dans la Capitale-Nationale ont été identifiés. Le présent mémoire ne pouvait pas couvrir la totalité des préoccupations soulevées par les professionnels rencontrés. Les entrevues préliminaires ont soulevé l’importance de s’intéresser aux réfugiés et au fait qu’ils semblent vivre de l’exclusion sociale, une piste de recherche retenue pour cette étude. Le prochain chapitre a trait à la recension des écrits portant sur les thèmes de cette étude.

(31)

CHAPITRE II : Recension des écrits et problématique

Le présent chapitre présente les résultats de différentes études portant sur l’exclusion sociale des personnes réfugiées au Canada, au Québec et dans le monde. Des recherches utilisant divers devis méthodologiques ont été examinées dans le but de dresser une vision la plus complète possible de la thématique de cette étude. La recension des écrits (français/anglais, publiés en 1996 ou après) inclut des études portant sur la santé des réfugiés réinstallés, leur inclusion sociale, leur exclusion sociale et leurs conditions de vie après leur réinstallation.

Les articles portant sur l’exclusion sociale des demandeurs d’asile et des immigrants économiques ont été exclus de cette recension des écrits, étant donné qu’il ne s’agit pas de la population visée par cette étude. Les articles portant sur les conditions de vie des personnes réfugiées vivant dans les camps de réfugiés n’ont pas été retenus puisque cette recherche s’intéresse aux conditions de vie des réfugiés après leur réinstallation.

Pour effectuer cette recension des écrits, les bases de données suivantes ont été utilisées : Pubmed, Ovid, Web of Science, Sociological Abstracts, Social Sciences Full Text, Academic Search Complete, Google Scholar, Repère, Érudit, Cairn, FRANCIS. Les mots-clés ont été choisis en tenant compte du but de l’étude, soit d’explorer les rapports d’exclusion sociale chez les personnes réfugiées. Le mot français réfugié a été utilisé. Ce mot-clé a été croisé avec réinstallé, inclusion sociale, exclusion sociale, santé, conditions de vie, Canada et Québec. Le mot-clé réfugié a été traduit en anglais par « refugee » et a été jumelé aux mots anglais « resettlement, social inclusion, social exclusion, health, life conditions, Canada et Quebec » dans les bases de données énumérées ci-dessus. Ces premières recherches ont généré plusieurs centaines de résultats. À la seule lecture du titre, la majorité d’entre eux ont été identifiés comme non pertinents et ont été retirés. D’autres articles ont été exclus, à la lecture du résumé.

La liste des titres des thèses et mémoires de l’Université Laval, disponible en ligne, a également été consultée afin de recenser les recherches effectuées dans la ville de Québec auprès des réfugiés. La liste de chacun des ouvrages retenus a aussi été analysée afin de trouver d’autres articles internationaux, canadiens ou québécois pertinents à cette recension des écrits.

La recension des écrits a permis d’identifier de nombreuses difficultés que les personnes réfugiées réinstallées rencontrent au Canada, au Québec et dans d’autres pays, notamment, le fait de vivre de l’exclusion sociale. Certaines études indiquent que les réfugiés vivent de l’exclusion dans certaines activités, comme l’emploi, ou encore qu’ils se heurtent à plusieurs barrières à la suite de leur réinstallation. D’autres études soulèvent les

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considérablement influencer la capacité d’un réfugié à s’adapter à la vie au Canada (Robert et Gilkinson, 2012), mais aussi que l’exclusion sociale a des effets négatifs sur leur santé. Les réfugiés arrivent dans leur nouvelle société avec un état de santé fragilisé par leur parcours migratoire. La première partie de ce chapitre se consacre aux principales conséquences du parcours migratoire sur la santé physique et mentale des réfugiés. La deuxième partie de ce chapitre décrit les principales causes de l’exclusion sociale ainsi que ses répercussions sur les conditions de vie, sur l’accès aux services de santé et sur la santé.

Portrait général des effets de la migration sur l’état de santé

des réfugiés

Les réfugiés ont souvent subi de grandes privations et traumatismes dans leur parcours migratoire qui ont affecté leur santé (Gushulak et al., 2011; Joshi et al., 2013). Les données qui concernent leur état de santé sont limitées, mais les écrits existants rapportent que comparativement aux autres groupes d’immigrants et à la population canadienne, ils ont un risque accru d’être en mauvaise santé (Redditt, Graziano, Janakiram, et Rashid, 2015). En effet, ils ont une espérance de vie moindre, ils présentent des taux de morbidité plus élevés et ils adoptent de moins bonnes habitudes de vie. Les deux prochaines sections présentent des données globales sur la santé physique et mentale des réfugiés réinstallés qui permettent de mieux comprendre les conséquences de leur parcours migratoire sur leur santé.

2.1.1 Les conséquences du parcours migratoire sur la santé physique

La migration a une incidence significative sur la santé physique des réfugiés (Mustafaeva et Shercliffe, 2010). L’abondance des problèmes de santé physique auxquels font face les réfugiés peut être associée à divers facteurs comme les traumatismes vécus avant la migration, le manque de soins de santé dans les camps de réfugiés, la famine, les carences en micronutriments, les maladies et les comportements à risque dans le pays natal (Dhooper et Tran, 1998; Redditt et al., 2015; Sastre et Haldeman, 2015).

Entre 2011 et 2014, une étude s’est penchée sur la prévalence des maladies infectieuses parmi 1 063 patients réfugiés de 87 pays différents d’une clinique pour réfugiés à Toronto. Elle indique que la santé des réfugiés diffère souvent de celle des personnes nées au Canada et des immigrants non-réfugiés (Redditt et al., 2015). Le tableau suivant présente les principaux problèmes de santé auxquels font face les réfugiés.

Références

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