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RELATIONNELS « FORCES » Objectif : amélioration de la

B. Le!degré!de!structuration!des!entretiens!

Trois catégories d’entretiens sont envisageables pour la collecte de discours, selon leur degré de structuration : les entretiens directifs, semi-directifs et non-directifs.

L’entretien semi-directif, dit aussi semi-dirigé ou semi-structuré ou encore centré, est

une méthode qui est construite sur la base de la revue de littérature étudiée, avec à l’appui « un guide structuré pour aborder une série de thèmes préalablement définis » (Baumard & al, 2014). Construit à partir de la littérature, le guide d’entretien traduit les questions de recherche en thèmes et en sous-thèmes, autant de questions à poser aux répondants.

L’entretien non-directif, dit aussi entretien libre ou entretien en profondeur, « se

caractérise par son ouverture et sa souplesse ». « Il est recommandé lorsque l’enquêteur veut appréhender, plutôt que des faits ou jugements précis, des représentations et mobiles, souvent latents : besoins ou motivations, représentations mentales, logiques subjectives, cadre de référence, valeurs sous-jacentes à des motifs explicitement invoqués par un individu » (Gavard-Perret & al, 2012a).

L’entretien directif, dit aussi standardisé, s’apparente au questionnaire à questions

ouvertes (Gavard-Perret & al, 2012a).

Le degré d’intervention du chercheur est inversement proportionnel à la profondeur d’exploration désirée, comme le montre le schéma ci-après :

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La problématique étant générale et espérant faire émerger des thèmes originaux, il n’est pas envisageable de construire un véritable guide d’entretien uniquement à partir de la littérature. En effet, si se tourner vers la littérature est utile, « cela peut nuire à l’identification en nous incitant à comprendre quelque chose en termes d’idées établies » (MacInnis, 2011).

Nous préférons laisser les entretiens se faire sans direction pour ne pas privilégier les

concepts étudiés dans la revue de la littérature et ne pas condamner d’autres pistes

que nous n’aurions pas envisagées et qui permettraient de mettre à jour les processus à l’œuvre dans la formation des bénéfices relationnels attendus.

Nous pensons en effet que les données auront une chance d’être nouvelles si elles sont les plus libres possibles, pour permettre aux « propres questions de l’enquêté » de devenir « le véritable objet de recherche » (Blanchet & Gotman, 2015). Ce renversement

méthodologique du couple question-réponse est issu des méthodes cliniques dont Jean

Piaget (1926) donne une description : « l’art du clinicien consiste, non à faire répondre, mais à faire parler librement et à découvrir les tendances spontanées au lieu de les

canaliser et de les endiguer. Il consiste à situer tout symptôme dans un contexte mental,

au lieu de faire abstraction du contexte ».

Précisément situées dans leur contexte indispensable à leur interprétation, les données seront susceptibles de nous faire accéder aux conceptions personnelles des interviewés (Blanchet & al, 1995).

Bien qu’elle nous semble la plus adaptée à notre sujet, il faut savoir que la méthode de l’entretien non-directif reste assez peu utilisée en gestion (Gavard-Perret & al, 2012a). Après une entame généraliste, à convenir avec le partenaire bancaire, il s’agit de laisser les répondants s’exprimer le plus librement possible, de manière non-directive, en pratiquant silences, relances et demandes d’approfondissements.

La problématique, à laquelle nous cherchons à répondre, détermine le type de données recherchées, ici les faits de parole : le domaine sur lequel portent ces faits de parole concerne en premier lieu des pensées construites qui portent elles-mêmes sur des

représentations, et de manière accessoire de faits expérimentés concernant des pratiques.

Le degré de structuration des entretiens le plus approprié à cette collecte est le type non-

directif avec une entame généraliste.

C. Les!précautions!à!prendre!lors!de!la!collecte!

Il faut noter la présence d’écrans (Pellemans, 1999) et de systèmes de défense (Blanchet & Gotman, 2015).

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Ecran psychologique Description L’écran de la

conscience

Les individus sont souvent inconscients de leurs propres attitudes et motivations ; ils ne peuvent, par conséquent, fournir les

informations sollicitées.

L’écran d’irrationalité Notre culture accorde une crédibilité élevée au comportement logique. La plupart du temps, les individus rationalisent a posteriori tous les événements dont ils sont les témoins ou les auteurs, y compris ceux dont les fondements sont loin d’être rationnels. L’écran de tolérance Tout individu est confronté à certaines normes et attentes qui sont

émises dans le milieu dans lequel il vit. En outre, tout manquement à ces règles est sanctionné. Ceci engendre, dès lors, un vague sentiment de culpabilité, vis-à-vis duquel la personne interrogée cherche à se justifier.

La barrière de politesse Les individus répugnent à dire des vérités passant pour trop désabusées ou trop critiques. Ils ont tendance à exprimer des pensées ou des sentiments socialement acceptables.

Tableau 28 - Ecrans psychologiques (Pellemans, 1999)

L’existence de ces écrans abonde dans le sens du choix d’entretiens non-directifs : comme on ne pose pas de question, on limite les signaux de désirabilité sociale, et l’idée qu’on attend quelque chose du répondant.

Blanchet & Gotman (2015) estiment que la « profondeur » du discours recueilli atteint « le niveau sinon inconscient en tout cas latent », justifiant que l’intervieweur se trouve en présence d’un système de défense qu’il est de sa compétence de circonvenir ».

Les systèmes de défense sont de deux types et regroupés dans le tableau ci-dessous :

Système de défense Description

L’objectivation Lorsqu’il parle, l’interviewé ne livre pas un discours déjà constitué mais le construit en parlant, opérant une transformation de son expérience cognitive, passant du registre procédural (savoir-faire) au registre déclaratif (savoir-dire). Les faits existent en tant que réalité vécue, mais le discours explicite ce qui n’était encore qu’implicite, ce qui jusqu’ici allait de soi, il extériorise ce qui était intériorisé, passant de l’insu au dit. L’individu s’expose : il peut vouloir reculer autant devant la nouveauté de ses propos que devant leur incongruité. La régionalisation Toutes les représentations ne sont pas formulables n’importe où ni

en n’importe quelles circonstances. Elles sont structurées en régions plus ou moins étanches et hiérarchisées.

Tableau 29 - Systèmes de défense (Blanchet & Gotman, 2015)

A contrario de ces écrans et systèmes de défense, Blanchet & Gotman (2015) relèvent qu’« un nombre croissant d’interviewés potentiels est d’ores et déjà préparé, dans le monde occidental, au rôle de répondant, que ce soit à l’école, au travail ou par les mass medias. La perception des rôles sociaux endossés par chacun des protagonistes de l’entretien ne biaise pas le processus de connaissance mais l’informe ».

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En ayant à l’esprit les précautions à prendre en lien avec l’existence d’écrans et de systèmes de défense chez les répondants, passons en revue les caractéristiques des études qualitatives et veillons à les respecter.