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Le contexte organisationnel d’intervention

Chapitre 2 : Revue de la littérature et propositions théoriques

2.3 Le contexte organisationnel d’intervention

Avant de présenter les éléments qui définissent le contexte organisationnel d’intervention dans un système de soins, il est important de rappeler qu’un système de soins peut être perçu comme un système organisé d’action qui résulte du jeu d’acteurs qui, dans un champ social donné et dans un environnement déterminé, interagissent pour mobiliser et utiliser des ressources afin de produire des activités, des biens ou des services nécessaires à la

concrétisation de leurs objectifs et de leurs projets collectifs (Rocher 1972; Freidberg 1993; Bourdieu 1994; Contandriopoulos, Champagne et al. 2000).

Propres à chaque système de soins, donc à chaque pays, les facteurs organisationnels contextuels permettent une analyse plus réaliste des politiques de financement et de leur influence sur la performance des systèmes de soins (Aucoin 2007; OMS 2008). L’hypothèse qui serait généralement faite est que les facteurs contextuels interagissent avec la politique de financement pour influencer la performance des systèmes. Les éléments de contexte organisationnel peuvent être subdivisés en deux grandes catégories : les facteurs contextuels organisationnels non sanitaires et les facteurs organisationnels sanitaires.

2.3.1 Les facteurs contextuels organisationnels non sanitaires

Les facteurs démographiques, politiques, macroéconomiques et financiers, les progrès scientifiques et technologiques, l’inégalité sociale et de société, les valeurs sociales et les facteurs environnementaux sont les principaux éléments organisationnels non sanitaires qui semblent influencer toute politique publique mise en place dans un pays (OCDE 2008). D’après l’OCDE (2008), la dimension démographique pourrait être définie par les indicateurs tels le taux de croissance de la population, le taux de fécondité, la distribution de la population nationale en régions urbaines, intermédiaires et rurales, le pourcentage des personnes âgées par pays, le pourcentage de la population de plus de 65 ans dans la population totale. Ensuite, la dimension politique pourrait être caractérisée par la gouvernance et la décentralisation politico-administrative du pays. Selon Jean Louis Denis (2002), la gouvernance se rapporte aux systèmes et aux pratiques qui permettent aux acteurs de développer une représentation plausible de leur devenir, de concevoir et implanter des stratégies efficaces de changement et de s’appuyer sur des valeurs productrices de confiance et de solidarité (Aggeri and Hatchuel 1999; Hatchuel 2000; Denis

2002). Pour sa part, la décentralisation politico-administrative fait référence au délaissement du pouvoir par les autorités centrales aux autorités régionales ou locales. Par ailleurs, la dimension macroéconomique et financière serait déterminée par les indicateurs de comptabilité nationale tels : la richesse (PIB) par tête et le revenu national brut par personne pour l’évolution macroéconomique ; le besoin ou la capacité de financement pour les finances publiques ; le taux d’épargne des ménages pour la croissance économique ; la valeur ajoutée dans les services publics pour la structure économique ; la balance économique et des services pour la mondialisation économique ; la rémunération du travail par salariés pour l’économie totale.

Les progrès scientifiques et technologiques pourraient être caractérisés par le taux de dépenses intérieures brutes en recherche et développement, la part des investissements en TIC (Technologie de l’information et communication) et aussi l’accès à un ordinateur et à internet. Quant aux inégalités sociales et de société, elles pourraient être identifiées par les indices suivants : le taux d’emploi (hommes et femmes) ; le différentiel hommes-femmes actifs ; le taux de chômage (hommes et femmes) ; le différentiel hommes-femmes ; la disparité de la densité de la population ; l’indice de Gini des disparités régionales du PIB ; l’indice de Gini des inégalités de revenu ; l’inactivité des jeunes de 15 à 19 ans non scolarisés en termes de différentiel garçons-filles ; le pourcentage de la population vivant dans les régions dont le PIB par habitant est inférieur à la moyenne nationale ; le pourcentage de la population active vivant dans les régions à chômage élevé ; l’indice de la concentration géographique des personnes âgées et la proportion de la population âgée inactive de plus de 65 ans par rapport à la population active. De plus, les valeurs sociales et l’idéologie politique sont des facteurs qui influencent l’acceptabilité d’une politique publique (Pineault and Daveluy 1995). Les principales valeurs qui régissent dans les sociétés démocratiques sont l’équité, l’efficience et la liberté individuelle

(Contandriopoulos 1999). Il serait donc capital de les prendre en compte afin de comprendre la position idéologique des acteurs dans le système politique (Donabedian 1973; Blondel 1990; Walt 1994). Enfin, les facteurs environnementaux (air et sols) caractérisés par la quantité de gaz carbonique CO2 (en tonnes) émise dans le pays et

l’intensité de production des déchets municipaux (tonnes) sont des éléments importants à prendre en compte dans l’analyse du financement sur la performance des systèmes de soins.

Tous ces facteurs interagissant ensemble semblent assez indispensables dans l’explication fine du lien existant entre le financement des soins et la performance du système de soins qui en découle. Dans son rapport, Aucoin (2007) indique qu’il faudrait mettre l’accent sur le contexte budgétaire du pays, ses valeurs et son idéologie politique, les inégalités sociales, la décentralisation politico-administrative et la structure démographique de la population pour analyser en profondeur une politique de financement des soins de santé.

2.3.2 Les éléments caractéristiques du contexte organisationnel sanitaire

Les éléments caractéristiques du contexte organisationnel sanitaire sont étroitement liés au système de soins. En plus des croyances (structure symbolique), des lois et règlements (structure organisationnelle), tout système de soins est constitué d’un ensemble de ressources humaines, financières, technologiques et matérielles (structure physique) qui influencent sa performance (Contandriopoulos, Champagne et al. 2000). Ces ressources peuvent être focalisées vers les services spécialisés de la médecine ou vers les services de première ligne. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), les services de première ligne représentent des services de premier niveau universellement accessibles assurés avec la pleine participation de la collectivité et offerts à un coût raisonnable. Ces services comprennent : la promotion de la santé ; la prévention des maladies ; les services

diagnostiques, curatifs, de réadaptation, de soutien et palliatifs (FCRSS 2001). Cette définition de l’OMS (2008) est utilisée non pas pour exclure les modes d’organisation des services de première ligne n’intégrant pas tous ces aspects, mais pour inclure ceux qui affichent au moins une des caractéristiques susmentionnées.

Selon l’OMS (2008), le niveau de spécialisation (versus la médecine générale ou de

première ligne), et le niveau d’institutionnalisation (versus ambulatoire) du système de

soins constituent les deux leviers d’action qui pourraient permettre de décrire clairement le contexte organisationnel sanitaire des pays. Le degré de spécialisation renseigne sur la façon dont les ressources et les services sont spécialisés dans le système. On l’oppose généralement au niveau de médecine générale. Le degré d’institutionnalisation représente la capacité du système de soins à fournir des services dans une institution ou un établissement de santé. Le caractère institutionnel s’oppose au caractère ambulatoire, autrement dit à la volonté du système d’offrir des soins et services en ambulatoire. Les soins « ambulatoires » ou « de ville », ou soins « hors hospitaliers » se distinguent des soins offerts à des patients admis dans toute institution sanitaire (hôpital).