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Conscience ordinaire

3.1. La transe spontanée :

La transe spontanée apparaît dans certaines circonstances. C'est un phénomène naturel que l'on expérimente tous au cours de la journée. Par exemple, lorsque nous conduisons sur une route monotone, nous nous rendons compte à posteriori que pendant un instant nous étions « ailleurs », « dans nos rêves ». L'expression « dans la lune » exprime bien cet état. Le temps semble être passé vite, et nous ne nous souvenons pas de nos pensées pendant ce moment. De même, en regardant un film passionnant, nous arrivons à faire abstraction de tout ce qui nous entoure si on adhère complètement au scénario, en oubliant l'heure, nos soucis... Nous sommes alors dissociés du monde extérieur, vivant une amnésie passagère sur le reste de la réalité.

Cette transe est la conséquence de la focalisation volontaire très intense de notre attention qui n'analyse alors qu'une partie d'une situation ou qu'une seule idée en ignorant le reste. Nous sommes concentrés et donc plus à même de percevoir, d'apprécier un événement. Plus la focalisation sera étroite, plus la transe sera intense et moins nous capterons ce qui se passe autour de nous. Mais si un danger survient, nous reviendrons aussitôt en conscience critique. Elle est immédiatement réversible, nous protégeant ainsi. Elle permet la mémorisation de nos apprentissages et donc de nous adapter plus facilement à des situations nouvelles ou imprévues (Virot, 2002 ; Virot, 2008 ; Michaux et al., 2007 ).

F. Roustang, philosophe et hypnothérapeute français reconnu du début du XXème siècle, parle d' « hypervigilance focalisée ». Les termes de « rétrécissement du champ de conscience » ou « dépotentialisation

de la conscience » peuvent être aussi utilisés, mais semblent moins adaptés (Benhaiem, 2005 ; Benhaiem, 2012).

Au quotidien, l'alternance de la transe spontanée et de la conscience critique est fondamentale à notre équilibre. Les échanges sont extrêmement rapides et nos réflexes sont conservés.

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Ici, la conscience virtuelle ou imaginaire prédomine. Ce fonctionnement mental peut être positif ou, au contraire, négatif voire douloureux.

En transe spontanée positive ou créative, nos pensées sont agréables (souvenirs d'un voyage, bruit de la mer, sensation de bien-être...). Nous pouvons rêver éveillés, ressentant du confort, de la sécurité et du plaisir. La conséquence physique est bénéfique : décontraction musculaire, détente, respiration calme, rythme cardiaque régulier dus à une activation importante du système para-sympathique. Une augmentation du seuil de la douleur a été observée, ce qui signifie que le patient sera moins douloureux, moins sensible. Le système ortho-sympathique est, quant à lui, diminué. Cet état facilitera le soin, la prise en charge du patient et donc sa guérison (Virot, 2010 ; Virot, 2013).

A l'inverse, en transe négative ou d'alerte, les pensées sont désagréables et les émotions correspondent à de la colère, de l'anxiété, de la peur, de la culpabilité... Elles sont dues à la perception d'informations de danger réel ou imaginaire (déformation de la réalité selon le vécu). Contrairement à la transe positive, le système ortho- sympathique est principalement activé. Les conséquences sont de la tension musculaire, une respiration saccadée, un rythme cardiaque accéléré... Le seuil de la douleur est diminué, ce qui signifie que le patient sera plus algique à un soin. Il ressent de l'inconfort et de l'insécurité rendant la prise en charge plus difficile pour le praticien et pénible pour le malade. Ce type de transe, qui peut s'amplifier et devenir permanente, apparaît lorsque nous sommes confrontés à une difficulté, à un imprévu ou à une situation stressante comme, par exemple, un rendez-vous chez le dentiste chez un patient anxieux. Dans cette situation, le cerveau indique trois façon de réagir pour se protéger : la fuite, la lutte (contre la peur en se raisonnant, ce qui est possible si la transe négative est modérée, ou contre le dentiste qui représente la menace) et enfin la paralysie ou l'immobilité. La mémorisation du patient se trouve également modifiée : il ne retient que ce qui est négatif, ce qu'il craint.

Il est donc important de reconnaître cet état négatif pour en faire sortir le patient et le ramener dans une transe spontanée positive, afin de réaliser les soins futurs dans un contexte favorable.

En résumé, chaque personne passe quotidiennement de la conscience critique à la transe positive et inversement, que ce soit dans la vie professionnelle ou personnelle. Ces échanges sont fluides et rapides.

Lors de situations compliquées, l'alternance s'effectue plutôt entre la conscience critique permettant de réfléchir et la transe négative amplifiant le problème à cause des émotions qui prennent peu à peu le dessus.

Pour sortir le patient de ses pensées négatives, il faut le ramener en conscience critique pour qu'il ne se focalise plus sur celles-ci, et le diriger ensuite vers une transe positive. Ce passage est plus lent et plus compliqué mais essentiel au bon déroulement du soin (Virot et Bernard, 2010 ; Bernard et Musellec, 2013 ; Michaux et al., 2006 ; Roustang, 2005 ; Bernheim, 2013).

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La transe spontanée est un phénomène banal que l'on veut exploiter et potentialiser au cours d'une séance d'hypnose. Le but est d'amener le patient dans un état de transe thérapeutique et ainsi de l'orienter de manière plus précise vers sa réalité intérieure pour engendrer le changement recherché et préalablement établi en collaboration avec lui.