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La relativisation de la légitimité démocratique du juge

TITRE I : LE DÉPASSEMENT DU TEXTE :

CHAPITRE 1 : LE REFUS DU FORMALISME

B. La relativisation de la légitimité démocratique du juge

134. Une large part de la doctrine constitutionnelle semble aujourd’hui convaincue de la

légitimité indiscutable du juge, qui s’éprouve toujours in fine à la lumière des canons de la démocratie. Lorsque cette question est posée en effet, elle est souvent tranchée en faveur du maintien, voire du développement de la justice constitutionnelle. Le droit politique n’en est pas, pour sa part, un défenseur privilégié, même s’il ne dispute pas systématiquement aux cours constitutionnelles le bénéfice de leur légitimité. Au moins estime-t-il nécessaire de s’interroger sur ce sujet435. Éclairer sa position sur le sujet suppose donc d’examiner tour à tour les différents arguments évoqués à ce titre par la doctrine en général, pour mieux saisir la spécificité de la posture juspolitiste. La légitimité de l’interprétation constitutionnelle est souvent articulée autour de deux arguments : elle découlerait d’abord de la Constitution elle-même, et de l’autorité indiscutable du pouvoir constituant qui la sous-tend (1). Elle peut également être associée à la fonction juridictionnelle, qui serait en tant que telle garante des intérêts démocratiques (2).

434

Le philosophe écrivait ainsi que « les Américains ont […] confié à leurs tribunaux un immense pouvoir politique ; mais en les obligeant à n’attaquer les lois que par des moyens judiciaires, ils ont beaucoup diminué les dangers de ce pouvoir ». Anticipant l’avènement d’un pouvoir d’abrogation des lois, Tocqueville ajoutait : « si le juge avait pu attaquer les lois d’une façon théorique et générale ; s’il avait pu prendre l’initiative et censurer le législateur, il fût entré avec éclat sur la scène politique ; devenu le champion ou l’adversaire d’un parti, il eût appelé toutes les passions qui divisent le pays à prendre part à la lutte. Mais quand le juge attaque une loi dans un débat obscur et sur une application particulière, il dérobe en partie l’importance de l’attaque aux regards du public. Son arrêt n’a pour but que de frapper un intérêt individuel ; la loi ne se trouve blessée que par hasard », A. de Tocqueville, De la démocratie en Amérique I,

1835, Chap. VI, Paris : Gallimard, coll. Bibliothèque de la Pléiade, 1992, p. 113-114.

435

O. Beaud, « Avant-propos », in R. Baumert, La découverte du juge constitutionnel, entre science et

politique : les controverses doctrinales sur le contrôle de la constitutionnalité des lois dans les républiques française et allemande de l’entre-deux-guerres, Clermont-Ferrand : Fondation Varenne, Paris : LGDJ, coll.

118

1. L’argument limité de l’habilitation constitutionnelle

135. Le premier fondement de la légitimité de la justice constitutionnelle semble reposer

dans le texte de la Constitution lui-même et sur la souveraineté démocratique dont il est le fruit : si le juge est bien légitime, c’est d’abord parce qu’il a été voulu par le peuple constituant436. Mais, comme le souligne Michel Troper, cet argument semble insuffisant à propos d’une institution dont la légitimité est aussi controversée que celle du Conseil constitutionnel437. D’ailleurs, ce constat préalable ne présage en rien du monopole herméneutique qui est habituellement reconnu au juge par la doctrine, dès lors que les Constitutions elles-mêmes n’en font pas mention, sauf rares exceptions438. C’est donc non dans son origine, mais dans les modalités de sa compétence qu’il faut chercher les fondements éventuels de la prévalence du juge en matière d’interprétation constitutionnelle.

136. Le père du modèle européen de justice constitutionnelle, Hans Kelsen, a apporté

quelques bribes de réponse en étudiant spécifiquement l’interprétation des énoncés juridiques. Admettant sa nécessité au stade de l’application du droit, le maître autrichien a réservé le bénéfice de l’interprétation « authentique »439

aux autorités habilitées par une norme à créer d’autres normes : l’interprète authentique est « […] l'organe juridique qui a compétence d'après l'ordre juridique pour appliquer le droit »440. L’absence d’habilitation expresse d’un interprète peut donc être compensée par la nécessité qu’il rencontre de

436

En effet, « de par le postulat du constitutionnalisme, […] la jurisprudence du Conseil constitutionnel ne serait pas, et ne serait pas ce qu’elle est, si la Constitution du 4 octobre 1958, révisée en 1974 et 2008, n’avait pas posé son existence, ses compétences, le mode désignation de ses membres », J.-M. Denquin, « Remarques sur la situation du droit constitutionnel en France », RDP n° 6, 2014, p. 1480.

437

M. Troper, « Argumentation et explication », Droits n° 54, 2011, p. 3.

438

On note par exemple en Espagne l’article 1er, alinéa 1er, de la Loi organique 2/1979 du 3 octobre 1979, relative au Tribunal constitutionnel, qui dispose que « le Tribunal constitutionnel, en tant

qu'interprète suprême de la Constitution, est indépendant des autres organes constitutionnels et soumis

exclusivement à la Constitution et à la présente loi organique ».

439

Il existe en effet dans la pensée de Kelsen, une différence fondamentale entre interprétation authentique – qui comporte un acte de volonté – et interprétation scientifique qui, ne produisant pas de normes, n’est jamais qu’une opération de connaissance : H. Kelsen, « Titre VIII : L’interprétation », in

Théorie pure du droit, trad. C. Eisenmann, Paris : LGDJ, Bruxelles : Bruylant, coll. La pensée juridique,

1999, p. 335-342. Paul Amselek résume la thèse de Kelsen comme « […] une grande distinction entre l’interprétation authentique – en quelque sorte officielle, appelée à faire autorité – effectuée par les organes d’application du droit (c’est-à-dire les organes habilités à édicter des normes juridiques sur la base de normes juridiques supérieures qu’ils sont chargés de mettre en œuvre) et l’interprétation non authentique opérée par ceux qui ont simplement à « obéir » aux normes juridiques, ainsi que par la science du droit qui étudie les normes juridiques », P. Amselek, « L’interprétation dans la Théorie pure du droit de Hans Kelsen », in Interpretatio non cessat. Mélanges en l'honneur de Pierre-André Côté, Cowansville (Québec) : Éd. Yvon Blais, 2011, p. 40.

440

H. Kelsen, Théorie pure du droit, trad. C. Eisenmann, Paris : LGDJ, Bruxelles : Bruylant, coll. La pensée juridique, 1999, p. 342.

119 préciser le sens d’un énoncé en vue de le mettre en œuvre. Dans cette perspective, rien ne semble donc distinguer le pouvoir herméneutique du juge constitutionnel, chargé d’appliquer la Constitution lors d’un contrôle de constitutionnalité, d’un organe comme le Parlement, qui l’applique également lorsqu’il adopte une loi441

.

137. Peu convaincu de la portée juridique d’un texte trop éthéré, Michel Troper a

substitué au critère de l’habilitation, celui de l’absence de recours possible : l’authenticité renvoie alors au « […] caractère d'une interprétation, qui ne peut être juridiquement contestée et qui est la seule à laquelle le droit positif attache des conséquences juridiques »442. Dans cette perspective également, il faut donc conclure que le juge n’est pas seul interprète authentique de la Constitution443. Le droit constitutionnel français illustre d’ailleurs clairement la possibilité qu’il existe une pluralité d’interprètes puisque, si « les décisions du Conseil constitutionnel ne sont susceptibles d’aucun recours »444, il en va de même de nombreux actes établis notamment par le Président de la République445.

138. Malgré des soutiens théoriques convergents, qui aboutiraient à considérer

également les interprétations livrées par divers pouvoirs constitués, la doctrine juridique démontre un attachement persistant à la thèse de la primauté de la compétence juridictionnelle en la matière. Le juge disposerait en effet d’une légitimité supérieure qui lui confèrerait une habilitation presque naturelle. À titre d’exemple, Marie-Anne Cohendet distingue soigneusement les interprétations juridictionnelles des interprétations présidentielles, pour mieux déconstruire la légitimité des secondes face aux premières. Elle écrit ainsi que, « contrairement à ce qu'a pu laisser penser la pratique, le président

441

Pour Kelsen en effet, toute création d’une norme – en l’occurrence une loi – est aussi une opération d’application d’une norme supérieure, habilitante, et suppose donc une interprétation authentique : « […] la norme de degré supérieur n’a jamais, dans son rapport avec l’acte de création de normes ou d’exécution matérielle qui l’applique, que le caractère d’un cadre à remplir par cet acte. Même l’ordre ou commandement qui entre aussi avant que possible dans les détails doit abandonner à celui qui l’exécute le soin d’effectuer par lui-même quantité de déterminations », ibid., p. 336.

442

M. Troper, « Justice constitutionnelle et démocratie », RFDC n°1, 1990, p. 36.

443

Michel Troper dénonce en ce sens le fait que seule l’interprétation délivrée par un juge soit considérée au titre du droit. Cela « […] méconnaît ainsi le caractère collectif de l’interprétation. En réalité, toutes les autorités chargées d’appliquer la constitution l’interprètent et la recréent de concert. Cela ne signifie évidemment pas que l’interprétation est toujours unanime, mais seulement que le sens de chacune des dispositions de la constitution – et de celle-ci dans sa totalité – est la résultante des interprétations qui s’exercent sur elles », M. Troper, « Le problème de l’interprétation et la théorie de la supralégalité constitutionnelle », in Pour une théorie juridique de l’État, Paris : PUF, coll. Léviathan, 1994, p. 313-314.

444

Alinéa 3 de l’article 62 de la Constitution du 4 octobre 1958.

445

Michel Troper l’admet d’ailleurs expressément : « est ainsi authentique l’interprétation […] que donne de la Constitution un juge constitutionnel ou un chef de l’État, dans les hypothèses où il n’existe pas de voie de recours contre ses actes », M. Troper, « Justice constitutionnelle et démocratie », RFDC n°1, 1990, p. 36.

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n'est en aucun cas habilité par la Constitution à délivrer une interprétation authentique du texte constitutionnel »446 tandis que « […] seul le juge peut donner une interprétation authentique du texte »447. C’est donc dans sa nature juridictionnelle que résiderait le pouvoir de l’interprète, notamment parce que celle-ci serait garante d’une plus grande neutralité, d’une meilleure juridicité que pourrait en manifester n’importe quel pouvoir « politique »448. On ne peut à cet égard que remarquer l’argument éminemment prescriptif alors à l’œuvre, l’autorité privilégiée reconnue à l’interprétation constitutionnelle relevant davantage de la pétition de principe que de la description du droit positif.

139. Même en l’absence d’habilitation – expresse ou implicite – conférant au juge un

monopole en matière d’interprétation authentique, l’autorité de ses décisions, consacrée par le texte constitutionnel, est parfois reçue en doctrine comme le moyen de fonder malgré tout la légitimité supérieure de l’interprétation juridictionnelle. En France, l’article 62 de la Constitution prévoit notamment que « les décisions du Conseil constitutionnel ne sont susceptibles d’aucun recours. Elles s’imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles ». Habituellement, cette disposition est entendue comme conférant aux décisions du juge l’autorité de la chose jugée449

. Celle-ci se définit le plus souvent par référence à la notion civiliste selon laquelle « l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité »450. C’est donc une triple identité, de cause, d’objet et de parties, qui constitue l’autorité de la chose jugée, quoique la dernière condition soit inopérante au vu de la portée absolue que revêt le contrôle de constitutionnalité des lois451. Cette lecture circonscrite de l’article 62

446

M.-A. Cohendet, Le président de la République, Paris : Dalloz, coll. Connaissance du droit, 2e éd., 2012, p. 62.

447

Ibid.

448

« Il y a – écrit Michel Troper à ce propos – dans l’idéologie commune une opposition entre la politique, vue comme partisane, passionnée, sale, et la juridiction, activité sereine, neutre, impartiale, juste. Sans peut-on y voir un effet de contamination du terme même de « justice », qui sert à désigner à la fois l’appareil judiciaire, l’activité juridictionnelle et une valeur morale », M. Troper, « Fonction juridictionnelle ou pouvoir judiciaire ? », Pouvoirs n° 16, 1981, p. 8.

449

C’est à tout le moins ce que reconnaissent les juridictions elles-mêmes, qui sont les premières concernées. Marc Guillaume invoque ainsi « l’assimilation, par le Conseil constitutionnel, de l’autorité de ses décisions à celle de la chose jugée […] », et affirme que « le Conseil constitutionnel, le Conseil d'État et la Cour de cassation font une interprétation restrictive de l'article 62 de la Constitution en assimilant l'autorité des décisions du Conseil à l'autorité de la chose jugée » ; M. Guillaume, « L’autorité des décisions du Conseil : vers de nouveaux équilibres ? », Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel n° 30, janvier 2011, p. 49-50.

450

Article 1355 du Code civil.

451

Ainsi, selon Xavier Magnon, « l’exigence d’une identité de parties est en général exclue en raison du caractère objectif du contentieux de constitutionnalité et de l’effet erga omnes de la décision de censure du

121 de la Constitution ne présage donc en rien de l’autorité de l’interprétation constitutionnelle délivrée par le juge.

140. L’ensemble de la doctrine constitutionnelle ne se contente cependant pas d’admettre

l’autorité de la chose jugée, mais entend accorder également au juge le bénéfice de l’autorité de la chose interprétée : la Constitution reconnaîtrait, en même temps que l’autorité des décisions, celle des interprétations rendues par le juge452

. Cet argument se fonde le plus souvent sur une jurisprudence du Conseil constitutionnel lui-même qui avait déclaré que l’autorité de ses décisions « […] s'attache non seulement à leur dispositif, mais aussi aux motifs qui en sont le soutien nécessaire et en constituent le fondement même »453. L’interprétation constitutionnelle livrée au soutien d’une décision bénéficierait ainsi de la même valeur que la décision elle-même. Pourtant, et contrairement à ce qu’affirment divers auteurs454

, cette affirmation du Conseil constitutionnel ne saurait fonder effectivement l’autorité de son interprétation, puisqu’elle relève elle-même de son interprétation455. Ce serait « […] poser au point de départ du raisonnement la proposition qu’il faut démontrer »456

.

141. À cette conception maximale457 de l’autorité de la chose interprétée des décisions du Conseil constitutionnel, continue de s’opposer une conception minimale, normativiste,

juge constitutionnel. […] La condition liée à l’identité de parties n’a pas de raison d’être dans le contentieux de constitutionnalité et n’est d’ailleurs pas exigée par le Conseil constitutionnel », X. Magnon, « Sur un pont-aux-ânes ? L’autorité des décisions du Conseil constitutionnel, pour une distinction entre « autorité » et « force » de chose jugée », RFDA n° 4, 2013, p. 862.

452

Bertrand Mathieu estime par exemple que « l’article 62 […] peut être analysé comme étendant […] l’autorité de ces décisions à la chose interprétée » ; B. Mathieu, « Pour une reconnaissance de l’« autorité de la chose interprétée » par le Conseil constitutionnel », D., 2003, p. 1508.

453

CC, Décision n° 62-18 L du 16 janvier 1962, Nature juridique des dispositions de l'article 31 (alinéa

2) de la loi n° 60-808 du 5 août 1960 d'orientation agricole, Rec. p. 31, cons. 1.

454

Ainsi Pierre Pactet et Ferdinand Mélin-Soucramanien écrivent-ils : « […] le fait que l’autorité des décisions s’attache à la fois aux motifs […] et au dispositif […] a pour conséquence de conférer une valeur quasi-constitutionnelle à l’interprétation du texte constitutionnel que l’on trouve inévitablement dans les motifs de ces décisions », P. Pactet, F. Mélin-Soucramanien, Droit constitutionnel, Paris : Sirey-Dalloz, coll. Sirey université. Série Droit public, 37e éd., 2019, p. 570.

455

Alexandre Viala écrit à cet égard que « le statut de cette réponse [du Conseil constitutionnel] est lui-même identique à celui d’une chose interprétée : elle est une interprétation de l’article 62 de la Constitution », A. Viala, « De la dualité du sein et du sollen pour mieux comprendre l’autorité de la chose interprétée », RDP n° 3, 2001, p. 779.

456

R. Capitant, « La coutume constitutionnelle », Gazette du Palais, 20 décembre 1929,reproduit à la

RDP n° 4, 1979, p. 967. Ce propos de René Capitant ne concerne évidemment pas la jurisprudence du

Conseil constitutionnel, mais vise plus généralement la conviction selon laquelle le droit n’est qu’écrit et la coutume constitutionnelle doit, ce faisant, être disqualifiée. On est frappé, à cet égard, de la symétrie que présentent des raisonnements qui valorisent l’écrit sous la IIIe

République et privilégient la jurisprudence sous la Ve.

457

Régis Ponsard distingue deux manières d’envisager l’autorité de la chose interprétée des décisions du Conseil constitutionnel : la « conception minimale » implique de considérer que les motifs de la décision « […] s’imposeraient à leurs destinataires uniquement dans le cadre de « l’interprétation et de l’application » des normes à l’occasion desquelles le Conseil constitutionnel a produit ces énoncés […] ».

122

plus attachée à la lecture restrictive de l’article 62458

. Le droit politique semble pour sa part adhérer à la seconde de ces postures ; Pierre Avril affirme que « le dispositif d’une décision juridictionnelle est seul doté de force juridique, celle de l’autorité de chose jugée, tandis que la motivation sur laquelle elle se fonde n’a, en elle-même, qu’une valeur argumentative et ne s’impose pas au-delà de l’espèce tranchée »459

. Cette idée bénéficie d’un argument de poids dans l’ineffectivité qui caractérise l’autorité de la chose interprétée, dès lors que celle-ci n’est pas de fait reconnue par les autorités juridictionnelles auxquelles elle devrait pourtant s’imposer460

. Le droit politique semble donc faire sienne une formule de Georges Vedel selon laquelle le Conseil constitutionnel ne peut se targuer que d’une autorité « relative » de chose interprétée461

, du fait

notamment de l’inconsistance logique de la thèse inverse462

.

La « [conception maximale] tend quant à elle à étendre la force reconnue par l’article 62 de la Constitution au dispositif et aux motifs qui en sont le soutien nécessaire, mais cela indépendamment des dispositions qui ont donné lieu à la production de la décision en cause […] », R. Ponsard, « Questions de principe sur l’autorité de la chose interprétée par le Conseil constitutionnel : normativité et pragmatisme », in B. Mathieu, M. Verpeaux (dir.), L’autorité des décisions du Conseil constitutionnel, Paris : Dalloz, coll. Les cahiers constitutionnels de Paris I, 2010, p. 34-35.

458

Charlotte Arnaud affirme à ce titre qu’« […] en l’absence d’habilitation expresse à statuer par voie de dispositions générales et abstraites clairement inscrite dans la Constitution (et non pas déductible d’une disposition constitutionnelle au prix d’une lecture analogique du texte), les motifs employés par le Conseil constitutionnel au soutien de ses décisions ne sont pas dotés d’une autorité juridiquement contraignante », C. Arnaud, L’effet corroboratif de la jurisprudence, Toulouse : Presses de l’Université Toulouse 1 Capitole, Issy-les-Moulineaux : LGDJ-Lextenso, coll. des thèses de l’institut fédératif de recherche « Mutation des normes juridiques », 2016, p. 82. De même peut-on lire que « […] si les décisions du Conseil ont autorité de chose jugée, cela ne signifie pas qu’elles aient valeur d’arrêts de règlement », L. Favoreu et alii, « Observations sous la décision n° 62-18 L du 16 janvier 1962, Loi d’orientation agricole », in Les grandes

décisions du Conseil constitutionnel, Paris : Dalloz, coll. Grands arrêts, 18e éd., 2016, p. 179.

459

P. Avril, « Une « survivance » : le droit constitutionnel non écrit ? », in Droit et politique à la croisée

des cultures : Mélanges Philippe Ardant, Paris : LGDJ, 1999, p. 9. On trouve ici l’expression d’une autorité relative de chose interprétée, telle qu’elle est définie par Guillaume Drago : « l’autorité des décisions n’est

donc pas seulement une autorité de la chose jugée par le Conseil, elle peut aussi être qualifiée – en ce qui concerne les interprétations dégagées par le Conseil, tant de la Constitution que de la loi contrôlée – d’autorité de « chose interprétée », mais dont la force obligatoire se limite à la loi qui a donné lieu à cette interprétation […] », G. Drago, Contentieux constitutionnel français, Paris : PUF, coll. Thémis. Droit, 4e

éd., 2016, p. 552.

460

Jacques Meunier démontre à ce titre qu’« elles ont admis la signification normative de l’article 62 et l’autorité qu’il confère aux décisions du Conseil constitutionnel. Mais invitées à en faire application, elles l’ont interprété d’une manière qui en restreignait la portée. Elles ont choisi d’y voir l’énonciation d’une simple autorité de la chose jugée et ainsi limité considérablement l’impact de ses décisions dans leur propre activité », J. Meunier, « Le Conseil constitutionnel et l’autorité de ses décisions », in D. de Béchillon, P. Brunet, V. Champeil-Desplats, E. Millard (dir.), L’architecture du droit : mélanges en l’honneur de Michel

Troper, Paris : Economica, 2006, p. 703.

461

G. Vedel, « La responsabilité pénale du Président. Réponse à deux questions », Pouvoirs n° 92, 2000, p. 75.

462

Carlos-Miguel Pimentel en appelle à la logique pour démontrer l’inanité de l’autorité absolue de la chose interprétée : la reconnaître supposerait que le juge soit lui-même lié par la règle de droit que constitue sa propre jurisprudence, ce qui rendrait tout revirement impossible ; C.-M. Pimentel, « De l’État de droit à l’État de jurisprudence ? Le juge de l’habilitation et la séparation des pouvoirs », in A. Pariente (dir.), La

séparation des pouvoirs : théorie contestée et pratique renouvelée, Paris : Dalloz, coll. Thèmes et